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»ral Chauvelin, arrêt qui juge que la sentence » par défaut non-signifiée, perpétuait jusqu'à » trente ans l'action de recours du maitre » contre son valet, pour un cheval estropié »et mort par la faute du valet. Note de Me. Maillard », connu par un commen. taire sur la coutume d'Artois.

Il est vrai qu'à cet arrêt et à celui de février 1697, on peut en opposer deux postérieurs de la même cour, qui, s'il en fallait croire les auteurs qui les citent, auraient jugé tout le contraire.

Voici ce qu'on lit dans la Jurisprudence civile de Rousseaud de Lacombe, au mot Péremption, no. 6: « arrêt par défaut de com» paroir, non-signifié, est sujet à Péremp» tion: arrêt du........... juin 1731 ».

Et Auroux de Pommiers, dans ses additions au tome 1, de son commentaire sur la contume de Bourbonnais, dit « qu'il a été » décidé, par un arrêt du mois d'août 1730, » qu'une sentence par défaut non signifiée » tombait en Peremption

Mais quel fond peut-on faire sur des arrêts dont ces auteurs ne parlent que par ouï-dire, et dont ils ne connaissent eux-mêmes ni l'espèce ni la date précise (1).

Et d'ailleurs quand nous admettrions que ces deux arrêts auraient change la jurispru. dence que le parlement de Paris avait établie par les deux précédens, quand on pourrait en conclure que cette cour avait fini par tenir pour maxime qu'un jugement par defaut non signifié devait être réputé non existant, serait ce une raison pour que cette maxime dût aujourd'hui prévaloir? Non certaiement: et je l'ai déjà dit, ce qui le prouve d'une manière sans réplique, c'est qu'aujourd'hui on ne doute plus qu'un jugement par défaut nonsignifié ne puisse être valablement inscrit comme titre hypothécaire.

11°. Que signifient, dans l'art. 397, les mots : Ce délai sera augmenté de six mois, dans tous les cas où il y aura lieu à demande en reprise d'instance ou constitution de nouvel avoué? En résulte-t-il que, si, avant que la Péremption d'instance ait été demandée à la suite d'une discontinuation de procédure pen. dant trois ans, il survient un événement qui nécessite une reprise d'instance ou une cons

(1) On dira peut-être que des deux arrêts précédens, il y en a un dont d'Héricourt n'indique pas non plus la date précise, puisqu'il ne le cite que sous celle du mois de février 1697. Mais du moins ce n'est

pas sur la parole d'autrui qu'il le cite, non plus que le suivant: on m'a communiqué sur ce sujet deux arrets du parlement de Paris; on se rappelle que ce sont ses propres expressions.

titution de nouvel avoué, la partie contre laquelle la demande en est faite, peut, en reprenant l'instance ou en constituant un nouvel avoué dans les six mois de cet événement, empêcher que la Péremption ne soit pro

noncée ?

Cette question s'est présentée dans une espèce où était en même temps agitée 'une autre sur laquelle je reviendrai ci-après, no. vIII.30.

Le 10 nivôse an 9, le sieur Roussilhe appelle d'un jugement rendu le 27 frimaire précédent par le tribunal civil du département du Cantal, en faveur de la veuve David. Le 29 du même mois, la veuve David anticipe cet appel.et fait assigner le sieur Roussilhe devant le tribunal auquel la connaissance en est dévolue.

Point de poursuites ultérieures pendant trois ans et au delà. Les deux parties meurent, savoir, la veuve David le 4 vendémiaire an 11, et le sieur Roussilhe le 2 février 1807.

Le 7 du même mois de février 1807, les héritiers de la veuve David forment contre ceux du sieur Roussilhe, devant la cour d'appel de Riom, une demande en Péremption.

Les héritiers Roussilhe répondent que la Péremption a été interrompue, et par le décès des parties, et par les changemens survenus dans les tribunaux.

Les héritiers David répliquent, au premier moyen, que la Péremption était acquise avant le décès des deux parties; au second, que, par les arrêts de la cour de cassation rappelés ci-devant, §. 1, no. 21, il a été jugé que la Péremption d'instance avait couru, nonobstant la substitution des ci-devant tribunaux civils de département aux ci-devant tribunaux de district.

