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cette doctrine, serait de dire que la Péremp tion est une espèce de prescription, et que, d'après l'art. 2281 du Code civil, les prescriptions commencées avant la publication du titre dont il fait partie, doivent être réglées conformément aux anciennes lois.

Mais cette objection s'évanouirait d'ellemême devant le principe établi au mot Prescription, sect. 1, §. 3, no. 8, que les choses déclarées imprescriptibles par les anciennes lois et prescriptibles par les nouvelles, prescrivent par l'espace de temps que celles-ci déterminent, pourvu qu'il se soit écoulé de puis leur publication.

se

En est-il de même des instances commen

cées avant le Code de procédure civile dans les tribunaux qui, sans admettre la Péremption de trois ans, admettaient la prescription d'instance par le laps de trente ans sans pour

suite ?

Un arrêt de la cour d'appel de Colmar du 5 mars 1811, a jugé que oui,

« Attendu qu'une demande en Péremption est nécessairement nouvelle et principale; que celle dont s'agit dans l'espèce, a été intentée sous le régime du Code de procédure; qu'ainsi, elle est dans le cas d'être jugée d'après cette loi, comme cela résulte de l'art. 1041. Or, le dernier acte de procédure étant du 10 juin 1806, et la demande ayant été formée les 29 et 31 décembre 1810, il s'est écoulé passé quatre ans et demi sans poursuite; et dès lors, suivant l'art. 397 du Code cité, l'instance se trouve éteinte ; et lorsque les trois ans, dont parle cet article, pourraient n'avoir couru qu'à partir du 1er janvier 1807, époque de la mise en activité dudit Code, encore la Péremption se trouverait-elle acquise en faveur des demandeurs, puisque la demande est postérieure de près de quatre ans ;

>> Attendu qu'il est indifférent, dans l'espèce, que, dans la ci-devant Alsace, ou n'ait pas connu la Péremption; le défendeur ne saurait en tirer avantage pour soutenir,comme il l'a fait, que le procès qu'on prétend périmé, ayant été intenté long-temps avant le Code, la Péremption, qui est un droit nouveau pour ce pays, ne saurait avoir lieu; mais c'est une erreur, puisque, dès que la demande en Pé. remption est principale, comme on l'a déjà établi, et qu'elle a été formée sous l'empire du Code, elle n'a pu être jugée que conformé ment à ce Code, sans avoir égard aux usages ni à la législation antérieure, lesquels se trouvent abrogés par l'art. 1041 (1) ».

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 14, partie 2, page 349.

En est-il de même de l'instance commeneće avant le Code de procédure civile, dans les tribunaux qui, en admettant la Péremption d'instance dans tous les cas où rien n'en in terrompait le cours, n'admettaient que la prescription trentenaire, soit lorsque l'une des parties venait à décéder, soit lorsque le décès de l'une des parties n'avait pas été suivi d'une demande en reprise d'instance, soit lorsqu'il etait survenu un jugement interlocu

toire ?

Il y a pour l'afirmative cinq arrêts de la cour de cassation, tous fondés sur le principe qu'en ce qui concerne le fond du droit, comme en ce qui concerne la forme, la demande en Peremption est une demande nouvelle et indépendante de l'instance périmée.

Le premier, du 5 janvier 1808, est rapporté ci-dessus, no. 2-11°. Il juge qu'encore que, sous l'ancienne jurisprudence, le décès de l'une des parties survenu après la discontinuation de poursuite pendant trois ans, ne couvrit pas la Péremption qui se trouvait encourue à l'époque de cet événement, et n'empêchât pas que la partie à laquelle était acquis le droit de la demander, ne fit assigner les héritiers du défunt pour la voir prononcer, il en est autrement aujourd'hui dans les instances commencées devant les anciens tribunaux, lorsqu'après une discontinuation triennale de poursuites qui remontent à un temps antérieur au Code de procedure civile, l'une des parties vient à décéder postérieurement à la mise en activité de ce Code, et qu'il ne s'est pas encore écoulé six mois depuis son dé ccs. Îl décide donc que le second paragraphe de l'art. 397 fait cesser le droit que l'autre partie avait eu précédemment de demander la Peremption; et il le décide, « attendu » que les procès intentes sous l'empire du » Code de procédure civile, doivent se >> régir suivant ce Code, et qu'une demande » en Péremption est une nouvelle procédure introduite à la suite d'une précédente, puisqu'il n'y a nec eadem res, nec eadem causa "petendi ».

