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sation prend tous les éléments de sa décision elle ne pourrait en prendre d'autres, elle ne pourrait, à peine de nullité, entendre ni le prévenu, ni-le plaignant; la loi ne lui a délégué que l'examen des actes de l'instruction. C'est là la base de son organisation; c'est aussi la raison de son existence; nous avons vu, en effet, que son institution n'a été que la conséquence de la suppression de la procédure orale devant le jury d'accusation.

2134. La chambre d'accusation délibère et juge à huis clos. C'est ce qui résulte de l'ancien article 218, qui portait qu'elle se réunit à la chambre du conseil. L'article 225 ajoute qu'elle délibère sans communiquer avec personne. Cette dernière disposition donna lieu à une observation dans le sein du conseil d'État. « M. Cambacérès dit que si l'on ne considère les juges que comme des jurés, on peut leur défendre de communiquer; mais cette défense serait peut-être déplacée, s'ils sont regardés comme remplissant les fonctions de juges. Tout dépend donc du caractère qu'on se propose de leur donner. Or, en supprimant le jury d'accusation, Sa Majesté a voulu surtout que l'action des juges ne fût pas entravée, et c'est par des juges qu'elle a entendu faire décider s'il y a lieu à mettre en accusation. M. Treilhard répond que, dans le cas de l'article, les juges ne sont certainement pas tout à fait des jurés, mais qu'ils n'opèrent pas non plus tout à fait comme juges, puisqu'ils décident d'après les mêmes règles que les jurés. » M. Faure a paru donner dans l'exposé des motifs le sens de cette disposition, lorsqu'il a dit que « le plus grand secret doit présider aux délibérations de la cour impériale dans toutes les affaires criminelles qui lui sont soumises». Nous verrons plus loin l'influence de cette règle sur les formes de la procédure.

2135. La chambre doit prononcer « immédiatement après le rapport du procureur général et, en cas d'impossibilité, au plus tard dans les trois jours » (art. 219). L'examen des pièces, l'appréciation de tous les faits et la détermination de leur qualification, dans les affaires compliquées où figurent de nombreux prévenus, exigent au moins ce dernier délai, qui ne doit courir que du jour où le procureur général a terminé son rapport et déposé ses réquisitions écrites.

1 Locré, tom. XXV, p. 431. 2 Locré, tom. XXV, p. 566.

L'article 225 ajoute néanmoins que « les juges délibéreront entre eux sans désemparer». Cette disposition, textuellement reproduite de l'article 238 du Code du 3 brumaire an IV, qui l'appliquait aux jurés, doit être entendue en ce sens que la chambre, lorsque sa délibération est commencée, ne doit entendre aucun autre rapport et procéder à aucun autre acte, jusqu'à ce qu'elle soit terminée. Elle ne proscrit pas un intervalle dans la délibération; elle interdit seulement de prendre une autre affaire avant que l'arrêt soit rendu. La Cour de cassation a d'ailleurs jugé « que l'article 225 n'a prescrit qu'une mesure d'ordre à l'inobservation de laquelle il n'a point attaché la peine de nullité ». Il a été également jugé, sur un pourvoi fondé sur ce qu'il n'était pas possible, vu la brièveté de la délibération, que les pièces de la procédure eussent été lues, « que l'arrêt constate formellement cette lecture et que, pour détruire cette constatation de l'arrêt, le seul moyen serait l'inscription de faux1».

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2136. Les arrêts sont prononcés à la majorité des voix. L'exception contenue dans l'ancien article 133 était spéciale à la chambre du conseil. S'il y a partage d'opinions, il n'y a point lieu d'appeler d'autres juges pour le vider. L'avis le plus favo rable au prévenu doit prévaloir. L'article 12, titre XXV, de l'ordonnance de 1670, portait : « Les jugements soit définitifs ou d'instruction passeront à l'avis le plus doux. » Cette règle s'appliquait particulièrement au règlement à l'extraordinaire. Notre Code, en la consacrant dans ses articles 347 et 583, ne l'a point étendue aux jugements d'instruction, ce qui a donné lieu à M. Merlin de soutenir qu'elle ne leur était point applicable *. Mais la Cour de cassation a maintenu l'ancienne jurisprudence, en déclarant « qu'il a toujours été de principe dans la législation française qu'en cas de partage d'opinions dans les jugements en matière criminelle, on doit suivre celle qui est plus favorable à l'accusé; que l'ordonnance de 1670, titre XXV, article 12, en confirmant celle règle établie par les lois anciennes, l'avait expressément appliquée aux jugements d'instruction et que les lois

