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Com. 195. écrit ainsi celui qui, possédant un navire, opposeroit à un revendiquant muni d'actes qui l'en établissent propriétaire, le fait de sa possession comme présomption d'une vente verbale, n'y seroit point admis comme s'il s'agissoit de meubles ordinaires; il faudroit qu'il prouvât sa propriété.

Vainement se serait-il fait enregistrer au bureau des classes comme nouveau propriétaire; puisqu'il n'y auroit pas fait insérer le titre qui le rend propriétaire, cet enregistrement irrégulier déposeroit contre lui. La seule prescription de trente ans éteindroit Civ. 2262. l'action en revendication du propriétaire dépouillé.

618. Mais il pourroit arriver qu'une personne eût acquis un navire de celui à qui il n'appartient pas.

On devroit d'abord distinguer en quelle qualité agissoit celui qui a vendu. S'il ne s'annonçoit que comme capitaine, une telle vente seroit nulle. Le capitaine d'un navire Com. 237. n'a point le droit d'en faire la vente sans un pouvoir spécial, et le tiers qui auroit acheté ne seroit pas admis à exciper de sa bonne foì. Il a dû se faire exhiber les pouvoirs du vendeur, et ne pas croire que par la seule nature de ses fonctions il avoit qualité pour faire cette vente, car précisément ces fonctions ont pour

objet la simple conduite du navire, incompatible avec le droit d'en aliéner la propriété.

la

Cependant, par une modification que justice et l'intérêt même du propriétaire commandent, lorsque le navire est reconnu et jugé innavigable, le capitaine, présumé naturellement pouvoir faire ce que son commettant eût fait, a droit de vendre le navire avec lequel il ne peut plus continuer la route. Rien en cela n'est contraire à la règle que nous venons de donner; car le seul parti qu'on puisse tirer d'un navire dans un tel état, est la vente des matériaux dont il se compose. Mais cette innavigabilité doit être constatée et reconnue par le magistrat des lieux, et son autorisation Com. 390. est requise pour la validité de la vente. C'est à lui à prendre les précautions convenables pour n'être pas trompé. Le capitaine qui le tromperoit seroit sans doute responsable et passible de dommages intérêts, mais l'acheteur serait à l'abri de toutes recherches, parce que tout ce qui se fait par suite de l'autorisation qu'a donnée le magistrat, quoique trompé, est valable dans l'intérêt du tiers de bonne foi.

La vente pourroit avoir été faite par une personne se disant propriétaire du navire, et en faveur de laquelle les apparences seroient assez fortes pour que l'acheteur fût en bonne foi, comme cela a lieu dans les ventes d'immeubles. Il semble naturel de continuer l'ap

plication, par analogie, des principes du droit civil. Dans ce droit, l'acquéreur de bonne foi qui achète un immeuble de celui qui n'en est pas propriétaire, prescrit contre le véritable Civ. 2265. propriétaire par le même laps de temps et les mêmes moyens qui servent à prescrire contre les hypothèques. De même il paroît convenable de décider que l'acheteur de bonne foi d'un navire prescriroit contre le véritable propriétaire, lorsqu'il l'auroit possédé pendant le temps et avec les circonstances qui purgent les droits des créanciers sur les navires.

619. On sent bien, au reste, que les principes généraux du droit civil sur la prescription, seroient appliqués en entier. Ainsi les copropriétaires d'un navire ne pourroient prescrire le droit de l'un d'eux, que par une possession exclusive de la sienne. Ainsi la qualité du Com. 430. capitaine est un obstacle invincible à ce qu'il en acquière la propriété par prescription. Il Civ. 2238. faudroit, dans ces différens cas, qu'il y eût une interversion de titre.

CHAPITRE I I.

De la copropriété des navires.

620. Un navire peut appartenir à plusieurs

co-propriétaires; ce cas est fréquent. La navi- Com. 195. gation et tout ce qui est nécessaire pour l'opérer donnent lieu à des avances considérables que ne pourroit pas toujours atteindre la fortune d'un seul particulier,

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Les effets de cette copropriété peuvent être réglés par les conventions des parties. Elles peuvent stipuler, comme dans toute autre espèce de société, la manière dont la chose commune sera administrée. Ces conditions doivent alors être exécutées, en quelque nombre que soient les refusans. C'est un principe constant qui recevra ses développemens dans la partie suivante, relative aux sociétés, que la majorité elle-même ne peut plus, après coup, changer des conventions sur la foi desquelles les parts ont été acquises, ou, l'intérêt a été conservé par les autres.

Mais le plus souvent les parties ne s'expliquent pas d'avance, ou les questions à décider naissent de circonstances et d'événemens imprévus. Il existe, en ce qui concerne les sociétés de copropriétaires de navires, des règles spéciales différentes de celles du droit commun des sociétés commerciales, qui, du reste, seroit suivi dans tous les autres cas non prévus par la convention des parties.

La majorité est déterminée par l'intérêt dans

le navire, et non par le nombre de voix. Ainsi Com. 220. un seul associé dont la part seroit de plus de

moitié, l'emporteroit sur tous les autres, quel fût leur nombre.

que

621. L'usage et le bon sens font suffisamment connoître ce qu'on doit entendre par l'intérêt commun. En général, on peut dire que le choix du capitaine et des gens de l'équipage, les engagemens envers eux, la rédaction des instructions, la location, le radoub et l'armement du navire, sont des opérations que la majorité peut décider malgré la minorité ; et si cette dernière s'obstine à refuser sa part de fonds nécessaires pour les dépenses délibérées, la majorité peut obtenir contre les refusans des condamnations, et faire ensuite saisir et vendre leurs parts dans le navire, ou se faire autoriser à emprunter à la grosse sur ces parts. Mais il n'en est pas de même du chargement, à moins qu'il n'ait été l'objet principal et direct de l'association.

Dans les autres cas, si la majorité avoit résolu de charger des marchandises sur le navire, et de les expédier pour tel port, cette résolution ne pourroit être obligatoire pour la minorité. La majorité pourroit seulement employer le navire pour exécuter son entreprise, puisqu'elle auroit eu droit de le louer à des étrangers, mais elle devroit tenir compte à la société du prix qui' auroit pu être exigé de ces étrangers.

Il y a pourtant des circonstances dans les

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