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GRANDE VOIRIE; compétence des conseils de PRÉFECTURE. 307 dictoirement ou par défaut, soit qu'il soit nécessaire, même dans le cas de la sentence rendue par défaut, d'attendre l'expiration de la huitaine; et en cas que la partie ait nommé un expert de sa part, et que les experts se trouvent d'avis différent, il sera nommé un tiers expert au premier jour d'audience, la partie présente ou dûment appelée au domicile de son procureur (art. 8). Sur le vu du rapport de l'expert ou des experts, la partie ouïe à l'audience ou elle dûment appelée, et ouï le commissaire de la voirie, ensemble notre avocat audit bureau en ses conclusions, il sera ordonné, s'il y a lieu, que, dans un certain temps, le propriétaire de la maison sera tenu de faire cesser le péril et d'y mettre, à cet effet, des ouvriers; à faute de quoi ledit temps passé, et sans qu'il soit besoin d'appeler les parties, sur le simple rapport verbal du commissaire de la voirie au bureau, portant qu'il n'y a été mis ouvriers, les juges ordonneront qu'il en sera mis à la requête de notre procureur audit bureau, poursuite et diligence dudit commissaire de la voirie, à l'effet de quoi les deniers seront avancés par le receveur des amendes, dont lui sera délivré exécutoire sur la partie, pour en être remboursé par privilége et préférence à tous autres sur le prix des matériaux provenant des démolitions, et subsidiaiement sur les fonds et superficie des bâtiments desdites maisons (art. 9).

336. Sous le bénéfice de l'observation de ces règles, le droit de 'administration préfectorale ou municipale, selon les cas, d'orlonner la démolition et de la faire directement exécuter, en cas de efus du propriétaire, est absolu, et il n'y a pas lieu de recourir au conseil de préfecture à cet effet. Les frais des travaux effectués l'office sont avancés par l'administration; ils sont ensuite prélevés ur les matériaux, et pour le surplus, il est demandé aux tribuaux judiciaires d'en ordonner le remboursement par privilége et référence sur toutes autres créances.

L'arrêté préfectoral ordonnant la démolition à l'exclusion du onseil de préfecture est un acte d'administration pure; il n'est sceptible que du recours par la voie gracieuse devant le mistre, et non du recours par la voie contentieuse devant le conseil État, auquel il ne peut être déféré que pour excès de pouvoir, si s prescriptions ci-dessus ont été méconnues. Le refus ou la néigence d'exécuter l'arrêté de réparation ou de démolition réguèrement pris par l'autorité administrative doit, en outre, être primé par l'autorité judiciaire, et constitue, comme on l'a vu ns les cas ci-dessus indiqués, la contravention de simple police évue par l'article 471 § 5 du Code pénal.

337. La compétence attribuée aux conseils de préfecture, en tière de grande voirie, est à la fois contentieuse et répressive; ont le double pouvoir de faire cesser l'usurpation, et de punir contravention commise en condamnant à l'amende. A ce double

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DOUBLE COMPÉTENCE CONTENTIEUSE ET RÉPRESSIVE

titre, les conseils de préfecture et le conseil d'État sont institués les gardiens du domaine public au point de vue juridictionnel, comme l'administration active au point de vue de l'action et de la police de la voirie.

Au contentieux, les conseils de préfecture prononcent définiti vement la réintégration du sol à la route, lorsqu'il y a eu anticpation sur la largeur légale de la voie ; ils jugent (C. d'Ét. 20 février 1822, Malafosse) les contestations entre les propriétaires riverains et l'administration, pour le remboursement des frais de planttions effectuées d'office d'après les textes rapportés ci-dessous [nos 838 et 863]; ils statuent sur les difficultés élevées entre les rive rains pour la répartition des frais de pavage dans les traverses des villes, bourgs ou villages, mis à leur charge par les textes cit plus loin [nos 1395 à 1397].

Au point de vue répressif, les conseils de préfecture fonctionnent en matière de grande voirie comme tribunaux de police correctionnels administratifs [n° 341 à 346]. C'est une de leur attributions les plus contestées, et dont quelques-uns de lear défenseurs les plus autorisés seraient disposés à faire l'abandar (Rapport présenté au nom de la commission chargée d'examiner le projet de loi de 1872 sur le conseil d'État, page 14). N'est-il p cependant plus rationnel, tant au point de vue de l'utilité pr tique, qu'au point de vue du principe même de cette mission d garde du domaine public conférée à l'administration et à la jur diction administrative, de ne pas scinder cette attribution?u question contentieuse est d'ailleurs sans cesse mêlée, en cette me tière, à la question de répression; on en voit ci-dessous [no 3 une preuve saisissante.