Par arrêt du 13 mai 1807,

« Attendu que la demande en Péremption est une demande nouvelle exercée sous l'empire du Code de procédure, et qui doit être régie par ce Code; que l'art. 397 de cette loi, parlant, dans sa première disposition, du terme de la Péremption déjà révolu, ajoute dans la deuxième, un nouveau délai de grace dans le cas où il y a lieu à reprise d'instance, et veut qu'en ce cas, on ajoute aux trois ans expirés, six mois de plus, afin que la partie intéressée à prévenir la demande en Peremp tion, puisse le faire en demandant la reprise; qu'en effet, la Péremption n'avait lieu dans les temps anciens, comme par le nouveau Code, qu'autant que la demande en eût été formée avant tout acte ou tout événement qui l'interrompait ou la faisait cesser;

» Que, dans l'espèce, il y avait lieu à reprise d'instance ; qu'il ne s'est point écoulé six mois

entre le décès de Roussilhe et la demande en Péremption; et, qu'ainsi, c'est le cas d'accorder le délai de grace accordé par le Code de procédure;

» La cour (d'appel de Riom) déclare les héritiers David non-recevables dans leur demande en Péremption ».

Ceux-ci se pourvoient en cassation, et proposent deux moyens :

a 10. Suivant l'art. 1041 du Code de procé dure (disent-ils), il n'y a que les proces in tentes depuis le 1er. janvier 1807, qui doivent être instruits conformément aux dispositions de ce Code; et il résulte de l'avis du conseil d'état, du 6 janvier 1807, que, dans le nombre de ces procès, on doit comprendre les appels interjetes depuis cette époque. Or, le procés dont il s'agit, a été intenté, et l'appel même du jugement de première instance a été interjeté bien antérieurement au er, jan vier 1807. Le Code de procédure n'était donc pas applicable à l'espèce. La cour d'appel n'a pu, pour la faire rentrer dans l'application de ce Code, assimiler la demande en Péremp tion d'instance, à une action nouvelle et prin cipale, ou à un appel; car elle en diffère essentiellement. La Péremption d'instance est toujours accessoire, incidente à un procès préexistant; elle n'est qu'une exception à une action principale ou à un appel. Aussi, aux termes de l'art. 400 du Code de procédure, doit-elle être demandée par requête d'avoué à avoué. Et pourquoi? Quel est le motif de cette disposition? On a pensé (dit Pigeau, dans son Traité de la procédure civile, page 450) que, tant que la Péremption n'était pas prononcée, il était incertain qu'elle existát; qu'ainsi, les parties devaient procéder comme si l'instance subsistait; que d'ailleurs, celui dont on soutenait la procédure éteinte, pouvait poursuivre sur sa procédure; que la Péremption étant une exception contre la poursuite, elle devait être proposée dans la même instance ; et d'après ces motifs, on a décidé, par l'art. 400, que la Péremption serait demandée par requête d'avoué à avoué. Les appels interjetes depuis le 1er. janvier 1807, sont bien soumis aux règles établies par le Code de procedure; mais pourquoi encore? Parcequ'ils sont le principe d'une nouvelle instance, ou, suivant les expressions du conseil d'état, d'une nouvelle procédure, qui s'introduit à la suite d'une précédente. Mais dans tous les autres cas, comme l'a déclaré le conseil d'état, les affaires entamées avant le 1er. janvier 1807, doivent continuer d'être instruites conformément aux réglemens antérieurs au Code de procedure.

Ainsi, les demandes en reprise d'instance, celles en intervention, ou celles en Péremption, toutes les demandes incidentes, quoique formées depuis le 1er. janvier 1807, doivent être instruites suivant les anciens réglemens, lorsqu'elles se rattachent à d'anciennes instances ou procedures. Au surplus, dans la supposi tion même où le Code de procédure aurait pu régir la demande en Péremption, formée par les héritiers David, ce ne pouvait être qu'en la forme et relativement à l'instruction. Ĉette demande au fond ne pouvait être appréciée que d'après la législation qui existait à l'époque où la Peremption s'était accomplie. En effet, l'art. 1041 de ce Code et l'avis interprétatif du conseil d'état, déclarent seulement que les procès intentés depuis le 1er. janvier 1807, seront instruits conformément aux dispositions de ce même Code. Donc si le Code de procédure avait pu être appliqué à la demande en Péremption d'instance formée par les héri tiers David, ce n'eût été que sous le rapport de l'instruction. La Péremption d'instance en elle même est un droit; ce droit était acquis, dans l'espèce, avant la mise en activité du Code de procédure, et par conséquent il n'était pas permis d'y porter atteinte, en lui appliquant ce Code, avec d'autant plus de raison, que la Peremption d'instance est une espèce de prescription, et que le Code civil veut, art. 2281, que toutes les prescriptions commencées avant sa publication, soient réglees conformément aux anciennes lois. La cour d'appel de Riom n'a donc pu puiser dans le Code de procedure, sans donner à ce Code un effet rétroactif, la raison de déclarer nonrecevable la demande en Péremption d'instance.

