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le Sénat applaudissait à cette politique de non-intervention, la meilleure, selon lui, « pour prévenir les conflagrations générales,» et fermer le champ de nos rivalités séculaires avec l'Autriche. « L'Italie, ajoutait l'Adresse, ne sera comprise du monde qui la regarde que si elle prouve qu'elle ne veut pas agiter l'Europe par sa liberté, après l'avoir si longtemps troublée par ses malheurs. Qu'elle se rappelle surtout que le catholicisme lui a confié le chef de l'Eglise, le représentant de la plus grande force morale de l'humanité. »

La discussion générale recommença en quelque sorte à la séance du 7 mars, par suite d'un discours du cardinal Morlot. Il ne pouvait que défendre les droits du Saint-Siége. Un autre prélat, le cardinal Gousset, prit aussi la parole dans le même sens. Le prélat reconnaissait les services rendus à l'Eglise par l'Empereur, mais, selon lui, le Saint-Père n'avait pas été ingrat. Il avait permis au clergé français d'unir le nom de l'Empereur à celui du Souverain Pontife dans les canons de la messe et dans les litanies des Saints. Soixante-quatre évêques étaient venus assister au baptême du Prince impérial. A l'Empereur de remplir sa mission de fils aîné de l'Eglise et d'héritier des traditions séculaires de la France. « Le Pape, disait l'éminent orateur, doit être maintenu dans sa double qualité malgré les révolutionnaires. >> Au cardinal Gousset succéda M. de Royer : « L'Empereur, disait-il, s'est constitué pour Rome... Pour Rome, entendez-vous? la sentinelle la plus vigilante, la plus fidèie. » L'orateur montrait ensuite l'Empereur toujours et avant tout préoccupé de la sécurité du Pape au milieu des incertitudes et des dangers de la question italienne. A son sens, l'idée de la confédération était une idée française; mais elle était aussi un moyen de maintenir le pouvoir et l'influence du Saint-Père. « Quand les Marches et l'Ombrie furent envahies,» l'Empereur rappela son ambassadeur de Turin, et donna le chiffre de nos troupes à Rome. M. de Royer faisait ensuite remarquer que l'Empereur n'avait jamais cédé à l'influence des partis.

M. de Castelbajac prit ensuite la parole. A ses yeux, l'unité catholique valait mieux que l'unité italienne, et cette dernière unité avait les plus grands désavantages pour la France.

Le maréchal Canrobert fit ressortir ce point que l'Empereur était le meilleur gardien de l'honneur français et des intérêts catholiques.

Le cardinal Mathieu revint à la question pontificale. L'éminent prélat fit observer que cette question, quant au pouvoir temporel, n'était en opposition qu'avec l'unité de l'Italie. Mais cette unité était-elle donc réalisable? « D'ailleurs le pouvoir temporel du Pape, ne doit pas, disait le Cardinal, être considéré seulement au point de vue du Piémont qui veut l'absorber, mais surtout au point de vue des puissances catholiques et au point de vue de la Papauté. » Quant à la législation du Saint-Siége, Son Eminence demandait ensuite pourquoi on voulait établir à Rome les lois civiles françaises. L'application de la partie politique de ces lois à la capitale du monde chrétien paraissait impossible au prélat. Quant aux réformes administratives, le Cardinal repoussait les accusations dont le Gouvernement pontifical était l'objet. Il remarquait même que le nombre de ses employés séculiers était de 6,854, tandis qu'il n'y en avait que 184 ecclésiastiques. «< Maintenant, » dit le prélat en terminant, « que va devenir la question qui s'agite devant l'Europe? Les ennemis du pouvoir temporel disent que sa dernière heure a sonné; mais le glas de cette agonie a ses mystères, on lègue quelquefois la solution à ses neveux, comme aussi l'avenir peut être demain le présent; mais qu'on soit rassuré sur l'avenir, l'avenir, quel qu'il soit, ne sera pas la fin. »

