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(Samedi 15 février 1817.)

(N°. 263.)

De l'injustice du monde envers les prétres.

« Une secte qui se charge encore parmi nous de diriger les opinions, met autant d'ardeur à perpétuer dans le sein de la nation un levain d'impiété, que nos pères en mettoient à transmettre à leurs neveux le feu sacré de l'honneur et de la vertu. Point de religion sans prêtres; et la voie la plus sûre pour détruire sans ressource et le christianisme et ses prêtres, c'est de flétrir le sacerdoce et de le dessécher jusque dans sa racine, par le mépris et la haine publique. Eh! que font-ils autre chose, nos irréconciliables ennemis, que de souffler encore, dans tous les cœurs, cette haine et ce mépris? L'Eglise de France s'est vue, pendant près de deux mille ans, un objet d'amour et de respect; ses ministres étoient les maîtres de l'enfance, les tuteurs des pauvres, les consolateurs des malheureux, les conseils des Rois, disons-le sans crainte, l'ornement et l'appui de la société entière. Pourquoi donc voit-elle l'amour se changer en haine, la confiance en dureté et en aversion? Qu'est-il done arrivé qui ait flétri et dénaturé son caractère? Seroit-ce ses blessures si profondes, et qu'elle a reçues pour la foi, qui la rendroient méprisable? Et son repos, ses biens et son sang, prodigués pour maintenir toutes les saines maximes qui ont fait si long-temps fleurir la France, ne lui donneroient des droits qu'à la haine des François !

» Ce n'est pas ce que les étrangers ont ressenti à son égard. Nos prêtres, forcés de s'éloigner de leur patrie qui les repoussoit, et en faveur de laquelle ni leurs prières, ni le martyr d'un grand nombre d'entr'eux n'avoient pu appaiser le ciel, n'ont reçu partout que Tome XI. L'Ami de la Religion et du Roi.

B

des respects; les autres peuples ont été attendris de leur infortune; ils ont révéré leur courage, admiré leur résignation, secouru abondamment leur noble pauvreté; et rentrés dans leur terre natale, ces miniştres, que le malheur devoit, ce semble, avoir rendus plus chers à leurs peuples, n'ont éprouvé, de la part d'une classe d'hommes trop accrédités, que des dérisions, qu'une persécution sourde et maligne, que des traitemens et des outrages propres à leur faire sentir que l'exil n'est pas, de toutes les situations, la plus triste ni la plus misérable.

<«< Oserai-je parler au nom de tous les ministres des autels, et réclamer en leur faveur les droits les plus sacrés? Ne voit-on plus en nous des François? Qui nous a fait perdre ce titre? Avons-nous donc flétri ce beau nom, et démenti une si noble origine? Les liens du sang et de la société sont-ils sans force pour nous? Nos prédécesseurs ont-ils eu si peu de part aux institutions qui fondent le bonheur public, que nous devions être exclus de ce bonheur? Veut-on nous faire porter la peine de leur zèle inaltérable pour nos Rois, des lumières qu'ils ont répandues, des monumens qu'ils 'ont fondés, de leur fermeté à soutenir les droits de la nation, de la prospérité où ils ont élevé tant de familles, des écrits immortels qu'ils ont laissés, de la gloire qu'ils ont acquise à la France? Où trouve-t-on là des motifs pour nous dégrader? Et quand, au milieu des humiliations et des dégoûts, nous ne continue. rions pas nous-mêmes, suivant nos forces, leur ministère et leurs travaux, ne devroit-on pas nous compter pour quelque chose, d'être les successeurs de tant de grands hommes, et les débris du corps le plus illustre dont aucun peuple ait pu s'honorer? Et cependant de quel oil nous voit-on? Quel rang nous laisse t-on dans la société? Quelle distinction a succédé à celle qui relevoit autrefois notre caractère? Eu est-il d'autre aujourd'hui pour nous qu'une triste privation de la con

sidération qui appartient à tous, que le douloureux privilége d'être en butte à des détractions éternelles, qui ôtent presque tout crédit à notre ministère? Ne diroiton pas que nous sommes unè colonie de gens inconnus et incommodes, qui, n'apportant aucun titre, aucune relation de famille ni de parenté, aucun droit à la reconnoissance ou même à l'hospitalité, est venue sur charger le corps de la nation, et sur laquelle on se venge, par la dureté et les rebuts, de l'impossibilité où l'on est de la chasser et de s'en défaire?

» Nous en attestons le ciel avec confiance; ce n'est pas pour nous que nous sommes touchés de cette injustice. Avouons-le franchement, nous y trouvons encore des compensations. Outre les motifs qui doivent nous guider et nous rendre peu sensibles à ces amertumes, la confiance de quelques chrétiens fidèles, les consolations que nous répandons encore dans quelques familles, la longue habitude de souffrir, les encouragemens que nous donnent encore des hommes supérieurs ou de nobles héritiers de la loyauté et de la foi de nos ancêtres; toutes ces circonstances empêchent presque de parvenir jusqu'à nous les insultes dont nous sommes l'objet. Mais, quoi qu'en disent nos implacables adversaires, nous savons prévoir l'avenir et nous intéresser à la destinée des peuples. François, nous tremblons à la vue de notre patrie, perdant, avec ses autels, le plus ferme appui de sa félicité; chrétiens et prêtres, nous ne connoissons pas de plus grand malheur que l'extinction de la foi Voilà ce que nous portons gravé au fond de nos cœurs; et c'est ce qui nous remplit d'inquiétude et d'alarmes, en voyant qu'on égare les sentimens d'une nation disposée au repentir, et qu'on la mène rapidement, par la haine du sacerdoce, à la ruine de tout culte et de toute religion ».