338. Pour les dépendances de la voirie urbaine, cette doub juridiction contentieuse et répressive appartient tout entière. l'autorité judiciaire représentée par le tribunal de simple police.

En ce qui concerne les chemins vicinaux [n° 395 et 1376), cell double juridiction n'est pas organisée comme elle l'est pour grande voirie et la voirie urbaine; elle est divisée entre les conseil de préfecture et les tribunaux de simple police. Une loi du 9 vente an XIII (28 février 1805), article 8, étendant à cette dépendanc la petite voirie le principe de la loi de l'an VIII, a soumis à la ju diction contentieuse des conseils de préfecture les chemins T naux, en ce qui concerne les anticipations sur eux commises moyen de plantations, disposition appliquée avec raison aux us

DES CONSEILS DE PRÉFECTURE EN MATIÈRE DE GRANDE VOIRIE. 309 pations et anticipations de toute autre nature. A un autre point de vue, cette disposition a donné lieu à une controverse qui a divisé la cour de cassation et le conseil d'État. La première tenait ce texte pour abrogé par les lois ultérieures sur les chemins vicinaux, et permettait au tribunal de simple police non-seulement de punir les contraventions commises en cette matière (C. p. art. 479 & 11), mais encore d'ordonner la suppression des travaux; le conseil d'Etat, au contraire, maintenait la compétence du conseil de préfecture seul investi du droit de résoudre la question d'anticipation, quel qu'en ait été le mode, en vertu de l'article 8 de la loi de l'an XIII; aucun texte n'est venu le remplacer relativement à la question contentieuse, et le Code pénal (art. 479 § 14) ne l'a mo difié, au profit du tribunal de simple police, qu'en ce qui concerne la question de répression. Le tribunal des conflits (arrêt du 24 mars 1850, Morel Wasse) a confirmé cette distinction, conformément à la jurisprudence du conseil d'État, en reconnaissant au conseil de préfecture le pouvoir de prononcer la restitution du terrain usurpé, et au tribunal de simple police le pouvoir de condamner à l'amende. Il faut y ajouter, pour ce dernier, le droit de prononcer la suppression de travaux confortatifs exécutés sans autorisation au mur de face d'un bâtiment faisant saillie. Cette distinction est actuellement établie par une jurisprudence administrative et judiciaire invariable (voir entre autres C. d'Ét. 30 janvier 1868, préfet de la Sarthe, 17 janvier 1873, Lassablière; c. cass. 29 juillet 1864, Siouret; 21 mars 1868, Marie; 27 juillet 1872, Fabre; Trib. confl. 17 mai 1873, Desanti); mais si la loi était à faire, il serait préférable de confier le tout à une seule et même juridiction.

A l'avenir, nul ne pourra planter sur le bord des chemins vicinaux, même lans sa propriété, sans leur conserver la largeur qui leur aura été fixée.... L. 9 ventôse an XIII, relative aux plantations des grandes routes et des chenins vicinaux, art. 7). - Les poursuites en contravention aux dispositions de a présente loi seront portées devant les conseils de préfecture, sauf le recours u conseil d'État (art. 8).

339. Dans les rues empruntées par les grandes routes pour la raversée des villes, bourgs ou villages, il faut observer que suivant jurisprudence de la cour de cassation, la compétence du conseil e préfecture se rencontre avec celle du tribunal de simple police, vesti de la juridiction répressive pour la petite voirie par les rticles 474 25 et surtout 479 14 du Code pénal. Le même fait est onsidéré par elle comme constitutif d'une contravention de grande

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DES CONTRAVENTIONS A LA POLICE DE LA

et de petite voirie, et en conséquence elle admet la concurrence des deux juridictions, sauf l'application de la maxime non bis in idem par la dernière juridiction saisie. Le conseil d'État, au contraire, tout en appliquant aussi la maxime protectrice non bis in idem, fait, avec raison, prédominer la juridiction du conseil de préfecture, et décide que, ces voies étant une dépendance de la grande voiric, la justice administrative est seule compétente. De même, nous avons pensé [no 334 et 335] que le préfet seul, à l'exclusion du maire, avait, dans ces rues, le droit d'ordonner les démolitions en cas de péril.

340. Suivant la jurisprudence constante du conseil d'État, l'anticipation ou usurpation commise par un particulier en établissant une construction sur le sol inaliénable et imprescriptible de b voie publique, constitue une contravention continue ou permanente, dont la répression peut être poursuivie à toute époque, dans l'intérêt toujours subsistant de la grande voirie; à ce point que lorsqu'un premier arrêté du conseil de préfecture a condamné contrevenant à l'amende et à la démolition, mais qu'il est frappe de prescription parce qu'il n'a été suivi d'aucun acte d'exécotion dans les trente ans de sa signification, la démolition peut encore être poursuivie en vertu d'un nouveau procès-verbal, et de: être prononcée par le conseil de préfecture (C. d'Ét. 43 avril 1842, Guyard; 3 mai 1854, Coulbeaux; 8 décembre 1857, Mazelier 31 mars 1864 et 13 avril 1870, Dupin).