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Le second arrêt, du 19 juillet 1810, est également rapporté ci-dessus, no. 2-12o. En jugeant (contre ce qu'a reconnu depuis la cour de cassation, par un autre arrêt du 2 avril 1823, rappelé au même endroit ) que le delai supplémentaire de six mois accordé par l'art. 397 du Code de procédure, dans les cas où il y a lieu à demande en reprise d'instance, n'est pas commun aux deux parties, il dé cide en même temps que l'on ne doit là-dessus s'attacher qu'à cet article, bien que, dans l'espèce, il fut question d'une instance com

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Le troisième arrêt, du 19 août 1816, est pareillement rapporté au no. 2-130.

Dans cette espece, les héritiers du sieur Payen employaient contre l'arrêt de la cour de Paris qui avait admis la demande en Péremption des heritiers du sieur Sanze, un moyen de cassation qui consistait à dire « que l'instance > principale ayant été introduite avant la pu»blication du Code de procedure, c'était d'a>près les lois anciennes qu'on devait décider >si la Peremption était acquise; que, dans » l'espèce actuelle, le sieur Sanzé étant mort » depuis la discontinuation des poursuites, et » l'avoue des héritiers Payen ayant cessé ses >> fonctions depuis la même époque, la Pó>> remption d'instance, d'après les ordonnan. ces de 1510 et 1553, avait été interrompue » et n'aurait pu reprendre son cours que dans » le cas où l'instance eût été reprise contre les » héritiers Sanzé, et que, de leur coté, les » heritiers Payen eussent été assignés en cons titution de nouvel avoué ».

Mais ce moyen a été rejeté, « attendu » que la demande en Peremption d'instance » est de sa nature une demande nouvelle, » indépendante de l'instance périmee, et as sujélie par conséquent a la forme de procéder en vigueur à l'époque où cette de >> mande est intentée; qu'ainsi, la demande en >> Peremption des héritiers Sanzé l'ayant ete » depuis la publication du Code de procédu »re, c'est avec raison que l'arrêt attaqué iui appliqué les dispositions de ce même » Code ».

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Le quatrième arrêt est celui du 15 juillet 1818, dont l'espèce est retracée ci-dessus, u. 4-9o. Pour repousser la demande en Peremption formée contre lui par le sieur Marre, le sieur Cadena soutenait en première ligne que l'instance dont il s'agissait, ne pouvait pas se perimer, même sous le Code de produre civile, par une discontinuation de poursuite pendant trois ans, parcequ'elle avait commencé en 1793, époque où la ci-devant province de Roussillon était gouvernée par les lois romaines, suivant lesquelles il n'y avait que la prescription de quarante ans qui pút

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éteindre les actions portées en justice. Mais par l'arrêt cité, celui de la cour royale de Montpellier qui avait déclaré la Péremption acquise au sieur Marre, a été maintenu, « attendu que la demande en Péremption » est une action nouvelle, susceptible d'être réglée par les lois existantes au moment de » son introduction: et qu'il n'a en conséquence » été commis aucune violation de l'art. 1041 » du Code de procédure civile, en appliquant » les dispositions de ce Code à une demande »en Peremption formée le 20 avril 1816 ». Le cinquième arrêt a été rendu dans l'espèce suivante.

Au mois d'août 1786, la commune d'Échenevex fait assigner celle de Chevry devant la maitrise des eaux et forêts de Belley, pour se faire reconnaître propriétaire d'un certain canton de bois.

En 1789, sentence qui renvoie la commune de Chevry de cette demande, et la maintient dans la proprieté en litige.

Le 2 août de la même année, la commune d'Échenevex se rend appelante de cette sentence; et son appel, après avoir passé successivement par le parlement de Dijon, le tribunal de district de Saint-Claude et des arbitres forces, est porté devant le tribunal civil du département du Jura.

