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voyage

les

transports ont harraflé nos chevaux, au point que l'agriculture en fouffrira prodigieufement. Affez affoibli par une année diferteufe & par impofitions, nous n'avons devant nous d'autre perfpective que celle de remplacer les Soldats, que la guerre, des maladies & d'autres accidens ont enlevés. Le commencement eft déja fait par la fourniture des Matelots qui doivent remplacer ceux qui ont perdu leur vie dans un combat hoLorable, & ceux qui, échappés aux dangers de la guerre & de la mer, font devenus, pendant leur de retour, les victimes infortunées d'un hiver rigoureux auquel ils ne purent réfifter. Cependant on ne ceffe de dire que la continuation de la guerre eft néceffaire, & que, les armes à la main, il faut forcer l'ennemi à confentir à une paix honorable pour nous. Cela eft beau, & fonne merveilleusement bien; mais je crains que par le résultat de ces démêlés, le pays ne foit forcé de fournir des Soldats, & de fupporter des impofitions au-deffus de fes moyens. L'iffue de la guerre eft dans la main de la Providence; fi elle est malheureuse, il ne nous refte plus aucune ressource: à la place de nos parens, amis & Concitoyens, qui feront restés fur le champ de bataille, nous nous verrons environnés de veuves & d'orphelins, dont les lamentations & les imprécations ajouteront un nouveau poids à nos fardeaux. La mefure de notre malheur feroit au comble, fi nos côtes étoient ravagées, fi des poffeffions étoient détachées du royaume, & fi leurs Habitans fe voyoient forcés de fe courber fous un jong étianger. Mais fi l'iffue de la guerre eft heureuse, eft-il probable que notre pofition foit améliorée ? Les Chefs gagnent les victoires; ils en retirent l'avantage, & fe couvrent d'honneur; mais quel dédommagement peut fe promettre le fimple Sujet? Nous ne partageons pas les conquêtes pour

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nous indemnifer de nos dépenses; nos fermes ne feront point agrandies par les pays conquis, & les dommages qu'elles auront elluyés par les fuites deftructives de la guerre, ne feront point réparés. Ces confidérations me portent à défirer fincèrement que l'on cherche à faire la paix, afin de détourner du royaume, s'il eft poffible, les adverfités qui le menacent, & je fuis d'avis de fupplier S. M. très-inftamment d'y avoir égard. Je prie d'inférer au Protocolle mes confidérations. Ma confcience fera tranquille, lorfque mes Concitoyens, qui font reftés chez eux, y liron: un jour que j'ai répondu à leur confiance, & que j'ai propolé ce dont ils m'avoient chargé, fave ir, de chercher la paix qu'ils défirent tous bien ardem

ment. »

Ces morceaux réfutent clairement l'opinion hasardée que l'assentiment de trois Ordres aux mesures du Roi, a été subreptice, et l'on voit que les délibérations se sont faites, dans l'Assemblée des Paysans, avec la plus grande liberté.

On a également publié la relation officielle de l'Audience qu'obtinrent les Députés des quatre Ordres, lorsqu'ils remirent au Roi, le 23 mars, leur Adresse de remerciemens ; en voici la

teneur :

En conféquence de la très-refpectueufe prière des Etats, il plût à Sa Majeft, cejourd hui, (23 mars, 1789) a 4 heures de l'après-midi, de recevoir dans fes appartemens, dans la partie (upérieure du Chateau-Royal, les Dé ut s des Etats du Royaume; Savoir, 50 de l'Ordre équeftre & de la Nobleffe, & 24 de chacun des autres Etats, fous la conduite de M. le Maréchal de la Diète, ainfi que des

Orat urs de chacun des trois autres Ordres. Le Roi, ayant à fa droite le Prince Royal, fon Fils, étoit acco pagné de fon grand Chambellan, le Comte Niels Poffe, de fon premier Gentilhomme de la Chambre, Baron Evert Taube, du Comte Adam-Louis Lowenhaupt, Capitaine-Lieutenant de la Compagnie des Trabans du Corps, & du Comte Jacob de la Gardie, Capitaine dans le Corps des Dragons-ligers de la Maifon du Roi. Le Prince-Royal avoit avec lui deux de fes Gentilshommes, les Barons de Morner & Boye. Le Secrétaire d'Etat Schroderh im, qui remplit les fonctions de la charge vacante de Chancelier de Cour, tenoit le Protocolle. Les Députés ayant été introduits par le Colonel Baron de Stranfelt, Maréchal de la Cour, le Comte de Lewenhaupt, Maréchal de la Diète, fit lecture d'une Adreffe des Etats au Roi, dont il remit enfuite entre les mains de Sa ajefté une copie conçue en ces

termes :

TRES-PUISSANT, TRÈS GRACIEUX Roi.

