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<< dite; ils n'avaient ni prétoire, ni appariteurs, ni force « exécutoire. Mais ils avaient, en certains cas, une sim«ple notio ou cognitio, comme les arbitres ou les délé«<gués des magistrats; et leurs décisions étaient remises << aux magistrats pour les mettre à exécution, sans qu'ils puissent statuer sur les causes criminelles, sans qu'il puisse en être appelé, si ce n'est au prince » (Code, 1, IV, 8). Mais l'évêque ne peut juger que quand les parties sont d'accord pour s'en rapporter à lui et en qualité d'arbitre.

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De plus, l'évêque a juridiction disciplinaire sur les ecclésiastiques de son ressort; il embrasse, dit M. Serrigny (eod. loc., p. 397), « non seulement la discipline propre«ment dite, mais même les délits de droit commun ayant «< trait à l'observance de la religion; on distinguait à l'égard des ecclésiastiques entre les délits légers et les <«< crimes proprement dits; les premiers étant donnés à « l'autorité religieuse, les seconds aux tribunaux ordi<<< naires. >>

Ainsi un clerc commettait-il un délit de droit commun, tel qu'un adultère ou un homicide, il devait être déféré au juge laïque, celui-ci était tenu de juger l'accusation. dans le délai de deux mois si l'accusé était condamné, il devait être dégradé par l'évêque avant que le jugement fût mis à exécution (Nov. 83). S'il s'agissait, au contraire, d'un délit ecclésiastique, le clerc était traduit directement devant l'évêque, sans passer devant le juge ordinaire, pour être condamné aux peines encourues pour le délit.

Il en fut de même pour les matières civiles. Les clercs obtinrent, lorsqu'il s'agit d'actions pécuniaires, de n'être appelés que devant leur évêque qui devait juger l'affaire

promptement, sans frais et sans écritures; il n'était pas besoin de libelles pour les citer en justice. Si, soit à cause de la nature de l'affaire, soit pour tout autre motif, il n'était pas possible à l'évêque de juger il était alors permis d'attirer le clerc devant le juge civil qui devait statuer en observant les égards dus aux ecclésiastiques (Nov. 123, c. 21).

Ainsi donc, comme le dit Justinien au Code (1, IV, De episcopali audientia, 29, § 4), les causes ecclésiastiques sont nécessairement renvoyées aux saints évêques, aux métropolitains, aux sacrés synodes et aux très saints patriarches. Dans les causes civiles, ceux qui veulent plaider devant l'évêque le peuvent, cela leur est permis; mais on ne peut contraindre ceux qui refusent son tribunal, car les jugements sont chose civile.

Indépendamment de ce droit de justice, l'évêque a aussi dans sa ville un droit de police qui lui donne une grande autorité et en fait un magistrat des plus influents. Il est appelé à l'élection des défenseurs de la cité, à la nomination des tuteurs et des curateurs. Il doit empêcher l'abandon et l'exposition des nouveau-nés (Code, 1, IV, 24). Il doit empêcher aussi la prostitution, et il devient le refuge des filles et des esclaves que leurs pères ou leurs maîtres voudraient forcer à mal faire. Il doit visiter les prisons publiques, modérer les châtiments et peut faire mettre en liberté le jour de Pâques tous ceux qui, par leur présence, ne gâteront pas ce jour de fête, a quibus contaminari potiùs gaudia lætitiamque communem, si dimittantur, animadvertimus, eos ab his secernimus (Code, 1, IV, 3).

Mais, avant tout, l'évêque est chargé de veiller sur le clergé et de réprimer tous les délits ecclésiastiques; il

veille sur la chasteté des prêtres, empêche le port illégal de l'habit religieux, défend les jeux de hasard parmi les clercs, et châtie sévèrement ceux qui s'y adonnent (Code, 1, IV, 14).

C'est enfin l'évêque qui donne son assentiment pour la fondation des églises ou des établissements religieux. C'est lui qui consacre les églises et fait la dedicatio dans les formes usitées. Le sol lui-même, en effet, avant la construction d'un temple, devait recevoir une consécration. Car il était défendu à toute personne de bâtir une église, avant que l'évêque du lieu y ait prononcé des prières, planté une croix, fait une procession publique, et avant qu'il ait publiquement annoncé qu'une église allait être érigée en ce lieu. L'administration des églises et de leurs biens est confiée également aux évêques qui les administrent soit par eux-mêmes soit par le clergé de leur église (Nov. 120, c. 6). Et si quidem sanctissimæ ecclesiæ sint vel aliæ venerabiles domus quarum gubernationem loci sanctissimus episcopus aut per se aut per venerabilem chorum clericorum faceret.

