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node, né à Kief en 1681, mourut en 1704, après avoir été appelé successivement à sa crer l'impératrice Catherine Ire, Pierre II et l'impératrice Anne. Protecteur des lettres, il avait formé l'une des plus considérables bibliothèques qu'eût possédée jusque là la Russie. Les prédicateurs russes considèrent encore comme un modèle l'oraison funèbre qu'il prononça à la mort de Pierre le Grand, plus toutefois pour la logique, la richesse et la clarté des idées, que par rapport au style, qui est saccadé et peu correct. Cette pièce, traduite en français, se trouve dans le Jour nal des Savants de décembre 1726. Procopovitsch écrivait mieux en latin que dans son idiome natal. Entre les ouvrages qu'il a laissés, nous ne parlerons que de ceux composés dans la première de ces langues; les autres d'ailleurs ne sont que des discours, sermons, oraisons funèbres, mémoires politiques, pièces de vers, etc., à peu près inintelligibles. Ses meilleurs ouvrages en latin sont : Miscellanea sacra, Breslau, 1745; christiana orthodoxa Doctrina de gratuitá peccatoris per Christum justificatione, Breslau, 1768-69; Tractatus de processione SpiritusSancti, Gotha, 1772; christianæ orthodoxæ Theol., etc., Koenigsberg, 1773.

PROCRIS. (Mythologie). Voyez Cé

PHALE.

PROCUREUR - GÉNÉRAL, PROCUREUR DU ROI. (Voyez MAGISTRAT et MINISTÈRE PUBLIC.)

* PRODICUS, sophiste, né dans l'ile de Céos, florissait environ quatre cents ans avant Jésus-Christ. Disciple de Protagoras, dont il égala l'éloquence, il vint ouvrir une école à Athènes, et y effaça bientôt tous les autres sophistes. Il partagea, avec Protagoras et Gorgias, l'honneur d'avoir mis en ordre et distribué par classes tous les sujets que les rhéteurs nomment lieux communs. Xénophon nous a conservé de lui une espèce d'apologue bien connu : c'est Hercule entre le Vice et la Vertu, figurés par deux femmes qui tâchent à l'envi de l'attirer. Il nous reste encore, dans l'Axiochus de Platon, l'extrait ou l'analyse d'une harangue dans laquelle Prodicus se proposait de rassurer ses auditeurs sur la crainte de la mort. Outre un Traité des synonymes, il avait composé sur les différentes parties de la rhétorique divers ouvrages dont on doit regretter la perte. Le sophiste de Céos, tourné en ridicule par Aristophane ( dans les Nuées et les Oiseaux), finit par être traduit en justice,

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et condamné à boire la ciguë. Sa mort est postérieure de quelques années à celle de Socrate, que l'on met au rang de ses disciples: ainsi l'on peut conjecturer qu'il mourut dans un âge avancé. (Voyez pour plus de détails la dissertation de G.-A. Cubæus intitulée: Xenophontis Hercules Prodicus et Silii Italici Scipio, perpetua notá illustrati, præmissà de Prodico dissert., Leipsig, 1797, in-8°. PRODROMUS. Voyez THÉODORE. PRODUCTION. (Économie politique.) Valeur donnée par le travail à un produit préexistant. Née du travail, la production enfante à son tour les capitaux qui constituent la richesse des nations. Adam Smith, le premier, a systématisé cette science, a formulé les règles à suivre pour arriver au plus haut degré de production, supputé les produits du travail présent, et prophétisé son influence future sur la prospérité, le bonheur et la moralité des peuples. Ce grand ouvrage jeté au milieu des nations oisives de l'Europe, fit croire que la philosophie économique avait la première lancé l'anathème contre le désœuvrement. Le précepte vient de plus haut et de plus loin; Dieu dit au premier homme : « Tu vivras par le travail ». Le christianisme dit aux fidèles : « TravailIez ainsi que nous vous l'avons ordonné ». L'Église place au premier rang des sept crimes capitaux cette oisiveté dont les philosophes chrétiens firent la mère de tous les vices. » A une époque où la religion remplissait les temples et les couvents d'une paresse pieusement stérile, on vit naître fadage : « Qui travaille prie; » comme pour placer le travail au-dessus des prières.

