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qu'à l'excès, interprétant à la moderne les grandes scènes de la Bible. Il y avait là Richelieu, Mazarin, et la Mort de Guise, histoires froides et léchées dues au pinceau lent et patient de M. Paul Delaroche, une grande réputation d'autrefois; le Tintoret peignant sa fille morte, vigourense toile de M. Léon Coignet; Dante et Virgile, hallucination ultra-romantique de M. Ary Scheffer.

L'exposition du boulevard BonneNouvelle nous a fait remonter jusqu'aux glorieux préludes de l'école moderne. Louis David y était représenté par une magnifique toile tout étrangère aux habitudes emphatiques et antinaturelles de son talent, Marat assassiné dans son bain. Malheureusement, à côté de ce chef-d'œuvre, il fallait voir une déplorable Mort de Socrate, une Diane et Endymion, et ce malencontreux Napoleon, tant de fois reproduit par la gravure, qui se cabre si solennellement pour enjamber le Saint-Bernard. Des Guérin, des Gros, des Gérard, des Girodet, y servaient de repoussoir à une chaude esquisse de Géricault, l'Engagement de cavalerie, et au Brigand italien de Léopold Robert. Sculpture.-Le morceau le plus remarquable exposé cette année est, sans contredit, la Poésie légère (no 2222), de M. Pradier. On y retrouve cette habileté de main qui distingue le grand sculpteur, et cependant peut-être estelle là à un degré moindre que d'ordinaire. C'est toujours la grâce du paien de la décadence, mais, à coup sûr, ce n'est pas une grâce saus afféterie. Il y a, dans ce corps qui ondule et fuit les yeux, l'absence de cette ligne unique qui est la première beauté des marbres antiques. La Poésie légère, qui pourrait tout aussi bien être une nymphe ou tout autre chose, a quelque chose de contourné et d'étriqué à la fois. Malgré d'admirables détails, il est impossible de ne pas être choqué par quelque chose de grêle et par des défauts matériels d'un ordre assez vulgaire. La Phryné valait cent fois mieux.

M. Pradier travaille vite et il fait beaucoup. Son exposition se compose encore d'une statue assise du Duc d'Orléans, avec bas-reliefs, et de deux bustes et statues de Jouffroy et de M. Paillet. Le prince royal est rendu avec bonheur; c'est incontesta

blement la meilleure statue qui en ait été faite, et M. Marochettia des raisons suffisantes pour la trouver détestable. Le Jouffroy est d'une belle expression.

Nous avons remarqué êncore deux figurines en bronze, tiers-nature, honnetes études de l'antiquité, qui témoigneut chez M. Pradier d'une de ces passions sérieuses pour l'art qui survivent au succès et à la fortune.

Une Mater amabilis (no 2210), de M. Ottin, quoique complétement depourvue d'expression religieuse, indique un travail consciencieux et de fortes études. Mais pourquoi done faire des vierges quand rien n'y force, et qu'on n'y comprend pas plus que M. Ottin.

M. Clesinger est en voie de progrès, dlt-on; il s'agit de s'entendre: si c'est du progrès matériel, peut-être, en effet, y a-t-il dans ses œuvres d'aujourd'hui plus de métier que dans celles d'hier. Soft marbre est plus gras qu'autrefois, sans doute, mais c'est là une qualité de praticien et de poisseur qui nous intéresse médiocrenient. M. Ciesinger nous annonce une Mélancolie, et nous cherchons une mélancolie; nous ne trouvons qu'une femme d'une tristesse maniérée, assez incorrectement dessinée, assez finement modelee, en somme, une grande statuet.e. Le Faune enfant, du même auteur, est aussi recherché dans sa pose, et trahit une grande inexpérience de dessin. M. Clesinger pourrait bien, dans cette voie, devenir un élégaut sculpteur de genre.

De M. Duret, le charmant auteur du Mercure et du Danseur, nous n'avons eu cette année qu'un buste de fenite, dans lequel on retrouve les solides qualités d'un maitre.

Nous sommes heureux de signaler deux débuts remarquables. C'est chose si rare! M. Deligand aborde le musée avec deux statues, un Flateur écontant l'écho et une Jeune fille con sullant une marguerite (no 2160, 2151). Ce sont là deux études conseiracieuses, antiques sans pastiche, antiques comme les idylles comprises dans la manière d'André Chénier. Le flûteur est d'une bonne et same naiveté. Le Faune de M. Clesinger, qui est un faune de bonne maison, trouverait à coup sûr_ce_berger-li fort stupide. La jeune fille a de chat

VARIÉTÉS. (Chronique des beaux-arts.)

mants détails, mais peut-être y a-t-il un peu de manière dans la bouche. L'excellent sentiment répandu dans ces deux œuvres nous fait espérer que M. Deligand continuera, comme il l'a déjà fait, à observer la nature, sans vouloir la corriger, comme tant d'autres. A ces conditions, il nous promet un bon sculpteur de plus.

