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avec trente-neuf de ses collègues, il avait soumis à la Commission un amendement ayant pour objet d'obtenir pour ces employés une augmentation de 400 fr. Déjà l'année dernière, à l'occasion d'une proposition analogue (V. Ann. 1856), l'organe de la Commission avait annoncé la préparation à la chancellerie d'un travail général ayant en vue d'améliorer le sort de la magistrature surtout dans les fonctions inférieures. Aucune satisfaction à ces légitimes réclamations ne se trouvait dans le budget de 1858.

Le commissaire du Gouvernement (M. de Parieu) se chargea de la réponse. Le Gouvernement avait fait étudier la situation des magistrats et des employés dont les fonctions se rapportent à l'administration de la justice; il avait été préparé sur cette matière un travail dont la Commission avait eu communication. Par suite de ces études, des crédits seraient demandés. Mais des mesures telles que celles que réclamait l'honorable membre, n'étaient pas de nature à être scindées, elles devaient nécessairement faire partie d'un travail d'ensemble.

Le décret du 1er mars 1852 prononce la mise en retraite d'office à l'égard des magistrats ayant atteint une certaine limite d'âge. M. Leroy-Beaulieu n'entendait pas improuver la pensée inspiratrice de cette mesure; mais pourquoi distinguer entre les magistrats de la Cour de cassation d'une part, et les magistrats des Cours impériales et tribunaux de l'autre? On mettait à la retraite les premiers à soixante-quinze ans, et les autres à soixante-dix.

Explications du commissaire du Gouvernement sur ce point : Le principe de la limite d'âge une fois adopté, il était parfaitement juste d'étendre cette limite en faveur de ces intelligences d'élite dont la haute capacité était constatée par le choix même dont elles avaient été l'objet. Cette raison; donnée par l'organe du Gouvernement, n'était pas d'une vérité absolue; souvent, l'histoire parlementaire ou politique du pays en faisait foi, certains choix avaient été dictés par des considérations qui n'étaient pas uniquement puisées dans la capacité.

Adoption successive et sans discussion des dépenses du ministère de la justice et du ministère des affaires étrangères.

Ministère de l'intérieur. MM. Edouard Dalloz, J.-P. de Champagny et Leroy-Beaulieu plaidèrent en termes chaleureux la cause des employés des préfectures et des sous-préfectures. Au surplus, l'exposé des motifs du budget en discussion constatait (observation de M. Dalloz), que le Gouvernement avait été vivement frappé des vœux si nombreux des Conseils généraux à cet égard, puisqu'il avait proposé à l'article 13 du budget du ministère de l'intérieur une augmentation de 170,000 fr. Mais en présence de l'affirmation émanée du ministre lui-même, qu'un crédit de 649,800 fr. serait à peine suffisant pour répondre aux strictes nécessités du service, l'honorable membre pensait que, par quelqu'un des moyens à sa disposition, par quelque virement de fonds, le Gouvernement pourrait peut-être avancer l'heure à laquelle « il viendrait guérir des misères trop constatées. >>

Peut-être l'honorable membre eût-il apporté à cette cause si intéressante un argument également efficace, s'il avait demandé une diminution sur certains gros traitements excessifs. Mais il était loin, il le disait, d'être animé d'un esprit de critique systématique, il savait « qu'il est de la nature d'un Gouvernement sage comme le nôtre de préférer à l'éloge un sage conseil. » Il demanderait donc si alors qu'on appliquait à l'ornementation et à l'ameublement du Louvre, aujourd'hui complétement édifié, un crédit de 3 millions, alors que l'on consacrait plus de 400,000 fr. de rente au rachat du Palais de cristal, alors enfin « que tant d'argent » était dépensé pour la formation de camps, qui ne vaudraient probablement pas, pour l'instruction du soldat, la terre d'Algérie, le Gouvernement ne pourrait pas trouver le nécessaire pour une armée non moins digne d'intérêt, pour son administration.

Aux raisons mises en avant par l'honorable M. Ed. Dalloz, M. J.-P. de Champagny ajouta que l'augmentation de 170,000 fr. portée au projet de budget, était presque dérisoire, car, appliquée au service de 86 départements et de 300 sous-préfectures, et répartie entre les employés de ces administrations, elle ne constituerait pour chacun qu'une gratification de 15 francs.

105 Une observation de M. Leroy-Beaulieu abondait dans le même sens. La loi, disait cet honorable membre, oblige les préfets à distribuer aux employés de préfecture les huit dixièmes des fonds qui leur sont alloués pour leurs frais d'administration. Cela n'existe pas pour les sous-préfectures. Il n'y a ni loi ni décret qui règle l'emploi des fonds alloués au sous-préfet. Conclusion: Il y aurait lieu de faire pour les sous-préfectures quelque chose d'analogue à ce qui existe pour les préfectures. L'honorable membre ne songeait pas à la médiocrité notoire des traitements alloués aux sous-préfets : les obliger à rendre compte des frais d'administration, ne serait-ce pas amener la nécessité de demander aussi une augmentation d'honoraires pour eux ?

