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ARRÊT.

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LA COUR; Sur le moyen unique, pris de la violation ou de la fausse application des art. 1, 2 et suiv. de l'ordonn. du 14 juin 1846, 237 et 230 de la loi du 28 avril 1846, et 3 de la loi du 28 févr. 1872 : Attendu que la loi du 28 févr. 1872, qui a pour but d'empêcher la fraude en permettant de constater, au moyen d'une vérification efficace, la réalité des transports et l'identité parfaite des boissons, porte, dans son art. 3, que « les employés ne pourront pas délivrer de certificat de décharge pour les boissons qui ne seraient pas représentées»; que cette disposition est générale, et qu'elle s'applique indistinctement à tous les acquits-à-caution qui accompagnent les expéditions, que les destinataires soient ou non assujettis ; - Attendu, dès lors, que les acquits-à-caution soumissionnés par Frayssenon pour les boissons destinées à Cros et Sassolas ne pouvaient, bien que ceux-ci fussent des débitants abonnés, être déchargés qu'après représentation desdites boissons, et qu'en validant les contraintes décernées contre le demandeur, à défaut de cette représentation, ainsi que la saisie-exécution qui en a été la suite, le tribunal civil de Tournon n'a ni violé, ni faussement appliqué aucun des articles susvisés; Rejette, etc.

Du 10 août 1880. Ch. req. MM. le cons. Alméras-Latour, prés. Petit, rapp.; Rivière, av. gén. (concl. conf.); Mazeau, av.

CASS.-CIV. 26 avril 1880.

TIONS INDIRECTES.

10 CASSATION, MOYEN NOUVEAU, CONTRIBU20 CONTRIBUTIONS INDIRECTES, SAISIE MAL FONDÉE, MAINLEVÉE, DOMMAGES-INTÉRÊTS.

40 L'Administration des contributions indirectes ne peut prétendre pour la première fois devant la Cour de cassation qu'une saisie, opérée à tort pour un excédant, était justifiée, au contraire, par un manquant ultérieurement établi; c'est là un moyen nouveau.

20 La Régie ne doit pas être condamnée à des dommages-intérêts pour une saisie mal fondée, lorsqu'il y a eu remise immédiate et effective de la chose aux mains de son pro

(1) La mainlevée conditionnelle, à la charge de représenter les objets saisis ou d'en payer la valeur, n'est pas suffisante pour exonérer l'administration de toute responsabilité à l'occasion des saisies qu'elle pratique. V. Cass. 24 mars 1876 (P. 1876. 429. S. 1876. 1. 190), et Cass. (motifs) 14 août 1877 (P. 1878. 262.- S. 1878. 1. 109.) (2) Les art. 29 et 30 du décret du 1er germ. an 13 apportent, au cas de saisie par l'Administration des Contributions indirectes, une restriction au grand principe de l'art. 1382, C. civ. V. Cass. 15 juin 1872 (motifs) (P. 1873. 72. S. 1873. 1. 45). Après avoir décidé que

priétaire. Mais il en est autrement lorsque, cette chose ayant été laissée au transporteur avec charge de la représenter ou d'en payer la valeur, le destinataire ne peut forcer celui-ci à s'en dessaisir et se trouve, par suite, privé de la faculté d'en disposer (4) (Décr. 4er germ. an 13, art. 29).

En outre de l'indemnité d'un pour cent, édictée par l'art. 29 du décret du er germinal an 13 pour privation des objets saisis, la Régie n'est passible de dommages-intérêts que pour dépérissement de ces objets survenu avant leur remise ou l'offre valable de les remettre. Il n'y a donc pas lieu de tenir compte d'autres éléments dans l'évaluation du préjudice causé (2) (Décr. 4er germ. an 13, art. 30).

(Contrib. indir. C. Dreux).

Le 2 sept. 1876, des employés des Contributions indirectes en résidence à Roanne, ont rapporté procès-verbal contre la Comp. du chem. de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée pour transport de 22 hect. 40 litres de vin avec un congé énonçant seulement 24 hect. 10 litres, à destination de M. Dreux, propriétaire et maire de la commune de Charlieu, soit un excédant de 430 litres. Cet acte stipule que mainlevée a été donnée au chef de gare, sous la promesse de représenter les objets saisis ou d'en payer la valeur fixée à 300 fr, Le destinataire intervenant prétendit qu'il n'existait aucun excédant et demanda qu'il fût procédé au dépotement. L'Administration acquiesça à cette demande, et l'opération accusa un manquant de 68 litres; elle consentit alors à abandonner cette affaire, et donna, le 14 déc. 1876, mainlevée pure et simple de la saisie. Mais M. Dreux, prétendant avoir éprouvé un préjudice moral et matériel par suite des agissements de l'Administration, assigna cette dernière en paie-l ment de 1000 fr. de dommages-intérêts.