Là, il intervient, le 20 février 1799, un jugement qui, avant faire droit, ordonne une descente sur les lieux dont un plan sera levé par des experts, et admet la commune d'Échenevex à prouver que, de temps immémo· rial, elle a joui, concurremment avec celle de Chevry, du canton de bois contentieux.

Vingt ans s'écoulent sans que ce jugement reçoive de part ni d'autre aucune espèce d'exé. cution. En conséquence, le 27 mars 1819, la commune de Chevry fait assigner celle d'Échenevex devant la cour royale de Lyon, pour voir dire que son appel de la sentence de 1789 est perimé par la discontinuation de poursuite pendant plus de trois ans depuis la mise en activité du Code de procédure civile.

La commune d'Échenevex répond que le Code de procédure est inapplicable à une instance d'appel commencée en 1789; que cette instance ne peut être régie que par les lois et les usages du temps où elle a été intentée ; que, suivant la jurisprudence du parlement de Dijon, conforme en cela à l'arrêt de réglement du parlement de Paris, du 28 mars 1692, tout jugement interlocutoire qui intervenait dans une instance, en empêchait la Péremption (1); qu'ainsi, le jugement interlocutoire

(1) 7. ci-devant, S. 1, u. 11.

du 20 février 1789 a prorogé jusqu'à trente ans l'instance d'appel dont il s'agit.

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Le 4 août 1820, arrêt qui déclare l'instance périmée, « attendu qu'en principe, une demande en Péremption d'instance est, par sa » nature, une action principale, laquelle, » par conséquent, doit être régie par la loi en » vigueur à l'époque où on l'intente; qu'ainsi, » ce sont les dispositions du Code de procé» dure qu'on doit appliquer à la demande en Peremption dont il s'agit, quoiqu'elle con» cerne un ancien procès commencé sous une législation anterieure ; que, d'après l'art. » 397 du Code de procédure, la Péremption s'opere par la discontinuation de poursuite » pendant trois ans; et que d'après l'art. 401, » cette Peremption emporte l'extinction de » la procédure; que des dispositions aussi ab» solues sont incompatibles avec l'exception » admise par certaines cours, et notamment » par l'arrêt du parlement de Paris, du 28 » mars 1692, qui disait que la Péremption » n'aurait pas lieu lorsqu'il serait intervenu » quelque arrêt interlocutoire; que le juge>> ment du 20 février 1789 ayant laissé indecis » le fond de l'instance d'appel dont il s'agis» sait, n'a pu faire obstacle à ce que l'instance » fut tombée en Péremption depuis la promul >gation du Code de procédure, par discon>> tiuuation de poursuites pendant le temps » prescrit ».

La commune d'Échenevex se pourvoit en cassation contre cet arrêt, et l'attaque comme violant l'art. 2 du Code civil par une fausse application de l'art. 397 du Code de procé dure.

Mais par arrêt contradictoire du 25 novembre 1823, au rapport de M. Rupérou, et sur les conclusions de M. l'avocat général Cabier,

« Attendu que la demande en Péremption d'instance est, par sa nature, une demande principale et nouvelle, qui doit être instruite et jugée d'après les lois en vigueur à l'époque· où elle a été formée, encore que le procès sur le fond ait été intenté sous l'empire d'une législation antérieure ;

» Attendu que, d'après l'art. 397 du Code de procédure, conforme aux dispositions des anciennes ordonnances, toute instance est éteinte par cessation de poursuites pendant trois ans; que la généralité de ces expressions comprend evidemment même le cas où il est intervenu un jugement, soit préparatoire, soit interlocutoire, en appel, comme en première instance, lorsqu'il s'est écoulé postérieurement à ce jugement, un délai de trois ans sans poursuites

» La cour (section civile) rejette le pour. voi... (1) ».

Voilà une série d'arrêts bien clairs, bien positifs, bien uniformes ; mais il s'elève contre la jurisprudence qu'ils établissent, une objection fort embarrassante, et qui sort de l'art. 2281 du Code civil, deja cité dans la discussion de la première branche de notre question.

