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» La cour casse est annulle.... (1) ». Au surplus, V. l'article Prescription, sect. S. 7, art. 2, quest. 10.

30. Les jugemeus interlocutoires se périment-ils comme les simples actes d'instruc tion; ou mettent ils, au contraire, à l'abri de la Péremption les instances dans lesquel

les ils sont intervenus ?

On a vu plus haut, §. 1, nos. 7, 8 et 11, qu'avant le Code de procédure civile, la jurisprudence des parlemens de Paris et de Dijon différait de celle des parlemens de Toulouse et de Rouen. De ce qu'un jugement interlocutoire préjuge le fond. les parlemens de Paris et de Dijon concluaient que, bien loin d'être sujet à la Péremption, il y faisait obstacle pour l'avenir. Les parlemens de Toulouse et de Rouen tenaient, au contraire, pour maxime que, par cela seul qu'un jugement interlocutoire ne faisait que préjuger le fond et ne liait pas le tribunal qui l'avait rendu, il ne pouvait ni échapper à la Péremption ni l'empêcher; et c'est à cette opinion que l'art. 397 du Code de procédure donne implicite ment la préférence, par la manière générale dont il s'exprime.

Ainsi l'a jugé un arrêt de la cour de cassation dans une affaire qui présentait en même temps la question de savoir si la Péremption de l'instance d'appel dans laquelle il est intervenu un jugement interlocutoire, peut être invoquée par l'intimé qui était demandeur devant les premiers juges et a obtenu définitive ment gain de cause par leur jugement (2).

En ventóse an 6, le sieur Huré forme, contre le sieur Tassin, une demande en rescision, pour cause de lésion d'outre mpitié, de la vente qu'il lui a faite d'un immeuble situé à Paris, le 27 ventôse an 3, c'est-à-dire, pendant le cours du papier monnaie.

En frimaire an 7, jugement qui, avant faire droit, ordonne qu'il sera procédé à une visite d'experts pour. déterminer la valeur de l'immeuble au temps de la vente.

Les experts estiment l'immeuble; et d'après leur avis, il intervient, le 5 fructidor an 7, un jugement définitif qui rescinde le contrat de vente du 7 ventôse an 3.

Le sieur Tassin appelle de ce jugement à la cour de Paris; et y obtient, le 15 ventóse an

(1) Journal des audiences de la cour de cassation, année 1818, page 429.

(2) On examinera, ci-après, no. 7-2o., quel est l'effet de la Péremption de l'appel d'un jugement interlocutoire, lorsque l'instance principale est encore indécise.

10, un arrêt qui ordonne une nouvelle expertise.

Le 29 thermidor an 11, cassation de cet arrêt, et renvoi du fond de la cause devant la cour de Rouen.

Le 2 germinal an 12, arrêt de la cour de Rouen qui, avant faire droit, ordonne que l'immeuble dont il s'agit, sera estimé de nouveau par des experts, d'après les règles qu'il leur trace.

Une expertise est commencée en exécution de cet arrêt, et les opérations s'en prolongent jusqu'au 5 septembre 1809; mais, à cette époque, elles sont interrompues ; et trois annees se passent sans qu'il soit fait, de part ni d'autre, aucun acte de procédure.

Le 26 décembre 1812, requête du sieur Huré tendant à ce qu'il soit dit que l'instance d'appel est périmée, et qu'en conséquence le jugement de première instance sera exécuté selon

sa forme et teneur.

Le sieur Tassin répond

Que l'arrêt du 2 germinal an 12 est interlocutoire; qu'il préjuge le fond et que par conséquent il confere à la partie qui l'a obtenu, un droit que la Péremption ne peut plus atteindre ;

Qu'en effet, le réglement du parlement de Paris, du 28 mars 1692, avait déclaré que la Peremption n'aurait pas lieu dans les affaires où il interviendrait quelque appointement ou arrét définitif ou interlocutoire ;

Que, s'il faut consulter l'ancienne jurispru dence, c'est celle du parlement de Paris qui doit prévaloir, puisque c'est d'un immeuble. situé à Paris qu'il est question, que les parties sont domiciliées à Paris, et que ce n'est que par délégation que la cour de Rouen est investie de la connaissance de leur différend;

Que, si l'on ne doit s'attacher qu'au Code de procédure civile, on arrive toujours au même résultat; que l'art. 397 de ce Code ne fait que reproduire la disposition de l'art. 15 de l'ordonnance de Roussillon, du mois de janvier 1563; qu'il doit par conséquent recevoir la même interprétation; que cela résulte même du soin qu'a pris l'art. 15 de ce Code de soumettre à la Péremption les jugemens interlocutoires des justices de paix; que c'est là, pour les justices de paix, une règle spéciale, et qui, par sa spécialité même, prouve qu'elle n'est pas commune aux jugemens interlocutoires des tribunaux ordinaires.