A M. Dalloz, un commissaire du Gouvernement, M. Boulay (de la Meurthe) répondit que le Gouvernement se préoccupait sérieusement de la situation souvent pénible des agents inférieurs des administrations départementales. Déjà (loi du 9 juin 1853) les services de ces employés avaient été admis (ce qui n'avait pas eu lieu ou était litigieux jusqu'alors) dans la supputation du temps nécessaire pour l'obtention de la pension de retraite. D'autre part, élévation à huit dixièmes de la portion affectée au traitement des employés des préfectures et des sous-préfectures dans le fonds d'abonnement (décret du 27 mars 1852), par dérogation à une ordonnance de 1839, qui ne fixait cette portion qu'aux sept dixièmes.

Ce débat donna lieu, au président du conseil d'Etat, de faire appel à la haute intelligence des membres de la Chambre. N'y avait-il pas un certain danger à forcer les organes du Gouvernement « tuteurs naturels de tous les agents de l'administration, de paraître repousser des améliorations qu'ils désiraient « autant que qui que ce fût. » Les employés de toutes les classes n'avaient pas de défenseurs plus zélés que les chefs de l'administration centrale; mais il y avait un intérêt grave qui devait être pris en grande considération : c'était l'intérêt financier de l'Etat.

Outre une augmentation de crédit dans le budget, le marquis de Piré, qui ne trouvait pas dans les paroles de M. Baroche « une satisfaction suffisante pour les intéressés, » réclamait pour

les employés des administrations départementales, leur nomination par le ministre, ce que ne voulaient pas les préfets, argumentant du décret de décentralisation du 25 mars 1852.

La Commission, elle aussi (observation du rapporteur), avait écouté avec la plus grande sympathie les propositions faites dans l'intérêt des employés; si elle n'avait pu les accueillir toujours, c'est qu'elle avait été arrêtée par la nature de la mission d'économie qui lui avait été donnée par la Chambre.

A la suite de ce débat, adoption du budget du ministère de l'intérieur.

Ministère des finances. M. Briot de Monrémy avait soumis à la Commission du budget de 1858 l'amendement qu'il avait présenté l'année précédente, au sujet des forêts domaniales, et sur lequel la Commission du budget de 1857 avait émis un avis favorable, en recommandant au Gouvernement l'étude de la question.

Cette année, expression du même vœu par la Commission du budget. Et pourtant nulle proposition à cet égard de la part du Gouvernement. M. de Monrémy rappela le but et les motifs de son amendement. Seules, entre toutes, les propriétés, les forêts de l'Etat sont exemptées de toute charge. Telle commune n'ayant d'autre ressource que celle provenant des centimes additionnels, a son territoire presque entièrement envahi par une forêt domaniale. A quoi s'élève alors cette ressource? A rien ou presque rien. L'étendue territoriale du département, de la commune, étant la base de ses revenus, les besoins étant en général en proportion de l'étendue du territoire, la règle et l'équité voudraient que toute propriété apportât son contingent, aussi bien au budget départemental et communal qu'au budget de l'Etat. Celui-ci étant propriétaire des biens domaniaux à titre privé, qui constituaient entre ses mains une propriété essentiellement productive de revenus essentiellement aliénables; en ayant les bénéfices, il en devait supporter les charges comme un simple particulier.

Le président de la Commission du budget (M. Lequien) opposa présentement, comme on l'avait fait jusqu'alors, à la demande de M. de Monrémy, une réponse qu'il appelait péremptoire : c'est que la situation financière ne permettait pas d'imposer au

Gouvernement une charge annuelle évaluée par l'honorable préopinant lui-même à 850,000 fr. La question, au surplus, était considérable. Il fallait distinguer entre les centimes départementaux et les centimes communaux. Au sujet des premiers, la prétention n'était pas fondée : les centimes départementaux de la première section étant en effet des centimes généraux ayant une certaine spécialité, dire que le Gouvernement en devrait payer sa part, ce serait dire qu'il se doit payer lui-même. Et quant aux centimes communaux, il faudrait encore distinguer, et d'ailleurs se livrer à de longs développements. Mais aucune solution n'étant possible quant à présent, la discussion serait sans objet. Le président du conseil d'État répondit absolument dans le même sens à l'auteur de l'amendement.

Une question soulevée par un autre honorable membre, M. André, ne reçut pas non plus de solution. Il s'agissait du traitement des conservateurs des hypothèques, depuis la loi de 1855 relative à la transcription. Et c'était la petite propriété dont cette fois l'intérêt était en cause. La loi de 1855 avait eu pour objet principal, de rendre la transcription obligatoire en faisant dépendre, à l'égard des tiers, de l'accomplissement de cette formalité, la conservation de la propriété transmise. Elle avait étendu l'obligation de cette formalité à des contrats qui n'y étaient pas antérieurement soumis, tels que les antichrèses, les actes constitutifs de servitude, etc. Elle avait eu enfin pour effet d'amener à l'inscription tous les titres de créances hypothécaires, par la suppression du délai de quinze ans précédemment accordé pour inscrire, ou en soumettant la conservation du privilége du vendeur à l'accomplissement de cette formalité. De là un développement considérable de cette partie des formalités hypothécaires. En 1841, les contrats de vente s'élevaient en nombre à 1,059,000 sur lesquels 232,000 seulement étaient transcrits; 701,000 étaient de 600 fr. et au-dessous, dont 86,000 se soumettaient à la transcription. La cause principale en était dans le défaut de proportionnalité de l'impôt et des frais de cette formalité. C'est l'établissement de cette proportionnalité que demandait l'orateur.

Réponse du commissaire du Gouvernement: Les documents

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