» 20. La Péremption d'instance était pleinement acquise, soit d'après les anciennes lois, soit d'après le Code de procédure lui-même. Il y a lieu à la Peremption d'instance, par discontinuation de poursuites pendant trois ans. Telle est la disposition de l'art. 13 de l'ordon nance de 1563, confirmée par l'art. 397 du Code de procédure.

Mais la Péremption est-elle arrêtée par le décès d'une des parties? Dans ce cas, le Code accorde une prorogation de délai, et l'ancienne jurisprudence déclarait la Péremption d'instance interrompue; mais cette jurisprudence n'attribuait au décès de l'une des parties, l'effet interruptif de la Péremption, que lorsqu'il était arrivé dans le cours des trois ans. C'est ce qu'attestent tous les auteurs, notamment Ferrière, dans son Dictionnaire de droit, au mot Péremption, Rodier, sur l'art. 15 du tit. 14 de l'ordonnance. Denisart, Rousseaud de

Lacombe et Pothier. Le décès d'une partie toujours subsiste, et qui est seulement proro.

dans le cours de trois ans (dit Denisart), interrompt la Peremption. Rousseaud de Lacombe dit aussi que le décès d'une des parties empêche la Péremption, quand il arrive dans les trois ans. Et suivant Pothier, dans son Traité de la procédure civile, chap. 4, art. 1, sect. 4, La mort des parties, ou méme de l'une des parties, ou de leur procureur, qui arrive dans les trois ans, empéche la Péremption. Ainsi, avant le Code de procedure, le décès d'une des parties n'empêchait la Péremption d'instance que lorsqu'il arrivait avant l'expiration des trois ans nécessaires pour l'accomplir. S il arrivait après, il etait permis d'assigner l'héritier de la partie décédée pour voir declarer l'instance périmée. » C'est ce qu'enseigne Jousse, sur l'art. 5 du tit. 27 de l'ordonnance de 1667 : Lorsque (dit-il) le demandeur ou appelant, depuis la Péremption acquise par le laps de trois ans, est décédé, le défendeur ou intimé doit assigner les héritiers de ce demandeur ou appelant, pour voir dire que l'instance ou appel demeurera péri, faute de poursuite pendant trois ans.

» La cour d'appel de Riom a donc erré, en posant en principe que la Peremption d'instance n'avait lieu qu'autant que la demande en était formée avant tout acte ou tout événement qui l'interrompait, ou la faisait cesser. Mais, comme cette cour paraît l'avoir pensé, le Code de procédure a-t-il établi cette règle? Non. Ce Code n'attribue point au décès d'une des parties l'effet d'interrompre la Péremption: seulement, suivant le § 2 de l'art. 397, le délai de trois ans doit être augmenté de six mois dans tous les cas où il y a lieu à demande en reprise d'instance ou constitution de nouvel avoué. Mais cette disposition ne peut être entendue dans le sens que lui a prêté la cour d'appel de Riom. Cette cour a supposé que, par-là, le Code de procédure attribuait au décès d'une des parties, l'effet de couvrir la Péremption acquise, mais non encore demandée; mais il n'attribue cet effet qu'aux actes valables faits par l'une ou l'autre des parties avant la demande en Peremption : et il déclare seulement que le dólai de trois ans, nécessaire pour l'accomplissement de la Péremption, sera augmenté de six mois, dans tous les cas où il y aura lieu à demande en reprise d'instance, ou constitution de nouvel avoué. Les six mois d'augmen tation doivent donc être ajoutés aux trois ans; les deux delais doivent être consécutifs, se lier entre eux, se fondre en un seul délai de trois ans et demi. C'est le delai ordinaire qui TOME XXIII.