Paroles d'une autre Eminence, le cardinal de Bonald : En entendant précédemment le prince Napoléon, ce prélat avait craint un instant, il le disait, pour l'existence du pouvoir temporel du Pape; mais il s'était rassuré en se rappelant que le Prince avait parlé lui-même des dissentiments qui existent parfois dans les familles princières. » Exemple : Lucien Bonaparte jadis en désaccord avec Napoléon Ier. Puis il s'était souvenu des promesses contenues dans les paroles impériales à propos du pouvoir temporel. Et, d'ailleurs, le Pape une fois dépouillé, que ferait-on de lui? Il y avait le plan proposé par le prince Napoléon : la rive droite du Tibre au Saint-Père, et la rive gauche à Victor-Emmanuel, mais selon l'orateur, ce plan était tout bonnement impraticable. La paix d'abord ne régnerait pas toujours, surtout, remarquait l'ora

teur « quand le roi d'Italie portera sur sa couronne les stigmates indélébiles de ses usurpations, et que le Saint-Père présentera aux regards des fidèles les chartes dix fois séculaires de Pépin et dé Charlemagne, qui sont l'origine du pouvoir temporel. >>

Le général Gemeau prit la parole après M. de Bonald. Il s'agissait du paragraphe XII faisant allusion à l'activité intérieure qui résulterait du progrès correspondant des institutions. Le général s'applaudissait de la liberté nouvelle accordée au pays. Il y voyait le témoignage de la confiance du Souverain dans sa propre force et dans le bon esprit de la France. Arrivant aux questions pendantes, et au principe de non-intervention en particulier, l'orateur regrettait de les voir poser d'une façon si absolue, si invariable. Après ces observations du général Gemeau et un court incident dont M. de Boissy fut le sujet, la clôture de la discussion ayant été prononcée, le Sénat allait procéder au scrutin sur l'ensemble de l'Adresse, quand le Prince Napoléon demanda à motiver son vote et celui de ses amis. «Si le Prince a la parole pour expliquer son vote, dit alors M. de La Rochejaquelein. je demande la parole après lui pour expliquer le mien. »> Insistance de la part du Prince; réponse du Président : « Le réglement ne prévoit pas de vote motivé. >>

Le Prince : << Dans toutes les assemblées ce vote a été de droit. » La liberté et la sécurité du vote sont engagées dans la question.

Réplique du Président : « Le réglement est formel. >>

Le Prince « Puisqu'il y a opposition et que l'on refuse de m'entendre, je ne voterai pas. »

Ouverture du scrutin sur l'ensemble de l'Adresse: bulletins blancs: 120;-bulletins bleus: 3. En conséquence, adoption de l'Adresse.

CHAPITRE III.

L'Adresse du Corps législatif. Discours de M. le Président de Morny; il annonce, entre autres choses, qu'il fera tous ses efforts pour faciliter aux journaux le compte-rendu des séances. Discussion du projet d'Adresse à l'Empereur. Discours de M. de Flavigny : il veut que le Gouvernement impérial désavoue en Italie la politique révolutionnaire. Après lui M. David fait entendre qu'il ne croit pas à l'unité italienne. Autres discours: M. Gouin envisage en particulier la situation financière. Prennent part ensuite à la discussion générale : MM. Konigswarter, Kolb-Bernard. Réponses de MM. Billault et Baroche, ministres sans portefeuille. M. de Ségur-Lamoignon :

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Il voit dans ce qui s'est accompli en Italie le triomphe de la Révolution. Autre orateur quelque peu pessimiste, M. Plichon.

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In

cidents à propos de ce discours. Réponse du Président du Conseil d'Etat. Autre réponse d'un éloquent organe du Gouvernement, à M. Keller. Après quoi clôture de la discussion générale de l'Adresse. - Discussion des paragraphes. - Discours de M. Taillefer sur le premier paragraphe relatif au décret du 24 novembre. Amendement relatif à la presse, à la loi de sûreté générale et au pouvoir municipal. Discours de M. Jules Favre : incidents auxquels il donne lieu. Le Président du Conseil d'Etat répond à l'orateur. Discours de M. Ollivier en réponse à ce discours. Rejet de l'amendement. Le deuxième paragraphe. Observations de M. Morin. Le marquis de Pierre et le décret du 24 novembre. Incidents. M. Belmontet. Discours de ce député.