Le 26 mai 1813, arrêt qui, sans avoir égard à cette défense, déclare la Péremption encourue et suite, confirme le jugement par dont est appel,

« Attendu qu'en droit, l'appelant est de

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» mandeur en réformation du jugement de » première instance, et par conséquent tenu, »en ladite qualité, de remplir les formalites » nécessaires pour parvenir au but qu'il se pro» pose; que les jugemens préparatoires ou pu>rement interlocutoires sont des actes qui ne » constituent pas des instances spéciales dans » l'instance d'appel, mais font partie de l'ins»truction et des erremens de la cause dans laquelle ils sont intervenus; qu'ainsi, dans » le ressort du parlement de Normandie, ou » autres cours, où l'on ne suivait pas le régle»ment fait par le parlement de Paris le 28 » mars 1692, les jugemens préparatoires et » interlocutoires tombaient incontestablement » dans la Péremption acquise par trois ans de » discontinuation de procédure; qu'il est sensible que cette doctrine est celle qui a été » adoptée en l'art. 397 du Code de procédure » civile, puisque, dans son 1er. paragraphe, >> il est conçu en des termes généraux qui ex>> cluent toute exception que l'on voudrait in»troduire hors des deux cas exprimés au » 2o. paragraphe du même article ».

Le sieur Tassin se pourvoit en cassation, et reproduit devant la section des requêtes, tous les raisonnemens qu'il a inutilement fait valoir devant la cour d'appel de Rouen. Mais par arrêt du 14 décembre de la même année, au rapport de M. Vergés, et sur les conclusions de M. l'avocat Giraud Duplessis, son recours est rejeté,

«Attendu qu'il n'a été fait, sur l'appel, aucune procédure depuis le 5 septembre 1809, époque de la dernière vacation des experts, jusqu'au 26 novembre 1812, époque de la demande en Peremption d'instance;

}} >> Qu'il y a eu, par conséquent, sur l'appel, discontinuation de poursuites pendant trois ans; que, d'après l'art. 397 du Code de procédure civile, toute instance est éteinte par cessation de poursuites pendant trois ans; que Ja généralité de ces expressions comprend evidemment même les cas où il est intervenu, comme dans l'espèce, un jugement prépara toire dans l'instance d'appel, lorsqu'il s'est écoulé, postérieurement à ce jugement, un délai de trois ans sans poursuites, à compter du dernier acte de la procédure;

>> Attendu enfin que l'art. 469 du même Code, en déclarant que la Peremption en cause d'appel à l'effet de donner au jugement de première instance la force de chose jugée, a eu évidemment pour objet de punir la négligence de l'ap pelant ;

» Que. par conséquent, Jacques Tassin, qui était appelant, a eu à s'imputer, quoiqu'il fût défendeur au principal, d'avoir laissé écouler

TOME XXIII,

trois ans sans poursuites ; que, par cette inaction, le jugement de première instance a acquis la force de chose jugée ».

On remarque sans doute que cet arrêt qualife, non d'interlocutoire, mais de préparatoire, celui que la cour d'appel de Rouen avait déclaré périmé par l'effet de la discontinuation des procédures pendant les trois ans qui en avaient suivi le dernier acte d'exécution; il est cependant certain que ce n'était pas un simple arrêt préparatoire, mais un arrêt véritablement interlocutoire que la cour d'appel de Rouen avait rendu le 2 germinal an 12, puisque cet arrêt, non-seulement préjugeait le fond, mais même n'avait ordonne une nouvelle expertise qu'après contestation sur le point de savoir si elle devait avoir lieu ou non (1). Mais du reste, de ce que la cour de cassation n'a employé, pour qualifier cet arrêt, que l'expression de préparatoire, il ne s'ensuit nullement qu'elle ait voulu faire entendre qu'il n'en est pas, à cet égard, des jugemens interlocutoires comme des jugemens préparatoires proprement dits. D'abord, les motifs de sa décision s'appliquent évidemment aux uns comme aux autres. Ensuite, elle a elle-même déclaré, par un autre arrêt du 25 novembre 1823, rapporté ci-après, no. 8 30., qu'il n'y a, en cette matière, aucune différence entre les premiers et les seconds.

