Page images
PDF
EPUB

du climat, un fol fécond & varié dans les bienfaits, des rivières navigables qui facilitent toutes les communications, des ports qui dominent les deux mers, des colonies plus riches & plus fertiles que celles de toutes les autres Nations, des manufactures particulières, des établiffemens de diverfes natures dans l'intérieur du royaume, des François enfin, c'eft-à-dire, des hommes exercés à tous les genres de travaux & propres à toutes les tâches que le génie & la gloire peuvent impofer, aux arts polis de la paix & aux fatigues de la guerre, au commerce & à la navigation, aux pénibles labeurs de l'agriculture & aux ftudieufes recherches des fciences. Que de matériaux, que d'inftrumens réunis pour élever un royaume au plus haut degré de profpérité! & quel moment encore eft choifi dans la route des fiècles pour appeler la Nation entière à conftruire, à affermir le majestueux édi fice du bonheur public! C'eft à une époque où les lumières générales paroiffent s'être approchée du dernier terme de leur perfection; c'est à une époque où les préjugés, où les restes d'une ancience barbarie ne tiennent plus que par des liens ufés, affoiblis & tout prêts à fe rompre; c'est à une époque où l'univers entier femble de mander à la France, pour l'honneur & la gloire de l'humanité, un noble & graad emploi des rares & finguliers avantages dont elle est l'unique dépofitaire; c'eft à une époque enfin, où, par un bonheur inappréciable, l'on voit affis fur le trône antique & révéré des Monarques François, un Prince que le Ciel paroit avoir défigné pour favori fer les efforts du génie national & de l'efprit de patrie. Il peut appeler les Repréfentans de fes Sujets à venir le feconder dans fes auguftes deffeins, parce qu'il a une idée jufte de la véritable grandeur, parce qu'il fait, parce qu'il fent que la gloire du Monarque & le bonheur de fes Peuples font infé.

parables, & que l'éclat d'un règne s'accroît par la fplendeur du fiècle où il fe trouve placé.

Enfin, les Miniftres du Souverain fe trouvent en ce moment d'un caractère fage & tempéré; ils ne font égarés par aucun fyftême, ils ne font emportés par aucune idée prédominante, & ils s'eftiment heureux de fervir fous un Roi qui ne fépare pas fes intérêts de ceux de la Nation.

Que leur falloit-il donc de plus, diroient un jour les races futures, fi nous perdions de fi favorables circonstances? que leur falloit-il donc de plus pour fonder les bafes du bonheur public & d'une inébranlable profpérité? Ah! penfez y bien, Meffieurs, il eft un concours d'événemens qui ne fe retrouve jamais; mais pour en profiter, adoptez un efprit de mesure & de fageffe, voyez un grand but & n'en détourne jamais vos regards; réunisfez-vous autour de l'autel du bien public, afin de vous écarter de ce dangereux foyer de prétentions ivales qui vous détourneroient d'un culte plus digne de vous. Echangez les petits intérêts particuliers contre cette grande & majestueufe part à l'intérêt univerfel; faites que le titre de François vous vaille plus de gloire & plus de profit que celui d'habitant d'une telle province, d'un tel Bailliage, ou d'un tel reffort, Enfin, Meffieurs, j'oferai vous le dire; car des hauteurs de la raifon l'on n'eft étonné par aucun fpectacle, on n'est affoibli par aucun afcendant, on n'est subjugué par aucun empire: j'oferai donc vous le dire, vous ferez refponfables envers le Roi, vous le ferez envers la Nation, vous le ferez envers la postérité, vous le ferez peut-être envers le monde entier, fi vous ne vous livrez pas fans réserve à la recherche impartiale du bonheur public, fi vous ne dépofez pas pour quelque temps les particularités qui vous feparent, pour vous livrer fans partag à ces grands intérêts qui vous appellent. Vous les

retrouverez de refte quand vous le voudrez, ces diftinctions cu fes féparations qui mettent les citoyens. en oppofition les uns des autres en raifon de leur état & de leur naiflance: on n'a garde de vous inviter à les qublier entièrement; elles entrent même dans la compofition de l'ordre civil,elles forment cette chaîne fi néceffaire pour la règle & la fubordination de tous les mouvemens de la fociété; ma's on doit fufpendre pour un temps ces confidérations rivales ; & fi quelque chofe peut en adoucir l'afpérité, c'eft de n'y revenir qu'après s'être occupé longtems en commun de la chofe publique.