C'eft avec la joie & la fatisfaction la plus in-time, que les Etats faififfent toutes les occafions de renouveler à leur gracieux Roi les affurarces de leur fidélité inviolable & de leur plus refpectueux attachement ils reconnoiffent qu'il eft de leur devoir de rendre à la Providence divine` leurs actions de graces les plus fincères, de ce qu'il lui a plu de garantir fon Oint au milieu des dangers les plus preffans de la guerre, & de ce qu'Elle a détourné la perfonne facrée de Votre Majefté, des malheurs qui l'accompagnent ordinairement; ils fentent qu'ils font également dars l'obligation de témoigner leur plus vive gratitude à Votre Majefté, qui n'a épargné aucun foin, qui ne s'eft fouftraite à aucun danger pour fauver le Royaume, pour en maintenir l'indépendance, pour en défendre les frontières & les Provinces, & pour en repouffer des armées étrangères.

Mais, TRÈS-GRACIEUX ROI, plus les cœurs de vos Sujets font remplis de fenfibilité pour tout ce qui regarde votre augufte Perfonne, plus leur follicitude eft grande à la vue des dangers où les événemens de la guerre peuvent la plorger, & plus leur vœu eft ardent de voir bientôt fe diffiper, par une paix prompte & heureuse, les' nuages qui ont couvert le ciel de la Suède. Ainfi ils font prêts à facrifier, chacun dans fa fphère, tout ce qui dépend d'eux pour s'oppofer à l'ennemi à forces réunies, pour défendre, en marchant fur les traces de leurs braves ancêtres, leur Roi & leur Patrie, avec un courage mâle, jusqu'à la dernière goutte de leur fang; pour maintenir l'indépendance du Royaume, & l'antique honneur du Peuple Suédois; & pour mettre, par ces moyens, Votre Majefté en état de procurer au Royaume une paix honorable, sûre & permanente, qu'il plaira à Votre Majefté, par amour pour fes Sujets, de préparer gracienfement, d'accepter & de confirmer, auffi-tôt qu'elle pourra être acceptée & confirmée. C'eft ce dont les Etats du Royaume la prient avec inftance, afin que les plaies & les dommages que les flammes de la guerre ne manquent jamais de caufer, foient guéries & réparés, & que l'activité de nos Concitoyens puiffe recueillir de nouveau en tranquillité les fruits fi défirables de la paix, qui ont rendu jufqu'à préfent le règne de Votre Majefté fi heureux, & par lefquels fon augufte nom doit toujours être en bénéd aion parmi les Habitans de la Suède. Nous fommes toujours avec le plus profond refpect, TRÈS-PUISSANT, TRÈS-GRACIEUX Roi, de Votre Majefté, les très-obéiflans & très-fidèles Serviteurs & Sujets, LES ETATS du Royaume.

Signés, pour l'Ordre Equeftre & la Noblesse, C. E. LEWENHAUPT, Maréchal de la Diète; pour

le Clergé, U. V. TROIL; Four la Bourgeoifie, AND. LUDBERG; pour l'Ordre des Pay fans, ANDERS ANDERSSON,

A cette Adresse, le Roi fit la Réponse qui suit

J'ai reçu avec la plus grande fatisfaction les témoignages de la reconnoiffance des Etats du Royaume, pour la follicitude conftante avec laquelle j'ai maintenu l'honneur déf ndu les frontières du Royaume. Je Jens avec une vive joie, combien il eft honorable d'être à la tête d'ure Nation brave & fidelle, dont l'amour & la confiance relèvent mon courage dans toutes les circonftances les plus inquietantes. Un de mes premiers vœux eft certainement celui d'effectuer une paix honorable, & qui foi d'une durée permanente. J'ai donné aux Etats laffurance que je ne négligerois aucune occafion favorable pour y parvenir; & c'est avec fatisfaction que je réitère ici ce vau, fondé d'ailleurs fur ma propre inclination & fur mes defirs. En attendant, je n'épargnerai point ma Perfonne, ma vie, ni mon fang pour le fervice de ma Patrie; & puifque les Etats fecontent mes efforts, ils peuvent être affurés des difpofitions gracieuses avec lefquelles je ferai toujours leur Roi bien affectionné.

Après la préfentation de cette Adreffe, M. le Maréchal, les Ora eurs & les Députés eurent l'honneur de baiser la main de Sa Majesté, qui, au momen qu'ils fortoient de l'audience, fit rappe'er M. le Maréchal & les Députés de la Nobleffe par fon Grand Chambellan le Comte de Poffe, & leur tint le difcours fuivant:

« Comme, après avoir reçu l'Adresse de remerciemens, je puis renouveler les aff rances de la fatisfaction avec laquelle j'ai toujours reçu l'Ordre

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