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CONSTITUTION DE 1875.

exécutif par 7 constitutions (an VIII, 1802-1804, 1814, 1815, 1830, 1852, 1870); remplacée dans une (1794) par le veto suspensif pendant deux législatures, et dans une autre (4848) par le droit de provoquer une nouvelle délibération du pouvoir législatif; entièrement refusée au pouvoir exécutif dans une autre (an III).

De l'étude historique et rationnelle du principe de la séparation des pouvoirs, nous allons passer à son étude dans les lois positives.

II.

Principe de la séparation des pouvoirs considéré au point de vue du droit positif en vigueur.

37. Lois constitutionnelles de la République française du 25 février 1875 relative à l'organisation des pouvoirs publics, du 24 février sur l'organisation du Sénat, et du 16 juillet sur les rapports des pouvoirs publics. 38. A ces lois seules s'applique l'article 8 de la première de ces trois lois; clause de révision; organisation constitutionnelle du pouvoir constituant.

39. Répartition du pouvoir législatif entre deux assemblées et le président de la République; mode de confection des lois.

40. Composition et organisation du Sénat.

41. Sa durée et son mode de renouvellement; il ne peut être dissous.

42. Composition et organisation de la Chambre des députés; règles relatives à son renouvellement et à sa dissolution.

43. Attributions; règles et prérogatives communes aux deux Chambres. 44. Attributions spéciales au Sénat, et règles qui lui sont propres.

45. Ses attributions comme cour de justice.

46. Attributions spéciales à la Chambre des députés.

47. Pouvoir exécutif remis au président de la République; formes de son élection; durée de son pouvoir.

48. Attributions constituantes et législatives du président de la République. 49. Promulgation et publication des lois.

50. Attributions gouvernementales du président de la République ; intervention des Chambres dans l'action du pouvoir exécutif.

51. Suite; responsabilité ministérielle.

52. Siége des pouvoirs publics.

37. L'organisation actuelle des pouvoirs publics en France, sous la forme républicaine, est l'œuvre de l'assemblée nationale de 1871, qui, avant de terminer sa carrière, a voté les trois lois constitutionnelles suivantes : 1° la loi du 25 février 1875 relative à l'organisation des pouvoirs publics, qui se compose de neuf articles; 2o la loi du 24 février 1875 relative à l'organisation du Sénal, votée un jour avant la précédente, mais dont l'article 14 et dernier disposait que « la présente loi ne pourra être promulguée qu après

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» le vote définitif de la loi sur les pouvoirs publics »; et 3o la loi du 46 juillet 1875 sur les rapports des pouvoirs publics, composée de quatorze articles.

Nous devons reproduire ici ces trois lois, qui forment le droit constitutionnel du pays et qu'il est nécessaire de connaître dans leur texte et dans leur ensemble.

Leur réunion forme la Constitution de 1875; elles seules sont des lois constitutionnelles et émanent du pouvoir constituant de l'Assemblée nationale. Ce caractère ne doit même pas être étendu à la loi du 2 août 1875 sur les élections des sénateurs [reproduite et analyséc no 565] et à la loi du 30 novembre 1875 sur l'élection des députés [reproduite et analysée nos 556 à 564]; ces deux lois sont des lois organiques, mais non des lois constitutionnelles.

Elles appartiennent au droit administratif, dans ses rapports avec le droit constitutionnel [nos 3 à 7], tandis que les trois autres forment le droit constitutionnel même de la France.

C'est à ces lois constitutionnelles et aux institutions qu'elles consacrent que l'article 1er de la loi du 29 décembre 1875, ci-dessous rapporté, donne une sanction pénale.

En outre, un très-grand intérêt pratique d'ordre constitutionnel s'attache à cette distinction; les lois organiques, comme les lois administratives et toutes les autres (sauf les lois constitutionnelles), peuvent être abrogées ou modifiées par l'action ordinaire du pouvoir législatif; les trois seules lois constitutionnelles des 24, 25 février, et 16 juillet 1875, ne peuvent être modifiées que dans les conditions déterminées par l'article 8 de la première de ces lois.

Loi du 29 décembre 1875, sur la répression des délits qui peuvent être commis par la voie de la presse ou par tout autre moyen de publication, et sur la levée de l'état de siége; art. 1er: Toute attaque par l'un des moyens énoncés en l'article 1er de la loi du 17 mai 1819, soit contre les lois constitutionnelles, soit contre les droits et les pouvoirs du gouvernement de la République qu'elles ont établi, sera punie des peines édictées par l'article 1er du décret du 11 août 1848. L'article 463 du Code pénal sera applicable dans les cas prévus par le paragraphe précédent.

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Loi constitutionnelle du 25 février 1875, relative à l'organisation des pouvoirs publics.