Le second début est celui de M. Caïn. C'est peu de chose que ce petit groupe en cire représentant des fauvettes défendant leur nid contre un loir (n° 2128); mais la vérité et la simplicité sont de si admirables choses, qu'elles nous font préférer ce petit morceau à de bien grandes choses, fût-ce la Madeleine de M. Marochetti. Nous avons toujours pensé qu'il y avait cent fois plus de talent à empailler des perroquets, dans un bon sentiment de nature, qu'à tailler 2,000 kilogrammes de pierre ou de marbre, comme le font quelques-uns.

Le gros de l'exposition sculpturale se compose, comme d'ordinaire, d'un assez bon nombre de grands hommes destinés aux places publiques des villes, qui peuvent trouver sur leurs centimes additionnels de quoi se glorifier dans la personne de leurs illustres enfants. Il y a ceci de consolant, dans cette pluie biographique, que la płace destinée à recevoir le grand homme est ordinairement nivelée, réparée, quelquefois éclaircie et bitu inée ad hoc. C'est souvent le plus clair et le meilleur des services rendus à la ville reconnaissante par le héros en question. Ceci soit dit sans application pour le Descartes de M. Nieuwerkerke, le Rambaud III de M. Daniel, héros de 3 mètres, le Gassendi de M.Ramus,le Cambronne de M. Debay, un sculpteur-peintre, quelques-uns disent un peintre - sculpteur. Un Viala de M. Poitevin et trois estimables morceaux de M. Vilain, l'un des meilleurs élèves de M. Pradier, se font remarquer parmi tous les autres. M. Maindron, talent énergique et

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bien intentionné, a réussi à faire ad-
mettre un Senefelder destiné aux
ateliers de M. Lemercier, lithographe.
C'est là pour l'industriel qui a com-
mandé la statue une noble manière
de remercier l'inventeur d'un art
auquel il doit sa fortune. M. Main-
dron, l'auteur d'une Velleda un peu
maniérée, d'une statue du général
Travot, est, malgré son inexperience,
une des espérances les plus sérieuses
de la sculpture moderne. Il se trompe,
sans doute, mais il travaille du cœur
et de la téte plus que de l'ébauchoir;
ce travail-là n'est pas le pire.

En dehors de l'exposition, M. David
(d'Angers), le violent improvisateur,
travaille à une statue de Larrey,
destinée au Val-de-Grâce; M. Rudde
termine un Napoléon couché dans
son cercueil, destiné à une habita-
tion particuliere. Ce Napoléon n'aura
pas de peine à valoir l'Empereur à
cheval que nous doit fournir M. le
baron Marochetti, le sculpteur offi-
ciel. L'illustre auteur du Prince royal
de la cour du Louvre, et du maître
autel de la Madeleine, a soumis à la
commission des beaux-arts deux
modèles de la statue équestre dont on
l'a si heureusement chargé. La com-
mission, après de longues hésitations,
s'est décidée pour celui qu'elle a jugé...
le moins mauvais; il eût peut-être été
plus spirituel de faire le contraire. Ce
modèle nous promet, dit-on, un cheval
de la race de celui que monte S. A. R.
dans la cour du Louvre.

Tel est, cette année, le bilan de nos richesses et de nos misères artistiques. En somme, le mieux abonde, si le bien est rare. Beaucoup de valeur disséminée, beaucoup d'habileté pratique, un sentiment incertain, variable, mais sincère, en l'absence d'une haute et saine direction, la liberté d'études, qui, si elle en égare beaucoup, guide heureusement quelquesuns tel est le spectacle que donne l'école française, restée première ou plutôt seule à la tête de l'art moderne.

NÉCROLOGIE.

LISTE DES PRINCIPAUX PERSONNAGES MORTS EN 1846.

Le signe? veut dire que la date de la mort est inconnue.

JANVIER.

8. Le baron Zangiacomi, pair de France, président de chambre à la Cour de cassation, mort à Paris.

10. De Malaret, pair de France, ancien député de la Haute-Garonne, ancien maire de Toulouse, mort à Toulouse.

17. Poincot, colonel au corps roval d'état-major, officier de la Légion d'Honneur, chevalier de Saint-Louis et de Saint-Ferdinand d'Espagne, directeur de l'école militaire egyptienne.

