Page images
PDF
EPUB

nombre fut porté au moins au maximum de trente, si ce n'est doublé. Dans ce cas, les Pères loueraient des terres à joindre à leur culture, et si jamais leurs ressources le leur permettaient, ils achèteraient la partie des bâtiments de l'ancienne abbaye qui ne leur appartient pas encore, et un moulin qui y touche et en faisait autrefois partie.

Puisse l'essai tenté à Fontgombaud réussir, et des colonies semblables être annexées aux autres couvents de trappistes, et particulièrement à celui de Staoueli, qui vient de remporter les grandes récompenses du comice agricole de la province d'Alger!

P. DE THURY.

LES PRISONS DE ROME (1).

Il existe à Rome trois prisons, celle des Thermes, les Prisons-Nouvelles, et celle qui a été érigée pour les enfants, où est appliqué le système cellulaire et qui fait partie du vaste hospice de Saint-Michel a Ripa. Dans cet hospicesont réunis les vieillards, les infirmes et les orphelins; on y trouve des fabriques de draps et de tapisserie, ainsi que les conservatoires de musique, de peinture, de sculpture et de gravure, d'où sont sortis beaucoup d'artistes qui font honneur à cet établissement, et parmi lesquels je me contenterai de citer Mercuri et Calamata. La prison, comme on le conçoit, est entièrement distincte, pour ses communi

[ocr errors]

(1) Nous empruntons à l'Univers ces renseignements précieux et dignes de foi sur les prisons de Rome, en élaguant tout ce qui touche à la polémique soutenue par ce journal contre la Presse. (Note du Gérant.)

620

cations et son régime, de toutes les autres parties de l'hospice.

Cet immense établissement fut construit par l'un des architectes les plus renommés de l'Italie, Antoine Fontana, qui l'appropria, avec une rare intelligence, au but pour lequel il était bâti, but dès lors réalisé pour la première fois par la création d'un système cellulaire mitigé, ce qui n'empêche pas d'en faire constamment honneur aux ÉtatsUnis.

Cette question offre trop d'intérêt pour que je ne sois pas conduit à citer quelques passages du Motu proprio de Clement XI, du 14 septembre 1703, qui a apporté cette importante amélioration au système des prisons :

« Considérant que journellement des enfants ou des jeunes gens de moins de vingt ans, avec une malice supérieure à leur âge, commettent des vols et d'autres délits qui les conduisent devant la justice et les font renfermer dans les prisons de notre ville de Rome; que malgré qu'on les place dans un lieu séparé, appelé la Polledrara, au lieu d'en sortir corrigés et amendés, ils retombent souvent dans les mêmes et dans de plus grandes énormités; pour remédier à un si grand mal, nous avons pensé, dès l'instant de notre élévation au pontificat, à construire, contigu à l'hospice de Saint-Michel a Ripa, un bâtiment d'une étendue convenable, sous le nom de maison de correction, ce qui a eu lieu en effet. Les constructions se trouvent terminées avec soixante petites cellules distinctes et séparées les unes des autres, autour d'une grande salle, dans le milieu de laquelle est l'autel pour célébrer la sainte messe; il y a en outre des logements pour un prêtre, pour les gardiens et les surveillants. On y voit une grande galerie découverte, et sous celle-ci de grands locaux, qui peuvent servir pour les ouvriers en laine, etc., de l'hospice... C'est pourquoi nous commandons et ordonnons que tous les enfants et

jeunes gens de moins de vingt ans qui, à l'avenir, seront condamnés à la prison par les tribunaux..., au lieu d'être envoyés dans les prisons publiques, soient transportés dans ladite nouvelle maison de correction... et ordonnons que les éminents cardinaux protecteurs de l'hospice désignent un prêtre pour instruire ces jeunes gens... et des maîtres pour leur enseigner quelques notions mécaniques, afin qu'ils laissent la paresse pour le travail et apprennent un nouveau moyen de bien vivre. »

C'est donc Rome, si arriérée dans la civilisation, suivant nos novateurs, ce sont les papes, objet de leurs mépris, qui ont les premiers conçu et réalisé l'une des plus importantes améliorations dans le système des prisons, améliorations dont nos philanthropes ont fait tant de bruit, parce qu'ils croyaient pouvoir en attribuer l'honneur à un peuple protestant.