Les églises elles-mêmes et les biens des établissements de la religion chrétienne sont protégés d'une manière toute particulière, et entourés de nombreux privilèges.

Les églises sont exemptées des charges réelles ordinaires, mais pas des impositions extraordinaires. Elles sont dispensées des charges sordides, à l'exception de la réfection des ponts et des chemins (Nov. 131, c. 5). Elles ne sont obligées à aucun transport, excepté pour les voyages de l'empereur.

La prescription contre elles, d'abord de cent ans, est fixée à quarante ans par les Novelles 105 et 131, c. 6. La loi punit des derniers supplices les clameurs tumul

tueuses dans les églises pour exciter et entretenir la sédition (Code, 4, XII, 5). L'interdit ne quid in loco sacro fiat défend que l'on fasse ou que l'on apporte dans le lieu sacré quoi que ce soit qui puisse y causer quelque incommodité ou quelque détérioration.

Le droit d'asile est législativement réglementé. Les églises peuvent servir d'asile, même aux esclaves maltraités injustement; une exception est cependant faite contre les juifs, les païens, les grands criminels qui, aux termes de la Novelle 17, c. 7, ne peuvent profiter du droit d'asile des églises. Mais si l'esclave n'a pas injustement été maltraité, il sera rendu à son maître (Institutes, liv. 1, tit. VIII).

La protection n'est pas limitée au temple lui-même; elle s'étend à toutes ses dépendances, même profanes, cellules, habitations, jardins, bains, places, portiques; il est défendu aux réfugiés de manger ou de dormir dans l'intérieur du temple; les clercs devaient leur désigner l'espace qui suffisait à les protéger; il leur était défendu d'entrer avec des armes soit dans le temple, soit dans ses dépendances. S'ils en avaient apporté, les clercs devaient les avertir de les déposer. S'ils s'y refusaient, ils pouvaient être arrachés du temple, même à main armée; mais l'expulsion ne pouvait avoir lieu que de l'avis de l'évêque et sur l'ordre de l'empereur ou des juges (Code, 1, XII, 2, 3).

La peine de mort était prononcée contre ceux qui violeraient un temple pour en arracher un fugitif. Si cependant celui qui s'est réfugié dans le temple est un esclave, un colon ou un affranchi, et s'il a fui après effraction ou vol ou pour échapper à la puissance de son maître, il doit être, par les soins des défenseurs de la cité dès qu'ils en sont prévenus, remis à leurs maîtres et réta

blis dans leur condition (Code, eod. tit., De his qui ad ecclesiam confugiunt, loi 6, § 5).

Au milieu des lois sans nombre que régissent les établissements de la religion chrétienne, le système général du Code et des Novelles se dégage avec une parfaite netteté. Il tend à multiplier indéfiniment les biens de l'Église; dès qu'il s'agit d'une acquisition, toutes les voies sont ouvertes. L'empereur accorde aux venerabiles loci tout le droit commun, plus que le droit commun; les privilèges succèdent aux privilèges, les immunités aux immunités; la faveur dont jouit l'Église va croissant tous les jours.

Le législateur ne songe pas seulement à favoriser de toute manière l'enrichissement illimité des églises, hospices et monastères. Par une conséquence toute naturelle, il pense qu'il est également bon de les empêcher de se ruiner. Aussi avec la liberté la plus vaste d'acquérir, vient la prohibition la plus générale et la plus formelle d'aliéner. Pour sanctionner cette prohibition et mettre obstacle à toute aliénation, les acquéreurs de biens ecclésiastiques, sont soumis à un régime exceptionnel et sévère1.

Le système général du Code et des Novelles peut donc se résumer en ces quelques mots : faciliter les acquisitions, entraver les aliénations par tous les moyens possibles privilèges quand il s'agit d'acquérir, incapacité quand il s'agit d'aliéner 2.

L'Église était une chose sacrée par suite de la consécration faite par l'évêque; et comme toutes les choses

1 Voyez au Cod. Just., L. 17, 21, 24, 25, de sacr. Eccles., 1, II. 2 Coulondre, These doct., Paris, 1886, pag. 128 et suiv.

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