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» Et attendu, en fait, que Dejean a comparu et plaidé par un agrée, son fondé de pouvoir, aux audiences des 26 novembre 1818 et 11 mars 1819, et que ce n'est qu'après avoir été débouté, à cette dernière audience, du déclinatoire par lui proposé, qu'il refusa de plaider au fond; d'où il résulte 10 que, si, par une seconde disposition du même jugement, une condamnation fut prononcée contre lui par défaut, ce fut évidemment par defaut faute de plaider ; 2°. que Dejean n'avait, aux termes de l'art. 436 et 157 du Code de procédure, que huitaine pour former opposition à ce jugement, à compter du jour de la signification d'icelui ;

» Et attendu que le jugement dudit jour, 11 mars 1819, a été signifié à Dejean au domicile de son mandataire et au greffe du tribunal de commerce, en vertu de l'art. 422 du Code de procédure, le 30 du même mois de mars 1819, et que Dejean n'a formé son opposition que le 17 mai suivant ; d'où il resulte que celle-ci était tardive et non-recevable et que le juge ment qui l'a reçue, a contrevenu à l'art. 436 et même à l'art. 157 du Code de procédure; » La cour casse et annulle.....(1) ». Voici un quatrième arrêt qui met le sceau à cette jurisprudence, en décidant tout à la fois que les jugemens des tribunaux de commerce qui sont rendus par défaut faute de plaider de la part des fondes de pouvoir ou agréés, ne se périment pas par leur inexécution dans les six mois de leur date, et qu'ils ne peuvent être attaqués par opposition que dans la huitaine de leur siguification.

Le 13 décembre 1817, les sieurs Liquier et Possac, négocians à Marseille, assignés à la requête du sieur Hubert devant le tribunal de commerce d'Orleans, y comparaissent par le ministère d'un agréé, qui, muni de leur pouvoir special, demande le renvoi devant les juges de leur domicile.

Le même jour, jugement qui rejette leur déclinatoire; et sur le refus de leur agréé de plaider au fond, second jugemeut qui prononce contr'eux les condamnations auxquelles conclud le sieur Hubert.

Le 1er juin 1818, ces deux jugemens sont signifiés aux sieurs Liquier et Possac. Ceux-ci appellent du premier, mais sans succes par arrêt du 23 décembre 1818, : cour royale d'Orléans le confirme.

la

Le 12 avril 1820,le jugement par défaut du 23 décembre 1817 est de nouveau signifié, avec commandement, aux sieurs Liquier et Pos

sac.

(1) Ibid., tome 25, page 297.

Le 14 juin suivant, les sieur Liquier et Possac, se fondant sur l'inexécution dans laquelle est resté ce jugement, y forment op position et concluent à ce que, conformément à l'art. 156 du Code de procédure, il soit déclaré périmé.

Le sieur Hubert répond que ce jugement a été rendu par défaut faute de plaider; qu'ainsi, d'une part, il ne peut pas être déclaré perimé faute d'exécution dans les six mois de sa date; que, d'un autre côté, il n'aurait pu, aux termes de l'art. 157 du Code de procé. dure, être attaqué par opposition que dans la huitaine de sa signification ; et que, deslors, l'opposition qu'y ont formée les sieurs Liquier et Possac, est non-recevable.

Les premiers juges le décident ainsi ; mais sur l'appel, arrêt de la cour royale d'Orléans, du 25 novembre 1820, qui, attendu qu'à l'audience du 13 décembre 1817, l'agréé des sicurs Liquier et Possac s'est retiré sans plaider, declare le jugement par défaut du même jour périmé faute d'exécution dans les six mois.