1 Cass. 24 févr. 1842 (Bull., no 33).

2 Cass. 28 janv. 1864 (Bull., no 25).

3 Muyart de Vouglans, Inst. crim., p. 797; Jousse, Comm. sur l'ord. de 1670, p. 444.

4 Rép., vo Partage d'opinions, § 2.

nouvelles, en l'adoptant pour les tribunaux qu'elles ont établis, ne l'ont pas limitée aux jugements définitifs; d'où il suit que la cour de Metz, en suivant cette règle dans un arrêt qui statue sur une mise en accusation, n'a fait ni fausse application ni violation d'aucune loi ' ».

CHAPITRE HUITIÈME.

ATTRIBUTIONS DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION.

§ I. Attributions générales.

2137. Attributions générales de la chambre d'accusation. Règles générales de leur compétence.

2138. Les chambres d'accusation n'ont de compétence qu'autant que les faits dont elles sont saisies ont le caractère d'un crime, d'un délit ou d'une contravention. 2139. Elles ne sont instituées que pour prononcer sur l'état de l'instruction et sur la compétence.

§ II. Attributions avant de statuer au fond.

2140. Les chambres d'accusation ne peuvent procéder à aucun acte d'instruction par elles-mêmes.

2141. Mais elles peuvent ordonner qu'il sera procédé à tel ou tel acte d'instruction. 2142. Elles déléguent un juge pour l'accomplissement de ces actes.

2143. Elles peuvent ordonner des informations nouvelles, et par conséquent un supplément d'information (art. 228).

2144. Elles peuvent ordonner ce supplément d'office et rejeter la demande formée à cet égard par les parties.

2145. Elles peuvent l'ordonner dans toutes les affaires dont elles sont saisies tant qu'elles n'ont pas statué au fond.

§ III. Attributions quand l'instruction est complète.

2146. La chambre d'accusation peut-elle statuer au fond si le procureur général n'a conclu qu'à un supplément d'information?

2147. Règles relatives à l'examen des procédures.

2148. Ce que la chambre doit faire quand elle est saisie d'une prévention de faux témoignage par le renvoi d'une cour d'assises qui a ajourné le jugement d'un procès. 2149. Quid, quand le prévenu est déjà condamné à une peine perpétuelle et que la nou velle poursuite ne peut influer sur sa situation?

2150. Elle est compétente pour prononcer sur l'exception de chose jugée.

2151. Elle est compétente pour prononcer sur l'état de démence du prévenu.

2152. Elle est compétente pour prononcer sur les exceptions qui ôteraient au fait son caractère de crime ou de délit.

2153. Quels sont, quant à la compétence, les effets de la transmission prescrite par l'article 133. Droits de la chambre d'accusation.

2154. Elle peut statuer sur tous les faits sur lesquels a porté l'instruction, lors même que le juge d'instruction n'aurait pas statué à cet égard.

1 Cass. 5 mars 1813 (J. P., tom. XI, p. 182).

§ IV. Appréciation des faits.

2155. Règles générales d'appréciation des faits incriminés.

2156. La chambre d'accusation a l'appréciation souveraine des faits recueillis par l'ínstruction.

2157. Exception pour le cas où l'appréciation repose sur une erreur de droit.

2158. Elle a le droit de modifier et de réformer les qualifications données aux faits par le juge d'instruction.

2159. Ce droit reçoit-il une exception dans la poursuite des délits commis par la voie de la presse?

2160. Le droit d'apprécier les faits et celui de les qualifier ne sont pas identiques.
2161. La chambre saisie en vertu de l'article 133 est-elle compétente pour examiner si
l'ordonnance est régulière et si les formes légales ont été observées ?

§ V. Attributions de la chambre d'accusation quand elle est saisie
d'une opposition.

2162. La chambre d'accusation doit examiner, en premier lieu, la régularité de l'opposition qui la saisit.

2163. Elle est saisie par l'opposition des pouvoirs de l'article 133, et peut relever toutes les irrégularités de l'ordonnance.

2164. Peut-elle connaître des ordonnances de l'instruction, en statuant sur la prévention, lorsqu'elles n'ont pas été frappées d'opposition?

