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No 46.

D'André au comte de Blacas.

26 mai 1815 (l'original porte, par erreur, 26 avril).

A. B.

.... Il serait bon, je crois, de dire quelque chose sur la constitution de Buonaparte. Je ne la connais pas encore en entier, mais du moins le préambule que j'ai vu dans l'Oracle 2 mériterait bien une réponse. On n'a pas été très content ici de ce qui a paru dans le Journal universel sur la déclaration du conseil, on aurait désiré plus de raisonnements et moins d'antithèses. Le mélange de citations de différents genres dans un ouvrage grave n'est pas approuvé, enfin la réfutation est trouvée trop longue. Il faudrait dire qu'il y a quinze ans ce ne fut pas le vœu des Français qui amena Buonaparte au gouvernement, mais une conspiration, comparer les promesses qu'il fit alors avec ce qu'il a tenu, faire voir aux républicains qu'il les jouera encore comme il les joua dans le temps, au peuple, qu'il lui promit aussi la paix et ne lui donna que la guerre, la liberté et le tyrannisa, qu'il détruisit insensiblement toutes les formes protectrices de la liberté. Voilà le thème de la réponse au préambule.

1. Directeur général de la police en 1814.

2. Journal publié à Bruxelles.

V.

L'ACTION ROYALISTE DANS LE NORD 1.

N° 47.

Le comte de Blacas à lord Castlereagh.

A. B., minute.

Ostende, le 23 mars 1815.

Mylord, vous aurez déjà appris que le Roi, mon maître, avait été obligé de quitter Lille et de passer à Menin, d'où Sa Majesté s'est rendue ici hier au soir : elle y est venue dans l'intention d'attendre des nouvelles de sa maison militaire, qui avait ordre de se porter sur Dunkerque, et de savoir également le parti qu'avaient pris Monsieur et M. le duc de Berri, qui marchaient à la tête des troupes de la maison du Roi et de quelques corps qui devaient s'y réunir 2. Dans cette attente, le Roi ne peut prendre aucune

1. Pour toutes les pièces de ce chapitre, no 47 à 54, cf. ci-dessus, instructions au comte de Castejas, 5 avril, no 26 et la note 4, p. 68; cf. ci-dessous, chapitre xi, lettre de Vineent, 23 mai, et t. II, correspondance de Stuart : dépêches no 12, 5 avril; n° 14, 11 avril; no 24, 18 avril; no 25, 21 avril; n° 46, 5 mai; n° 54, ra mai; n° 64, 16 mai; n° 69, 19 mai; n° 72, 24 mai. Lettres de Castlereagh : no 1, 18 avril; n° 4, 2 mai. — Correspondance de Goltz : les annexes aux dépêches n° 4, 13 mai; no 5, 18 mai; no 15, 16 juin. 2. Cf. n° 1, p. 4, note 1, et ci-dessous, no 55 et 56.

détermination ultérieure, mais l'intention de Sa Majesté est de tenter tous les moyens qui pourront dépendre d'elle pour aller de nouveau en France animer par sa présence le zèle de ses fidèles sujets, qui sont prêts à tout entreprendre pour seconder les efforts qui seraient faits en faveur de l'autorité légitime. Vous pouvez être certain, Mylord, que trente mille hommes entrant actuellement en France avec la cocarde blanche réuniront tous les habitants, qui ne demandent que des armes, et que ce corps, en marchant sur Paris sans perdre un instant, ne rencontrera que bien peu d'obstacles et trouvera une population immense prête non seulement à se réunir à lui, mais à l'aider de tous les moyens pour renverser l'homme audacieux qui veut de nouveau asservir la France et faire la guerre à l'Europe.

Quelques bâtiments et un vaisseau de guerre seraient bien nécessaires au Roi pour le transporter où sa présence sera jugée utile, s'il ne peut aller sur-le-champ à Dunkerque. Sa Majesté compte toujours sur l'appui de ses alliés et il est certain d'avance de tout le bien qu'il recevra du prince régent et de votre généreuse nation.

N° 48.

Le comte de Blacas à lord Castlereagh.

