Page images
PDF
EPUB

» Et quoique intimement persuadés que la France entière, se ralliant autour de son souverain légitime, fera incessamment tomber dans le néant cette dernière tentative d'un délire criminel et impuissant, tous les souverains de l'Europe, animés des mêmes sentiments et guidés par les mêmes principes, déclarent que, si, contre tout calcul, il pouvait résulter de cet événement un danger réel quelconque, ils seraient prêts à donner au roi de France et à la nation française, ou à tout autre gouvernement attaqué, dès que la demande en serait formée, les secours nécessaires pour rétablir la tranquillité publique, et à faire cause commune contre tous ceux qui entreprendraient de la compromettre.

» Vienne, le 13 mars 1815. »

XXI

M. de Talleyrand sortit triomphant de la conférence en agitant dans sa main, à l'approche de son hôtel, le signe de sa victoire aux regards de ses familiers.

L'hésitation qui avait suspendu jusque-là les mesures des souverains et de leurs ministres se changea en une formidable activité de préparatifs. Il n'y avait que des contre-ordres de marche à donner aux armées. Les corps étaient encore entiers et en armes. Les souverains signèrent entre eux un traité solidaire offensif et défensif contre l'usurpateur du trône de France. L'Autriche armait trois cent cinquante mille hommes sous le commandement du généralissime prince de Schwartzenberg, qui avait conduit

ses armées dans la campagne précédente; l'Angleterre et la Prusse réunies armaient deux cent cinquante mille hommes, formant deux armées distinctes, mais opérant de concert, l'une sous Blücher, l'autre sous Wellington; Alexandre, deux cent mille hommes commandés par l'empereur lui-même. Des troupes auxiliaires, espagnoles, suédoises et italiennes, devaient porter ce formidable armement à près d'un million d'hommes aguerris, vainqueurs, conduits par des chefs à qui les dernières victoires devaient rendre la confiance et l'audace, et qui allaient reprendre ainsi la route de la France, rappelés par la témérité d'un seul homme, incertains encore du sort de Louis XVIII, dont ils connaissaient seulement le départ de Paris. Les puissances stipulaient dans la convention de guerre que le roi de France faisait partie principale de cette coalition, dont l'objet unique était la défense de son trône garanti par l'Europe, et qu'il joindrait aux forces combinées les armées françaises fidèles à sa cause. M. de Talleyrand donnait ainsi le rôle principal à ce prince expulsé de sa capitale, déjà errant sur la terre étrangère, et qui, la veille encore, était menacé de l'abandon et du dédain du congrès. Il envoya par diverses routes des courriers au roi pour lui annoncer cette victoire de sa négociation. On peut dire qu'il couronna deux fois son maître. Rôle dangereux pour un sujet.

LIVRE VINGT ET UNIÈME

Réserves de lord Castlereagh dans la convention de guerre. Ouverture

de Napoléon à l'ambassadeur d'Autriche. Hortense près d'Alexandre.

Tentative de la reine

Lettre de Napoléon aux souverains. — Rapport de Caulaincourt à Napoléon. - Réponse du Conseil d'État à Mission de M. de Montrond près de M. de Stassaert près de l'impératrice. — Intrigues

la déclaration des alliés.
Talleyrand, et du baron de
de Fouché avec les alliés.
M. Fleury de Chaboulon et de M. de Werner à Bâle.

Défiance de l'empereur.

[merged small][ocr errors]

Entrevue de

Soupçons de

Napoléon contre Davoust. - Soulèvement de Murat en Italie. - Retour

[blocks in formation]

Sa famille, son enfance. Ses commencements à l'ar

Son mariage.

[blocks in formation]

l'affaire du duc d'Enghien. Son expédition en Espagne. Il devient roi de Naples. Son caractère et sa vie.

I

La politique de l'Angleterre, obligée par la nature de ses institutions libérales à répondre de tous ses actes devant l'opinion d'un peuple libre, n'avait pas permis à son ministre à Vienne, lord Castlereagh, de signer le traité offensif et défensif dans les mêmes termes que la Russie, la Prusse, l'Autriche et la France avaient adoptés. Le respect extérieur de la nation britannique pour l'indépen

dance des autres nations défendait à ses ministres d'avouer l'intention formelle du rétablissement de la maison de Bourbon sur le trône de France. Il fallait que les ministres pussent répondre au parlement, quand on leur demanderait compte de leurs stipulations, que la sûreté de l'Angleterre, la délivrance du continent et la guerre contre Napoléon étaient le but unique de leurs armements et de leurs subsides. Ces ministres ne donnèrent donc leur adhésion aux traités et à la convention de guerre qu'en termes ambigus, dont tous comprenaient la signification, dont nul ne pouvait accuser le texte. Ils déclarèrent qu'ils ne se joignaient à la coalition que pour poursuivre la guerre commune contre l'ennemi commun, nullement pour imposer tel ou tel gouvernement à la France. Cette réserve était nécessaire à leur responsabilité devant le parlement anglais. Par un étrange revirement d'opinion et par un de ces contre-sens inexplicables, mais naturels à toutes les oppositions dans les pays libres, un parti peu nombreux, mais éloquent, de la chambre des communes, affichait une partialité passionnée pour le bonapartisme. Ce parti sacrifiait le patriotisme à cette soif de popularité à tout prix, maladie des orateurs, et recherchait cette popularité jusque dans le nom de Napoléon, l'ennemi de leur patrie. Toutefois les ministres anglais, sûrs du bon sens de la majorité et du concours de leur nation en masse, s'engagèrent à verser un subside de guerre de cent vingt-cinq millions de francs dans les caisses de la coalition pour solder une partie des troupes.

« PreviousContinue »