gé, lorsque l'instance doit être reprise, ou un nouvel avoué constitué. Donc le décès de l'une des parties arrivé après les trois ans ré volus, ne peut, sous l'empire même du Code de procedure, être un obstacle à la Peremption ; elle peut être demandée après le décès, tant qu'elle n'est pas couverte par des actes valables faits par l'une ou l'autre des parties. Et c'est ainsi que M. Pigeau a interprété le §. 2 de l'art. 397 du Code de procé dure: Si les trois ans (dit il) s'écoulent avant qu'il y ait lieu à reprise d'instance, ou cons titution de nouvel avoué, la Péremption est acquise, parceque le temps fixé par la loi, se trouve écoulé; ainsi elle peut être deman. dée, quand même, dans les six mois suiil y aurait eu lieu à reprise d'instance, ou à constitution de nouvel avoué. Donc,

vans,

pour qu'il y ait lieu, dans les cas prévus, à la prorogation de six mois, il faut que ces cas soient arrivés pendant le cours de la Péremption, c'est-à-dire, dans les trois ans nécessaires pour l'accomplir. Donc la cour d'appel de Riom a fait une fausse application du S. 2 de l'art. 397 du Code de procédure, et violé le §. rer. de cet article, et l'art. 15 de l'ordonnance de 1563.

Tels étaient les deux moyens des héritiers David. J'avoue, sans m'expliquer quant à présent, sur le premier, que le deuxième m'au rait paru décisif. Cependant il est intervenu, le 5 janvier 1808, au rapport de M. Cassaigne et sur les conclusions de M. Lecoutour, un arrêt par lequel,

» Attcudu 10. que les procès intentés sous l'empire du Code de procédure civile, doivent se régir suivant ce Code; et qu'une demande en Péremption est une nouvelle pro. cédure introduite à la suite d'une précédente, puisqu'il n'y a nec eadem res, nec eadem causa petendi ;

» 20. Que, suivant l'usage attesté par l'ar· rêt attaqué, la Péremption n'était acquise, sous l'ancien droit, qu'autant qu'elle était de mandée avant d'avoir été couverte par quelque acte ou événement; qu'il en est de même sous le nouveau Code, d'après les art. 397 et 399;

» 30. Que, suivant les mêmes articles, le délai de la prescription est prorogé de six mois dans tous les cas où il y a lieu à reprise d'instance ou constitution de nouvel avoue; » Attendu enfin que, dans l'espèce, la demande en Peremption a ete faite sous l'empire du nouveau Code, qu'elle ne l'a été qu'apres le décès de Roussilhe, et que les beritiers de celui-ci ont repris l'instance dans les six mois du décès;

22

» Qu'ainsi, en rejetant la demande en Pé remption, l'arrêt s'est justement conformé aux lois et aux principes de la matière;

» La cour rejette le pourvoi.... ».

Cet arrêt est-il, par rapport à la question qui nous occupe ici, motivé de manière à justifier suffisamment celui qu'il confirme, du reproche d'avoir violé l'art. 397 du Code de procédure civile ? J'ose penser que non.

que

Que veut cet article? Deux choses la Péremption soit acquise au bout des trois années qui suivront immédiatement le dernier acte de poursuite, et qu'à ces trois années il soit ajouté, en cas d'événement donnant lieu à une demande en reprise d'instance ou à une constitution de nouvel avoué, un délai supplémentaire de six mois. Comment, dès lors, peut-on dire que les héritiers d'une partie décédée après les trois années révo lues, doivent jouir du délai supplémentaire de six mois, comme ils auraient dû en jouir,

si elle était décédée dans le cours des trois années? Il faudrait pour cela que l'art. 397 voulût que le délai supplémentaire fût ajouté, pour le cas qu'il prévoit, à l'espace de temps quelconque qui se serait écoulé après le dernier acte de procédure. Mais telle n'est pas, à beaucoup près, sa disposition. Ce n'est qu'aux trois années qu'il ordonne l'addition du delai supplémentaire ; et par conséquent, ou l'évidence n'est qu'un mot vide de sens, ou il est de toute evidence qu'il n'accorde le délai supplémentaire que dans le cas où c'est pendant les trois années que survient l'événement d'après lequel la procedure ne peut plus être continuée, sans qu'au préalable il y ait eu reprise d'instance ou constitution de nouvel avoué.

