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dans ce moment en sa puissance; je demande comment il en a usé jusqu'à présent; je demande si l'assemblée auroit désavoué des proclamations utiles à la tranquillité publique; je demande davantage, je demande si les municipalités sont inutiles dans l'organisation sociale. Ceux qui ont hasardé tant d'assertions pour le faire penser croient-ils donc que nous sommes au tems des Thésée et des Hercule, où un seul homme domptoit les nations et les monstres ? Avons-nous pu croire que, dans le moment actuel, le roi tout seul feroit mouvoir le pouvoir exécutif? Nous aurions fait le sublimé du despotisme. Eh! que sont les municipalités ? des agens du pouvoir exécutif. Lorsque nous déterminerons leurs fonctions, ne travaillons - nous pas pour le pouvoir exécutif. A-t-on dit qu'il n'étoit pas temps d'organiser le pouvoir exécutif ? non, nul de nous n'a dit cette absurdité. J'ai dit que le pouvoir exécutif est le dernier résultat de l'organisation so ciale; j'ai dit que nous ne faisons rien pour la constitution qui ne soit pour le pouvoir exécutif; voici un dilemme que je propose: ou¦l'on dira que nous travaillons contre le pouvoir exécutif, et dans ce cas, qu'on in

dique un décret qui le prouve, l'assemblée sera reconnoissante et réformera ce décret; ou l'on nous demandera d'achever sur-lechamp tout ce qui, dans la constitution, tient au pouvoir exécutif; et dans ce second cas, qu'on nous indique un décret qui puisse être rendu isolément à cet égard. Vous avez tous entendu parler de ces sauvages qui, confondant dans leurs têtes les idées théologiques, disent, quand une montre ne va pas, qu'elle est morte; quand elle va, qu'elle a une ame; et cependant elle n'est pas morte, et cependant elle n'a pas d'amé. Le résultat de l'organisation sociale, le pouvoir exécutif, ne peut être complet que quand la constitution sera achevée. Tous les rouages doivent être disposés, toutes les pièces doivent s'engréner, pour que la machine puisse être mise en mouvement. Le roi a professé lui-même cette théorić; il a dit : » en achevant votre ouvrage, vous vous occupérez, sans doute avec candeur »>, non pas de la création du pouvoir exécutif, il auroit dit une absurdité, mais « de l'affermissement du pouvoir exécu tif». Que ce mot, pouvoir exécutif, qui devroit être le symbole de la paix sociale, ne soit donc plus le cri de ralliement des mécontens;

que ce mot ne soit donc plus la base de toutes les défiances, de tous les reproches : nous ne ferons rien de bon dans l'ordre social qui ne tourne au profit du pouvoir exécutif : vouloir que la constitution l'exécute avant que d'être achevée, c'est vouloir que la montre aille avant que d'être montée. Cette idée ne fait pas beaucoup d'honneur à la justesse d'esprit de ceux qui l'ont conçue, si toutefois elle en a fait à leurs intentions».

«Des observations sur la responsabilité des ministres appartiennent à cette matière, comme à toutes les matières environnantes. Les ministres avec un peu de candeur, si la candeur pouvoit exister dans le cœur des ministres, n'auroient pas fait un obstacle de cette loi salutaire. Nous hésitons, nous marchons à pas lents depuis quelques semaines, parce que ce dogme terrible de la responsabilité effraie les ministres : je ne dirai pas toutes les raisons de cet effroi, quoique, si j'étois malin, j'eusse quelque plaisir à les développer; j'en dirai une qui, selon moi, est la principale, elle est fondée, qu'ils me pardonnent cette expression, sur leur ignorance. Ils croient toujours que nous cherchons à les rendre responsables du suc

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cès; et cependant nous n'avons jamais ni ni voulu faire porter cette responsabilité que sur l'emploi ou le non emploi des moyens. Ancun homme qui se respecte n'oseroit dire qu'il veut se soustraire à ce genre de responsabilité. Pourquoi donc, dans tous les tiraillemens qui ont eu lieu entre l'assemblée et les ministres, ceux-ci ont-ils sans cesse combattus cette responsabilité du succès dont nous ne parlions pas, tandis qu'ils se sont tû constamment sur celle qui nous paroissoit nécessaire, et à laquelle ils ne peuvent raisonnablement refuser de se soumettre? Je conclus à rejetter les amendemens qui portent sur cette idée, que le pouvoir exécutif doit avoir, en ce moment, tous

les moyens qu'en ce moment on ne peut pas. lui donner. Quand votre constitution sera faite, le pouvoir exécutif, par cela même, sera fait tous les amendemens qui tendroient à donner des moyens excentriques, des moyens hors de la constitution, doivent. être absolument écartés ».

L'assemblée rendit un décret par lequel, 1o. elle déclare perturbateur du repos public quiconque se prévaut d'aucun acte émané du roi et de l'assemblée nationale, s'il n'est

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revêtu des formalités prescrites par la constitution; 2o. veut que le discours du roi l'adresse aux françois, les décrets soient envoyés aux municipalités à mesure qu'ils seront sanctionnés, et qu'ils soient lus au prône; 3°. fixe la conduite des officiers municipaux lorsque la perception des impôts sera en danger; 4°. oblige les municipalités à se prêter main-forte mutuellement et à répondre de leur refus; 5°. détermine le cas où l'on doit faire usage de la loi martiale, et rend les communes responsables des dommages causés par les attroupemens, quand elles auront pu les empêcher.

26 février 1790. L'assemblée avoit décrété que le comité de constitution seroit chargé de donner des dénominations aux quatrevingt-trois départemens.

M. l'abbé Maury attacha, peu d'importance à cette dénomination; Mirabeau étoit d'un avis tout opposé.

«Il me semble que le préopinant, dit-il, no

s'est

pas fait une idée nette de ce que le comité se propose en donnant une nouvelle dénomination aux départemens. Rome fut toujours Rome depuis César jusqu'à Claude, et cependant César avoit l'empire du génie,

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