4o. La mise d'une cause au rôle qui a, comme on le verra ci après, no. 4-5o., l'effet de couvrir la Péremption, lorsqu'elle est encourue, et de l'interrompre lorsqu'elle n'est encore que commencée, a t elle en outre celui d'empêcher qu'elle ne s'acquière par la discontinuation de toute poursuite pendant les trois années suivantes ?

On a vu plus haut, §. 1, no. 7, que, dans l'ancienne jurisprudence, l'affirmative était tenue pour constante au parlement de Toulouse, et il n'est pas douteux qu'il n'en fût de même dans toutes les autres cours qui admettaient la Péremption; car cette règle était la conséquence du principe que le rôle formait, pour les deux parties, une interpellation permanente de se tenir toujours prêtes à plaider; et la preuve que ce principe etait admis partout, c'est que l'art. 3 du tit. 35 de l'ordonnance de 1667 en faisait le fondement de la disposition par laquelle il refusait la voie d'opposition contre les arrêts par défaut faute de plai. der, qui étaient rendus à tour de role. Tel était d'ailleurs évidemment l'esprit de l'art. 91 de l'ordonnance de 1629, puisqu'en déclarant o t que

(1) V. l'article Interlocutoire, et mon Recueil de Questions de droit, au même mot.

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les causes mises au rôle seraient sujettes à Péremption, à compter du jour que l'on cesserait de plaider lesdits rôles, il supposait elairement que la Péremption dormait tant que n'était pas changé le rôle sur lequel une cause était inscrite.

Mais aujourd'hui que les rôles ne sont plus ce qu'ils étaient dans l'ancienne organisation judiciaire, et que, par suite, les arrêts rendus à tour de rôle par défaut faute de plaider, ne sont plus à l'abri de l'opposition (2), il n'y a plus la même raison pour attribuer à la mise d'une cause au rôle, l'effet qu'elle avait sous l'ordonnance de 1667, d'empêcher la Péremption; et dés-là, il semble qu'elle ne peut pas empêcher que la cause ne se périme par la discontinuation de toute poursuite pendant les trois années qui la suivent.

Cependant M. Carré, dans ses Questions de procédure civile, no. 1991, soutient le contraire; et voici ses raisons:

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Supposons que le défendeur au principal n'ait pas constitué d'avoué en cette circonstance, l'avoué du demandeur ne peut qu'attendre que le tour de role arrive: s'il pressait et sollicitait pour faire appeler la cause, ce ne pourrait être que par un acte à partie, et d'ailleurs il n'est pas à supposer qu'il doive provoquer une faveur qui serait une violation mani feste de la loi, puisqu'elle veut que toutes les causes viennent à leur tour de numéro, à moins de motifs d'urgence qui font exception à la régle générale. (V. La loi du 24 août 1790, tit. 2, art. 18).

» Il y a plus, on ne voit pas qu'il soit legalement possible de faire, depuis la mise au rôle, un acte qui puisse couvrir la Péremption, à moins qu'on ne suppose, ce qui serait évidem ment déraisonnable, que la loi ait entendu obliger un avoué à créer des sortes d'actes insignifians et frustratoires pour se mettre à l'abri de la Péremption.

>> Admettrait-on ce que Rodier (sur l'art. 15, tit. 14, de l'ordonnance) condamne expressement, la possibilité de faire des significations d'actes dejà signifiés, ou de nouvelles demandes en communication, ce qui peutêtre serait plus tolerable; du moius est-il difficile de croire que la loi ait entendu obliger un avoué à ces procédures surabondantes, qui, loin d'avoir réellement le but qu'elles supposent, en ont évidemment un tout opposé, puisqu'elles ne sont faites que par la crainte de la Peremption.

