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gations d'un emprunteur ordinaire, puisqu'il serait, comme lui, devenu propriétaire. Quant à l'action, elle appartiendra au prêteur, quoiqu'il ne fût pas propriétaire, car il a fourni à l'emprunteur l'occasion de le devenir; d'ailleurs il doit compte au véritable propriétaire des choses qu'il a prêtées, et dès lors il est juste qu'il puisse en obtenir la restitution de l'emprunteur.

Le prêt de consommation peut, à la différence du commodat, être fait à titre onéreux ; et il ne se confondra pas avec le louage, car le preneur devra non la même chose, mais des choses semblables en mêmes nombre, poids ou mesure.

ANALOGIES et DIFFÉRENCES entre le prêt de CONSOMMATION et le QUASI-USUFRUIT. - Il y a une grande analogie entre le prêt de consommation et le quasi-usufruit; car, dans l'un et l'autre cas, il y a translation de propriété avec obligation de restituer des choses de même nature en pareilles quantité et qualité; mais plusieurs différences les séparent.

Ainsi le quasi-usufruitier est tenu de donner caution; Son droit peut résulter d'un legs, et il ne passe point à ses héritiers;

L'emprunteur, au contraire, ne donne pas caution; Son droit résulte toujours d'un contrat et passe à ses hétiers.

Ce que L'EMPRUNteur doit restituer. Lorsque le prêt consiste en une somme d'argent, l'emprunteur doit restituer une somme égale à celle qu'il a reçue, et non des espèces monnayées du même poids et en même nombre. - Si, par exemple, l'argent augmente de valeur intrinsèque, et que le franc, qui pèse aujourd'hui 5 grammes, soit converti en une pièce de même valeur pesant 4 grammes, l'emprunteur qui a reçu 100 francs devra restituer, non 100 pièces anciennes, mais 100 pièces nouvelles, par la raison que les parties ont eu en vue la somme, et non le poids et le nombre des pièces.

Lorsque la chose prêtée consiste en un lingot, elles l'ont

nécessairement évalué au poids, et l'emprunteur ne doit qu'un poids égal, lors même que le métal aurait subi une hausse ou une baisse très-sensibles.

Pareillement, quand la chose prêtée consiste en denrées, l'emprunteur doit toujours les rendre en pareilles quantité et qualité, qu'elles aient augmenté ou diminué de valeur.

En résumé, voici la règle : On examine si les choses prêtées ont été appréciées d'après leur valeur, leur nombre, leur poids ou leur mesure, et, suivant ces diverses distinctions, l'emprunteur doit restituer des choses de même espèce, appréciées aussi par leur valeur, leur nombre, leur poids ou leur mesure.

DEUXIÈME SECTION

DES OBLIGATIONS DU PRÊTEUR,

ART. 1898. Dans le prêt de consommation, le prêteur est tenu de la responsabilité établie par l'article 1891 pour le prêt à usage. 1899. Le prêteur ne peut pas redemander les choses prêtées, avant le terme convenu.

1900. S'il n'a pas été fixé de terme pour la restitution, le juge peut accorder à l'emprunteur un délai suivant les circonstances.

1901. S'il a été seulement convenu que l'emprunteur payerait quand il le pourrait, ou quand il en aurait les moyens, le juge lui fixera un terme de payement suivant les circonstances.

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Des OBLIGATIONS du PRÊTEUR. Les obligations du prêteur dans le mutuum sont régies par les mêmes règles que celles du prêteur dans le commodat; cependant il y a une différence: ainsi, dans le prêt de consommation, le créancier ne peut pas demander la restitution de la chose, lors même qu'il alléguerait un besoin pressant et imprévu. Cette faculté eût été dangereuse pour l'emprunteur qui, ayant disposé de la chose, n'aurait pas eu le temps encore de se procurer une chose semblable; tandis que, dans le commodat, l'objet est toujours resté entre ses mains, puisqu'il doit être restitué identiquement.

TROISIÈME SECTION

DES ENGAGEMENTS DE L'EMPRUNTEUR.

ART. 1902. L'emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en mêmes quantité et qualité, et au terme convenu.

1903. S'il est dans l'impossibilité d'y satisfaire, il est tenu d'en payer la valeur eu égard au temps et au lieu où la chose devait être rendue d'après la convention. Si ce temps et ce lieu n'ont pas été réglés, le payement se fait au prix du temps et du lieu où l'emprunt a été fait.

1904. Si l'emprunteur ne rend pas les choses prêtées ou leur valeur au terme convenu, il en doit l'intérêt du jour de la demande en justice.