10 juill. 1877, jugement du tribunal civil de Roanne, ainsi conçu : - Le Tribunal;

Attendu qu'il est constant en fait qu'à la suite d'un premier procès-verbal dressé le 2 septembre les employés de la Régie avaient saisi à la gare 2,440 litres de vin rouge, alléguant qu'il y avait dans les fûts un excédant de 130 litres, mais qu'une vérification ultérieure, faite en présence des employés de

cette exception n'est pas opposable aux propriétaires qui revendiquent les objets leur appartenant, indûment frappés de saisies sur des tiers (Cass. 14 août 1877. P. 1878. 262. - S. 1878. 1. 109), et que, dans le cas de dépérissement, les indemnités des art. 29 et 30 peuvent se cumuler (Cass. 14 août 1877, précité), la Cour de cassation fixe aujourd'hui les éléments qui doivent entrer dans le calcul de l'indemnité due à ce propriétaire; autrement dit, elle décide que les seuls dommages qui peuvent entrer en ligne de compte sont ceux de privation, de détérioration et de perte de la chose saisie à tort.

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l'Administration, établit qu'au lieu d'un excédant, il manquait en réalité 68 litres; - Attendu que, par suite du procès-verbal dressé, les vins du demandeur ont dû être retenus à la gare où ils ont subi une dimiDution et une dépréciation; que, par suite, l'Administration doit être déclarée responsable des conséquences des constatations inexactes de ses employés; Attendu que l'art. 29 du décret de germ. an 13, invoqué par l'Administration, ne s'applique qu'à la simple privation des boissons saisies, et n'exclut pas les autres causes de dommages prévues et indiquées dans l'art. 30 dont il y a lieu de faire l'application; Attendu qu'en tenant compte de toutes les circonstances de la cause, des déboursés occasionnés à Dreux par cette affaire et des démarches et pertes de temps qu'elle a entraînées pour lui, le Tribunal estime qu'il y a lieu de lui allouer 200 fr. pour tous dommages-intérêts; ces motifs; -Condamne l'Administration des Contributions indirectes à payer au demandeur la somme de 200 fr. à titre de dommages-intérêts avec les intérêts de droit. »>

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Par

POURVOI en cassation par l'Administration des Contrib. indir. 4er Moyen. Fausse application de l'art. 30 du décr. du 1er germ. an 43, violation du même article et de l'art. 29 du même décret, en ce que le jugement attaqué a prononcé contre l'Adminisration des Contrib. indir, une condamnation à des dommages-intérêts, à raison d'un préjudice prétendu dont la réparation ne pouvait être légalement mise à sa charge.

2 Moyen. Fausse application des art. 29 et 30 du décret du er germ. an 13, et violation expresse tant des mêmes textes que des art. 6, 10, 47 et 19 de la loi du 28 avril 4846 et de l'art. 4er de la loi du 28 févr. 1872, en ce que le jugement attaqué a déclaré qu'il y avait saisie mal fondée alors qu'une contravention avait été commise par suite d'un manquant dans les quantités de boissons transportées.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le second moyen du pourvoi :- Attendu qu'appelé à statuer sur une demande en dommages-intérêts formée par Dreux contre l'Administration des Contrib. indir. à raison de la saisie de quatre fûts de vins pratiquée à son préjudice, le 2 sept. 1876, par les employés de la Régie pour une quantité supérieure à la quantité déclarée, le tribunal de Roanne n'avait pas à rechercher, en dehors du procès-verbal, seul soumis à son appréciation, si cette saisie opérée à tort pour un excédant n'était pas justifiée, au contraire, par un déficit ultérieurement établi ; Que l'Administration ne se prévalait pas devant lui de ce manquant qui, imputable, pour partie au moins, au fait de ses préposés, ainsi que le constate le jugement, pouvait, déduction faite de la perte provenant de cette cause, être inférieur au ANNÉE 1881. — 1re Livr.

déchet de tolérance admis par la loi ; - Que, si elle prétend aujourd'hui que la constatation d'un déficit impliquait une contravention et légitimait la saisie, ce moyen est nouveau et ne peut, par suite, être soumis à la Cour de cassation; Le déclare non recevable;