Le sieur Hubert se pourvoit en cassation, et ses adversaires ne se présentent pas pour défendre l'arrêt attaqué. Mais suivant la regle constamment observée par la cour suprême, la question n'en est pas moins examinée avec la même attention que si elle était débattue contradictoirement; et par arrêt du 5 mai 1824, au rapport de M. Cassaigne, « Vu les art. 156, 158 et 436 du Code de procedure civile..... ;

» Attendu que, par les art. 156 et 158, les jugemens faute de comparaître sont sculs reputés non-avenus faute d'exécution dans les six mois de leur date, et sont seuls déclarés susceptibles d'opposition depuis la huitaine de leur signification jusqu'à leur exécution; que par conséquent on ne peut y assujctir les jugemens faute de plaider, rendus par les tribunaux de commerce, sous prétexte que, dans ces tribunaux, il n'y a point d'avoués, comme dans les tribunaux civils, mais seule ment des agréés qui ne présentent pas la même garantie, puis qu'il y a même raison en un cas que dans l'autre ; qu'en effet, si on a appliqué ces mesures aux jugemens rendus contre des parties qui n'ont pas constitué d'avoué, et si on ne les a pas étendues à ceux rendus contre des parties qui en ont constitué un, c'est qu'au premier cas, on a voulu prévenir les inconveniens qui auraient lieu si les assignations n'étaient pas constamment parvenues aux parties assignées, ce qui peut être à craindre lorsqu'elles n'ont pas constitué d'avoué; au lieu qu'au second, il y a certitude qu'elles leur sont parvenues, puisqu'elles.

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en ont constitue un ; qu'il en est évidemment de même des jugemens faute de plaider, rendus par les tribunaux de commerce contre des parties qui ont comparu par un agréé ou autre procureur fondé de leur choix, puisqu'il y a même certitude que les assignations leur sont parvenues, et que c'est leur faute si elles n'ont pas défendu ;

» Attendu que, dans le fait, les défendeurs ont comparu devant le tribunal de commerce par le ministère d'un agréé qui a proposé, de leur ordre, un déclinatoire dont ils ont été déboutés; que le jugement intervenu en con-, sequence sur le fond, n'a été rendu par défaut contr'eux que sur le refus fait par ce mandataire,de proposer leurs défenses; qu'en fin, il leur fut signifié le premier juin 1818, et qu'ils n'ont formé leur opposition que le 14 juin 1820, c'est-à-dire, après le délai de huitaine de la signification; qu'il suit de là que ce jugement ne peut être attaqué par op. position, ni être declaré nul faute d'exécution; et que l'arrêt qui juge le contraire,a violé et faussement appliqué les articles précités du Code de procé ure civile;

» La cour, donnant défaut contre les dé. fendeurs, casse et annulle.....(1),

Huit jours après la prononciation de cet arrêt, et par conséquent avant qu'il pût être connu à Toulouse, la cour royale de cette ville en a rendu un parfaitement semblable.

Le 29 mars 1822, le sieur Vignes, assigné devant le tribunal de commerce de Toulouse, à la requête du sieur Plante, y comparait par le ministère d'un fondé de pouvoir qui ne propose que des exceptions de forme.

* Premier jugement qui, rejettant ces exceptions, ordonne de plaider au fond; et sur le refus du fondé de pouvoir, second jugement par defaut qui adjuge au sieur Plante les fins de sa demande.

Ce jugement est signifié le 30 mai suivant, au domicile du sieur Vignes.

Le 17 juin de la même année, le sieur Vignes y forme opposition.

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Le sieur Plante soutient qu'il est non recevable, parcequ'aux termes de l'art. 436 du Code de procédure, il aurait dû former son opposition dans la huitaine de la signification qui lui avait été faite à domicile du jugement par défaut.

Le 2 septembre 1822, jugement qui reçoit l'opposition.

Appel de la part du sieur Plante, qui fait valoir les principes sur lesquels sont fondés les

(1) Lhid., tome 26, page 158,

arrêts de la cour de cassation, des 18 janvier 1820, 26 décembre 1821 et 2 décembre 1822. Le sieur Vignes oppose à ces principes les argumens par lesquels les héritiers Marillat et le sieur Dejean les avaient inutilement combattus devant la cour de cassation, et il les reproduit avec une nouvelle force.