Nous savons ce que

Des OBLIGATIONS de L'EMPRUNTEUR. l'emprunteur doit restituer; si, au terme convenu, il est dans l'impossibilité de faire cette restitution, il devra, suivant la distinction établie par l'art. 1903, rendre, ou une somme égale à la valeur des choses prêtées, eu égard au temps et au lieu où la restitution devait être faite; ou une somme égale à la valeur des choses au moment du prêt. Ainsi, un hectolitre de blé valant 20 francs a été prêté, avec obligation de le restituer au lieu du prêt, dans le délai d'un an. Si, dans ce lieu et à ce moment, l'hectolitre vaut 30 francs, le prêteur pourra exiger cette somme; et rien n'est plus juste, car c'est là ce qu'il aurait reçu, si le blé lui avait été restitué en nature. Mais si le lieu et l'époque de la restitution n'ont pas été indiqués, le prêteur ne pourra réclamer que 20 francs; car il n'y a pas de raison de supposer que la restitution dût se faire à un moment et dans un lieu où l'objet aurait une valeur soit supérieure, soit inférieure à celle qui existait lors du contrat.

CHAPITRE III

DU PRÊT A INTÉRÊT.

ART. 1905. Il est permis de stipuler des intérêts pour simple prêt soit d'argent, soit de denrées, ou autres choses mobilières.

- L'intérêt légal est

1906. L'emprunteur qui a payé des intérêts qui n'étaient pas stipulés ne peut ni les répéter ni les imputer sur le capital. 1907. L'intérêt est légal ou conventionnel. fixé par la loi. —L'intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi, toutes les fois que la loi ne le prohibe pas. térêt conventionnel doit être fixé par écrit.

Le taux de l'in

1908. La quittance du capital donnée sans réserve des intérêts en fait présumer le payement et en opère la libération.

1909. On peut stipuler un

prêteur s'interdit d'exiger. de constitution de rente.

intérêt moyennant un capital que le

Dans ce cas, le prêt prend le nom

1910. Cette rente peut être constituée de deux manières, en perpétuel ou en viager.

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1911. La rente constituée en perpétuel est essentiellement rachetable. Les parties peuvent seulement convenir que le rachat ne sera pas fait avant un délai qui ne pourra excéder dix ans, ou sans avoir averti le créancier au terme d'avance qu'elles auront déterminé.

1912. Le débiteur d'une rente constituée en perpétuel peut être contraint au rachat : 1° s'il cesse de remplir ses obligations pendant deux années; 2o s'il manque à fournir au prêteur les sûretés promises par le contrat.

1913. Le capital de la rente constituée en perpétuel devient aussi exigible en cas de faillite ou de déconfiture du débiteur.

1914. Les règles concernant les rentes viagères sont établies au titre des Contrats aléatoires.

Notions PRÉLIMINAIRES.-Le prêt de consommation le plus usuel et le plus important est, sans contredit, celui qui a pour objet des sommes d'argent. Quand ce prêt est fait gratuitement, il est régi par les règles générales du prêt de consommation. Mais quand il est fait à titre onéreux, il se trouve sou

TOME III.

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mis à des règles tout à fait particulières que nous allons étudier. On appelle intérêt la somme additionnelle que le débiteur doit au créancier, comme loyer du capital prêté.

On appelle usure l'intérêt qui excède le taux légal. Le loyer des capitaux, comme celui de tous les objets qui sont dans le commerce, est sujet à une foule de variations.

La première et principale cause qui influe sur le taux de l'intérêt, est dans le mouvement même des transactions commerciales. L'offre est-elle abondante, et la demande rare? le taux de l'intérêt faiblit. Le contraire arrive-t-il? le taux de l'intérêt s'élève.

A cette cause générale vient s'en joindre une autre. En effet, l'intérêt de l'argent ne représente pas seulement le loyer normal d'une marchandise spéciale; il représente encore les risques auxquels s'expose le capitaliste en prêtant, de telle sorte que, plus les garanties offertes par le débiteur sont faibles, plus le taux de l'intérêt doit être élevé.

La plupart des économistes professent la théorie de la liberté absolue du taux de l'intérêt. Il est incontestable que, si cette fixation résultait toujours et uniquement du rapport existant entre l'offre et la demande, rien ne serait plus légitime. On peut même dire, qu'en fait, la plupart des grands établissements financiers ne connaissent pas d'autre loi que celle-là. Mais souvent il arrive que le prêt est fait par un capitaliste exigeant à un emprunteur obéré, et que, prétextant une insuffisance de garanties, il stipule un intérêt excessif que le débiteur subit plutôt qu'il ne l'accepte, faute de crédit pour emprunter ailleurs. Dans ce cas on ne peut pas dire que le taux stipulé soit l'expression du loyer normal du capital prêté, et la loi tend à protéger l'emprunteur contre la pression de ses propres besoins, en limitant l'intérêt qu'il peut valablement promettre à son créancier. S'il promet au delà du taux légal, l'intérêt est réductible; et s'il a payé au delà du taux légal, il a droit à la restitution de tout l'excédant.

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