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relations particulières : c'est un homme, comme il y en avoit au temps où l'on s'a musoit à voir des fous dans les cours, tantôt aristocrate, tantôt démocrate aujourd'hui enragé dans un sens, et demain dans un autre; jugez si tout cela pouvoit me donner beaucoup de confiance en lui. Il prétend m'avoir adressé des mémoires, je ne dirai ni oui ni non ; je reçois à-peuprès cent lettres par jour; il m'est aussi parvenu des milliers de mémoires; j'en ai lu quelques-uns; il y en a beaucoup que je n'ai pas lus, et que probablement je ne lirai pas. Il est très - possible que les mémoires de M. Riolles se trouvent parmi ceux-là ce que je puis dire, c'est qu'il ne m'a rien envoyé à ma provocation. Depuis long-temps mes torts et mes services, mes malheurs et mes succès, m'ont également appellé à la cause de la liberté : depuis le donjon de Vincennes et les différens forts

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du royaume où je n'avois pas élu domicile,

mais où j'ai été arrêté par différens motifs, il seroit difficile de citer un fait, un écrit, un discours de moi, qui ne montrât pas un grand et énergique amour de la liberté. J'ai vu cinquante-quatre lettres-de-cachet

dans ma famille ; oui, Messieurs, cinquantequatre, et j'en ai eu dix-sept pour ma part ainsi vous voyez que j'ai été partagé en aîné de Normandie. Si cet amour de la liberté m'a procuré de grandes jouissances, il m'a donné aussi de grandes peines et de grands tourmens. Quoiqu'il en soit, ma position est assez singulière; la semaine prochaine, à ce que le comité me fait espérer, on fera un rapport d'une affaire où je joue le rôle d'un conspirateur factieux; aujourd'hui on m'accuse comme un conspirateur contre - révolutionnaire. Permettez que je demande la division. Conspiration pour conspiration, procédure pour procédure; s'il le faut même, supplice pour supplice, permettez du moins que je sois un martyr révolutionnaire».

Mirabeau descendit de la tribune au milieu des applaudissemens d'une grande partie de l'assemblée et de toutes les galeries.

L'assemblée décréta, sur la proposition du comité des recherches, qu'il seroit informé par-devant le Châtelet contre M, Riolles et ses complices.

SECONDE

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SECONDE PRÉSIDENCE DE M. BUREAU

DE PUSY.

Du 12 au 25 septembre 1799,

27 septembre. L'ordre du jour appelloit la discussion sur la nouvelle émission d'assignats.

Mirabeau avoit demandé la parole; M. l'abbé Maury rappella qu'il avoit déjà été entendu, et qu'il pourroit se faire que son éloquence entraînât l'assemblée; il espé roit que l'assemblée lui pardonneroit de prévenir cet ordre de délibération; la véritable manière, dit-il, de discuter, consiste à se prendre corps à corps, et je jette le gant à M. Mirabeau,

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Mirabeau répondit que la cause des as-> signats étoit trop importante pour que la défense lui en fût exclusivement confiée. I desira que les très-bons auxiliaires qu'il auroit dans cette matière fussent entendus; → il est cependant très-simple, dit-il, de satisfaire M. l'abbé Maury je demande à parler l'avant-dernier; et M. l'abbé Maury me répondra. Il est très-juste que celui qui c a ouvert cette discussion ait aussi la pa Tome III. X

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role. Quant à moi, continua-t-il, je suis prêt dans ce moment à répondre à toutes les objections qui ont été faites; car je n'ai pas, comme certaines personnes, le talent de les prévoir.

L'assemblée décida que la discussion sexoit continuée à la huitaine, et discutée tous les jours suivans jusqu'à sa décision.

Séance du soir 18 septembre. Cette séance offrit le tableau d'une scène, nous osons le dire, scandaleuse. Une députation du peuple Liégeois étoit venue rendre hommage aux principes de l'assemblée nationale; elle étoit venue réclamer des sommes prêtées au gou

vernement.

M. Merlin ayant demandé que ces dépués fussent entendus dans l'intérieur de la alle, cette motion fut décrétée ; mais plusieurs membres du côté droit s'écrièrent qu'ils communiquassent leurs pouvoirs. Ils tentèrent vainement d'étouffer par leurs clameurs les observations de Mirabeau.

Je suppose, dit-il, que MM. les députés Liégeois ont fait part de leurs pouvoirs, et qu'ils sont très en règle cette formalité de simple discipline est du fait du président de l'assemblée. ( le côté droit »

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murmure. ) Cette formalité, je le répète, en dépit de la facile réfutation des interruptions, regarde le président. (les murmures augmentent. ) Cette réclamation devoit se faire au moment où la députation a été annoncée, et non par une interruption désobligeante et tumultuaire. (les murmures s'élevent dans la même partie de la salle avec une nouvelle force.) Tous ces murmures ne pourront me décourager assez pour que je ne fasse pas une observation que je crois essentielle. Les réclamans tumultuaires se tairoient s'ils savoient que MM. les députés Liégeois ne sont pas tellement débiteurs de l'assemblée nationale

pour le bien que leur a fait son exemple, qu'ils ne soient aussi créanciers de l'état. C'est à ce dernier titre qu'ils viennent présenter une pétition que vous ne pouvez refuser d'entendre. Au reste, quant au reproche qu'on a voulu faire à l'égard des Suisses, il porte entièrement à faux. L'as- ́ semblée, en les recevant, savoit parfaitement qu'ils n'étoient pas envoyés par les treize cantons mais députés d'un club. Je n'aurois pas demandé la parole, si je n'avois voulu prouver à MM. les députés

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