« L'art. 443 du Code de commerce (dit-il), en déclarant les art. 156, 158 et 159 du Code de procédure applicables aux jugemens par defaut rendus par les tribunaux de commerce, n'a fait aucune distinction : il n'a point séparé les jugemens par defaut faute de plaider, des jugemens par défaut faute de comparaître. Il est hors de doute que, si le législateur eût voulu qu'on admit une telle distinction devant les tribunaux de commerce, il aurait déclaré que l'art. 157 du Code de procédure était aussi applicable aux jugemens par défaut rendus par les tribunaux de commerce, que les art. 156, 158 et 159. Mais le legislateur n'a point prononcé de semblable décision ; et de son silence on doit nécessairement conclure qu'on ne doit point distinguer, devant les tribunaux de commerce, deux sortes de ju gemens par défaut.

» Il est facile de reconnaître la cause du silence que le législateur a gardé : c'est que l'art. 157 du code de procédure civile ne pouvait point recevoir son exécution devant les tribunaux de commerce, où la présence des avoués n'est point nécessaire pour l'instruction de la procedure. On sent qu'on ne peut point confondre un fondé de pouvoir, ni même un agréé, avec un avoué. Le fondé de

pouvoir et l'agree ne tiennent leur mandat
que de leur partie ; ils n'ont point de carac-
tère légal, leurs fonctions expirent avec le
pouvoir passager dont ils étaient nantis. Au-
cun acte de procédure ne saurait donc être
fait régulièrement avec eux. Or comment,
dans un tel état de choses, pourrait-on distin-
guer les jugemens par défaut faute de plai-
der des jugemens faute de comparaître ? Si,
en matière civile, cette distinction est ad-
mise c'est que, lorsque le défendeur se pré-
sente,
il ne peut le faire qu'en constituant
un avoué; si, ensuite, malgré sa présenta
dre, l'avoue qu'il a déjà constitué, n'en de-
tion, le défendur ne veut point se defen-
meure pas moins chargé de ses intérêts,
et de surveiller tous les actes de pro-
cédure qui pourraient être faits à son pré-
judice. Devant les tribunaux civils, le dé-
qu'il a constitué un avoué, soit qu'il veuille
fendeur ne court jamais aucun risque, dès

ou non se défendre. Mais il ne saurait en être
de même en matière commerciale, où le dé-

fendeur, alors même qu'il a comparu, n'a point de représentant légal. Il n'y a point là d'officier ministériel qui puisse veiller pour lui à tous les actes que son adversaire pourrait faire à son detriment. Alors n'est-il pas evident que, si en matière commerciale l'opposition envers un jugement par defaut n'etait point recevable jusqu'à l'exécution, le défendeur demeurerait exposé à tous les dangers qu'on a voulu prevenir en matière civile, par les dispositions rigoureuses des art. 156, 158 et 159 du code de procedure? N'est-ce pas dans cette vue seulement que le législateur les a déclarés applicables aux jugemens par défaut rendus par les tribunaux de commerce? Le défendeur n'a point devant ces tribunaux de representant legal; il peut donc ignorer l'existence du jugement qui a été rendu contre lui. Comment pourra-t-il le connaitre ? Il ne le pourra que par l'exécution. L'opposition doit donc, dans son intérêt, être recevable jusqu'à l'exé cution ».

Le sieur Vignes ajoute à ces raisonnemens, qu'en tout cas, dans l'espèce où il se trouve, son opposition doit être admise, parceque le jugement par defaut n'a point été signifié à son fondé de pouvoir, et que, si l'on pouvait à toute force, malgré le silence de l'art. 643 du Code de commerce, appliquer l'art. 157 du Code de procedure aux jugemens par défaut faute de plaider, il faudrait en conclure que le délai de l'opposition à ces jugemens, ne court, dans les juridictions commerciales, que du jour de leur signification aux fondes de pouvoir des parties défaillantes, comme il ne court, dans les juridictions civiles, que du jour de leur signification à avoué.