Mais, Meilleurs, quelle diverfité d'objets s'of-; friront de toutes parts à votre confidération! l'efprit en eft effrayé, même en se bornant aux branches. d'adminiftration qui ont une connexion avec les finances. Peut-être à cette tenue ne voudrez-vous. en prendre qu'une idée générale en vous réfer-, vant d'y revenir, lorfque d'une ou d'autre manière vous aurez réuni tous les renfeign mens qui vous font néceffaires, & que du fein même de, votre affemblée vous aurez préparé les voies aux. inftructions & aux examens les plus propres à captiver votre confiance.

Le Roi vous confidérant, Meffieurs, comme affeciés dès ce moment à fes confeils, écoutera non-feulement avec attention & avec intérêt toutes les ouvertures & les propofitions qui lui viendront de votre part, mais Sa Majesté vous fera communiquer encore toutes les idées qui lui paroîtront mériter votre examen : c'et par un concert abfolu entre le gouvernement & cette augufte affemblée, que les affaires du Roi & de la Nation feront mieux traitées & mieux entendues, & que l'on approchera plus firement de l'heureux termes auquel il faut tendre. A ez de difficultés prifes dans les chofes mê des viend on éprouver votre› courage & le rendre néceffaire; il faut au moins

que vous receviez des miniftres du Roi toute l'aide que vous pourrez défirer, & que vous trouviez en eux le concours dont vous croirez avoir befoin.

Et puifque dans un grand enfemble & dans une complication d'affaires infiniment variées, c'est par la méthode que l'on fait route plus promptement il ne fera pas inutile de vous rendre compte de l'idée que Sa Majefté a conçue de vos examens & de vos recherches. Le gouvernement est bien loin de vouloir vous tracer aucune marche, mais il a eu befoin lui-même de s'en former une idé afin de faire recueillir les divers renfeignemens que vous pourriez demander.

Il femble, Meffieurs, qu'en allant en avant dans la recherche du bien de l'Etat, vous devez, pour hâter vos travaux & perdre le moins de temps poffible en vaines tentatives, divifer les objets de vos réflexions en deux claffes, L'une raffembleroit les améliorations qui dépendent néceffairement des délibérations de la Nation enrière repréfentée par fes Députés aux EtatsGénéraux; l'autre comprendroit les bonifications qui doivent être exécutées par l'administration particulière de chaque province.

Le Roi, dans le feul deffein de rendre votre travail plus facile, m'a commandé de vous donner un premier indice de ces deux divifions.

Jere CLASSE. Ameliorations qui appartiennent aux délibérations des ÉtatsGénéraux

1. On eût indiqué d'abord les difpofitions relatives à l'ordre des finances, fi cette matière ne venoit pas d'être traitée avec étendue, Quel objet` peut en effet intéreffer davantage la Nation entière que cet ordre & ce jufte rapport entre les befoins & les refources de l'Etat? Ceft d'un pareil accord que naiffent la tranquillité générale, & la certi

tude de n'être pas appelé fans néceffité à faire le facrifice d'une portion de fa fortune; c'eft d'un pareil accord auffi que naiffent la confiance inté ricure & le ménagement des mbyens qui étendent au dehors la force & la puiffance de l'Etat.

II. On doit mettre encore au premier rang parmi les améliorations qui intéreffent tous les habitans du royaume, l'établiffement des principes qui doivent affurer une égale répartition des impôts, & je diftingue ici les principes de leur application. Les principes appartiennent à la délibération des Etats-Généraux, & l'application de ces principes regarde l'adminiftration particulière de chaque province. Il faut le concours de la Nation, il faut toute la force légif a tive pour déterminer qu'il n'y aura déformais aucunes diftinctions pécuniaires entre les divers ordres de l'Etat, & qu'on abolira pour toujours jufqu'au nom des impôts qui conferveroient les veftiges d'une défunion dont il eft fi preffant d'efiacer la mémoire. Mais le principe une fois admis, c'eft à l'a miniftration de chaque province qu'il faut s'en rapporter pour apprécier l'étendue diverfe en chaque licu, de la taille perfonnelle & de la capitation taillable, & pour faire choix des moyens les plus convenables de convertir ces, impôts dans un autre genre de contribution.

On a fait des recherches pour arriver à connoître diftinctement l'étendue refpective de la taille purement territoriale & de la taille perfonnelle; mais ces informations font difficiles à acquérir parce que dans plufieurs provinces, la portion de taille que fupporte un colon en raison de fa propriété territoriale, fe trouve confondue dans le même article avec celle qui lui eft impofée en raifon de fon induftrie ou de fa fortune mobiliaire. I eft des détails dont une affemblée nationale peut d fficilement prendre connoiffance avec certitude & précision; ainfi, comme on vient de le dire,

« PreviousContinue »