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subséquents.

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Paragraphe 9.

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discours de M. Auguste Chevalier sur cette matière. orateurs entendus à ce sujet MM. Randoing, Jules Brame, PouyerQuestier, Schneider; M. Baroche, au nom du Gouvernement. — Le paragraphe 10 et les douanes. Substantielles observations de MM. Arman et Conseil. Réponse du Président du Conseil d'Etat. MM. David et Ancel. Observation de M. Ed. Dalloz. - Paragraphe relatif au budget. Amendement proposé. Il est développé par M. Darimon. Autre amendement relatif au budget. Discours de M. Devinck sur la situation financière. - Incident à propos du mot inépuisable employé au sujet des ressources de la France. Un Ministre, M. Magne, répond au sujet de la situation financière. - Les crédits supplémentaires et le contrôle en matière de finance. - Même sujet traité par un autre orateur, M. Gouin. Observations de M. de Belleyme. Continuation du débat auquel prennent part MM. Ancel, Schneider, de Kervéguen. Administration de la ville

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de Paris.

David.
Boigne et Lubonis.

Amendement proposé à ce sujet. Il est développé par M. Picard et combattu par M. Deviuck. - MM. Réveil et Hénon, au sujet de l'administration du Rhône. - Explications de M. Billault, ministre sans portefeuille. Réplique de M. Picard. Le treizième paragraphe. Discours de MM. d'Andelarre, de Beauverger. Les paragraphes suivants : l'Algérie. - MM. Jules Favre, Lebreton, le général Allard. Réplique du premier de ces orateurs. Le baron L'annexion de Nice et de la Savoje paroles de MM. de Le paragraphe 20 et la Syrie: MM. Guillaumin, Nogent Saint-Laurent et le Président du Conseil d'Etat. La Cochinchine. Amendement proposé. Il est développé par M. de Cuverville. Explications de M. Billault. — Débats au sujet des paragraphes relatifs à l'Italie. - Amendement au sujet de Naples. Il est motivé par M. de Jouvenel. Discussion de M. Granier de Cassagnac. Autres propositions au sujet des affaires Ronie. M. Jules Favre développe un amendement sur Réponse que fait M. Granier de Cassagnac. - Derniers débats au sujet de l'Adresse et de la question romaine en particulier. Discours de M. Anatole Lemercier. Réponse de M. Billault.

- Rejet de l'amendement. italiennes.

cette question.
Observations de M. Schneider.

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Rejet de l'amendement pro

posé par M. Jules Favre. Discussion des derniers paragraphes. Adoption du projet d'Adresse. Présentation de ce document à l'Em

pereur. Réponse de Sa Majesté à la députation.

M. le président de Moruy prononça, au lendemain de la séance impériale, un de ces discours auxquels il sait toujours donner de la portée. Envisageant d'abord les conséquences du droit de voter une Adresse accordé par l'Empereur au « Corps législatif, » droit'qui implique le libre examen de la politique intérieure et extérieure de son Gouvernement, M. le Président estimait que cette concession honorait le Souverain et les représentants du pays, « car, disait-il, si l'Empereur nous autorise à juger ses actes, c'est qu'il a la confiance de ne vouloir que le bien public et qu'il sait que vous n'avez d'autre désir que de faire connaître au pays la vérité, et d'autre but que la consolidation de sa dynastie. »

Puis M. de Morny indiquait la différence entre l'Adresse actuelle et celle des régimes antérieurs, c'est qu'autrefois « la discussion de l'Adresse était un tournoi parlementaire dont l'issue amenait le maintien ou la chute d'un cabinet. La rédaction de l'Adresse était presque secondaire; la lutte politique était presque la seule préoccupation. Aujourd'hui l'Empereur rend compte aux grands Corps de l'Etat des affaires du pays avec

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