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UN NOUVEAU PROJET DE CODIFICATION DES LOIS

DE LA GUERRE SUR TERRE ET SUR MER,

PAR

M. ERNEST LEHR,

professeur honoraire de l'université de Lausanne, secrétaire général de l'Institut de droit international.

Un des faits remarquables et réjouissants de notre époque, est la préoccupation universelle d'atténuer les maux de la guerre et d'en limiter les effets désastreux, en substituant la notion du droit, d'un « droit de la guerre, à la notion de la force brutale et d'un arbitraire sans frein. Sans parler de la Convention de Genève et de ses admirables conséquences dans l'intérêt des blessés et des malades militaires, on a plusieurs fois songé, depuis vingt ans, à poser les règles des luttes à main armée, à contrôler les anciennes pratiques et à tracer un code des lois et usages de la guerre, tels qu'on les peut concevoir en un siècle de civilisation et de progrès. Les deux plus importants de ces essais de codification sont incontestablement la Déclaration qui a résumé les travaux de la Conférence militaire et diplomatique de Bruxelles (août 1874) et le Manuel des lois de la guerre, élaboré, avec un soin extrême, par l'Institut de droit international (rédacteur principal: M. G. Moynier) et adopté dans sa session d'Oxford, en 1880.

La Déclaration, à qui le caractère officiel de ses auteurs semblait devoir assurer un meilleur sort, est restée jusqu'à présent un simple énoncé de principes, aucun des gouvernements représentés à la Conférence de Bruxelles ne s'étant montré disposé à la ratifier. Quant au Manuel, œuvre de l'assemblée de jurisconsultes certainement la mieux qualifiée pour l'entreprendre, il résume, avec autant de clarté que de méthode, les principes qui paraissent aujourd'hui devoir être suivis ; mais, bien que ses auteurs se soient extrêmement préoccupés de tenir compte des exigences militaires et de ne pas se cantonner dans les

REVUE DE DROIT INT. - 25 ANNÉE.

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sphères sereines de la science pure, on pouvait craindre qu'aux yeux de soldats le Manuel ne fut encore trop un travail de juristes et que l'application ne leur en parût inconciliable avec les nécessités de leur métier, la guerre, dans ses pratiques, étant en somme, du commencement à la fin, la négation du droit selon sa conception vulgaire.

Il n'en est que plus curieux de constater que le Manuel vient de recevoir une éclatante consécration dans un congrès exclusivement militaire tenu à Madrid, en novembre 1892, sur l'initiative de deux capitaines d'état-major, MM. Pio Suarez Inclan et Carlos Garcia Alonso, et d'un commandant d'artillerie, M. Vincent Sanchis y Guillen. Ce congrès, présidé par un général espagnol, M. A. Serrano Echarri, a réuni un très grand nombre d'officiers des armées de terre et de mer appartenant à l'Espagne, au Portugal, à la République Argentine, au Mexique, au Guatemala, au Chili, à Costa-Rica, au Pérou, à l'Uruguay, au Nicaragua, au Honduras, à la Bolivie, au Salvador, à Saint-Domingue, en un mot, à tous les États hispano-portugais soit de l'Europe, soit de l'Amérique. Tous les grades et toutes les armes y étaient largement représentés. On peut donc dire que les résolutions adoptées sont l'expression des manières de voir acceptées, en matière de guerres terrestres ou maritimes, dans cette grande fraction de la race humaine que constituent les diverses nations ibériques. Et ce qui ajoute encore à l'importance de la inanifestation, c'est que, dans la plus considérable de ces nations, en Espagne, le gouvernement, après examen du Projet de codification, a introduit dans les académies militaires un opuscule Cartilla de leyes y usos de la guerra, où l'un des promoteurs et secrétaires du Congrès, M. Garcia Alonso, a fait connaître les antécédents historiques et publié les textes de la Convention de Genève de 1864, des Articles additionnels de 1868, de la Déclaration de Saint-Pétersbourg de 1868, et du Projet de 1892, in extenso; cette adoption dans les écoles du gouvernement équivant à une adhésion, tout au moins en principe, et elle est d'autant plus justifiée que le Projet de codification est excellent presque de tous points.

