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faire céder, dans toutes les occasions de quelque importance, les intérêts agricoles devant les préoccupations de divers genres. Ceci n'est la faute de personne; c'est le résultat de notre situation sociale actuelle, et chaque fois que l'administration, ou la législature, sacrifient les intérêts agricoles, tantôt à des intérêts de négoce ou à des intérêts fiscaux mal compris, tantôt à des exigences tout aussi mal calculées de quelques industries particulières, quelquefois aussi aux conséquences détruites de certains principes abstraits, on ne fait véritablement qu'obéir aux entraînemens de ce qu'on peut bien regarder comme l'opinion publique, puisque c'est la seule qui manifeste dans les grands centres de population, où les intérêts agricoles ne comptent que bien peu d'organes éclairés. Mais cet état de choses tend évidemment à se modifier par les progrès mêmes de l'art agricole qui associe chaque jour à ses intérêts un plus grand nombre d'hommes placés dans l'ordre social de manière à donner à leur voix un certain retentissement.

On a raison, sans doute, de favoriser la multiplication des fermes-modèles et des comices agricoles; mais il est d'autres mesures législatives qui favoriseraient bien plus efficacement les progrès de l'agriculture qu'on ne peut le faire par l'emploi des fonds d'encouragement votés par les chambres (1). La loi qui a donné une si grande impulsion à la réparation des chemins vicinaux, exercera plus d'influence sur l'avenir de notre agriculture que ne pourront

(1) Nous ne nions pas l'heureuse influence que pourraient exercer certaines mesures législatives; mais d'après les termes dans lesquels M. de Dombasle formule ici son opinion, nous croyons qu'il ne s'est pas parfaitement rendu compte de l'action puissante que peuvent exercer sur le progrès agricole, à l'aide de la centralisation, et d'une bonne répartition, les fonds accordés chaque année par le gouvernement, pour encouragement à l'agriculture.

jamais le faire les comices et les institutions agricoles. Mais il est bien d'autres points sur lesquels la législation pourrait venir en aide tout aussi efficacement aux progrès de l'agriculture. Les tarifs de douane dans lesquels l'industrie agricole a toujours été sacrifiée, la révision des lois incohérentes et surannées qui régissent les matières rurales, la réforme du système fiscal par lequel on a détourné de son cours naturel une des sources les plus fécondes que le génie des inventions modernes ait créées au profit de l'industrie agricole.... tout cela offre à l'administration du pays un champ vaste, et des moyens d'assurer un rapide développement à notre prospérité agricole. Mais sur tous ces points les efforts de l'homme isolé viennent se briser contre des obstacles que le temps seul peut vaincre, en répandant parmi les classes éclairées de la société une plus juste appréciation de la part que prend l'industrie agricole dans la production générale des richesses du pays, ainsi que des moyens par lesquels le gouvernement peut favoriser cette industrie.

Au reste l'agriculture s'est améliorée en France, et fait chaque jour des progrès remarquables, malgré les entraves et les obstacles qui sont semés sous ses pas; et elle continuera certainement à suivre la même voie. En effet, à côté du public des grandes cités, il est un autre public qui couvre la surface entière du pays, et qui forme presque les quatre cinquièmes de sa population; c'est le public agricole, qui parle peu, qui écrit encore moins, qui défend mal ses intérêts près des grands pouvoirs de l'état, mais qui agit, qui travaille, et qui comprend bien, lui, toute l'importance des améliorations de l'agriculture, car c'est en servant ses propres intérêts qu'il travaille si efficacement à accroître la richesse du pays. Qu'on ne croie pas que cette

population est aussi aveugle et aussi routinière qu'on le dit souvent; mais des impossibilités que l'on ne sait guère apprécier hors de son sein, se rencontrent sans cesse sur sa route. Lorsque le public éclairé comprendra mieux les moyens de rendre la tâche des cultivateurs plus facile, lorsqu'il sera plus pénétré aussi de l'importance de la production agricole parmi les diverses sources de la richesse du pays, on ne se contentera plus de donner à l'agriculture d'insuffisans témoignages d'intérêt; et l'on verra bientôt la législation favoriser l'impulsion qui porte manifestement l'industrie rurale vers les améliorations. On ne peut calculer à quel degré de prospérité est appelée l'agriculture française lorsqu'elle sera placée sous ce régime de protection éclairée.

MATHIEU DE DOMBASLE.

(REVUE AGRICOLE, 27e. et 280. Livraisons, novembre et décembre 1840).

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BAUCHART, avocat, membre du conseil général de l'Aisne.

BOURBIER, docteur en médecine.

BUCELLY D'ESTRÉES (le chevalier DE), secrétaire de l'Administra

tion des Hospices.

CARPENTIER (Emile), négociant.

DAUDVILLE (Charles), négociant.

GOMART-LECAISNE (Charles), propriétaire.

GRAND-MOULIN, curé-archidiacre de Saint-Quentin.

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