Mais par arrêt du 8 mai 1824, le jugement qui avait reçu l'opposition, est reforme

« Attendu que, d'après l'art. 436 du Code de procédure civile, l'opposition envers les jugemens par défaut rendus par les tribunaux de commerce, n'est pas recevable après Ja huitaine du jour de la signification;

» Qu'en point de fait, le jugement de défaut du 29 mars 1822 fut signifié au sieur Vignes le 30 mai suivant, et qu'il n'y forma opposition que le 17 juin aussi suivant ; et que par conséquent le délai pour faire opposition, était expiré ;

» Que vainement on objecte que l'art. 643 du Code de commerce a déclaré applicables aux jugemens par défaut rendus par les tribunaux de commerce, les art. 156, 158 et 159 du Code de procedure; que ces articles ne s'ap pliquant, en matière civile, qu'aux jugemens par défaut rendus contre une partie qui n'a point constitué d'avoué, ne doivent, en ma

tière commerciale, s'appliquer qu'aux jugemens par défaut rendus contre une partie qui n'a point comparu;

» Qu'il faut en effet distinguer, en matière commerciale, comme en matière civile, deux sortes de jugemens par défaut, ceux rendus faute de plaider, et ceux rendus faute de comparaître;

» Que cette distinction a dû être admise depuis la publication de l'art. 643 du Code de commerce, qui, en déclarant applicables les art. 156, 158 et 159 du Code de procédure aux jugemens par défaut émanés des tribunaux de commerce, n'a pas néanmoins abrogé l'art. 436 du Code de procedure; que l'exécution en est même plutot ordonnée par l'art. 642 du Code de commerce, qui veut que l'on continue de suivre devant les tribunaux de commerce la procédure tracée dans le tit. 25 du premier livre du Code de procedure, et dont l'art. 436 fait partie;

» Que ce dernier article deviendrait toutà-fait inutile, et ne recevrait jamais d'application, si l'on ne distinguait point, en matière commerciale, les jugemens par défaut faute de plaider, des jugemens par defaut faute de comparaitre, puisque ces derniers jugemens sont soumis aux dispositions des art. 156, 158 et 159 du Code de procedure;

» Que la distinction des jugemens par défaut faute de plaider, des jugemens par défaut faute de comparaitre, a été reconnue fondée depuis la publication de l'art. 643 du Code de commerce, par deux arrêts de la cour de cassation, qui ont décidé que la peremption de six mois, établie par l'art. 156 du Code de procédure, ne courait point contre les jugemens rendus faute de plaider en matière commerciale, mais seulement contre les jugemens par défaut faute de comparaître ;

» Que c'est sans fondement qu'on alléguait qu'au moins dans l'espèce, le jugement par défaut du 29 mars 1822 aurait du etre signifie à l'agréé où fondé de pouvoir qui avait represente la partie de Delhom, parceque l'art. 157 du Code de procédure, ne faisait courir le delai de l'opposition envers les jugemens par défaut contre une partie qui avait constitué avoué, que du jour de la signification à un avoué;

» Qu'on ne pouvait tirer aucune induction de l'art. 157, dont on ne faisait actuellement aucune application; que le délai de l'opposi tion envers les jugemens par defaut faute de plaider, etait fixé par l'art. 436, et qu'on ne peut établir non plus aucune parité entre l'avoué dont les fonctions sont nécessaires et réglées par la loi, et un agréé qui, quelle

que soit la dénomination qu'il porte, n'est jamais que le procureur fondé spécial de la partie qu'il représente ;

» Que, d'après ces considérations, on ne pouvait s'empêcher de rejeter, comme faite hors du délai fixé par la loi, l'opposition du sieur Vignes envers le jugement de défaut du 29 mars 1822 (1) ».

Il paraît cependant que l'opinion contraire a encore des partisans ; car il y a un arrêt de la cour royale de Paris, du 20 mai 1824, qui,en réformant un jugememt du tribunal de commerce de la même ville, déclare recevable l'opposition formée le 13 mars 1823, à un jugement par défaut faute de plaider rendu le 24 janvier précédent, à la suite d'un jugement contradictoire du même jour par lequel il avait été ordonné au fondé de pouvoir de la partie défaillante de plaider au fond, et dont la signification avait été faite au domicile de celle-ci, le 22 février suivant.

