Page images
PDF
EPUB

mes transmises au 30 juin 1915 atteignait 1.036.000 francs. Les mandats arrivant de l'étranger doivent être recopiés sur des mandats suisses; il faut tenir compte des cours du change et en faire bénéficier les destinataires. Toute expédition d'argent fait l'objet d'une fiche, classée par ordre alphabétique, afin qu'il soit toujours possible de répondre aux réclamations et de contrôler les opérations. Au mois de mars 1915, le total des sommes transmises dépassait 600.000 francs.

Quant aux plis chargés ou recommandés qui parviennent journellement au nombre de 200 en moyenne, on en vérifie le contenu, on achemine sur les divers services les demandes qu'ils renferment et l'on dresse la fiche indispensable.

Les mandats-postes télégraphiques dont la transmission avait été active durant les premiers mois ont à peu près cessé, la plupart des commandants de camps n'autorisant plus ce mode d'expédition.

Il faut croire que le travail accompli par la Trésorerie de l'Agence est utile et apprécié, puisque tant de personnes continuent de recourir à Genève pour l'envoi d'argent, alors que le Contrôle général des postes de Berne est précisément établi pour l'acheminement de la correspondance et des mandats des prisonniers.

De fait, il est fort rare que les mandats n'arrivent pas à destination et s'ils ne peuvent être délivrés à cause du décès du destinataire, d'une adresse inexacte ou pour toute autre raison, ils sont toujours retournés à l'Agence, qui grâce à son système de fiches, prévient l'expéditeur.

Inspection des camps de prisonniers.

L'action charitable en faveur des prisonniers exercée à Genève par le Comité international de la CroixRouge pouvait être utilement complétée par les rapports de délégués impartiaux et dévoués qui visiteraient les dépôts et communiqueraient leurs observations au Comité.

Ainsi en a-t-il été décidé dans les derniers jours de l'année 1914 et les résultats obtenus, la multitude de renseignements précis et instructifs fournis par les délégués, les nombreuses améliorations apportées dans certains camps à la suite de leurs rapports ont prouvé que l'initiative de la Croix-Rouge internationale était opportune et utile.

Ajoutons qu'en choisissant ses représentants, le Comité a eu la bonne fortune de tomber sur des hommes compétents et parfaitement conscients des hautes responsabilités qui leur incombaient.

Pendant le mois de janvier 1915, MM. Edouard Naville et Victor van Berchem ont visité en Angleterre les camps de prisonniers militaires de Hollyport, de Dyffryn, de Dorchester et les vaisseaux l'Ivernia sur la Tamise, le Scotian à Portsmouth, puis les détenus civils de Queensferry, ceux internés sur les bateaux de Southend et de Portsmouth. Leur impression a été satisfaisante, surtout pour les militaires qui sont traités sur le même pied que les soldats de l'armée anglaise.

M. le Landammann Arthur Eugster, vice-président du Conseil national suisse, au cours de deux voyages en Allemagne accomplis du 4 au 14 janvier et du 22 février au 11 mars 1915, a inspecté 29 dépôts de prisonniers représentant un total de 226.880 prisonniers dont 145.202 Français. Il s'est occupé tout spécialement du logement et de la nourriture. Si les baraquements lui ont paru en général très bons, il a été moins affirmatif sur le second point et il a formulé des propositions intéressantes pour l'amélioration du régime alimentaire des prisonniers français.

Il a constaté que la distribution de la correspondance, des paquets et envois d'argent, l'établissement de bibliothèques, la question des secours religieux avaient été mûrement étudiées par les autorités allemandes et faisaient l'objet de tous leurs soins.

