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PROVANCHÈRES (SIMÉON DE), médecin, né à Langres, vers 1540, mort en 1617, exerça avec succès sa profession à Sens, obtint le titre de médecin du roi, et fut député aux États-Généraux de 1614. On a de lui : des Traductions de la Chirurgie de Jacques Houllier, Paris, 1576, in-16; et de la Chirurgie de Fernel, Toulouse, 1567, in-8°. On a encore de lui une traduction latine des quatrains de Pibrac, in-8°.

PROVENCE (la) fut appelée par les Romains Provincia, parce que ce fut la première partie des Gaules réduite par eux en province romaine. Sous cette dénomination se trouvaient compris, non seulement la Provence proprement dite, mais encore le Languedoc, le Dauphiné et la Savoie jusqu'à Genève. Vers le 11e siècle, on restreignit le nom de Provence au territoire renfermé entre la mer Méditerranée, le Rhône, la Durance et les Alpes. Les Romains pénétrèrent pour la première fois dans ce pays, à la sollicitation des Phocéens établis à Marseille, qui réclamaient leur appui contre les anciens habitants. Ceux-ci, vaincus par le consul Fulvius, 125 ans avant Jésus-Christ, furent soumis entièrement deux ans après par Sextus. La Provence, enlevée aux Romains par Euric, roi des Visigoths, fut transmise à Alaric, fils de ce prince, et passa ensuite sous la domination de Théodoric, roi des Ostrogoths, qui la laissa à sa fille Amalasonte et à son petit-fils Athalaric. Plus tard, les rois mérovingiens la voyant abandonnée par les Ostrogoths, vaincus par Bélisaire, la partagèrent entre eux. Enfin, sous les Carlovingiens, elle fut possédée par Lothaire, qui la donna à son fils Charles, à titre de royaume, en 855. Ce royaume s'étant éteint environ cent après, plusieurs princes en jouirent alors sous le titre de comtes jusqu'à Charles III, roi de Sicile, après la mort duquel Louis XI, qui prétendait avoir été institué son héritier, s'empara de la Provence. Louis XI étant mort à son tour, René, duc de Lorraine, dont les droits sur la Provence étaient plus légitimes, puisque le roi René était son aïeul maternel, les fit valoir; mais ce fut en vain. Une sentence arbitrale le débouta, et Charles VIII réunit à perpétuité la Provence à la couronne. Les recherches que l'on voudrait faire sur ce pays seront facilitées par le tableau suivant : Boson Ier, premier comte bénéficiaire.

Boson II

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Louis XI, roi de France.

La Provence réunie à la France par
Charles VIII.

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PROVERBE (Littérature), du latin proverbium, façou de parler. Ce mot a plusieurs acceptions. Dans le sens le plus rapproché de son origine, il désigne ces phrases toutes faites, ces locutions usuelles qui, comprises de tout le monde, éclaircissent, par allusion une idée différente de celle qu'elles expriment, et sont devenues comme des mots de la langue. Exemple : Point d'argent, point de Suisses; passez-moi la rhubarbe, je vous passerai le séné.

Telle est la propriété de ces mots heureux Qui, par le prompt effet d'un sel réjouissant. Deviennent quelquefois proverbes en naissant. (BOILEAU, épître 10.) Comme celui-ci : C'est le secret de la comédie.

Placé à propos, le proverbe supplée de lon948 gues explications, etjette de la gaité dans le

discours, auquel il donne plus de mouvement. Dicton, en ce cas, est synonyme de proverbe.

PROVERBE, règle de conduite, principe énoncé sous des formes concises et familières.

Résumé de l'expérience des siècles, les proverbes sont l'expression de la raison commune, l'expression de la sagesse de tous les âges et de tous les hommes; on les a très-justement nommés la sagesse des nations. La réunion des proverbes formerait, un cours de morale, applicable à toutes les circonstances de la vie.