M. Garcia Alonso ayant en l'obligeance d'offrir à l'Institut son petit volume et le protocole du Congrès, avec le texte complet du Projet de codification, nous pensons intéresser nos confrères en traduisant ici ce projet et en plaçant en regard les dispositions similaires adoptées suc cessivement par l'Institut, soit dans son Manuel, soit dans d'autres de ses projets de règlement.

I

PRÉAMBULE DU PROJET DE CODIFICATION.

Le Congrès militaire hispano-portugais-américain, réuni à Madrid, au Centro del Ejército y de la Armada, au mois de novembre 1892, afin de délibérer sur des réformes dans les lois et usages de la guerre;

S'inspirant de la nécessité de mettre les fins de l'état de guerre en harmonie avec les sentiments d'humanité et avec les progrès scientifiques et moraux de notre temps;

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Acceptant les principes de droit positif et les doctrines de droit subsidiaire (secundario) unanimement établies par les auteurs;

Ayant sous les yeux le Manuel des droits de la guerre rédigé par l'Institut de droit international et les travaux postérieurs auxquels ce remarquable manuel a donné naissance;

• Considérant avec attention, dans leur lettre et dans leur esprit, les Conventions et Déclarations de Paris (16 avril 1856), de Genève (22 août 1864 et 24 octobre 1868), du Caire (novembre 1869), de SaintPétersbourg (11 décembre 1868), de Bruxelles (26 août 1874) et de Londres (29 octobre 1887), ainsi que la jurisprudence résultant des avis de hauts corps consultatifs et des arbitrages ou jugements des tribunaux internationaux;

• Admettant les règles relatives à la neutralité posées par les Conventions de Genève de 1864 et de 1868 susrappelées, sans préjudice des modifications qu'il peut paraître convenable d'apporter à quelques-unes d'entre elles et de l'extension nécessaire de la neutralité au service sanitaire maritime et aux chemins de fer internationaux ;

Prenant en considération les mœurs, le caractère et l'organisation politique des nations représentées au Congrès, ainsi que leurs conditions militaires et topographiques;

Tenant compte des travaux et propositions présentés par les membres et les commissions du Congrès;

Et désirant soumettre à un seul et même critérium les lois des guerres, soit continentales, soit maritimes;

a Adopte les conclusions suivantes, et a l'honneur de s'adresser aux gouvernements des nations représentées au Congrès, afin qu'ils leur accordent leur sanction officielle et proposent aux autres gouvernements d'y adhérer. »

Projet de codification des lois et usages de la guerre continentale et maritime, adopté par le congrès militaire hispano-portugaisaméricain en novembre 1892, sous la présidence de M. le général Alvaro Serrano.

CHAPITRE PREMIER.

Belligérants.

ARTICLE PREMIER. Sont belligérants:

a) Les forces armées de terre et de mer qui constituent les armées (ejércitos) d'un État;

b) Les milices, la garde nationale, les réserves, les corps francs ou tous autres mobilisés par les gouvernements ou ayant fait ouvertement usage de leurs armes sur terre ou sur mer 1;

1 L'article 2 du Manuel des lois de la guerre adopté par l'Institut de droit international, à Oxford, en 1880, assimile les milices à l'armée proprement dite et, quant aux autres corps énumérés à la lettre b, ne les comprend dans la force armée d'un État que s'ils sont sous la direction d'un chef responsable et ont un uniforme ou un signe distinctif, fixe et reconnaissable à distance.

c) Les équipages des navires et convois qui transportent des troupes fuerzas beligerantes), ainsi que ces troupes elles-mêmes à bord des navires 2;

d) Les équipages des navires marchands auxiliaires de la marine de guerre et destinés soit à la défense navale, soit à la poursuite du commerce ennemi;

e) Les conseils de défense, en quelque lieu qu'ils se forment, ainsi que leurs délégués et auxiliaires 2;

f) Les habitants de tout pays envahi qui prennent les armes spontanément et ouvertement pour combattre l'envahisseur, même quand ils n'ont pas eu le temps de s'organiser;

g) Les habitants d'un pays envahi qui concourent à l'exécution des opérations contre l'envahisseur, d'accord avec les personnes qui dirigent ces opérations 2.

2 Le Manuel ne contient pas les rubriques c, e et g.

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