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Ces soldats qui se firent plus tard un dogme politique de l'oisiveté, ces prêtres, dont le désœuvrement devint un précepte religieux, furent les premiers producteurs des monarchies occidentales; les moines étaient nos uniques savants, nos seuls maitres lecture, écriture, calcul, médecine, défrichement des landes, desséchement des marais, culture agricole, manufactures, routes, commerce; nous leur devons tous ces essais informes et grossiers, il est vrai, mais étonnants pour l'époque, qui permirent à l'Europe de marcher sans eux, plus vite qu'eux et contre eux. Ces soldats, qui dévastèrent l'Occident, le mirent, après l'invasion, à l'abri de dévastations nouvelles, et seuls hommes de guerre de ces siècles barbares, ils laissèrent au peuple le temps et la paix nécessaires pour produire.

La féodalité fit oublier ces bienfaits; le prêtre sortit de l'ordre religieux, le soldat de l'ordre militaire; tous entrèrent dans l'ordre politique. Le système théologicoféodal, improductif par son essence, haissait la production jusque dans les serfs qui pouvaient remonter à la liberté par le travail. Dans les républiques de l'antiquité, les citoyens oisifs voulaient arriver à la fortune par le travail de leurs esclaves le maitre était une espèce de chef de ferme, d'atelier, de fabrique. Le seigneur féodal, prêtre ou soldat, puissant par le glaive ou l'encensoir, vivait de domination et d'orgueil, au milicu d'un luxe gothique, privé de presque toutes les nécessités de la vie actuelle.

Fille de la paix et de la liberté, la production alla s'établir dans les républiques; Venise et la Hollande lui durent leur puissance; Gênes, Florence, Pise, les villes anséatiques, leur indépendance et leur bon heur. La force et la richesse de ces faibles pays excitèrent l'envie des rois de l'Europe; ils voulurent égaler au moins le luxe d'un doge ou le faste d'un podestat ; ils excitèrent au travail, et la prodigalité des cours, insatiable de taxes nouvelles, fit, à mesure de ses besoins, reculer le despotisme pour faire place à la production. De là vinrent les richesses de la France et de l'Angleterre: nées de la liberté, elles la produisirent à leur tour.

périorités existantes, les unes comme féodales, les autres comme théologiques, toutes comme improductives, n'admettrait que les seuls producteurs au droit de faire les lois, au devoir de les administrer, en un mot à toutes les immunités du gouvernement. Qu'adviendrait-il de cette rénovation politique? En plaçant les honneurs dans la richesse, la fortune remplacerait bientôt la vertu, et toute moralité serait bannie de l'ordre social. Comme les propriétés passent du père au fils, les talents seraient aussi sensés héréditaires, et les emplois le seraient en effet ; une aristocratie financière sans contre-poids pèserait sur le pays, et toute égalité serait proscrite. Comme les fonctionnaires, grands propriétaires territoriaux, chefs d'ateliers et de manufactures, disposeraient du peuple qu'ils feraient vivre par le travail, en qualité de capitalistes, ou qu'ils pourraient légalement plonger dans la misère, puisqu'ils fixeraient le taux des salaires, en qualité de législateurs et de magistrats ; toute liberté, tout bien-être disparaîtrait sous cette combinaison qu'on propose comme la combinaison la plus libérale de l'école moderne.

Ces idées, qu'on fait circuler comme nouvelles, sont d'une haute antiquité, et les fruits qu'on leur a vu produire dispenseront la société actuelle d'une funeste convoitise: tel fut le gouvernement de Carthage, tel fut jusqu'au serrar del consiglio, celui de Venise; Gênes, Florence, Sienne, Pistoïe, tombèrent victimes de ses tristes effets. Là, les chefs du peuple étaient aussi des chefs d'ateliers; l'industrie conduisait au pouvoir, parce qu'elle menait à la fortune. Qu`arrivat-il? Un sénat, des inquisiteurs, un doge, un podestat, se disputant des lambeaux de tyrannie; la noblesse de soie proscrivant la noblesse d épée; le corps de marchands ne voulant d'assemblées délibératives que dans les confréries d'industriels, établirent partout un arbitraire perturbateur, une police haineuse qui, après avoir tari les sources de la richesse publique, finirent par livrer à l'avidité de l'étranger la liberté et la patrie.