Le proverbe est le plus communément une métaphore. Comme l'affabulation à la suite de l'apologue, c'est une conséquence tirée d'un fait connu. Ainsi que l'apologue, il arrive à l'intelligence par l'imagination. L'Ecclésiaste veut-il donner une idée précise du néant ou nous tombons par la mort? melior est canis vivus leone mortuo ; mieux vaut, dit-il, un chien vivant qu'un lion . mort. Vérité traduite par La Fontaine dans

ce vers:

Mieux vaut goujat debout qu'empereur enterré, et qu'il développe et démontre dans sa Matrone d'Ephèse, laquelle n'est pas le moins juste de ses apologues, si elle n'en est pas le plus moral. L'apologue, au fait, est-il autre chose qu'un proverbe développé ?

Dites que la douceur, l'aménité ont bien plus de puissance sur les hommes que l'aigreur et la dureté ; bien des gens pourront ne pas tenir cette opinion pour incontestable. Dites-leur qu'on prend plus de mouches avec une cuillerée de miel qu'avec cent tonneaux de vinaigre, votre opinion, sons cette forme, sera pour eux une vérité démontrée,

Le proverbe s'appuie donc sur un fait, et c'est, ce me semble, ce qui constitue la différence qui existe entre lui et la sentence. La sentence affirme, le proverbe démontre. Proverbe, dans ce sens, n'a pas de synonyme. Adage ne le remplace pas: composé de deux mots latins, ad agendum, il indique ce qu'il faut faire, ce qu'il y a d'utile, de bien, de mieux à faire; mais il ne le prouve pas. Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fit, est un adage. Qui sème du vent recueillera des tempêtes, est un proverbe. Ce mot adage peut donc suppléer ceux de sentence, de maxime, de principe; mais il n'a pas un sens aussi étendu que proverbe dans cette acception.

Les sentences, les maximes, les apophtegmes, peuvent suffire aux esprits méditatifs, c'est-à-dire au petit nombre; mais au grand nombre, il faut des proverbes. Sancho est plus généralement compris que Platon ; c'est le législateur universel.

PROVERBE, petit drame, qui a pour objet de démontrer, par une action, la vérité énoncée dans un proverbe.

PROVERBES DE SALOMON, recueil de réflexions, de maximes que l'on attribue à ce prince. Plusieurs critiques pensent toutefois que ce recueil a été fait pour lui et non par lui, et que les Proverbes ne sont pas plus de Salomon que les Institutes de Justinien ne sont de Justinien. Ce ne serait, à leur sens, qu'une compilation faite par son ordre, de ce qu'il y avait de plus remarquable dans les écrits des moralistes qui l'avaient précédé, compilation à laquelle Ézéchias a fait ajouter ce qui a été écrit de plus utile depuis Salomon jusqu'à lui. Ce livre contient d'étranges choses; la sagesse y revêt quelquefois des formes assez singulières. Quoiqu'il en soit, il a été rangé parmi les livres canoniques.

Proverbe, dans les livres sacrés, est employé en plusieurs sens; tantôt il signifie para. bole, allégorie, comme dans ce passage: Hoc proverbium dixit eis Jesus. (Evangile de saint Jean, chap. 10); Jésus leur dit ce pro verbe ; et dans cet autre : Hæc in proverbiis locutus sum (ibidem ) ; je leur ai dit ces choses sous la forme de proverbe. Tantôt il y est pris dans le sens d'énigme : Occulta proverbiorum exquiret; il cherchera le sens caché des proverbes. (Ecclésiaste, chap. 59, vers. 3.) Souvent aussi il y est pris dans le sens de raillerie, chanson, épigramme, Erit Israël in proverbium, et in fabulam cunctis populis : Israël deviendra le proverbe et la fable de toutes les nations. (Deutéronome, chap. 38.)