Mais, dit l'arrêt de la cour de cassation, il était d'usage, dans l'ancien droit, et cela est attesté en fait par la cour d'appel de Riom, dont la décision sur ce point échappe à toute censure, que la Péremption n'était acquise qu'autant qu'elle avait été demandée avant d'avoir été couverte par quelque acte ou événement, et il en est de même sous le nouveau Code, d'après les art. 397 et 399.

D'abord, la cour d'appel de Riom était tombée dans une grande erreur, en avançant que, dans l'ancien droit, le décès d'une par tie avait l'effet, non seulement d'interrompre la Péremption, lorsqu'il arrivait avant que le droit de la demander fût acquis par trois années de discontinuation de poursuites, mais encore de la faire cesser, lorsqu'il arrivait après l'expiration des trois années. Le contraire était clairement prouvé par les au

torités citées par les demandeurs en cassation, et que renforçait encore l'arrêt du parlement de Paris, rapporté ci-après, no. 5-20.

Ensuite, qu'importait que, sur ce point, l'erreur de la cour d'appel de Riom fut, de la part de la cour suprême, à l'abri de toute censure? C'était bien une raison pour laisser cette erreur de côté; mais ce n'en était pas une pour en tirer un argument en faveur de l'interprétation que cette cour avait donnée aux art. 397 et 399 du nouveau Code; et cela est si vrai que la cour de cassation elle-même avait commence par établir que, pour appré cier la demande formée sous le Code de procédure civile, en péremption d'une instance commencée auparavant, il n'y avait pas d'autre loi que ce Code à consulter.

Enfin, où a-t-on pris que le prétendu usage erronément attesté par la cour d'appel de Riom, est consacré et érigé en loi par les art. 397 et 399 du Code de procédure civile ?

Que porte l'art. 399? Rien autre chose si cé n'est que la péremption est couverte par les actes valables faits par l'une des parties avant qu'elle soit demandée. Le décès de l'une des parties ou de son avoué, n'est certainement pas un acte dans le sens de cet article. Que les héritiers d'une partie décédée après les trois ans, puissent, d'après cet article, couvrir la Péremption avant qu'elle soit demandée, et qu'ils n'aient besoin pour cela que d'un acte valable de poursuite, rien de plus juste. Mais inférer de cet article que la demande en Péremption formée contre eux leur part, est prématurée, s'il ne s'est pas avant un acte quelconque de poursuite de encore écoulé six mois depuis le décès de leur auteur, c'est lire dans la loi ce qui n'y est pas, c'est faire dire au legislateur ce à quoi il n'a ni pensé ni pu penser dans cet article.

Et quant à l'art. 397, tout ce qu'on y voit, tout ce qu'il est possible d'y voir, c'est que, lorsqu'une partie décède dans les trois ans, la Péremption ne peut être demandée contre ses héritiers, qu'après qu'il s'est écoulé, outre les trois ans, un delai supplémentaire de six mois. Pressez, retournez cet article tant qu'il vous plaira, vous n'y trouverez pas autre chose; et ce n'est qu'en y ajoutant ce qu'il ne dit pas, que vous parviendrez à en tirer la conséquence que le droit de demander la Péremption une fois acquis par le laps de trois années avant le décès d'une partie, ne peut pas être exercé dans les six mois suivans, contre les héritiers qui la représentent, et qui ne l'ont pas neutralisée par des diligences personnelles.

Cependant la question s'étant reproduite

en 1812, devant la cour d'appel de Trèves, elle y a été de nouveau jugée de la même manière qu'elle l'avait été en 1807 et 1808, par la cour d'appel de Riom et par la cour suprême.

Dans un procès pendant entre les sieurs Slander et consorts, appelans, et les héritiers Schorrenberg, intimés, il y avait eu, de part et d'autre, interruption totale de pour suites pendant plus de cinq ans, lorsque le 1er janvier 1812, l'avoué des seconds est venu. à mourir.

Le 1er, février suivant, et par conséquent avant qu'il se fut écoulé six mois depuis son deces, le nouvel avoué des héritiers Schorrenberg a formé, contre les sieurs Slander et consorts, une demande en Péremption de leur appel.