Article premier.

Le pouvoir législatif s'exerce par deux assemblées : la

Chambre des députés et le Sénat.

La Chambre des députés est nommée par le suffrage universel, dans les conditions déterminées par la loi électorale.

T. I.

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LOI CONSTITUTIONNELLE DU 25 FÉVRIER 1875.

La composition, le mode de nomination et les attributions du Sénat seront réglés par une loi spéciale.

Art. 2. Le président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat et par la Chambre des députés réunis en Assemblée nàtionale. Il est nommé pour sept ans ; il est rééligible.

Art. 3. Le président de la République a l'initiative des lois, concurremment avec les membres des deux Chambres; il promulgue les lois lorsqu'elles ont été votées par les deux Chambres : il en surveille et en assure l'exécution. Il a le droit de faire grâce; les amnisties ne peuvent être accordées que par une loi.

Il dispose de la force armée.

Il nomme à tous les emplois civils et militaires.

Il préside aux solennités nationales; les envoyés et les ambassadeurs des puissances étrangères sont accrédités auprès de lui.

Chacun des actes du président de la République doit être contresigné par un ministre.

Art. 4. Au fur et à mesure des vacances qui se produiront à partir de la promulgation de la présente loi, le président de la République nomme, en conseil des ministres, les conseillers d'Etat en service ordinaire.

Les conseillers d'État ainsi nommés ne pourront être révoqués que par décision prise en conseil des ministres.

Les conseillers d'État nommés en vertu de la loi du 24 mai 1872 ne pourront, jusqu'à l'expiration de leurs pouvoirs, être révoqués que dans la forme déterminée par cette loi.

Après la séparation de l'Assemblée nationale, la révocation ne pourra être prononcée que par une résolution du Sénat.

Art. 5. Le président de la République peut, sur l'avis conforme du Sénat, dissoudre la Chambre des députés avant l'expiration légale de son mandat. En ce cas, les colléges électoraux sont convoqués pour de nouvelles élections dans le délai de trois mois.

Art. 6.

- Les ministres sont solidairement responsables devant les Chambres de la politique générale du gouvernement, et individuellement de leurs actes personnels.

Le président de la République n'est responsable que dans le cas de hante trahison.

Art 7. En cas de vacance par décès, ou par toute autre cause, les deux Chambres réunies procéderont immédiatement à l'élection d'un nouveau président. Dans l'intervalle, le conseil des ministres est investi du pouvoir exécutif.

Art. 8. Les Chambres auront le droit, par délibérations séparées, prises dans chacune à la majorité absolue des voix, soit spontanément, soit sur la demande du président de la République, de déclarer qu'il y a lieu de réviser les lois constitutionnelles.

Après que chacune des deux Chambres aura pris cette résolution, elles se réuniront en Assemblée nationale pour procéder à la révision.

Les délibérations portant révision des lois constitutionnelles, en tout ou partie, devront être prises à la majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale.

Toutefois.... (Disposition qui a cessé d'être applicable le 30 janvier 1879 [voir no 47 in fine]).

Art 9. (Abrogé (voir no 52]).

LOI CONSTITUTIONNELLE DU 24 FÉVRIER 1875.

2o.- Loi constitutionnelle du 24 février 1875, sur l'organisation du Sénat.

Article premier.

Le Sénat se compose de trois cents membres :

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Deux cent vingt-cinq élus par les départements et les colonies, et soixantequinze élus par l'Assemblée nationale.

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Les départements de la Seine et du Nord éliront chacun cinq sé

Les départements de la Seine-Inférieure, Pas-de-Calais, Gironde, Rhône, Finistère, Côtes-du-Nord, chacun quatre sénateurs;

Les départements de la Loire-Inférieure, Saône-et-Loire, Ille-et-Vilaine, Seine-et-Oise, Isère, Puy-de-Dôme, Somme, Bouches-du-Rhône, Aisne, Loire, Manche, Maine-et-Loire, Morbihàn, Dordogne, Haute-Garonne, Charente-Inférieure, Calvados, Sarthe, Hérault, Basses-Pyrénées, Gard, Aveyron, Vendée, Orne, Oise, Vosges, Allier, chacun trois sénateurs;

Tous les autres départements, chacun deux sénateurs.

Le territoire de Belfort, les trois départements de l'Algérie, les quatre colonies de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Réunion et des Indes françaises éliront chacun un sénateur.

Art. 3.

Nul ne peut être sénateur s'il n'est Français, âgé de quarante ans au moins, et s'il ne jouit de ses droits civils et politiques.