Parmi les tribulations auxquelles il est passagèrement soumis, la moins amère pour Job n'est pas d'être en but aux attaques des sots et des vilains, stultorum et ignobilium, qui, dit-il, l'ont mis en chanson et en proverbe Nunc in eorum canticum versus sum ; mon nom se trouve à présent dans toutes. leurs chansons, et je suis devenu proverbe pour eux; et factus sum eis in proverbium. Triste chose en effet que de devenir proverbe. Achille, sur ce point, est tout à fait de l'avis de Job, quand il s'écrie :

Suis-je, sans le savoir, la fable de l'armée ? (RAC.) Remarquons que dans ces passages fable

ct proverbe sont exactement synonymes. duit à sa volonté tous les événements de la Être traduit en proverbe n'avait pourtant vie présente. pas toujours ce sens pour les enfauts d'Israël. Quand Saül se mit à prophétiser, il devint, est-il dit dans le Livre des Rois, l'occasion d'un proverbe ; Unde exivit proverbium ; Saül Ini-même, disaient-ils, est-il donc devenu prophète ? Nùm quid Saül inter prophetas? Être traduit en proverbe n'est pas être traduit en ridicule, dans ce sens, à moins que cela ne signifie : Jusqu'à Saül, tout le monde s'en mêle. ARNAULT. PROVIDENCE. ( Religion.) Volonté, attribut de Dieu, qui règle et gouverne selon des lois immuables cet univers et particulièrement le genre humain, et qui, enfermant dans son ordre l'instabilité des choses humaines, ne dispose pas avec moins d'égards les accidents inégaux qui mêlent la vie des particuliers, que ces grands et mémorables événements qui décident de la fortune des empires. Cette définition, prise mot à mot dans Bossuet, me semble rcnfermer tout ce qu'il importe de savoir de cet attribut de Dieu, qui a le plus de rapport avec nous, et qui, par cela même, mérite de notre part le plus d'attention.

:

Au milieu de ce concert qui s'élève dans tous les pays et dans tous les temps en faveur de la Providence, on entend parfois des voix discordantes qui en rompent l'unanimité. Dans l'antiquité la plus reculée, les amis de Job osèrent soutenir que la Providence ne se mêlait point du gouvernement du monde, puisqu'il est continuellement en proie à tant de désordres; que la vertu y est laissée sans récompense, et le vice sans châtiment, Il faut l'avouer, c'est une des objections contre le dogme de la Providence les plus difficiles à résoudre, celle qui résulte du spectacle de la prospérité des méchants et de la misère des justes. Le prophète-roi s'en plaint amèrement dans le psaume 73, suivant l'hébreu : « Mes pieds ont >> chancelé et mes pas ont presque failli, quand je contemple le bonheur des impies Ils ne » sont point atteints de plaies mortelles; ils » sont robustes et pleins de santé ; ils ne partagent point les peines des humains; ils sont à l'abri des coups qui frappent tous ceux qui les environnent. Aussi l'orgueil » s'enlace autour d'eux comme une chaîne ;

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que

embonpoint; insulte et le blasphème » sont sur leur lèvres. Ceux qui portent » leurs regards sur eux. sucent à longs traits le poison. Où est la Providence du » Très-Haut? disent-ils. Ces hommes sont » des impies, et ils regorgent de richesses. » C'est donc en vain que je tiens mon cœur exempt de souillures, et que je lave mes » mains dans une eau pure. Job et David ne peuvent répondre à ces difficultés qu'en rappelant le principe fondamental d'une vie future, où les désordres de celle-ci seront entièrement réparés. « Vainement je m'agite et

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Est-il vrai que l'être infini régit la na-» l'iniquité de leur àme perce à travers leur ture? Oui; la voix du genre humain tout entier proclame cette vérité, et de toutes parts retentit la maxime de Montesquieu les lois selon lesquelles Dieu a créé le monde sont celles selon lesquelles il le conserve (1). L'histoire de l'Ancien - Testament n'a été écrite que pour constater l'influence immémédiate et perpétuelle de la Divinitė, nonseulement sur la marche du monde physique, mais encore sur les destinées humaines. Bien que le peuple juif soit le bien-aimé du Très-Hant et l'objet spécial de ses faveurs, les autres peuples ne sont cependant pas déshérités, et on voit à chaque page que des faveurs pareilles leur sont réservées dans la plénitude des temps. Les anuales des nations ne renferment pas de moindres témoignages de l'intervention de la Providence dans les affaires humaines, et des preuves moins évidentes de la conviction intime et générale que rien ne se passe sur la terre on Dieu ne soit mêlé. Sans doute, le peuple de Dieu est un exemple palpable de son éternelle Providence, comme parle Bossuet, et toutefois les autres peuples nous fournissent aussi des preuves sensibles que lui seu! con

(1) Esprit des lois, liv. 1, chap. 1.