En effet, si la Péremption est une espèce de prescription, comment ne pas lui appliquer cet article, et comment ne pas en conclure que le cours de la Péremption commencée sous les lois antérieures au Code de procedure civile, ne peut se compléter que d'apres ces lois ?

Ce ne serait pas répondre à notre objection que de dire qu'il n'y a rien de commun entre la prescription et la Peremption d'instance. D'abord, je prouverai à l'article Prescription, sect. 1, no. 3, que l'on doit considérer comme une véritable prescription toute expiration de délai dans lequel la loi veut que soient faits certains actes sous peine de dechéance ; et l'on sent bien qu'il importe peu, pour l'application de ce principe, que la dechéance resultant de l'expiration d'un delai, soit de droit, ou qu'elle ait besoin d être demandée.

En second lieu, Dunod, dans son Traité des Prescriptions, partie 2, chap. 11, dit, en propres termes, « que la Peremption d'ins » tance est une espèce de prescription ». On lit également dans les Décisions sommaires du palais, de la Peyrère, tome 2, page 449, édition de 1807: « la Péremption n'est autre >> chose qu'une prescription, qui s'oppose de » la part du défendeur ou de l'intime, lorsque >> le demandeur ou l'appelant est resté trois »ans sans faire aucune poursuite, à compter » du jour du dernier errement », et c'est aussi le langage de M. Carré, dans son Analyse raisonnée du Code de procédure civile, no. 1293.

Sans doute, parmi les règles de la prescription proprement dite, il en est plusieurs qui ne sont pas applicables à la Péremption d'instance; mais pourquoi ne le sont-elles pas ? Parceque la loi en excepte formellement celle-ci; et ce n'est assurement pas une raison pour ne pas appliquer à celle-ci les autres règles de la prescription.

Mais n'y a-t-il pas une autre réponse à faire à l'objection dont il s'agit? Ne peut-on pas dire que l'art. 2281 du Code civil n'a en vue

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 24, page 121.

que les prescriptions établies par le Code civil lui-même, et qu'il est inapplicable à celles qui sont etablies par le Code de procedure? Je sais bien qu'on peut opposer à cette these, et les deux arrêts de la cour de cassation, des 12 juin 1822 et 23 juillet 1823, qui ont jugé que la prescription de cinq ans à laquelle l'art. 189 du Code de commerce assujétit les billets à ordre, est inapplicable à ceux de ces billets qui ont été créés sous l'ordonnance de 1673, alors même qu'il s'est écoulé cinq années sans poursuite depuis la promulgation de ce Code; et les deux arrêts de la même cour, des 4 mars 1812 et 17 mars 1820, par lesquels il a eté jugé que l'appel des jugemens par defaut rendus à une époque où ils pouvaient être attaqués par cette voie dans les dix années qui en suivaient la signification à personne ou domicile, est encore recevable sous le Code de procedure, après les trois mois de la signification qui en a été faite à personne ou domicile depuis la mise en activité de ce Code (1).

Je sais bien qu'indépendamment des motifs des deux premiers de ces arrêts, ceux du troisième et du quatrième s'adaptent d'eux-mêmes et avec la plus grande justesse, à la Péremption; et que, s'il est vrai, comme ils l'énoncent, que la faculté d'appeler étant un droit acquis aux parties du moment où le jugement a été rendu, ce droit subsiste jusqu'à l'expiration des délais fixés par la loi pour son exercice; qu'il en est de ces dolais comme des prescriptions, et qu'il suit de là qu'il y a lieu d'appliquer à l'appel d'un jugement rendu sous les anciennes lois, les dispositions de l'art. 2281 du Code civil ; il ne peut pas n'être pas également vrai que la faculté de demander l'extinction d'une instance sujette à se perimer par un laps de temps quelconque, etant un droit acquis aux parties du moment où la poursuite de l'instance commence à être inter rompue, et la faculté de laisser dormir une instance pendant tout ce temps, étant un droit qui leur est acquis du moment où l'instance est formée, ces deux droits subsistent respectivement, l'un jusqu'à l'expiration des délais après lesquels la loi permet de l'exercer, l'autre jusqu'à l'expiration des délais dans lesquels la loi en circonscrit l'exercice; il ne peut pas n'être pas également vrai que c'est comme une prescription véritable que l'on doit considérer l'expiration de ces delais ; il ne peut pas n'être pas également vrai que, sur la ques tion de savoir si ces délais sont expires ou non, c'est à l'art. 2281 du Code civil que l'on doit s'en rapporter.