19. Le comte de Hédouville, ancien ministre plénipotentiaire, officier de la Légion d'Honneur, chevalier de Saint-Louis, mort à Paris, âgé de 79 ans.

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1er. Oscar Varcollier, jeune peintre de mérite, élève de M. Paul Delaroche, mort à Paris, âgé de 25 ans.

2. Pierre Delbrel, ancien membre de la Convention nationale, du con21. S. A. R. Francois IV, duc de des cent-jours, mort à Moissac (Héseil des Cinq-Cents et de la Chambre Modène, mort âgé de 67 ans.

Le baron Charles-Henri Delacroix, maréchal de camp en retraite, commandeur de la Légion d'Honneur, frère de M. Eugène Delacroix, peintre d'histoire, mort à Bordeaux, âgé de 67 ans, fits de M. Ch. Delacroix, ministre sous le Directoire, et préfet de la Seine sous l'Empire.

FÉVRIER.

2. Maximo Garro, plénipotentiaire du Mexique, mort à Paris.

14. Philippe Dupin, mort à Nice, âgé de 50 ans.

19. Auguste Régnier, duc de Massa, mort à Paris, âgé de 32 ans.

29. Mme Monge, comtesse de Peluse, veuve de l'illustre géomètre, morte à Paris, âgée de 99 ans.

? Le comte Alexandre de Guairy, mort à Guairy, âgé de 68 aus.

rault), âgé de 86 ans.

4. Le cardinal-diacre Paolo Mangelli, du titre de Sainte-Marie in Cosmedin, mort à Rome, né à Forli

en 1762.

12. La princesse Pélagie Sapiaha, née comitesse Potocka, morte à Paris.

15. Le marquis de Langaunay, mort à Courvaud, âgé de 98 ans.

16. Villenave, littérateur distingué, Courrier français, mort à Paris, traducteur d'Ovide, et fondateur du âgé de 84 ans.

17. Pantaleon Potocki, condamné à mort, et exécuté à Siedlec.

22. Mme de Salvandy, mère du ministre de l'instruction publique, morte âgée de 92 ans.

28. Le lieutenant général baron Delort, pair de France, ancien aide de camp du Roi, mort á Arbois, âgé de 72 ans.

? Frédéric-Guillaume Bessel, doyen des professeurs de l'Université royale de Koenigsberg, célèbre astronome, âgé de 62 ans.

? Le lieutenant général d'Hautefeuille, mort à Paris, âgé de 88 aus. ? Le baron de Moltke, chargé d'affaires de Russie près la cour grandducale de Bade, mort à Baden.

? Le lieutenant général comte Charbonnel, pair de France, mort à Paris.

? Le marquis de Tryon-Montalembert, ancien chambellan de l'Empereur, mort âgé de 37 ans.

AVRIL.

4. M.Maffioli, conseiller référendaire à la Cour des comptes, mort à Paris,

9. La comtesse de Lovenhjelm, née comtesse Augusta de Fersen, mère du ministre de Suède à Paris, morte à Stockholm, âgée de 94 ans.

10. Le prince de Hesse PhilippsthalBarchfeld, lieutenant au régiment des bulans prussiens, mort à Mayence, âgé de 22 ans.

- Le comte de Montlivautt, conseiller d'Etat et préfet du Calvados de 1816 à 1830, mort à Blois, àgé de 75 ans.

14. Le baron de Turkheim, médecin célèbre, chef du service de santé de tout l'empire autrichien, mort à Vienne.

15. S. A. R. la princesse Marie-Anne, femme du prince Guillaume de Prusse, née princesse de Hesse, morte à Berlin.

25. Le lieutenant-colonel marquis de Clermont-Mont-Saint-Jean, mort à Paris.

29. J.-A. Buchon, savant littérateur, mort à Paris, né à Bourges en 1791.

? Le lieutenant général baron Marmier, mort à Paris.

? Le vicomte de Charrier-Moissard, contre-amiral bonoraire, né en 1765, mort à Bagnols (Gard).

MAI.

9. Sixdeniers, graveur distingué, mort à Paris, âgé de 48 ans.

13. Auguste-Emmanuel-Maximilien de Matharel, marquis de Fiennes, ancien secrétaire général aux colonies, mort à Paris, âgé de 84 ans.

18. Le baron Schobert, maréchal de camp en retraite, commandeur de la Légion d'Honneur, doyen d'âge des généraux de l'armée, mort à Paris,

né à Sarrelouis en 1763.

21. La princesse douairière d'Isembourg-Birstein, née comtesse d'Erbach-Erbach, morte à Heidelberg; elle était née le 5 juin 1777.

