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diaires, on est aisément porté à croire qu'il n'y a point eu de fraude. La justification seroit plus difficile, si l'emprunt avoit été fait par l'emprunteur lui-même. Mais il ne seroit pas convenable qu'on s'arrêtât à des différences qui n'auroient rien d'important, ou à de foibles inégalités. Un tel scrupule ne serviroit qu'à occasionner des procès ce point est laissé à la prudence du juge.

Néanmoins la fraude est toujours présumée contre celui qui auroit emprunté à la grosse sur des effets déjà assurés, ou auroit fait assurer des effets affectés à un prêt, ou enfin qui, ayant emprunté et fait faire des assurances sur le même chargement, n'auroit pas, en délaissant aux assureurs, fait les déclarations à l'aide desquelles ceux-ci pussent s'assurer si le prêt et l'assurance réunis égalent ou excèdent la valeur desdits objets.

826. Si le prêteur parvient à établir la fraude de l'emprunteur, le contrat peut être annullé sur sa demande, et l'emprunteur est tenu alors de rembourser la somme totale, sans qu'il puisse Com. 316. prétendre faire valoir la convention en quelque portion que ce puisse être; mais il n'est dû prêteur aucun profit maritime, puisqu'il se trouve n'avoir été exposé à aucun risque. Il est toutefois présumable que les tribunaux n'hésiteroient pas à lui allouer les intérêts suivant le

cours de commerce de terre, par forme dé dommages-intérêts.

827. L'emprunteur ne peut exciper de cette fraude prouvée contre lui, ou dont il viendroit faire l'aveu, pour se dégager, dans le cas où le prêteur n'ayant point demandé le ristourne, exigeroit, après l'heureuse arrivée, le paiement du capital et des profits maritimes. Ce n'est celui qui a commis la fraude qui peut l'alléguer ; l'annullation du prêt étant une faveur accordée au prêteur trompé, il est seul maître de la demander.

pas

Il est bien vrai qu'il aura eu la double chance, dans le cas d'heureuse arrivée, d'exiger la somme prêtée et le profit, et, en cas de sinistre, de s'affranchir des risques; mais c'est une juste peine contre l'emprunteur qui est en fraude.

Ces droits du prêteur appartiennent à celui à qui il transporte sa créance, dans les cas dont nous avons parlé, n. 785.

S. II.

Du Ristourne causé par erreur de l'Emprunteur.

828. Il peut arriver que, sans fraude de l'emprunteur, la totalité des choses affectées n'ait point été chargée, ou que ces choses n'aient pas une valeur égale à la somme prêtée. Le contrat est valable jusqu'à concurrence de

,

la valeur réelle des objets affectés à l'emprunt et chargés dans le navire, et ce qui excède Com. 317. forme une créance ordinaire dont le prêteur a droit d'être remboursé, avec intérêts comme nous l'avons vu, n. 822, soit que le navire vienne à périr, soit qu'il arrive à bon port. La déduction peut alors être demandée par l'emprunteur qui est en bonne foi; le prêteur ne peut lui opposer que le voyage ayant eu lieu et le navire étant arrivé heureuşement, il doit profiter de la chance, parce qu'il étoit possible qu'en cas de perte l'emprunteur n'eût pas excipé du ristourne. Mais c'est à celui-ci de prouver sa bonne foi; et les circonstances dans lesquelles il fera valoir cette exception, le rendront plus ou moins favorable.

829. La réduction se fait alors à la valeur des objets qui ont été effectivement chargés dans les termes de la convention. Par exemple, un chargeur prend à la grosse 6000 fr., moyennant 20 pour 100; il ne charge des effets que pour 3000 francs. Si le navire périt corps et biens, le prêt étant réduit à 3000 francs, le prêteur ne sera en perte que de cette somme, et l'emprunteur ne pourra exciper de l'accident qui a fait périr son chargement entier, pour se dispenser de rembourser, avec l'intérêt légal, 3000 fr. qui n'étoient point garantis par des marchandises chargées. S'il y a heureuse arrivée, le

prêteur ne pourra exiger que 3000 francs avec le profit de 20 pour 100, et les 3000 francs non garantis lui seront payés comme il vient d'être dit. S'il y a perte ou autre accident partiel, on n'en fera l'imputation que sur les 3000 francs réellement garantis.

Toutes ces règles recevront de nouvelles explications dans les chapitres correspondans du titre suivant.

TITRE SIXIÈME.

DU CONTRAT D'ASSURANCE.

830. Le contrat d'assurance est en général celui par lequel une personne, qu'on nomme assureur, s'engage envers une autre, qu'on nomme assuré, moyennant un certain prix appelé prime d'assurance, à réparer les accidens, détériorations ou pertes que des choses peuvent éprouver par cas fortuits. Cette convention s'établit par un écrit, dit police d'assurance.

L'assurance est un des contrats aléatoires dont le droit civil reconnoit la légitimité. Elle se trouve implicitement dans un grand nombre de conventions. Toute stipulation par laquelle une personne prend pour elle des

propres,

événemens fortuits n'est
pas autre chose.
Les cautionnemens, avals, garanties, qu'on
stipule dans un grand nombre de cas, sont
des espèces d'assurances. Mais comme ces con-
ventions reçoivent des noms qui leur sont
celui d'assurance n'appartient qu'à
la convention par laquelle la personne qui
assure reçoit de celle envers qui elle se porte
assureur, un prix des risques dont elle se
charge. Cette nécessité d'un prix ainsi payé ou
promis, par l'assuré, est de l'essence de ce con-
trat et le rend intéressé. Ceux que nous venons
de désigner peuvent être et sont presque tou-
jours des contrats de bienfaisance; il n'est point
de leur essence que celui qui donne sa garantie
reçoive quelque récompense pour cela. Lors
même qu'il en recevroit une, ce ne seroit que
du débiteur dont il cautionne l'obligation, et
jamais du créancier à qui elle est due; car s'il
la recevoit du créancier, il y auroit alors une
véritable assurance.

Le contrat d'assurance considéré dans la définition que nous avons donnée, peut s'appliquer à toutes sortes de choses et de risques: on peut assurer une maison contre les incendies; une vigne, un champ, contre la gelée, la grêle et autres cas fortuits; des marchandises expédiées Com, 337, par terre, ou sur des rivières et canaux, contre les dangers et autres accidens imprévus du transport et de la navigation; un créancier qui

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