» Si, au contraire, il est reconnu qu'avant l'expiration du tour de róle, la Peremption

(1). l'article Role, no. 3.

n'est point à redouter, par la raison que c'est une prescription qui ne peut courir contre celui qui ne peut agir valablement, il n'y aurait plus d'excuse pour ces actes illusoires qui ne servent qu'à grossir les frais de la procédure.

» Mais l'abus et l'injustice sont plus grands encore quand il n'y a pas d'avoué en cause, puisqu'en supposant que l'enrólement ne dut pas couvrir la Péremption, il faudrait faire signifier dispendieusement à personne ou à domicile des actes qui n'auraient aucune utilité réelle pour l'instruction et que le juge ne pourrait passer en taxe ».

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Mais que deviennent ces raisonnemens lorsqu'on se reporte aux art. 505, 506 et 507 du Code de procédure civile, à la faculté qu'ils accordent aux parties de faire aux magistrats des sommations de juger, et au moyen qu'ils leur offrent, par là,de prévenir la Péremption? Comme le dit M. Carré lui-même sur la question qui sera traitée dans un instant (50.), n'est-ce pas discontinuer des poursuites, que de ne pas user des moyens que la loi donne pour obtenir jugement?

M. Carré prétend que l'arrêt de la cour royale de Rennes, du 2 mars 1818, dont il sera parle au no. 4-5o., a décidé qu'avant l'expiration du tour de rôle, la Péremption n'est point à redouter; mais c'est, de sa part, une méprise évidente.

Il est bien vrai qu'à la suite des motifs par lesquels cet arrêt juge que la mise au role n'a pas besoin d'être signifiée pour couvrir la Péremption, il s'en trouve un ainsi conçu : « Si » des auteurs graves et des arrêts de cours sou» veraines établissent un principe contraire à » cette doctrine, s'ils ont pensé et jugé qu'une signification d'acte soit nécessaire pour in» terrompre la Péremption d'instance, la né»gative étant une conséquence directe du

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silence de la loi, cette conséquence est sans » contredit, pour le magistrat qui ne voit que » la loi, preferable au risque evident d'ajouter » à son texte et d'exiger au-delà de ce qu'elle » prescrit; qu'au reste, à la règle de droit lex » non omisit incautè, șed quia dictum noluit, » vient se joindre l'ancienne jurisprudence » du parlement de Bretagne, attestée par » tous les auteurs bretons, suivant laquelle » l'enrólement de la cause était un obstacle » légal à la Péremption d'instance ; qu'il ne » faut point recourir au Code civil qui ne l'a » point traitée et qui n'a réglé que les pres»>criptions, et que la confusion des divers n ordres de lois conduit nécessairement à l'er»reur et devient la source la plus féconde

des mauvais jugemens, ainsi que l'a si

» savamment établi l'auteur de l'Esprit des » Lois ».

Mais de ce que, par ce dernier motif, la cour royale de Rennes argumente bien ou mal de l'effet qu'avait la mise au róle sous l'ancienne jurisprudence, de former un obstacle légal à la Péremption d'instance; de ce qu'elle croit pouvoir en tirer une raison bonne ou mauvaise de plus pour attribuer à la mise au role l'effet de couvrir une Péremption déjà encourue,et d'interrompre celle qui n'est encore que commencée, s'ensuit-il qu'elle regarde ce point de l'ancienne jurisprudence comme maintenu' implicitement par le Code de procedure civile, et comme compatible, soit avec la généralité de la disposition de l'art. 397 de ce Code, soit avec la nature actuelle des rôles? S'ensuit-il, en d'autres termes, qu'elle adopte l'opinion de M. Carré ?ll me paraît évident que

non.

Ce qu'il y a du moins de bien constant, c'est que, comme on le verra sur la question suivante, cette opinion a été formellement condamnée depuis l'arrêt dont il s'agit, par un arrêt de la cour royale de Douai, du 31 mars 1819, et par un autre de la cour de cassation, du 19 juin 1822, qui ont été rendus précisément sur la question actuelle.

5o La Péremption cesserait-elle de courir, si, à l'inscription sur le rôle, se joignait la mise de la cause en état d'être jugée, c'est-à-dire, comme l'explique l'art. 343, si des conclusions avaient été prises contradictoirement à l'audience, ou, pour me servir des termes reçus dans la pratique, si les qualités avaient été po

sées?