22. Barba, doyen des libraires de Paris, mort à Paris.

26. Le duc de Montmorency, pair de France, mort à Paris. Anne-CharlesFrançois, premier baron chrétien, était né en 1768.

- Le comte de Sade, député de l'Aisne.

Caroline-Ethelwina - Sophie de Forbin-Janson, duchesse de Beaufort, morte à Pau, âgée de 28 ans.

27. Vaudoyer, architecte, membre de l'Institut, chevalier de la Légion d'Honneur, secrétaire-archiviste de la section d'architecture de l'Ecole royale des beaux-arts, membre du conseil général des bâtiments civils, mort à Paris, âgé de 90 ans.

30. Le duc de Damas, mort à Paris, âgé de 93 ans.

31. Le docteur Marheinecke, célèbre professeur de théologie à l'Université de Berlin, mort à Berlin, âgé de 68 ans.

? Fourrier de Serres, consul de France à Edimbourg, mort dans cette

ville.

? Le baron Barbier, ancien chirurgien en chef et professeur au Val-deGrâce, membre de l'Académie royale de médecine, mort âgé de 79 ans.

? Sir Robert-Walter Otway, baronnet, amiral de l'escadre blanche, chevalier grand-croix de l'ordre du Bain, mort à Londres, âgé de 74 ans.

? Dittmer, directeur de l'agriculture et des haras au ministère de l'agriculture et du commerce, mort à Paris, âgé de 49 ans.

? Chaigneau, consul de France à Singapour.

JUIN.

1er. Grégoire XVI, Mauro Capellari, né à Bellune le 18 septembre 1765, nommé cardinal en 1825, par Léon XII, élu pape le 2 février 1831.

7. Charles de Ochoa, célèbre orientaliste, mort à Paris, âgé de 29 ans.

8. Le chanoine Balthazar Spaez, doyen du chapitre de la cathédrale de Munich, un des plus érudits archéologues de l'Allemagne, mort à Munich, âgé de 72 ans.

10. Le duc de Fitz-James, mort à Paris.

12. Jean-Frédéric Benzenberg, célèbre professeur d'astronomie et de physique, mort à Dusseldorff.

14. Philippe-Jean-Michel, comte d'Arschot-Schoonhoven, né au château de Voordt le 24 décembre 1771, ancien conseiller d'Etat et gouverneur du Brabant méridional, sénateur de Belgique, grand maréchal de cour, mort à Bruxelles.

La comtesse de Lamartine du Villars, ancienne chanoinesse du chapitre de Salles, tante de M. Alphonse de Lamartine, morte à Mâcon, âgée de 91 ans.

17. La comtesse de Meulan, née Turpin de Crissé, veuve du général de Meulan, et belle-sœur de M. Guizot, morte à Paris.

20. Le général Comman, mort à

Blidah.

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? Le marquis de Blainville, ancien président au parlement de Paris, chevalier de Maite, mort, âgé de 89 ans.

JUILLET.

1er. La princesse Caroline-Louise, sœur du prince régnant de Schaumbourg-Lippe, mort à Rudolstadt, âgée de 60 ans.

4. Hallette, fondeur célèbre, inventeur d'un nouveau système atmosphérique.

6. S. Em. le cardina! Joseph Bernet, archevêque d'Aix, d'Arles et d'Embrun, comte romain, chanoine honoraire du chapitre royal de SaintDenis, commandeur de l'ordre royal de la Légion d'Honneur, né à SaintFlour le 4 septembre 1770, mort à Aix.

d'ordonnance du Roi, membre de la 7. Le colonel de Lassalle, officier Chambre des députés, mort à Paris.

11. Le prince Henri de Prusse, oncle du roi de Prusse, mort à Rome, né le 30 décembre 1781.

17. Le comte Timothée Ledochoski, colonel au servive d'Autriche, chambellan de l'archiduc François-Charles, gendre du palatin comte Ostrowski, président du sénat de l'ancien royaume de Pologne, mort à Vienne.

31. Le professeur Heine, de Würzbourg, célebre orthopédiste, mort à Glockenthal (Suisse).

? Le comte Adolphe de Vaublanc, l'un des membres les plus intelligents et les plus éclairés de la Société d'encouragement pour le perfectionnement des races chevalines en France, mort aux eaux de Cauterets.

? Soulange-Bodin, l'un des plus habiles horticulteurs de France, mort âgé de 72 ans.

? Le duc de Poix, second fils du prince de Poix, et petit-fils du maréchal de Mouchy, ancien ambassadeur de France à Saint-Pétersbourg, mort à Paris.

AOUT.

1er. Dwarkanaught-Tagore, babou indien, mort à Londres, âgé de 51 ans.

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