Les sieurs Slander et consorts out répondu que l'avoué de leurs adversaires était mort avant que cette demande fut formée, et que cet evenement avait nécessité une prorogation de six mois.

Les heritiers Schorrenberg ont répliqué que leur avoué n'était mort qu'apres que la Péremption avait été acquise, et que, deslors, il n'y avait pas eu lieu au délai supplémentaire de six mois ; que d'ailleurs ce delai n'etait accorde qu'a la partie qui avait perdu son avoué, et que les sieurs Slander et consorts avaient toujours conservé le leur (1).

Par arrêt du 17 juin 1812, la demande en Péremption a été rejetée,

« Attendu que, d'après l'art. 399 du Code de procédure, la Péremption n'a pas lieu de droit, de même qu'elle n'opérait pas de plein droit dans l'ancienne legislation ; et que, suivant l'art. 397 précédent, le délai general doit être augmenté de six mois dans tous les cas où il y a lieu à demande en reprise d'instance ou constitution de nouvel avoué, sans que la loi fasse une distinction entre le demandeur ou le defendeur en Péremption;

» Qu'il résulte de la combinaison de ces deux articles, que le demandeur au principal ou l'appelant doit pouvoir couvrir la Peremption jusqu'au moment où elle est demandée contre lui, encore que les trois ans soient révolus; et, par une conséquence nécessaire de ce principe incontestable, que, si, avant qu'elle ait été formée, il a existé, du côté de la partie adverse, un obstacle prévu par l'art. 317 du Code de procedure, qui a empèché l'appelant de la prevenir par un acte valable de procédure, les six mois d'augmentation

(1) Ce moyen subsidiaire présentait une autre question qui sera traitéc dans un instant.

du delai, accordé à raison de cet obstacle, doivent lui profiter et être comptés depuis le jour de l'événement qui a nécessité la reprise d'instance ou la constitution d'un nouvel avoué, puisqu'en n'accordant l'augmentation du délai qu'autant que l'événement serait arrivé dans les trois années, ce serait implicitement admettre que la Péremption d'instance opère de plein droit;

» D'où il suit que, dans l'espèce dont il s'agit, les appelans ayant été dans l'impossibilité, depuis le 1er. janvier jusqu'au 1er février suivant, de prévenir la demande en Peremption, puisque les intimés n'avaient point d'avoué, et le délai de six mois pour constituer nouvel avoué, n'étant pas encore expiré, il n'y aurait pas encore sous ce dernier rapport, lieu de déclarer l'instance périmee (1) ».

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Cet arrêt est, comme l'on voit, motivé un peu autrement que le sont celui de la cour d'appel de Riom, du 17 mai 1807, et celui de la cour de cassation, du 6 janvier 1808; mais en est il mieux d'accord avec la loi? Je ne le crois pas.

Il se fonde sur le principe écrit dans l'art. 399, que la Péremption n'a pas lieu de droit, de mème qu'elle n'opérait pas de plein droit dans l'ancienne législation.

Mais qu'a de commun ce principe avec la question de savoir si, pour qu'il y ait lieu au delai supplémentaire de six mois, il faut que l'événement donnant lieu à la reprise d'instance ou à la constitution d'un nouvel avoué, soit survenu avant l'expiration du délai de trois ans ? Sous l'ancienne jurisprudence, et dans les pays où la Péremption n'était pas plus de droit qu'elle ne l'est aujourd'hui, le décès d'une partie ou de son procureur, lorsqu'il survenait après les trois années révolues, empêchait-il que la Péremption ne pút être demandée immédiatement, soit contre les héritiers de cette partie, soit contre cette partie elle-même, et avaient-ils, pour s'en préserver, un autre moyen que de reprendre l'instance ou de constituer un nouveau procureur avant qu'on les assignât pour la voir déclarer acquise ? On vient de voir que non. Comment donc le décès d'une partie ou de son avoue produirait-il, à cet égard, en faveur de cette partie ou de ses héritiers, un effet qu'il n'opérait pas sous l'ancienne jurisprudence? Quel changement a-t-il été fait, en cette matière, à l'ancienne jurisprudence par l'art. 397 du Code de procédure civile ? Point

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 13., partie 2, page 194.

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