Mais comment motive-t-il sa disposition? Uniquement en disant, « qu'aux termes de » l'art. 414 du Code de procédure civile, la » procédure devant les tribunaux de commerce se fait sans le ministère d'AVOUÉS ; » d'où il suit que toutes les dispositions du » même Code qui supposent le ministère d'a»voué ne sont pas applicables devant les tri> bunaux de commerce où les parties peuvent » se présenter seules et en personne, ou par » de simples mandataires spéciaux, limités » et connus sous le nom d'agréés ; que, dans » cet esprit, le Code de commerce, statuant, » art. 643, pour le cas des sentences rendues » par défaut, renvoie seulement aux art. 156, » 158 et 159 du Code de procédure, ce qui > exclud l'application de l'art. 157, intermé» diaire (2) »; motif qui ne fait que répéter une objection réfutée à l'avance de la manière la plus lumineuse et la plus tranchante, par les arrêts de la cour de cassation des 2 décembre 1822 et 4 mars 1824.

S. III. Les jugemens par défaut des justices de paix, sont-ils passibles de la Péremption dont il s'agit?

La négative est établie dans un réquisitoire du 30 août 1809, et consacrée par un arrêt de la cour de cassation, du 13 septembre de la même année. L'un et l'autre sont rapportés dans mon Recueil de Questions de droit au mot Défaut, S. 8. ]]

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[[ PÉREMPTOIRE (Exception). V. l'ar ticle Exception. ]]

* PERPRENDRE, PERPRISE, PERPRISION.

Ces mots nous viennent de la basse latinité, Perprendere, Perprehensio, Perprensio, Perprisio, Perprisum, Perprisa, repondaient à ceux-ci, acquérir, s'emparer, usurper, s'approprier de son autorité.

Ils signifiaient plus spécialement, clore un terrain de murs, de haies ou de fossés. Et c'est de là que nous est venu le mot Pourpris, que plusieurs coutumes emploient pour désigner un enclos, un terrain entoure murs, de haies ou de fossés.

de

prision, c'est dans la coutume de Dax, tit. 9, Perprendre, user de Perprise ou de Perart. 18, prendre de sa propre autorité, des terres communes, sans congé du seigneur, sans lui payer des lods et ventes, mais seule ment à la charge de payer sa quotité de la quéte ou rente.

Ce droit de Perprise ou de Perprision n'est pas usite dans toute la sénéchaussée de Dax

il n'a lieu que dans les terres que la coutume appelle terres de quête. Telles sont la vicomté de Marempnes, les baronnies de Marensin, d'Herbe Saveyre, de Lafarie, de Majesc, de Sabres et de Cap-Breton, et les fiefs du seigneur de Poylhoaut.

Il y a même quelques terres de quête dans cette sénéchaussée, qui ne pratiquent plus le droit de Perprise: ce sont les baronnies de Gosse, de Senhans et de Saubusse. Les habitans de ces trois terres renoncèrent au droit de Perprise lors de la rédaction de la coutume de Dax.

Il ne faut pas confondre les terres de quéte de la coutume de Dax, avec les terres de quête dont parlent quelques coutumes de main-morte.

La coutume de Dax, tit. 9, art. 15, appelle terres de quète, celles dans lesquelles la rente seigneuriale est uniforme et générale, payée en commun pour raison de toute une paroisse, ou de tous les ténemens et terres d'une baronnie, et où chaque habitant contribue au paiement de la quête ou rente en proportion de la quantité des terres qu'il a prises on qu'il possède.

C'est dans ces terres, où la rente est générale, uniforme et imposée en commun, 'que le droit de Perprise a lieu..

Et ces terres ressemblent si peu aux terres de main-morte, que la coutume appelle celles sur lesquelles le droit de Perprise s'exerce, terres communes et franches.

Quelle est l'origine, quelle est la nature de ce droit de Perprise? Quels en sont les avantages et les inconvéniens? C'est ce que je vais examiner.

S. I. Origine du droit de Perprise.

S'il est vrai, comme quelques observateurs ont prétendu le prouver, que les terres communes forment au moins la dixième partie du sol du royaume, il est bien étonnant qu'on n'ait commencé que dans le seizième siècle à s'occuper d'un objet aussi intéressant pour l'Etat, et que nous n'ayons, depuis cette époque, q'un très-petit nombre de lois, toutes tres imparfaites, sur cette matière.