-

Sur le premier moyen du pourvoi, considéré dans sa seconde branche: Attendu que, s'il résulte des termes de l'art. 29 du décr. du 1er germ. an 13, que la Régie ce doit pas être condamnée à des dommagesintérêts pour une saisie mal fondée, lorsqu'il y a eu remise immédiate et effective de la chose aux mains de son propriétaire, l'immunité dont il s'agit n'est pas applicable au cas où, comme dans l'espèce, cette chose ayant été laissée au transporteur avec charge de la représenter cu d'en payer la valeur estimative, le destinataire ne peut le forcer de s'en dessaisir et se trouve privé de la faculté d'en disposer; Qu'en le jugeant ainsi, le jugement attaqué, loin de violer l'art. 29 précité, en a fait, au contraire, une juste application; Rejette ce moyen;

Mais, sur la première branche du premier moyen: Vu l'art. 30 du décret du 1er germ. an 13; Attendu qu'à l'exception de l'indemnité d'un pour cent édictée par l'art. 29 de ce décret pour privation des objets saisis, la Régie n'est, aux termes de l'art. 30, passible de dommages-intérêts que pour dépérissement de ces objets, survenu avant leur remise ou l'offre valable de les remettre, et qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'autres éléments dans l'évaluation du préjudice causé; - Attendu que le tribunal a cru devoir cependant comprendre, parmi les éléments de l'indemnité accordée au sieur Dreux, indépendamment de la diminution et dépréciation de la marchandise saisie, les déboursés qui lui ont été occasionnés, les démarches qu'il a dû faire, les pertes de temps qu'il a subies, et qu'en lui allouant pour ces diverses causes une somme de 200 fr., sans relever à la charge de l'Administration aucune faute spéciale extrinsèque à la saisie, le jugement attaqué, méconnaissant le caractère restrictif de l'art. 30 susvisé, en a faussement appliqué, et, par suite, violé les dispositions;-Casse,... mais en ce qui concerne seulement la quotité des dommages-intérêts, etc.

Du 26 avril 1880. Ch. civ. - MM. Mercier, 1er prés.; Guérin, rapp.; Desjardins, av. gén. (concl. conf.); Arbelet, av.

CASS.-CIV. 14 juin 1880. CASS.-CIV. 12 juillet 1880. CONTRIBUTIONS INDIRECTES, JUGEMENT, MÉ

MOIRES, SIGNIFICATION, MENTION.

Est nul le jugement qui, en matière de contributions indirectes, ne mentionne dans aucune de ses parties les significations des mémoires sur lesquels la cause a dû être instruite

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Après avoir été condamnée sur les poursuites de l'Administration des Contrib. indir. à deux amendes de 600 fr. pour fabrication illicite d'une certaine quantité de bière, au moyen d'une chaudière non déclarée, et à une troisième amende de 200 fr. envers l'octroi de la ville de SaintQuentin, Mme Mairesse, brasseur dans cette ville, s'est vue, de la part de la Régie et de la ville, l'objet, devant le tribunal civil de Saint-Quentin, d'une demande en payement de 98,110 fr. à titre de réparation du préju dice qui leur aurait été causé, du fer juill. 1869 au 22 juin 1875, par la soustraction à la perception de l'impôt, à l'aide de manoeuvres frauduleuses, d'une partie des bières fabriquées. Par jugement du 13 juill. 1876, le tribunal, qualifiant cette demande d'action en recouvrement de taxes assujettie par la loi à des formes spéciales, a annulé la procédure et renvoyé la demanderesse à se pourvoir devant qui de droit. Des contraintes ont été alors décernées le 24 oct. 1876 contre Mme Mairesse, et, sur l'opposition de cette dernière, l'affaire s'est engagée. Un jugement du 27 mars 1878 a ordonné, avant faire droit, une enquête sur les faits articulés par les parties en cause, et la production des livres de l'opposante pour être soumis à l'examen d'un expert; il s'exprimait ainsi sur les productions: « Vu les mémoires signifiés à la requête de l'Administration des Contrib. indir. et par la ville de Saint-Quentin, aux dates des 25 janv. 1877; Vu également les mémoires de la dame Mairesse, portant les dates des 26 juillet et 24 déc. 1877 ».