(1). l'article Preseription, sect. 1, §. 3, no. 13.

Et c'est effectivement ainsi que l'a jugé, par l'un de ses motifs, un arrêt de la cour d'appel de Trèves, du 17 juin 1812, dont j'ai parlé plus haut, no. 2-11o.

Dans l'espèce sur laquelle il a été rendu, les défendeurs à la demande en Péremption ne se faisaient qu'un moyen subsidiaire de la mort de l'avoue de leur adversaire survenue sous le Code de procedure civile; leur moyen principal consistait à dire que l'instance avait été commencée sous l'ancienne jurisprudence, l'un de leurs adversaires eux-mêmes que était décédé, non seulement avant que le Code de procédure fat publié, mais même avant qu'il se fut écoule deux mois depuis le dernier acte de poursuite.

et

L'arret cité a accueilli ce moyen en même temps que l'autre, et il a declare l'instance périmée,

la

<< Attendu qu'il conste, dans le fait, 1o. que les derniers actes de procédure dans la cause entre les parties, ont eu lieu le 29 août 1806; 2o. que Charles-Frederic de Schorrenburg, l'un des intimes, est decedé le 4 octobre de la même année; 3o. que l'avoue des intimes a notoirement fini ses fonctions le 1er janvier 1812; et que, jusqu'à ladite epoque, ргоcédure a ete discontinuée de part et d'autre ; 4°. que la demande en Peremption d'instance a été formée le 1er. février suivant par requête du nouvel avoué des intimés, sans qu'elle ent été précédée d'une reprise d'instance ou d'une constitution de nouvel avoué, ou qu'il eût eté fait d'autres actes de procédure dans l'intervalle du 1er janvier au 1er. février;

» Attendu, dans le droit, que, si une demande en Péremption d'instance est soumise à la loi en vigueur au moment de son introduction, cela doit s'entendre de la forme dans laquelle elle doit être intentée, instruite et jugée, et non du droit qui doit servir de base au jugement;

» Que la Péremption d'instance est une espèce de prescription;

>>Que, d'après le principe consacré par l'art. 2281 du Code civil, pour décider si la prescription est acquise ou non, on doit consulter la loi sous l'empire de laquelle elle a commencé à courir, et non celle sous laquelle elle

est demandée ;

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Qu'en conséquence, la Péremption d'instance demandée dans l'espèce, ayant commence à courir avant la mise en activite du nouveau Code de procedure, ce n'est point ce Code, mais la loi anterieure qu'on doit appliquer;

» Attendu qu'il existe sur cette matière, entre la loi ancienne et la nouvelle, cette différence que, dans l'ancienne legislation, la

mort de l'une ou de l'autre des parties au pro cès interrompait la Péremption jusqu'à ce qu'il y eût reprise d'instance, tandis que, d'après le Code actuel, cet événement produit seulement l'effet d'augmenter de six mois le délai requis pour l'acquérir;

» D'où il s'infere que, dans l'espèce, la Péremption ayant été interrompue par la mort de l'un des intimes, arrivée même dans les trois premières années de la discontinuation des poursuites, il y a d'autant moins lieu de la prononcer, qu'elle n'a point été précedee d'une reprise d'instance ».

Maintenant point de milieu: ou il faut dire que cet arrêt a bien jugé et que l'on doit abandonner la jurisprudence etablie par les cinq arrêts de la cour de cassation, des 5 juillet 1808, 19 juillet 1810, 19 aout 1816, 15 juillet 1818 et 25 novembre 1823; ou il faut reconnaitre qu'il a été mal jugé et fait une fausse application de l'art. 2281 du Code civil, par les quatre arrêts de la cour de cassation, des 4 mars 1812, 1er. mars 1820, 12 juin 1822 et 23 juillet 1823, relatifs au delai de l'appel des jugemens rendus dans l'ancien ordre judiciaire et à la prescription des billets à ordre crées sous l'ordonnance de 1673.