Ainsi parle un écrivain dont nous avions promis de citer quelque chose, et dont nous ne pouvions mieux faire que d'emprunter les paroles, dans l'intention

où nous étions d'émettre quelques réflexions sur l'injustice du monde envers les prêtres. M. l'abbé Clausel nous paroît avoir bien fait ressortir cette injustice criante, et ce seul passage appeleroit l'attention sur son livre, dont on prépare en ce moment une seconde édition. La Religion prouvée par la révolution étoit digne de çet honneur et du débit rapide qui le lui procure.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

ROME. Le 2 janvier, S. Em. le cardinal della Somaglia, évêque de Frescati et vicaire de S. S. à Rome, après un examen attentif, et après avoir entendu des témoins et des théoFogiens, porta un décret pour déclarer qu'il étoit constant que par l'intercession de la sainte Vierge, il s'étoit opéré un miracle de guérison subite et parfaite en la personne de Marie Catalani, veuve Janson, attaquée depuis plusieurs années de maladies compliquées et jugées incurables. S. Em. a permis que ce miracle fut publié, et que la relation en fut dressée. Le décret est précédé d'une relation détaillée de l'état où étoit cette femme, des progrès de son mal, et de sa guérison subite, qui arriva, le 3 septembre dernier, à Rome, dans le dépôt des pauvres femines, près la basilique de Sainte-Croix de Jérusalem

- Le 21 janvier, on a célébré, dans l'église de Saint-Louis des François, un service solennel pour Louis XVI. M. l'évê– que d'Ortosie officioit. M. le comte de Blacas, accompagné de toutes les personnes attachées à l'ambassade, occupoit une tribune tendue de noir. Tous les François qui se trouvent à Rome assistoient au service en deuil, ainsi que beaucoup de Romains et d'étrangers. Le même service a été célébré dans les cinq autres églises de fondation françoise existantes à Rome. PARIS. Dans son Mandement pour le Carême, M. l'évêque de Troyes rappelle avec autant de force que de vérité les motifs qui nous sollicitent de revenir à Dieu :

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Quand avons-nous vu plus de maux rassemblés à la fois? quand la main de Dieu s'est-elle appesantie sur nous d'une manière plus visible? quand a-t-elle ajouté davantage la douleur à la douleur, et la misère à la misère? et ne nous

semble-t-il pas l'entendre ici nous demander, par son Prophete, si nous ne sommes pas assez punis, et ce qu'il pouvoit faire de plus pour nous rappeler à nous-mêmes, et imprimer bien avant dans nos ames la terreur de ses jugemens? Super quo percutiam vos ultrà.

» La voilà donc accomplie sur nous, N. T. C. F., cette menace que faisoit Moïse à son peuple: « Si vous n'écoutez pas la voix de Dieu, et que vous soyez infidèles à ses commandemens, vous serez maudit à la ville et à la campagne, maudit dans vos maisons et dans vos champs, et vous verrez le ciel vous refuser sa rosée en même temps que la terre vous refusera ses fruits ». En vain voudrions-nous nous le dissimuler et nous le cacher à nous-mêmes: la leçon est trop forte et les événemens parlent trop haut: et à moins que nous ne soyons parvenus à cet excès d'aveuglement de croire que Dieu est fatigué de gouverner le monde, et qu'il laisse au hasard le soin de sa destinée, pouvons-nous ne pas reconnoître dans les calamités sans nombre accumulées sur nos têtes, ce bras vengeur qui arme contre nous les vents et les orages, et les coups de cette verge vigilante dont parle Jérémie, image naturelle de cette justice éternelle que l'on ne peut tromper, pas plus que l'on ne peut la fuir; et qui, lorsque nous avons abusé de tout, nous a puni de tout; de l'abus de la prospérité, par tous les genres d'adversités; de l'abus de l'abondance, par toutes les sortes de privations, de l'abus des richesses, par le renversement de nos fortunes; de l'abus de nos succès et de nos victoires, par l'humiliation et par la présence des étrangers; de l'abas de la religion, par tous les fléaux que l'impiété traîne à sa suite; et enfin, de l'abus de notre raison et de nos lumières, par le chaos de nos pensées, et cet esprit de vertige et d'erreur qui nous possède encore: de sorte que, punis également de nos vices et de nos folies, de nos désordres et de nos faux principes, de nos mœurs corrompues et de nos systêmes corrupteurs, nous ne pouvons que nous écrier avec le Prophète: Vous êtes juste, Seigneur, et vos jugemens ne sont qu'équité et droiture.

>>Mais ce n'est point encore assez, et sa main est encore éten due plus loin. Jetés les yeux de toutes parts, et voyez s'il y a quelqu'endroit sur la terre où on ne se plaigne. Si d'un bout de l'Europe à l'autre, vous n'entendez pas un cri de détresse et d'alarme qui nous anonce qu'elle souffre; si partout ne se

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