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ARRET (après délib. en la ch. du cons.). LA COUR ; Sur le premier moyen da pourvoi : Vu les art. 88 de la loi du 5 vent. an 12, 17 de la loi du 27 vent. an 9, et 65 de la loi du 22 frim. an 7; Attendu qu'aux termes de ces dispositions, les contestations sur le fond des droits réclamés par la Régie des Contrib. indir. et par l'octroi doivent être instruites par simples mémoires respectivement signifiés ; Que cette signification, à défaut des plaidoiries qui sont interdites par les lois spéciales, peut seule faire connaître aux parties les moyens invoqués contre elles, et les mettre à même d'éclairer la justice par une discussion contradictoire ; Qu'elle constitue en conséquence une formalité substantielle, et que son observation doit être constatée, à peine de nullité, par le jugement qui, en cette matière comme en toute autre, doit porter en lui-même la preuve de sa régularité; A tendu que le jugement attaqué n'énonce en aucune de ses parties que le mémoire de la veuve Mairesse, en réponse à celui de l'octroi de la ville de Saint-Quentin, dont il est fait mention dans ses motifs, ait été signifié à ladite ville; Qu'ainsi il a violé les dispositions de loi susvisées; - Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi; - Casse, etc.

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Du 44 juin 1880.- Ch. civ.- MM. Mercier, 4er prés.; Greffier, rapp.; Desjardins, av. gén. (concl. contr.); Demasure, Mimerel et Arbelet, av.

20 Espèce.

(Contrib. indir. C. Jutge). ARRÊT.

LA COUR: Sur le premier moyen du pourvoi : - Vu les art. 17 de la loi du 27 vent. an 9, et 88 de la loi du 5 vent. an 12; Attendu que les formes instituées par ces dispositions légales, pour l'instruction et le jugement des contestations qui s'élèvent sur le fond des droits établis en matière de contributions indirectes, sont substantielles ; qu'en conséquence l'observation en doit être constatée par les jugements mêmes rendus en cette matière, lesquels, comme toutes les décisions judiciaires, doivent contenir la preuve de leur régularité; — Attendu que le jugement attaqué vise un mémoire présenté par Jutge à la date du 27 oct. 1876, et un autre mémoire en réplique, sans constater que ces mémoires ont été signifiés;

avaient été examinés contradictoirement avec ceux de la Régie. Quoi qu'il en soit, et malgré les conclusions contraires de l'avocat général, la Cour n'en a pas moins prononcé la cassation du jugement, faisant ainsi une stricte application du principe que cette signification constitue une formalité substantielle, dont l'observation doit être constatée, à peine de nullité, par le jugement, qui, en cette matière, comme en toute autre, doit porter la preuve de sa régularité.

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CASS.-crv. 14 juin 1880. CONTRIBUTIONS INDIRECTES, RECOUVREMENT DE DROITS, PROCÉDURE, MÉMOIRES, PRODUCTION, PRESCRIPTION, Preuve.

La loi n'ayant pas réglé la forme spéciale en laquelle il serait constaté que les mémoires des parties ont été mis sous les yeux des juges, il suffit qu'il résulte des motifs du jugement, et des termes dans lesquels il a statué, qu'ils ont nécessairement connu, et été mis à même d'apprécier les prétentions et les conclusions de l'une et de l'autre partie (1) (L. 5 vent. an 12, art. 88).

Lorsque l'Administration réclame à un industriel le montant de droits dont celui-ci est partenu à éluder le paiement pendant une certaine période ou sur certaines quantités déterminées d'objets soumis à l'impôt, cette demande a, en réalité, pour objet le recoutrement de droits établis en matière de contributions indirectes, et elle doit être introduite et jugée dans les formes prescrites par les lois des 5 vent. an 12, et 22 frim. an 7 (2) (L. 5 vent. an 42, art. 88, 89 et 90; Décr. germ. an 43, art. 43).- Rés. par jugem. La prescription annale de l'art. 50 du decr. du 1er germ. an 13 ne s'applique qu'aux droits que les employés ont pu constater dans les formes et dans les délais légaux; La prescription ne peut étre opposée par le redevable, lorsque c'est par un acte matériel et frauduleux de ce redevable que la Régie a ignoré l'existence du fait générateur

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(1) Est nul le jugement rendu sur le fond des droits réclamés par l'Administration des Contributions indirectes, sans que des mémoires aient été signifiés: Cass. 18. déc. 1878 (P. 1879. 382. - S. 1879. 1. 152), et les renvois. Adde, les deux arrêts qui précèdeat. Mais la loi ne prescrit pas de formes sacramentelles pour constater l'existence des mémoires respectifs des parties. L'arrêt de la chambre civile décide que cette preuve peut résulter implicitement des motifs du jugement. (2) Décision conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation. V. Cass. 8 avril et 12 août 1878 (P. 1879. 404. S. 1879. 1. 166), et la note.