A laquelle de ces deux propositions, doit on s'en tenir? Je crois pouvoir demontrer par les propres termes de l'art. 2281 du Code civil, que c'est à la seconde ; et c'est ce que je ferai a l'article Prescription, sect. 1, §. 3, no. 13. Mais, des-lors, plus d'objection à opposer aux cinq arrêts qui décident que, pour juger si le délai de la Péremption est ou n'est pas ecoulé, il faut s'attacher, non à la loi du temps où l'instance a été introduite, mais à celle du temps où la Peremption est demandée.

S. III. De la Péremption dans les tribunaux de commerce et dans les justices de paix.

I. La question de savoir si la Péremption a lieu dans les tribunaux de commerce, est traitée dans mon Recueil de questions de droit, aux mots Tribunal de commerce, S. 10.

II. La loi du 14-26 octobre 1790, sur la manière de proceder dans les justices de paix, a introduit une espèce toute particulière de Péremption.

Voici ses termes, tit 7, art. 7, « Les parties >> seront tenues de mettre leur cause en état » d'être jugée definitivement, au plus tard, » dans le délai de quatre mois, à partir, du » jour de la notification de la citation, après » lequel l'instance sera périmée de droit, et » l'action eteinte; le jugement que le juge de » paix rendrait ensuite sur le fond, serait su

» jet à l'appel, même dans les matières où il » a droit de prononcer en dernier ressort, et » annulé par le tribunal de district ».

Ce texte a donné lieu à plusieurs questions, sur lesquelles il a été prononcé par des arrêts de la cour de cassation qu'il ne sera pas inutile de rapporter ici, d'autant qu'à l'exception de deux qui prononcent sur la se conde et la quatrième, ils sont tous applicables aux dispositions du Code de procedure civile qui remplacent aujourd'hui celles de la loi du 26 octobre 1790.

10. La disposition de ce texte était-elle applicable au cas où le juge de paix etait et se déclarait incompetent pour connaitre de l'action portée devant lui?

Voici un arrêt de la cour de cassation, du 25 frimaire an 9, qui juge que non.

« Le cit. Pluvis, proprietaire d'un domaine rural, composé de terres labourables, pres et bois, avait donné ce domaine à bail à ferme au cit. Landry.

»A l'expiration du bail,ce propriétaire avait articulé, contre le fermier, des faits de dégra. dations, notamment dans les bois, et avait cité le cit. Landry, le 22 brumaire an 2, devant le juge de paix, pour convenir d'experts, aux fins de constater les atteintes portées a sa propriété, et en faire estimation.

» Des recusations d'experts et de tiers experts, des remises de transport sur les lieux, avaient retardé l'opération jusqu'au mois de messidor an 2.

» Le tiers expert n'avait remis son procèsverbal aux parties que le 17 brumaire an 4.

» Le 26 fructidor de la mème année, le demandeur avait fait sommation au défendeur de comparaitre pour voir homologuer ce procès-verbal et se voir condamner à lui rembonrser les objets qui y étaient estimes une somme de 384 francs, et a lui payer 2726 francs pour dégats faits aux arbres.

» Le juge de paix avait ordonné le même jour que les pièces lui seraient remises pour en être delibere, et être le jugement prononce le 9 vendémiaire an 5.

» Le jugement a été prononcé le 9 vende

miaire.

» Il contient deux dispositions: par la premiere, il condamne au paiement de 354 francs; par la seconde, vu, que la demande de 2,726 francs, dérive d'une atteinte portée à la propriété, que, par là, elle n'est pas de la competence du juge de paix; celui-ci renvoie les parties à se pourvoir devant le juge competent.

» Les juges du tribunal civil du departement de Saone-et-Loire, prononçant sur l appel interjeté par le fermier, ont annule ce jugement, en lui appliquant les art. 5 et 7 du

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