DÉDIÉ AU ROI,
PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES}
Le Journal Politique des principaux évènemens de toutes les Cours; les Pièces Fugitives nouvelles en vers & en profe; l'Annonce & l'Analyse des Ouvrages nouveaux; les Inventions & Décon vertes dans les Sciences & les Arts; les Spec- tacles; les Caufes célèbres; les Académies de Paris & des Provinces; la Notice des Édits, Arrêts; les Avis particuliers, &c. &c.
Au Bureau du Mercure, Hôtel de Thou? rue des Poitevins, No. 18.
Avec Approbation, & Privilége du Roi
Charades, Enigmes & Logog. Concert Spirituel.›
Académ. Roy, de Mufiq. 126
19 Comédie Italienne. 86, 184.
A Paris, de l'Imprimerie de Moutard, rue des Mathurins, Hôtel de Cluni
TRADUCTION
D'UN Fragment tiré du Ier. Chant du Poëme fur les Jardins, par le P. RAPIN, où l'Auteur décrit avec feu la métamor phofe fubite & brillante de la Nature, à la renaiffance du mois de MAI.
SI ce beau mois, fertile en prodiges heureux, Eft refpecté d'Atlas & des vents pluvieux, Vois du fein créateur de ton fol qui fermente S'échapper de tes fleurs la moiffon abondante. Ç'eft le moment où Flore étale tous fes dons, Remplit cette corbeille & ces rians feftons
Voyez déjà briller dans la plaine fleurie Le Genêt tranfplanté des champs de l'Ibérie 3 Ces fleurs orner le front de l'humble Romarin; Ces berceaux de Lilas, ces bouquets de Jasmin, La plante qui du Nil embellit le rivage, La Pivoine cherchant la fraîcheur & l'ombrage De fon cafque guerrier, l'Aconit orgueilleux L'Acanthe, hér ffé d'épines & de nœuds; Le Citife paré de fes fleurs jaunissantes ; Le Lifet déployant fes couleurs pâliffantes Lente dans fes travaux, la Nature jadis Fit, dit-on, cette fleur en ébauchant le Lis. Tout fermente, tout naît; déjà s'offre à la vue. La Sauge s'élevant à côté de la Rue,
Et cette fleur qu'Homère a chantée en fes vers ; Mille autres étalant leurs panaches divers. C'eft le moment heureux, le règne des prestiges; La terre avec orgueil montre tous les prodiges : Des nappes de verdure embraffent l'Univers ; Mille parfums exquis s'élèvent dans les airs; Les citoyens ailés, qui peuplent les bocages, Les animent du bruit de leurs tendres ramages. Tels la Fable nous peint dans fes tableaux flattés, D'Armide & de Vénus les jardins enchantés. Voyez-vous ces courfiers bondir dans les campagnes, Les chevreuils fufpendus au fommet des montagnes, Les cieux étincelans d'un feu brillant & pur, Ces ruiffeaux tranfparens roulant des flots d'azur. Dieux! que ne fuis-je affis aux rives de la Seine, Ou du fleuve brillant qui baigne la Touraine !
Salut! ô ma Patrie ! au charme de tes bords, Qui pourroit préférer les antiques trésors, Les fuperbes côteaux dont Naple eft couronnée, Et le Tibre couvert d'une ombre fortunée ? Qu'un magique pinceau raffemble à mes regards Les monumens pompeux du faste des Céfars ; Qu'une Reine, autrefois l'idole de l'Afie, D'un art audacieux employant la magie, Place fur des remparts, aux yeux de l'Univers, Des jardins étonnés de fleurir dans les airs; Qu'un dragon vomiffant de fa bouche enflammée De longs & noirs torrens d'une épaille fumée, Défende des vergers ornés de pommes d'or ; Qu'on nous vante l'Olympe & l'Elysée encor : Paris fait oublier ces prodiges antiques. Contemplez nos palais, nos jardins magnifiques;
Des fleuves inconnus roulant fur les fillons Où Cérès prodiguoit les tréfors des moissons ; L'Art qui change, en créant des merveilles foudaines, Nos vallons en côteaux, & nos côteaux en plaines 5 Ces vergers d'ananas, ces forêts d'orangers, Etonnés d'enrichir des climats étrangers,
Qu'opposer à ces bords que le Printemps couronne, Toujours chargés des dons de Flore & de Pomone? A ce Saint-Cloud magique, à ce fuperbe lieu, Tout fier d'être paré du nom de Richelieu ; A ces murs que la Seine arrofe de fon onde, Renfermant dans leur fein les richeffes du Monde? J'admire, Saint-Germain, tes monts religieux, Où le cœur fent, l'œil voit la préfence des Dieux
« PreviousContinue » |