Mais la haine de l'improductive féodalité est encore tellement vivace, que, de nos jours, un économiste souvent original et parfois bizarre, Henri de Saint-Simon, a très-bien vu qu'il n'était de citoyens utiles que les seuls producteurs ; prenant ensuite la production pour la politique, il a demandé que les oisifs fussent exclus de toute participation au gouvernement, et que l'administration de l'État fût uniquement confiée aux industriels. Saint-Simon a fait école ; et comme les adeptes vont toujours plus loin que leur maître, ses disciples ont multiplié les livres, les pamphlets, les journaux, les cours publics et privés, pour propager, en j'outrant, cette nouvelle réforme économique. C'était saper l'ordre social dans sa base. Les républiques de la Grèce, le colosse Par un indéfinissable aveuglement, ce sont romain, ne sont guère appréciés que sous des hommes de talent et de bonne foi, dé- le rapport politique; la gloire et la liberté fenseurs constants et sincères de l'indépen- semblent cacher l'économie intérieure de dance du citoyen et de la cité, qui, par un ces pays célèbres. L'apparence est loin de amour mal entendu de la liberté, nous ra- la réalité; Sparte était un vaste atelier où mèneraient à la servitude. deux cent mille ouvriers, nommés ilotes, Leur erreur, en effet, proscrivant les su exploitaient les propriééts de trente mille

industriels appelés citoyens. Les esclaves, seuls producteurs d'Athènes, avaient encore des citoyens pour chefs d'ateliers. A Rome, la hiérarchie de servitude semblait plus funeste; le citoyen travaillait par la main des esclaves; et comme l'argent lui manquait pour alimenter ses travaux, il aliénait, pour s'en procurer, une partie de sa liberté; il briguait cette servitude qu'il appelait patronage, et le peuple-roi n'était, en économie politique, qu'un peuple de clients pressuré par les énormes usures des sénateurs. Ainsi, une servitude plus ou moins honteuse, une misère plus ou moins profonde s'établit partout où la richesse s'empare de l'autorité, et les ut opics qui voudraient livrer la puissance à l'industrie feraient rétrograder l'espèce humaine. De ces exemples il faut nécessairement conclure que, loin de livrer aux producteurs le droit de faire les lois, il faut laisser la production créer en liberté ses merveilleuses richesses, sous la protection des lois dictées par son intérêt, mais qui ne sont pas son ouvrage.

De tous les genres de production quel est le meilleur ? Quel est celui que les lois doivent le plus favoriser, parce que lui-même exerce le plus d'ascendant sur la prospérité des nations? Ici, la division éclate encore parmi les économistes : de Sully à Quesnay, les écrivains qui pensent avec justesse que tout produit vient médiatement ou immédiatement de la terre, en déduisent la conséquence erronée, que la terre étant l'origine de toute production, l'industrie agricole est la première en elle-même et par ses résultats. Ceux qui, comme Colbert et Forbonnais, placent la richesse dans l'argent, ne voient de production que dans l'industrie commerciale, o, pour mieux dire, dans le commerce extérieur, et oublient que l'argent étranger, rapporté par les importations du commerce, n'est que la représenta tion des capitaux dus à l'industrie agricole ou manufacturière intérieure, et échangés par l'exportation dans les pays lointains. Ceux enfin qui, depuis Gournay et Adam Smith, considèrent l'industrie manufacturière comme l'unique source des richesses d'un État, n'ont pas réfléchi qu'on ne manufacture que les objets déjà créés par l'industrie agricole, et que ces objets manufacturés n'ont eux-mêmes de valeur réelle et présente qu'autant que l'industrie commerciale les fait circuler et consommer.

tes les unes des autres : l'industriel ne peut produire sans l'agriculteur, ne peut vendre sans le commerçant ; et les lois, les doctrines qui veulent favoriser une production à l'exclusion des autres, choquent la raison et nuisent à la prospérité. Dans un état de civilisation peu avancée, une seule des trois industries peut momentanément suffire à un peuple en ce sens, Sully prétendait que « le labourage et le pastourage sont les deux mamelles d'un État. » Venise vivait par ses manufactures, et sans propriétés agricoles. Quelques insulaires de la Méditerranée existent sur des rochers stériles par le seul commerce de transport. Je ne dis rien des sauvages: on ne peut rien induire de leur vie précaire et nomade, où tout manque, fors la liberté.

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Cette corrélation des trois industries rend les lois sur la production beaucoup plus difficiles que ne l'ont cru jusqu'à ce jour les ministres et les législateurs. Ce qu'on accorde de faveur à l'une au détriment des autres, les paralyse toutes à-la-fois. Ces règlements sur les forêts, les vins, les fers, les primes, les exclusions, les monopoles en offrent une preuve vivante.