V. en ce sens, Cass. 5 juin 1880 (P. 1880. 1191.5. 1880. 1. 483) et la note. L'article 50 du décret du 1er germ. au 13 porte : « La prescription est acquise aux redevables contre la Régie, pour les droits que ses préposés n'auraient pas réclamés dans l'espace d'un an, à dater de l'époque où ils étaient exigiMes ». Or, dans le cas spécial, les droits étaient exigibles du jour de la constatation de la fabricafon de la bière aux registres portatifs; cette cons

de son droit et n'a pu exercer l'action qui lui compétait pour en poursuivre l'exécution (3) (Décr. 1er germ. an 13, art. 50).

Dans les instances de cette nature, il ne s'agit pas d'une action civile en réparation d'un dommage causé par une contravention, et par conséquent la prescription des art. 637 et 638,C. instr. crim.,n'est pas applicable (4) (Id.). Si, en matière de contravention aux lois des contributions indirectes et des octrois, toute poursuite correctionnelle doit avoir sa base dans un procès-verbal régulier énonçant les faits constitutifs de la contravention, il en est autrement lorsqu'il s'agit d'une action en recouvrement de droits dont la perception n'a pu avoir lieu à raison de faits dolosifs. Dans ce dernier cas, les juges du fond peuvent admettre la Régie à faire la preuve par tous les moyens reconnus par la loi (5) (L. 5 vent. an 12, art. 62; Décr. 4er germin. an 13, art. 24 et 34; L. 28 avril 1816, art. 111, 120 et 125).

(Vermesch C. Contrib. indir. et Octroi de Saint-Quentin).

En 1875, des procès-verbaux ayant été dressés contre plusieurs brasseurs de la ville de Saint-Quentin chez lesquels on avait trouvé des bacs non déclarés, communiquant par des tuyaux avec les chaudières, et dans lesquels ces industriels effectuaient des déchargements partiels, des poursuites correctionnelles, suivies de condamnations furent engagées ; mais, en outre, l'Administration, ayant acquis la conviction que cet état de choses existait depuis longtemps, chercha à récupérer les droits qui avaient été fraudés à la ville et au Trésor, et actionna les contrevenants en dommages-intérêts. Par jugement du 13 juill. 1876, le tribunal de Saint-Quentin pensa qu'il avait été mal procédé. Nous extrayons du jugement ce qui

tatation n'ayant pu être faite par suite d'un acte frauduleux du brasseur, la prescription manquait de dies à quo, et, par suite, n'était pas opposable à la Régie. Une solution ainsi motivée nous eût paru préférable à la formule générale de l'arrêt. Nous ne pensons pas du reste qu'il veuille aller jusqu'à dire que, même après 30 ans, l'Administration peut répéter des droits que des manœuvres frauduleuses ont empêché de découvrir plus tôt. La prescription trentenaire est, en effet, générale. V. Cass. 5 mai 1879 (P. 1879. 777. S. 1879. 1.. 313). Adde, pour la jurisprudence de la Cour suprêmeen matière d'enregistrement, Cass. 3 déc. 1878 (P.. 1879. 175. S. 1879. 1. 86), avec la note et lerapport de M. le conseiller Dareste.

(4) Il appartient aux juges, sous le contrôle de la Cour de cassation, de déterminer le caractère légal des faits servant de base à l'action, et, par suite, la prescription qui leur est applicable. V. Cass. 7 mars 1877 (P. 1878. 241. - S. 1878. 1. 97).

(5) Application du principe général posé par l'art. 1348, C. civ. sur la preuve des quasi-délits.

suit:-« Le Tribunal;- Considérant que, sous le nom de dommages-intérêts, il n'est pas douteux que l'Administration réclame uniquement la restitution des droits qui, par suite de manœuvres dolosives, ont échappé à la perception de ses agents; Avant de statuer au fond; Dit que les actes de procédure ont été mal engagés, en prononce la nullité, sauf en ce qu'ils peuvent produire effet au point de vue de l'interruption de la prescription; Dit, en outre, qu'il y a lieu de saisir la chambre du conseil suivant les formes de procédure édictées par l'art. 88 de la loi du 5 vent. art. 12. »