Même oubli, même imperfection dans ce nombre prodigieux de coutumes qui gouvernent la France; la plupart gardent un silence absolu sur les terres communes; et celles qui en parlent, ne règlent que la manière dont 'on doit en jouir et les administrer je n'en connais qu'une, outre celle de Dax, qui ait porté ses vues plus loin : c'est la coutume de

Lorraine.

Elle dit que les communautés ayant bois, pasquis, terres et autres choses communes, ne peuvent, ni les aliéner, à quelque titre que ce soit, ni en changer la nature, sans l'aveu et consentement du seigneur haut justicier.

Ce n'est donc ni aux ordonnances de nos

rois, ni aux coutumes , que nous devons ce principe reçu depuis long-temps en France, que les membres d'une communauté ne peu vent ni partager entre eux les communes, ni en intervertir et changer l'usage : c'est la jurisprudence des cours qui à consacré ce principe.

Lebret paraît en avoir donné la première idée. «Ab initio, disait ce magistrat, hæc fuit » dicta lex agro compascuo, ut communiter » pasceretur,sub uno ejusdem universitatis dominio: or, c'est une maxime tirée de la loi, » qu'il n'est pas permis d'intervertir ni de chan. »ger l'usage établi de tout temps, comme il » est traité dans la loi ambitiosa, D.de decretis » ab ordine faciendis : et de plus, ces com»munes faisant partie de la république, il im» porte qu'elles soient éternellement en même » état ».

Tel est le droit commun du royaume sur cette matière: la propriété des terres communes appartient à la communauté; les membres de la communauté n'en ont que l'usage, et elles doivent rester à jamais indivises, parce quelles ont été destinées, dès le commencement, à l'usage commun.

Mais ni ce principe, ni les motifs sur lesquels il est fondé, ne peuvent s'appliquer

aux communes dites terres de quéte dans la sénéchaussée de Dax. Là, les seigneurs ont fait la concession des communes, non pour qu'elles restassent à jamais en pâturage, indivises et consacrées à l'usage commun, mais pour qu'elles fussent employées au plus grand avantage de chacun des membres de la communanté. Là, ab initio lex non fuit dicta agro compascuo, ut communiter pa sceretur; on'y a envisagé d'abord que la plus grande utilité de chaque habitant; on a voulu laisser le champ libre à l'industrie du cultivateur ; que chaque habitant mit en valeur tout ce qu'il voudrait, tout ce qu'il pourrait cultiver ; et qu'il ne restát, pour l'usage commun, que ce qui ne trouverait pas de cultivateur.

S. II. Nature du droit de Perprise.

Ce droit n'a lieu, dans chaque communauté qu'entre les habitans, membres de la communauté; les étrangers en sont exclus.

Chaque habitant a la faculté de prendre, de clore et de cultiver, à son profit, telle partie des terres communes qu'il juge à propos.

Il les prend de sa propre autorité, sans le consentement du seigneur, sans être assujéti à aucune formalité, et même sans être obligé de demander le consentement des autres habitans.

La baronnie du Cap-Breton est la seule où le droit de Perprise ne peut s'exercer que du consentement du juge et des habitans.

Ce n'est que sur les terres vraiment vacantes qu'on peut exercer ce droit. La coutume dit qu'on ne pourra perprendre terre connue d'autre voisin, c'est-à-dire, la terre qui est connue pour appartenir à un autre membre de la communauté; car tel est le sens du mot voisin dans la coutume.de Dax, comme dans celles de Bayonne et de Saint-Sever.

La coutume dit aussi qu'on ne pourra, par le droit de Perprise,empécher chemin public ni privé, ni chemin de bétail.

Celui qui s'empare, par droit de Perprise, d'une portion de terre commune, n'est pas obligé de payer des lods et ventes.

Il est seulement tenu, tant qu'il possède la terre Perprise, de contribuer au paiement de la quête ou rente générale, à proportion de ce qu'il possède.

Ce droit de Perprise n'anéantit point la propriété de la communauté sur la terre Perprise; et cependant il procure, à l'habitant qui perprend, à peu près tous les avantages de la pleine propriété.

Cet habitant emploie la terre Perprise à telle espèce de culture et de production qu'il juge à propos, en perçoit les fruits, en use et

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