Cinq voyages, entrepris du mois de janvier au mois de mai 1915, ont permis à M. le lieutenant-colonel Dr C. de Marval de faire une inspection générale de presque tous les dépôts de prisonniers de France, de Corse, de Tunisie, d'Algérie et du Maroc. Partout il a procédé avec la même méthode, interrogeant comme ses collègues les internés dans leur langue maternelle, entrant dans leurs baraques, soulevant les paillasses, goûtant à la nourriture. Ses rapports traitent successivement les questions de logement, d'eau, de couchage, de nourriture, de vêtements, de santé, de travail, de services religieux, de correspondance et présentent pour finir les réclamations et les désirs des prisonniers. M. de Marval a eu l'impression qu'en France ces derniers étaient bien nourris, étaient placés la plupart du temps sous une direction morale excellente mais qu'en certains endroits dans le Midi les logements laissaient à désirer.

Ensuite, pendant le mois de mai 1915, ces deux délégués ont inspecté en commun onze dépôts d'Allemagne et douze dépôts de France, ce qui leur a permis de contrôler et de comparer leurs observations et de formuler un jugement parfaitement impartial sur leurs visites. « C'est avec un plaisir tout particulier, ont-ils écrit, qu'en Allemagne nous nous sommes rendus compte d'améliorations sensibles et constantes introduites depuis un certain temps dans l'organisation générale des camps. La grande question, la seule peut-être qui reste capitale, est celle de l'alimentation. »

Au sujet du midi de la France, ils se sont exprimés en ces termes :

« Les questions importantes de l'hygiène (bains, douches, W.-C., cube d'air, eau potable) paraissent avoir été résolues ici d'une façon moins minutieuse que dans la plupart des camps allemands .... Si les commandants de dépôts nous ont paru presque tous animés du désir de faire le mieux, nous pensons cependant qu'ils pourraient améliorer le service des cantines.... Il est heureux que presque tous les prisonniers valides puissent être occupés en France, rien n'est plus démoralisant comme l'inactivité.... Arrivés au terme de notre mission, nous ne voudrions pas omettre d'exprimer notre satisfaction d'avoir pu constater que les autorités françaises traitent les prisonniers de guerre avec une bienveillance et des sentiments humanitaires hautement appréciés par nous. »

Ces témoignages d'esprits impartiaux de délégués qualifiés auront eu ainsi le grand avantage de fournir aux gouvernements intéressés les renseignements dignes de foi sur le traitement réservé à leurs nationaux, de rectifier les bruits exagérés, les nouvelles alarmantes et tendancieuses qui n'ont cessé de courir au sujet des prisonniers et par là même de faire valoir

vue de l'apaisement et non de l'aggravation ce terrible principe de la réciprocité, seul puissant aujourd'hui.

en

L'échange des grands blessés.

Bien que cette initiative si humanitaire ait été entreprise et conduite par le Conseil fédéral, notre exposé serait incomplet si nous ne mentionnions ici brièvement la part qu'a eue le Comité international de la Croix-Rouge à sa réalisation.

A peine le bruit s'est-il répandu dans les pays belligérants que l'on étudiait la possibilité de rapatrier les blesssés les plus gravement atteints, incapables de reprendre les armes, qu'une multitude de familles se sont adressées à l'Agence pour recommander des cas intéressants.

Toutes ces lettres ont été classées et les demandes mises sur fiches. Le Dr Ferrière, après avoir examiné chaque cas, les a signalés individuellement aux médecins-chefs de lazarets, lorsqu'il les jugeait probants et il a obtenu de nombreuses réponses à ses demandes qu'il communiquait aux intéressés. Un accusé de réception avait été auparavant envoyé aux personnes qui avaient recouru à nos services. Enfin, de grandes listes portant tous les noms des prisonniers qui faisaient l'objet d'une démarche ont été expédiées à intervalles réguliers aux ministres de la guerre à Paris et à Berlin.

Après de longs pourparlers et d'interminables renvois, l'échange des grands blessés s'est opéré du 2 au 11 mars 1915. 2450 amputés, aveugles, aliénés ont passé par Genève, tant dans l'une que dans l'autre direction. En juillet, le second convoi, environ 3545 français et 675 allemands. Le spectacle émouvant de ces passages des victimes de la guerre, le dévouement témoigné par les infirmiers et infirmières de la Croix-Rouge suisse dans les trains et dans les gares, l'enthousiasme

« PreviousContinue »