Il semblerait, d'après le compte que rendent les Annales de la cour royale de Douai, tome 1er., page 361, de l'arrêt de cette cour, du 31 mars 1819. déjà cité sur la question précédente, que cet arrêt et celui de la cour de cassation qui l'a maintenu, eussent jugé que

non.

Avant d'examiner si, en le supposant ainsi, ils devraient faire jurisprudence, il faut nous fixer sur ce qu'ils ont veritablement jugé. Voici les faits.

Au mois d'avril 1812, le sieur Dehault fait assign erla dame Boucher devant le tribunal de première instance d'Arras.

La dame Boucher constitue un avoué et fait signifier ses défenses. Le 4 novembre 1813, elle déclare au sieur Dehault, par acte d'avoué à avoué, qu'elle a fait mettre la cause au róle, avec sommation « de veiller quand » elle viendra sur la feuille, pour être appe» lée à l'audience ».

Les choses restent en cet état pendant près

de quatre années, sans qu'il soit fait, ni de part ni d'autre, aucun acte de procédure. Le 14 mai 1817, la dame Boucher demande que l'instance soit déclarée périmée.

Le 23 août suivant, jugement par défaut qui la déclare telle, « attendu qu'aux termes de >> l'art. 397 du Code de procédure civile, toute » instance est périmée par la discontinuation >> des procédures pendant le laps de trois

» ans ».

Le sieur Dehault appelle de ce jugement à la cour royale de Douai, et soutient que l'acte par lequel la dame Boucher lui a déclaré avoir fait mettre la cause au role, n'a pas seulement interrompu la Peremption qui avait jusqu'a lors commencé à courir, mais qu'il a encore empêché qu'elle ne reprit désormais son cours; qu'en effet, la Péremption n'est qu'une peine de la négligence des partics qui laissent dormir leur cause pendant trois ans ; qu'il n'y a point de négligence à reprocher à l'une ni à l'autre des parties, ni par conséquent de peine à appliquer, du moment que la cause est mise au róle, puisqu'il ne dépend pas d'elles de la faire juger avant son tour; « que dans l'espèce, » après la mise au rôle et la pose des quali»tés, surtout après la sommation du 5 novem»bre 1813, la cause se trouvait totalement en » état, et toutes les procédures terminees ; que » par conséquent il ne pouvait écheoir de >> Péremption ».

La dame Boucher répond

«Que la Peremption ne peut être interrompue, et que le délai ne peut être prorogé, que dans les cas expressement indiqués par le Code de procédure civile;

» Qu'en admettant que la cause fût en état depuis 1813, la Péremption n'avait pas moins couru, puisque les art. 397 et suivans n'indiquent pas cette circonstance de mise en etat de la cause, comme un obstacle à la Péremption; qu'il est donc impossible d'admettre l'inapplication de l'art. 397, dans le cas où la cause resterait trois ans et au-delà, en état, sans procédure ni jugement;

» Que, bien que la procedure soit complete, lorsque la cause se trouve en état, rien, n'empêche cependant de signifier, avant le jugement, soit des défenses, soit des conclusions, soit un avenir, ou tout autre acte propre à interrompre la Péremption; que ces mêmes actes n'en seraient pas moins valables et opérans, malgré qu'ils ne fussent pas sus. ceptibles d'être admis en taxe ».

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Le 31 mars 1819, arrêt qui, « attendu que l'appellant avait des moyens d'interrompre » la Péremption, en faisant nn acte quelconque de poursuite d'audience, adoptant, au

» surplus, les motifs des premiers juges, met » l'appellation au néant avec amende et dé» dépens ».

Le sieur Dehault se pourvoit en cassation et parvient à faire admettre sa requête.

Mais l'affaire portée à la section civile, arrêt contradictoire du 19 juin 1822, au rapport de M. Pajon, sur les conclusions conformes de M. l'avocat général Jourde, et après un délibéré en la chambre du conseil, par lequel, • Attendu 1o. que l'art. 397 du Code de procédure contient une disposition générale et qui n'est limitée par aucune autre exception que celle énoncée en l'art. 399, c'est-à-dire, dans le cas où il aurait été fait, par l'une ou l'autre des parties, un acte valable antérieur à la demande en Péremption;