La cour de cassation, jugeant les mêmes questions en matièr. de petite voirie, admet la prescription de l'action publique neseulement pour l'amende, mais aussi pour la démolition (ch. crim 2 juin 1865); toutefois, elle admet que même alors la démoliti peut être poursuivie par voie d'action civile (c. cass. 1er août 1836 11 août 1864).

344. La juridiction répressive des conseils de préfecture régie par la loi du 29 floréal an X (49 mai 1802), relative aux OC traventions en matière de grande voirie. Leur compétence ri s'étend qu'aux contraventions qui affectent l'état matériel de voie publique, ou bien y empêchent la libre circulation; mais principe de compétence, écrit à cet égard dans l'article 4 de la de l'an X, n'est pas restrictif; sa disposition est purement démer trative; aussi la cour de cassation et le conseil d'État l'ont-ils:pliqué de la manière la plus large, même au cas de mauva

GRANDE VOIRIE; LOI DU 29 FLORÉAL AN X.

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manœuvre occasionnant l'abordage de deux bateaux à vapeur sur un fleuve (c. cass. 5 janvier 1839 et C. d'Ét. 15 août 1839, Pagès). Les tribunaux judiciaires peuvent seuls punir les dégradations et vols de matériaux et en ordonner la restitution, et sont également seuls compétents pour connaître des violences, voies de fait ou réparations de dommages réclamés par les particuliers.

Le décret sur les routes du 16 décembre 1844, celui du 10 avril 1812 sur la police des canaux, fleuves, ports maritimes et de commerce, et la loi du 45 juillet 1845 sur la police des chemins de fer, ont fait à ces dépendances de la grande voirie l'application du principe de la loi de l'an X, dans des textes spéciaux que nous reproduisons à la suite de cette loi.

Les contraventions, telles que: anticipation, dépôt de fumiers et autres objets, et toutes espèces de détériorations commises sur les grandes routes, sur les arbres qui les bordent, sur les fossés, ouvrages d'art et matériaux destinés à leur entretien, sur les canaux, fleuves et rivières navigables, leurs chemins de halage, francs-bords, fossés et ouvrages d'art, seront constatées, réprimées et poursuivies par voie administrative (Loi du 29 floréal an X, relative aux contraventions en matière de grande voirie, art. 1or). Les contraventions seront constatées concurremment par les maires ou adjoints, les ingénieurs des ponts et chaussées, leurs conducteurs, les agents de la navigation, les commissaires de police et par la gendarmerie: à cet effet, ceux des fonctionnaires publics ci-dessus désignés qui n'ont point prêté serment en justice le prêteront devant le préfet (art. 2). Les procès-verbaux sur les contraventions seront adressés au sous-préfet, qui ordonnera par provision, et sauf le recours au préfet, ce que de droit pour faire cesser le dommage (art. 3). Il sera statué définitivement en conseil de préfecture: les arrêtés seront exécutés sans visa ni mandement des tribunaux, nonobstant et sauf tout recours; et les individus condamnés seront contraints par la voie de garnisaires et saisie de meubles, en vertu desdits arrêtés qui seront exécutoires et emporteront hypothèque (art. 4 et dernier de la même loi).

A partir de la promulgation du présent décret, les cantonniers, gendarmes, gardes champêtres, conducteurs des ponts et chaussées, et autres agents appelés à la surveillance de la police des routes, pourront affirmer leurs procès-verbaux de contraventions ou de délits devant le maire ou l'adjoint du lieu (Décret réglementaire du 16 décembre 1811, sur les routes, titre IX, art. 112). Ces procèsverbaux seront adressés au sous-préfet, qui ordonnera sur-le-champ, aux termes des articles 3 et 4 de la loi du 29 floréal an X, la réparation du délit par les délinquants, ou à leur charge, s'il s'agit de dégradations, dépôts de fumiers, immondices ou autres substances, et en rendra compte au préfet, en lui adressant les procès-verbaux (art. 113). — Il sera statué sans délai par les conseils de préfecture, tant sur les oppositions qui auraient été formées par les délinquants, que sur les amendes encourues par eux, nonobstant la réparation du dommage. Seront, en outre, renvoyés à la connaissance des tribunaux, les violences, vols de matériaux, voies de fait, ou réparations de dommages réclamés par des particuliers (art. 114).

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