§ VI. Informations nouvelles. Évocation des procédures criminelles. 2165. Pouvoirs de la chambre d'accusation pour ordonner des informations nouvelles ou évoquer les procédures déjà commencées.

2166. Conditions apportées par la loi à l'exercice de ces pouvoirs il faut que les faits soient punissables, qu'elle en soit saisie et qu'elle le soit valablement.

2167. Compétence de la chambre d'accusation quand elle est saisie par le renvoi de la

procédure ou par une opposition dans les cas prévus par les articles 133 et 135. 2168. Compétence quand elle est saisie par les réquisitions du procureur général à fin d'évocation d'une procédure.

2169. Compétence quand elle est saisie par un arrêt de la cour impériale en vertu de l'article 11 de la loi du 20 avril 1810.

§ VII. Règlement de la compétence.

2170. Le règlement de la compétence est l'indication du tribunal qui doit connaitre de l'affaire et le renvoi devant ce tribunal.

2171. Quel est le juge que la chambre d'accusation doit saisir lorsqu'elle a été saisic par une opposition à une ordonnance du juge d'instruction.

2172. Quel juge doit être saisi quand l'opposition a été formée contre une ordonnance statuant sur la mise en prévention.

2173. Quel juge doit être saisi quand le fait ne présente que les caractères d'une contravention de police.

2174. Le renvoi peut-il avoir lieu devant le tribunal correctionnel auquel appartient le juge d'instruction, quand l'ordonnance qui avait qualifié le fait crime est réformée? Nouvelle rédaction de l'article 230.

2175. Motifs à l'appui de la modification introduite dans l'article 230 par la loi du 17 juillet 1856.

2176. Du cas où il y a lieu à renvoi devant une cour d'assises.

2177. Comment la compétence doit être réglée lorsque, après avoir constaté les indices d'un crime ou d'un délit, elle reconnait que l'instruction a été faite par un juge incompétent.

§ VIII. Attributions de la chambre d'accusation pour statuer sur la liberté provisoire, les saisies et les charges nouvelles.

2178. Dans quels cas la chambre d'accusation est appelée à statuer sur la liberté provisoire des prévenus.

2179. Dans quels cas elle peut donner mainlevée des saisies et ordonner la restitution des objets saisis.

2180. La chambre d'accusation est dessaisie par l'arrêt de renvoi ou de non-lieu. Exception au cas de survenance de charges nouvelles.

§ I. Attributions générales de la chambre d'accusation. 2137. Le législateur a voulu constituer dans chaque cour impériale un centre d'instruction de toutes les affaires criminelles du ressort. Si les cours impériales, porte l'exposé des motifs de la loi du 20 avril 1810, rendent plénièrement la justice civile, elles deviennent aussi le centre d'instruction de toutes les affaires criminelles. "

Les chambres d'accusation ont été organisées pour remplir cette mission. Elles ont été en conséquence investies de trois attributions générales :

Elles ont seules le pouvoir de prononcer la mise en accusation des prévenus et leur renvoi devant la cour d'assises; d'où il suit qu'elles connaissent en dernier ressort de toutes les procédures instruites à raison de faits qualifiés crimes par la loi. (Art. 133 et 231 C. inst. cr.)

Elles constituent un second degré de juridiction placé au-dessus des juges d'instruction; d'où il suit qu'elles connaissent de toutes les ordonnances de ces premiers juges qui, dans le cas même où le fait n'a que le caractère d'un délit ou d'une contravention, sont frappées d'opposition par les parties. (Art. 134 et 539.)

Enfin, elles exercent une haute surveillance sur l'instruction de toutes les procédures; d'où il suit qu'elles ont le droit, 1° d'étendre les poursuites dont elles sont saisies à tous les faits qui peuvent s'y rattacher; 2° d'ordonner une information lorsque, dans l'exercice de leurs fonctions, elles découvrent les traces d'un crime ou d'un délit; 3° d'évoquer d'office, lorsqu'elles sont déjà saisies ou sur les réquisitions du ministère public, l'instruction des affaires qui sont poursuivies devant les juges inférieurs. (Art. 228, 235 et 250.)

Nous allons examiner dans ce chapitre l'étendue et les limites de ces différentes attributions qui, quoique distinctes entre elles,

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