» Attendu 2o. qu'il est attesté en fait, dans l'espèce de la cause, tant par le jugement de première instance, que par l'arrêt attaqué, qui, en le confirmant, en a adopté les motifs, qu'aucun acte de cette espèce n'avait eu lieu de la part du demandeur pendant les trois ans qui s'étaient écoulés depuis sa demande introductive d'instance; d'où il s'ensuit qu'en déclarant la Peremption acquise au profit de la défenderesse, l'arrêt attaqué n'a fait qu'une juste application dudit art. 397 dudit Code de procedure, et s'est conformé à l'art. 399 du même Code;

» La cour rejette le pourvoi...... (1) ». Est-il bien vrai que, dans cette espèce, il y avait eu, suivant l'expression du sieur Dehault, devant la cour royale de Douai, pose des qualités, c'est-à-dire, conclusions prises contradictoirement à l'audience, en même temps qu'inscription de la cause au role? Estil bien vrai, par conséquent, que la cause eut été mise, par là, en état d'être jugée, et que, par les deux arrêts que je viens de transcrire, il ait été décidé que, du moment qu'une affaire a été mise en etat d'ètre jugée, la Peremption ne peut plus l'atteindre ? N'est-il pas plutot à croire qu'en alléguant que les qualites avaient été posées lors de l'inscription de la cause au rôle, le sieur Dehault voulait seulement dire que la cause n'avait pu être mise au role que sur les qualités fournies par l'avoué poursuivant ?

Pour nous fixer là-dessus, reportons-nous au compte que rend le Journal des audiences de la cour de cassation, de la manière dont la dame Boucher combattait, devant la section civile, le moyen de cassation du sieur Dehault. « La veuve Boucher (y est-il dit) répondait:

(r) Journal des audiences de la cour de cassation, année 1823, page 102.

» d'après notre nouvelle organisation judi» ciaire, il n'existe plus de roles proprement » dits. La loi du 24 août 1790 a voulu, art. » 18, que les affaires fussent jugées sans pré-· » férence ni tour de rôle, et selon que le ju»gement en serait requis par les parties. Le » Code de procedure a également voulu, par » ses art. 79 et 8o, que l'audience fût pour» suivie par les avoués sur un simple acte. » Par différens arrêts, la cour de cassation a » elle-même reconnu qu'il n'y a plus de role » fatal. Ainsi, les rôles, tels qu'il existent au »jourd'hui, ne peuvent produire l'effet de » suspendre indéfiniment la Péremption. Dans » le cas particulier qui nous occupe, la cause » avait été inscrite sur le role général; mais » cette inscription ne mettait pas l'affaire en » état d'être jugée. Pour que l'affaire n'eût » plus eu qu'à attendre son tour d'audience. »il eût fallu que l'instruction en eût été plus » complète ; et elle était bien loin de l'être, » puisque non seulement le sieur Dehault n'a»vait pas répondu aux moyens de défense, » mais encore qu'il n'avait donné aucun ave»nir, et les parties n'avaient pas pris de conclusions. Si donc la cause est demeurée » pendant plus de trois ans sans être jugée, » c'est à la négligence du sieur Dehault que » ce retard doit être imputé; et c'est par une »sage application de l'art. 397, que la Pé» remption a été prononcée ».

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Ainsi, dans cette espèce, point de conclusions prises contradictoirement à l'audience; point de qualites posées à cette époque, dans le sens vulgairement attache à ces mots; point de mise de la cause en état d'être jugée; et par conséquent point d'application à faire des deux arrêts dont il s'agit, à la question qui nous occupe ici.

Mais il reste à savoir comment cette question doit être décidée; et il ne parait pas douteux qu'elle ne doive l'être comme elle le serait par les deux arrêts cités, si, dans l'espèce sur laquelle ils ont été rendus, la cause eût été mise en état d'être jugée, soit en même temps qu'elle avait été portée sur le róle, soit après.

En esset, il n'est pas exact de dire qu'une fois la cause portée sur le role et mise en état d'etre jugée, il n'y a plus de poursuite à faire de la part de l'une ni de l'autre des parties pour en obtenir le jugement. Cela était bon dans l'ancien ordre judiciaire, pour les causes pendantes devant les cours souveraines, parcequ'il n'était pas permis de faire aux magistrats de ces cours des requisitions tendant à les obliger de statuer sur les affaires dont ils étaient saisis. Mais alors même, et par la raison contraire, il en était autrement dans

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