Il y a mieux : il ne suffit pas d'encourager ly une industrie, une production quelconque dans ses rapports avec toutes les industries et toutes les productions possibles; il faut encore considérer chacune d'elles dans sa corrélation avec le commerce qui fait circuler les produits, avec le consommateur qui les détruit, et rend par conséquent nécessaires une production et une circulation nouvelles. La consommation est la fin de la production; la circulation est à-la-fois le moyen de produire et de consommer. La production est stérile lorsqu'elle s'établit sur un lieu qui manque de routes, de canaux, de marchés, d'instruments de transports : elle ne peut ni aller chercher ni faire venir le consommateur; la misère alors s'établit au milieu de la richesse. et l'on meurt de besoin au milieu des capitaux amoncelés. Tels sont les sauvages du nord dans les deux continents, lorsqu'ils entassent des pelleteries que le commerce ne vient pas acheter; tel un producteur de vins quand la guerre vient fermer l'Océan ; tels les producteurs an glais quand le blocus continental leur interdit les marchés de l'Europe.

La production ayant la consommation pour objet, doit produire toujours autant qu'il

Les industries sont donc ainsi dépendan- est possible, mais jamais plus qu'on ne peut

consommer. Les produits que les consommateurs appellent actuellement, ou vont incessamment appeler sont des capitaux véritables. Les objets surabondants, lorsque tous les marchés sont saturés, deviennent stériles, et n'auront de valeur qu'au moment où des débouchés nouveaux viendront en permettre l'échange. Il est même des productions excédantes qui sont stériles à perpétuité : les objets susceptibles d'avarie, ceux manufacturés dans l'espoir d'une guerre, d'une paix, même d'une mode frivole qui change subitement, ceux enfin qu'on transporte dans un marché où l'abondance a détruit leur valeur, et qui ne rembourseraient pas les frais d'une exportation nouvelle.

Sans doute, malgré l'égalité réclamée par la production, il est des produits privilégiés. La masse des capitaux consacrée à produire des tissus de cachemire ou des points d'Angleterre, donnera des bénéfices bien autrement considérables qu'une somme égale produisant du froment, du vin ou des moutons. Quelques économistes, trompés par ces différences de valeur, veulent que les peuples se rangent du côté des plus gros profits. Il est plus sage de laisser faire le producteur; le génie industriel n'est que trop porté par instinct et par calcul à exiger de ses capitaux le gain le plus fort possible. D'ailleurs, si, déférant à cette intempestive invitation, nos laboureurs, nos vignerons, nos bergers, voulaient en corps tisser la soie ou le duvet soyeux des chèvres du Thibet, la famine suivrait leur désertion, et cette exubérance de luxe n'aurait produit qu'un faste sans valeur.

L'industrie agricole est incontestablement la première : tout vient d'elle. Mais, quoique ne travaillant que sur les objets que l'agriculture lui livre, l'industrie manufacturière offre des bénéfices bien plus considérables; et l'industrie commerciale n'exploitant que les capitaux que lui cèdent les deux autres, accumule à son tour des richesses plus fortes encore. Ainsi, ôtez l'agriculture, il n'est plus d'industrie; ôtez l'agriculture et l'industrie, il n'est plus de commerce. Laissons donc sous une protection égale ces trois sources de la fortune publique dans un état de dépendance réciproque et de solidarité mutuelle. Elles se demanderont, elles s'accorderont selon leurs besoins progrès, prospérité, décadence, tout est commun entre elles. Industrie agricole, manufacturière, commerciale,

voilà toutes les richesses des nations: production, circulation, consommation, voilà toute l'économie politique.

Comme il est des productions plus fécondes que les autres, il est aussi des producteurs qui exercent un plus grand empire sur la production. On n'a que trop répété que les gouvernements étaient stériles par essence; on les a trop représentés comme le lion de l'Écriture, quærens quem devoret, non-seulement improductifs, mais dévorant encore la substance produite par les nations. I importe à l'ordre public et aux vrais principes de l'économie de rétablir des faits dénaturés auxquels la prodigalité, la faiblesse ou l'impéritie du pouvoir a donné une apparence de réalité.

