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596. Le droit commercial maritime peut être

considéré sous trois points de vue différens.

Le premier est celui de l'intérêt politique des nations. Il offre à l'examen du publiciste les grandes questions de la liberté des mers et des limites que le droit de la guerre peut permettre à une puissance d'y apporter, non-seulement à l'égard de ses ennemis, mais encore quelquefois à l'égard des neutres.

Ces questions ne sont que de pure spéculation, si on les envisage sous les seuls rapports du droit primitif. S'il faut les examiner dans l'état actuel des sociétés humaines, il n'existe point de tribunal dont le jugement puisse les résoudre. Les querelles qui s'élèvent entre des Etats indépendans, sont presque toujours Tome II.

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décidées par la force des armes. Avec un tel mode de jugement, les succès du vainqueur n'établissent pas mieux la justice de sa cause, que les traités consentis par le vaincu ne sont la preuve qu'il avait tort.

Le second point de vue sous lequel le droit maritime peut être considéré, est l'action du Gouvernement pour protéger et entretenir la sûreté et la police, du rivage et des ports, pour diriger vers

grand but de l'intérêt public et

de la défense de l'Etat de l'Etat, non-seulement le commerce en général, mais encore, s'il est nécessaire, les moyens particuliers de chacun de ceux qui s'y livrent.

Tout ce qui appartient à l'administration, la police, à la conservation des ports, est, dans l'état actuel de la législation française, confié à une autorité indépendante des tribunaux. Cette autorité trouve les règles de sa conduite dans des lois et des instructions spéciales. Il est vrai que la connoissance de plusieurs de ces règles peut servir à décider certaines difficultés que font naître les transactions privées ; mais elles n'ont, par leur objet, ni la rigoureuse exactitude, ni la fixité des lois qui statuent sur les engagemens ou les rapports individuels, elles tiennent à des causes, à des intérêts qu'il n'appartient point au simple citoyen de discuter. Il suffira donc de les indiquer à l'occasion.

Les mesures que prend l'administration dans

les bris et naufrages, pour sauver les personnes et les propriétés, quoiqu'en apparence plus rapprochées par leur objet des lois qui statuent sur les intérêts privés, ne devant point donner lieu à des contestations sur lesquelles les tribunaux aient à prononcer, sont, par cela même, hors du domaine de la jurisprudence commerciale telle que nous l'envisageons dans cet ouvrage. Quoique fondées sur l'intérêt sacré du malheur, elles ont besoin d'ètre modifiées selon les circonstances, surtout lorsque le Gouvernement peut avoir de justes sujets de craindre qu'un ennemi n'abuse des droits de l'humanité et de l'hospitalité pour attenter à la sûreté et au commerce de l'Etat.

D'ailleurs, ce que le malheur réclame, ce que la justice commande, c'est de préserver les effets naufragés du vol et du pillage des habitans des côtes; et l'activité des autorités locales, la promptitude des secours, une grande vigilance pour empêcher que des voleurs ne prennent le masque de l'humanité, la sévère punition de ceux qui commettroient ce crime, sont la plus sûre garantie.

Il en est de même de ce qui concerne les prises. Leur nature, leurs résultats, les questions qu'elles font naître, intéressent autant les droits politiques des peuples en général, que ceux du commerce de chaque nation en particulier. La course est une sorte de guerre maritime

dont les règles ne sont que les lois même de la guerre plus ou moins modifiées. Les armateurs, que fait agir l'espoir du gain, deviennent les auxiliaires de leur patrie; ils ne sont pas plus que celle-ci, au-dessus des principes du droit des gens, qui déterminent dans quels cas, de quelle manière et jusqu'à quel point il est permis de nuire à son ennemi. Ce n'est qu'à ces conditions qu'un Etat permet la course, qui, sans cela, seroit une véritable piraterie.

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Le Gouvernement, à qui appartient la direction de toutes les forces vers le but de la défense commune, doit prévenir et réprimer les contraventions que l'ardeur immodérée du butin pourroit faire commettre au préjudice des lois de la guerre, des rapports soit d'amitié, soit de neutralité, qu'il peut seul apprécier. Quand les sujets d'une puissance ont à se plaindre d'avoir été injustement traités par les corsaires d'une autre, ce n'est ni aux particuliers auteurs des désordres, ni aux tribunaux, juges ordinaires de ces particuliers, qu'ils peuvent demander justice. Le Gouvernement dont les sujets ont été lésés n'a, comme nous l'avons déjà observé, n. 207, d'autre moyens à employer que les négociations; lorsqu'elles sont infructueuses, la force des armes devient sa dernière et sa terrible res

source.

Enfin la rigueur du droit, même appliquée

aux ennemis, pourroit quelquefois contrarier des mesures politiques dont le secret fait, presque toujours, tout le succès, arrêter une négociation importante, ou éloigner la paix la plus désirable. De telles considérations ne pouvant être soumises à des principes invariables, et d'ailleurs ces matières sortant du cercle de la jurisprudence, il étoit convenable d'en interdire la connoissance aux tribunaux ordinaires.

597. Nous ne parlerons donc ici que des engagemens auxquels le commerce maritime peut donner lieu entre les particuliers, et voici l'ordre que nous allons suivre.

Les navires, seuls moyens à l'aide desquels se fait le commerce maritime, ne pouvant exister sans appartenir à quelqu'un, nous nous occuperons d'abord de ce qui établit, en général, la propriété d'un navire. Ce sera l'objet du titre premier.

Ce n'est qu'en voyageant que les navires peuvent remplir leur destination. La conduite en est confiée à un chef assez généralement connu sous le nom de capitaine. L'importance de ses fonctions, l'étendue et la nature des droits et obligations qui naissent de sa qualité, nous porte à en faire l'objet du titre second.

Les navires sont dirigés tant par le capitaine que par un grand nombre d'employés sous ses ordres. Il loue leurs services, et la nature des

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