A. B., minute.

Ostende, le 27 mars 1815.

Mylord, j'ai déjà eu l'honneur d'annoncer à Votre Excellence l'arrivée du Roi à Ostende et l'espoir qu'avait Sa Majesté d'occuper Dunkerque en y appelant sa maison militaire. Malheureusement, les ordres qu'elle avait

donnés à cet effet ne sont point parvenus à Monsieur et à M. le duc de Berri, qui, ne pouvant entrer à Lille, se sont dirigés de Béthune sur Ypres. Le refus que l'on a fait dans cette dernière ville de recevoir un détachement qui s'y était présenté a augmenté les embarras de cette pénible retraite. Une partie de la maison du Roi, arrêtée dans Béthune, s'y est trouvée environnée par des troupes de Buonaparte. Cependant Monsieur, qui est maintenant à Ypres, a rassemblé autour de lui un assez grand nombre de ceux qui ont pu passer la frontière, et l'on a pris des mesures pour recueillir tout qui pourrait encore s'y réunir 2.

M. de Gain de Montagnac 3, qui est déjà connu de Votre Excellence, et qui arrive en ce moment de Paris après avoir traversé plusieurs provinces comme simple voyageur, rend le compte le plus satisfaisant des dispositions du peuple, et fait même envisager la défection de l'armée comme tenant à une effervescence 4 qui ne tardera point à se refroidir lorsqu'elle apercevra la faiblesse réelle de l'homme qui l'a séduite. Je crois devoir l'adresser à Votre Excellence 5, à qui je me flatte qu'il pourra donner des informations utiles 6. Il vous fera connaître le désir du Roi conforme, ainsi qu'il sera facile de vous en convaincre, à ce que doit conseiller la situation présente de la

1. Cf. sur cet incident Souvenirs du comte de Rochechouart, p. 375. Le commandant de la place, officier russe, ne voulut laisser entrer que Richelieu, qui portait l'uniforme moscovite; il tint la porte fermée à Marmont et à Bordesoulles comme « traîtres à leur Roi. >>

2. Cf. no 1, p. 4, note 1, et ci-dessous, lettres du comte d'Artois, no 55

et 56.

3. Cf. ci-dessous, lettre du comte d'Artois, n° 56.

4. Rature : Que la réflexion pourra, que le moindre effort qui, qui doit être passagère.

5. Cf. ci-dessous les pièces 76 à 82.

Rature: En vous priant de lui faire

obtenir une audience de M. le prince régent.

6. Rature: Je vous prie, Mylord, de l'écouter avec attention et intérêt.

France et celle où elle pourrait se trouver si l'on ne déconcertait par une extrême promptitude les desseins de Buonaparte. Il n'a encore aucune force, aucun ascendant réel, et la présence d'un corps de troupes se portant rapidement sur Paris avec le Roi produirait incontestablement un changement encore plus soudain que celui dont nous venons d'être témoins. Votre Excellence qui a vu elle-même la France dans une grande crise, qui doit connaître le véritable sentiment de la nation 2, est plus que personne en état d'apprécier ces vérités.

N° 49.

Le comte de Blacas au duc de Wellington.

A. B., minute.

Gand, le 15 mai 1815.

et

Mylord, un devoir impérieux me prescrit de soumettre, sans délai, à Votre Excellence un projet fondé sur les rapports très importants qui viennent de me parvenir. Des députés des communes d'Armentières 3, d'Aire, d'Hazebrouck, de Cassel, sont venus offrir au Roi leur sang leur fortune. Les habitants de cette fidèle contrée sont impatients d'arborer le drapeau blanc. Animés d'un dévoument sans bornes, ils se sont cotisés et ont formé une caisse assez considérable pour les frais de leur armement, ont fabriqué des cartouches et sont tous armés de fusils de chasse. En un mot, ils s'engagent, au premier

1. Rature: Et ralliant à lui toute la population qui s'armerait pour lui. 2. Rature: Ne peut douter qu'elle ne seconde le premier effort qui sera tenté pour briser le nouveau joug.

3. Cf. ci-dessous, no 54.

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