L'Administration se rangea à cette manière de voir, et elle fit délivrer des contraintes en recouvrement des sommes auxquelles elle évaluait le préjudice causé par chacun des brasseurs; c'est ainsi que l'une atteignit M. Vermesch et sœurs. Sur leur opposition, le même tribunal a rendu, le 27 mars 1878, le jugement suivant : << Le Tribunal; Sur la fin de non-recevoir, tirée par le défendeur Vermesch, de la nature même de la demande des administrations: Attendu que Vermesch soutient que les administrations demanderesses réclament le recouvrement de l'impôt en désignant leur réclamation tantôt sous le nom de restitution de droits, tantôt sous le nom de dommages-intérêts, et que cette confusion de langage est employée volontairement, dans le but de se rendre plus facile la tâche de la preuve qui leur incombe; Attendu que le tribunal n'a pas à se préoccuper des expressions à l'aide desquelles les parties entendent faire valoir leurs droits, et qu'appréciant le caractère du litige, il a déjà été décidé par le jugement du 13 juillet 1876 qu'il s'agissait d'une contestation sur le fond du droit et d'une restitution de taxes à raison de laquelle la loi aurait déterminé une compétenc› spéciale; Attendu, en principe, que nul citoyen n'a le droit de se soustraire à l'impôt ; que, si la loi a déterminé la manière dont s'opérerait le recouvrement de l'impôt, elle a par son silence même laissé toute leur force d'application aux exceptions nées de la fraude; - Attendu plus spécialement, en ce qui concerne les brasseries, que, si la perception des taxes se fait d'après les énonciations consignées au registre désigné sous le nom de portatif, c'est à la condition sous-entendue que les renseignements consignés audit registre n'ont point été altérés par suite d'une fraude quelconque; Attendu que la loi du 28 avril 1816 a imposé dans son art. 120 l'obligation d'une déclaration de mise au feu et du nombre des bassins; qu'il est, par conséquent, impossible d'imaginer que tout ce qui a échappé à l'impôt est définitivement acquis aux brasseurs, puisque la loi impose à ces industriels l'obligation d'aller au-devant de la perception par une déclaration préalable; Attendu, spécialement, en ce qui concerne la Régie, en vertu des mêmes principes, que la

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prescription annale édictée par l'art. 50 de la loi du 1er germ. an 13 n'est pas applicable à l'espèce; qu'il est reconnu que la prescription ne peut être invoquée que si l'existence des droits réclamés après plus d'un an était connue de l'Administration..;-Au fond; - Attendu que la demande, en l'état où elle se trouve, s'appuie sur des présomptions sérieu ses dont la gravité ne peut être méconnue, et qui sont appuyées par les constatations du procès-verbal, mais qu'il paraît utile de chercher, par les moyens des voies d'instructions ouvertes au tribunal, à préciser certains faits en concordance avec lesdites

présomptions; Attendu qu'il est reconna par la jurisprudence que le tribunal a la faculté d'ordonner une enquête et la représentation de tous les livres propres à manifester la vérité; - Attendu que les décisions rendues par les tribunaux en matière de contributions indirectes, comme en matière d'enregistrement, sont en dernier ressort, et que ces matières sont considérées comme sommaires; Attendu qu'eu égard aux circonstances de la cause, il paraît utile d'édicter une contrainte pour obtenir la repré sentation des livres de commerce; ces motifs; Avant faire droit au fond; Prescrit une enquête à l'audience pour fixe la date à laquelle remonte l'établissemen des bacs clandestins ; Ordonne l'appor des livres de commerce, etc. »

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Par

POURVOI en cassation par M. Vermesch et sœurs. 1er Moyen. Violation de art. 65 de la loi du 22 frim. an 7, 17 d celle du 27 vent. an 9, et 88 de celle du vent. an 12, ainsi que des droits de l défense, en ce que le jugement attaqué a ét rendu au vu d'une partie seulement de mémoires signifiés et produits pour l'instruc tion de l'affaire.

20 Moyen. Violation de l'art. 50 d décr. du 1er germ. an 13, et subsidiaire ment des art. 637 et 638, C. instr. crim., e ce que le jugement a écarté, comme inap plicable dans la cause, l'exception de pres cription opposée à la réclamation.

30 Moyen. Violation des art. 62 de loi du 5 vent. an 12, 21 et 34 du décr. d 1er germ. an 13, 114, 120 et 425 de la loi d 28 avril 1816, en ce que, pour établir l'exis tence des droits contestés, il a été recour à d'autres preuves que celles qui, aux terme de la législation spéciale de la matière, peu vent servir de base légale à une condamna tion.

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