Le gouvernement est le premier des producteurs toutes les branches de l'économie publique lui doivent ces lois dont la libéralité protectrice permet à la production de créer ses richesses, cette sécurité qui naît de l'ordre intérieur, cette sûreté produite par une force constamment armée contre toute agression étrangère. C'est au gouvernement que l'industrie commerciale est redevable de ces routes, de ces canaux, de ces ports, de ces marchés nationaux ou étrangers, de ces traités de commerce, qui permettent à nos produits de circuler sur terre et sur mer, d'aller sur tous les points du globe interroger les besoins divers et satisfaire les nécessités lointaines, sans craindre sur la rive inhospitalière des peuplades barbares, ou, dans les bazars des nations les plus despotiques, ni séquestre, ni spoliation, ni abus de pouvoir. C'est au gouvernement que l'industrie manufacturière doit l'introduction de ces produits exotiques qui ont accru si miraculeusement les richesses du pays, l'établissement de ces machines qui, simplifiant le travail qu'elles accélèrent, permettent de produire plus et mieux, la pondération de ces lois de douane, qui, sagement balancées avec le tonnage de l'étranger, offrent à notre concurrence l'égalité ou le privilége. C'est au gouvernement que l'industrie agricole doit la plupart de ses conquêtes et de ses perfectionnements : mûriers, millet, sarrasin, tabac, oliviers, riz, coton, sucre indigène, merinos, nouvelles espèces d'arbres, d'arbustes, de plantes, de céréales, variétés de bestiaux et croisement de races.

Sans doute le pouvoir, quel qu'il soit, quel qu'il puisse être, n'a pas fait, ne fait

point, ne fera jamais tout ce qu'il pourrait faire pour les trois industries. La part des remontrances est large, et je me suis souvent placé sur ce terrain que l'amour du bien public n'a pas encore complètement exploré; mais l'hostilité est injuste, qui, faisant un crime à la puissance du bien qu'elle n'a pas fait ou du mal qu'elle a pu faire, refuse de lui tenir compte du bien qu'elle ordonne et du mal qu'elle empêche. Il est cependant une autre puissance qui, rivale du pouvoir politique, invente, formule, signale, et souvent accomplit ellemême ce qui s'opère de bien, de bon et de beau; c'est à la science que la production, la circulation et la consommation doivent presque tous leurs prodiges. Les créations de l'industrie sont le fruit du talent; et ce que le hasard a seul découvert, le génie seul encore le systématise et l'applique. Mais les plus utiles inventions eussent été stériles et oubliées, si les capitaux publics ou privés n'avaient permis de les tirer du domaine des théories pour les faire descendre sur le terrain de l'application, et de les livrer ainsi, non comme de vagues spéculations, mais comme des instruments réels de bien-être et de prospérité.

Viennent ensuite les capitalistes qui, pour accroître leur fortune, la consacrent à la

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production, et qui, pour augmenter leurs richesses privées, sont dans l'heureuse nécessité de susciter la richesse publique : par le salaire ils créent le travail; par le travail, la production; par la production, le bien-être général, la satisfaction des besoins, et cette moralité du peuple qui naît des besoins satisfaits.

Lorsque plus tard nous nous occuperons du travail, nous aurons à considérer l'utilité des machines et celle des ouvriers, qui malheureusement, pour la perfectibilité de l'espèce humaine, ne travaillent jamais mieux que lorsqu'ils approchent le plus de la perfection des machines. Fatale destinée de la classe pauvre, à qui le bien-être physique n'est vendu qu'aux prix d'une intelligence qu'il faut rendre routinière et mécanique.

Telle est la production dans son point de vue général il nous reste à jeter un coup d'œil sur ce qu'elle a fait, sur ce qu'elle peut faire encore. Mais les données statistiques manquent pour tous les États : ceux où la liberté s'est établie sont les seuls qui nous offrent des probabilités assez approximatives tels sont la France, l'Angleterre, les États-Unis; les autres ne présentent qu'incertitude et vague.

10 millions d'habitants produisent aux État-Unis. 10 millions d'habitants produisent en Espagne.

La diversité d'emploi dans les populations explique cette différence dans les produits. Le peuple agriculteur de l'Espagne est plus de la moitié du nombre de ses habitants, et l'on porte à trois millions la masse des improductifs. En Portugal, les cinq sixièmes Tome 19.

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ne participent pas à la propriété. En Russie, sur 26,000,000 d'individus, la population libre ne s'élève qu'à trois, et les sept huitièmes végètent dans la servitude. En Suède, au contraire, les trois quarts des habitants sont agriculteurs.

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