C'est dans cette, prison, dont je rapporte les plans (que pourront consulter ceux qui le désireraient), que sont placés les prisonniers que l'on peut appeler plus particulièrement politiques; car il n'est pas inutile de remarquer que, sous ce nom, on affecte de confondre avec eux, pour grossir leur nombre, beaucoup de détenus placés dans les autres prisons, où les retiennent des actions contre la société ou contre des particuliers, qui ne sont en réalité que des crimes ou des délits civils commis dans des temps de commotions politiques.

Sur une salle de 37 mètres de longueur, 6 mètres 5 centimètres de largeur, et 13 mètres 18 centimètres de hauteur, s'ouvrent les cellules du plan inférieur et règnent les galeries autour desquelles sont distribuées, en nombre égal, les cellules des deux étages supérieurs, à chacun desquels on parvient par des escaliers placés en retrait dans les angles : c'est dans cette salle que se promènent tous les jours les prisonniers, qui y jouissent d'une déambulation

très-étendue, d'une lumière vive et générale, d'une grande. masse d'air. J'ai visité bien des prisons en France et en divers pays, j'ai comparé les différents systèmes, j'ai été à même d'apprécier leurs avantages comme leurs ineonvénients; jamais je n'ai vu, je ne sache pas, qu'il existe quelque chose d'aussi bien approprié au but pour lequel il a été construit que ce pénitencier.

Les cellules ne reçoivent que la nuit des hommes d'âges divers.

Les prisonniers placés dans l'ancienne prison des femmes sont dans les mêmes conditions que ceux qui sont réunis dans les autres prisons.

Au temps où nous sommes, avec les connaissances acquises sur les meilleures conditions hygiéniques auxquelles il faut satisfaire dans la construction des habitations, on trouve souvent encore beaucoup à dire sur un grand nombre de celles qui ont été édifiées de nos jours, et c'est véritablement chose digne d'un intérêt tout particulier que de voir les cellules d'une prison, construites en 1703, pour des enfants ou des jeunes gens, présenter un cube de 17 mètres par individu.

Les Prisons-Nouvelles, construites sous le pontificat d'Innocent XI, en 1655; celles des Thermes, établies depuis un assez grand nombre d'années dans d'anciens greniers pour les huiles et les grains avant la liberté du commerce, sont moins favorables que les précédentes; les prisonniers y sont placés dans des salles communes dont les dimensions supassent de beaucoup celles de nos prisons en France. Ces salles sont divisées en deux catégories distinctes: segreta piana, larga piana. Dans les premières, on place les prisonniers en instruction; dans les secondes, les condamnés.

Partout, chaque prisonnier a une paillasse de 9 palmes romaines (2 mètres) de longueur, renfermant 50 livres

(16 kil. 80) de paille. J'ai examiné ces paillasses dans un grand nombre des parties des diverses prisons; que d'hommes seraient heureux d'en avoir toujours de semblables ! Une couverture de laine est donnée à chaque détenu.

Pendant le jour, les paillasses sont relevées, et les prisonniers peuvent facilement prendre de l'exercice; j'en ai cependant trouvé, à dix heures du matin, plusieurs couchés, dans le seul but de prendre du repos, comme ils me l'ont dit, en réponse à la question que je leur adressais à ce sujet. Chaque jour, ils sont conduits ou dans un préau, ou dans des galeries à l'italienne, ouvertes et couvertes, largement aérées, et dont plusieurs jouissent d'une magnifique vue. Ici, comme partout, les étages supérieurs sont plus favorablement situés que les parties inférieures du bâtiment. Les palais eux-mêmes ne sauraient jouir dans toutes leurs parties d'avantages égaux.

Chaque prisonnier est pourvu d'une écuelle en poterie de grès, d'une cuiller en bois et de divers autres ustensiles; l'abondance de l'eau n'est pas l'un des moindres avantages que l'on rencontre partout ici.

Les prisonniers al segreto peuvent obtenir l'autorisation de se procurer des matelas et d'autres objets qui leur seraient nécessaires; ils conservent, s'ils le veulent, leurs vêtements. Ceux qui sont placés al largo, n'ont besoin d'aucune autorisation pour faire venir du dehors des matelas; les condamnés sont obligés, comme en France, de prendre les vêtements de la maison. Les chemises sont en bonne toile, blanchies chaque quinzaine; les vêtements en toile, analogues à ceux de nos prisons. J'ai examiné les uns et les autres avec beaucoup de soin, je puis dire qu'ils sont très-convenables.

L'expression de segreto (secret) n'a pas en Italie la même acception que, dans notre langage judiciaire. Le secret de nos prisons n'existe pas ici. Pourvu que celui qui est ren

« PreviousContinue »