Art. 4. Les sénateurs des départements et des colonies sont élus à la majorité absolue, et quand il y a lieu, au scrutin de liste, par un collége réuni au chef-lieu du département ou de la colonie et composé: 1o des députés ; 2o des conseillers généraux; 3° des conseillers d'arrondissement; 4° des délégués élus, un par chaque conseil municipal, parmi les électeurs de la commune. Dans l'Inde française, les membres du conseil colonial ou des conseils locaux sont substitués aux conseillers d'arrondissement et aux délégués des conseils municipaux.

Ils votent au chef-lieu de chaque établissement.

Art. 5.

Les sénateurs nommés par l'Assemblée sont élus au scrutin de liste et à la majorité absolue des suffrages.

Art. 6.

Les sénateurs des départements et des colonies sont élus pour neuf années et renouvelables par tiers, tous les trois ans.

Au début de la première session, les départements seront divisés en trois séries contenant chacune un nombre égal de sénateurs; il sera procédé, par la voie du tirage au sort, à la désignation des séries qui devront être renouvelées à l'expiration de la première et de la deuxième période triennale.

Art. 7.

Les sénateurs élus par l'Assemblée sont inamovibles.

En cas de vacance par décès, démission ou autre cause, il sera, dans les deux mois, pourvu au remplacement par le Sénat lui-même.

Art. 8.

Le Sénat a, concurremment avec la Chambre des députés, l'initiative et la confection des lois. Toutefois les lois de finances doivent être, en premier lieu, présentées à la Chambre des députés et votées par elle.

Art. 9. Le Sénat peut être constitué en cour de justice pour juger soit le président de la République, soit les ministres, et pour connaître des attentats commis contre la sûreté de l'État.

Art. 10. Il sera procédé à l'élection du Sénat un mois avant l'époque fixée par l'Assemblée nationale pour sa séparation.

Le Sénat entrera en fonctions et se constituera le jour même où l'Assemblée nationale se séparera.

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LOI CONSTITUTIONNELLE DU 16 JUILLET 1875.

3o.

Loi constitutionnelle du 16 juillet 1875, sur les rapports des pouvoirs publics.

Article premier. Le Sénat et la Chambre des députés se réunissent chaque année, le second mardi de janvier, à moins d'une convocation antérieure faite par le président de la République.

Les deux Chambres doivent être réunies en session cinq mois au moins chaque année. La session de l'une commence et finit en même temps que celle de l'autre.

Le dimanche qui suivra la rentrée, des prières publiques seront adressées à Dieu dans les églises et dans les temples pour appeler son secours sur les travaux des Assemblées.

Art. 2. Le président de la République prononce la clôture de la session. Il a le droit de convoquer extraordinairement les Chambres.

Il devra les convoquer si la demande en est faite, dans l'intervalle des sessions, par la majorité absolue des membres composant chaque Chambre.

Le président peut ajourner les Chambres. Toutefois, l'ajournement ne peut excéder le terme d'un mois, ni avoir lieu plus de deux fois dans la même session.

Art. 3. Un mois au moins avant le terme légal des pouvoirs du président de la République, les Chambres devront être réunies en Assemblée nationale pour procéder à l'élection du nouveau président.

A défaut de convocation, cette réunion aurait lieu de plein droit le quinzième jour avant l'expiration de ces pouvoirs.

En cas de décès ou de démission du président de la République, les deux Chambres se réunissent immédiatement et de plein droit.

Dans le cas où, par application de l'article 5 de la loi du 25 février 1875, la Chambre des députés se trouverait dissoute au moment où la présidence de la République deviendrait vacante, les colléges électoraux seraient aussitôt convoqués, et le Sénat se réunirait de plein droit.

Art. 4.- Toute assemblée de l'une des deux Chambres qui serait tenue hors du temps de la session commune est illicite et nulle de plein droit, sauf le cas prévu par l'article précédent et celui où le Sénat est réuni comme cour de justice, et, dans ce dernier cas, il ne peut exercer que des fonctions judiciaires. Art. 5. - Les séances du Sénat et celles de la Chambre des députés sont publiques.

Néanmoins chaque Chambre peut se former en comité secret, sur la demande d'un certain nombre de ses membres fixé par le règlement.

Elle décide ensuite, à la majorité absolue, si la séance doit être reprise en public sur le même sujet.

Art. 6.

Le président de la République communique avec les Chambres par des messages qui sont lus à la tribune par un ministre.

Les ministres ont leur entrée dans les deux Chambres et doivent être entendus quand ils le demandent. Ils peuvent se faire assister par des commissaires désignés pour la discussion d'un projet de loi déterminé, par décret du président de la République.

Art. 7. Le président de la République promulgue les lois dans le mois qui suit la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée. Il doit promulguer dans les trois jours les lois dont la promulgation, par un vote exprès dans l'une et l'autre Chambre, aura été déclarée urgente.

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