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je m'inquiète pour pénétrer le mystère: mes » yeux n'y découvrent qu'iniquité, jusqu'à » ce que j'entre dans le sanctuaire de l'Éter»nel, et que je considère le terme de leur

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carrière. Ils sont passés, Seigneur, comme » un songe au moment du réveil, et tu m'é» leveras un jour au séjour de la gloire. Dieu » est l'asile que je cherche, et mon partage » à jamais. » Dieu, dit l'Ecclésiaste, jugera le juste et l'impie, et alors ce sera le temps de toutes choses.

Saint Augustin, dans son admirable ouvrage de la Cité de Dieu, s'est attaché à pénétrer les desscins de la Providence dans la répartition des biens et des maux de la

vie; et il a dit : « Il a plu à la divine Provi-
dence de préparer à l'avenir des biens
* pour les justes, dont les injustes ne joui-
⚫ront pas ; et pour les impies, des maux
dont les bons ne seront pas tourmentés.
■ Mais quant à ces biens et à ces maux tem-
porels, il a voulu qu'ils fussent communs
aux uns et aux autres, afin que l'on ne
• désire pas trop ardemment des biens que
e l'on voit aussi entre les mains des méchants,
» et que l'on ne fasse rien de honteux pour
⚫ éviter des maux que les bons mêmes
» souffrent le plus souvent.... Si tout péché
était maintenant puni d'une peine mani-
feste, on croirait que rien ne serait réservé
au dernier jugement ; et si Dieu ne punis-
»sait maintenant aucun péché évidemment,
on croirait qu'il n'y a point de Providence.
De même pour les biens de cette vie, si
Dieu ne les donnait à quelques-uns de
ceux qui les demandent, il semblerait
» qu'ils ne dépendent pas de lui; et s'il les
donnait à tous ceux qui les demandent,
» nous croirions ne le devoir servir que
⚫ pour ces récompenses, et, au lieu d'être
pieux, nous serions avares. »>

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gissons donc pas seulement sous ses yeux; mais, si j'ose le dire, nous vivons en » lui (1). »

Le dogme de la Providence trouva des adversaires dans la plupart des philosophes qui s'élevèrent contre le christianisme, durant les cinq premiers siècles, et quelquefois même parmi les disciples de l'Évangile. Le prêtre Salvien, saint Jean Chrysostome, Théodoret, et d'autres Pères opposérent à leurs plaintes et à leurs déclamations des traités, où le plus profond savoir et la plus pressante dialectique sont revêtus de tout l'éclat du style et des charmes de la diction.

Très-peu de temps après la réformation da seizième siècle, les sociniens renouvelėrent quelques-unes des erreurs des anciens philosophes et des premiers hérétiques sur la Providence. Depuis, les libres penseurs anglais renchérirent, s'il est possible, et donnerent lieu aux ouvrages de Sherlock, de Burnet, et de quelques autres, car je ne prétends pas tout dire. Bayle, réfugié en Hollande, plaça toute la question dans celle de l'origine du bien et du mal. Les justes sont opprimés, et les méchants prospèrent : donc la Providence n'est qu'un vain mot. Tel est le paradoxe que son imagination enfanta, et qu'il défendit avec toute la vigueur de sa logi que. Laplacette, Jacquelot, King, dom Gaudin, Mallebranche, Leibnitz, le vicomte d'A

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Parmi les philosophes, il s'en trouve un très-grand nombre qui attaquèrent la Providence ou qui s'en formèrent des idées extravagantes. Les épicuriens enseignèrent que dans le monde tout est l'effet du hasard, que les Dieux endormis dans un profond repos, ne s'en mêlent en aucune manière; Cécilais, Jean Leclerc, inventèrent les hypothèses lius, dans l'Octavius de Minuci Felix, tourne les chrétiens en ridicule, parce qu'ils admettent un Dieu curieux, inquiet, ombrageux, present à tout, voyani tout, même les plus secrètes pensées, se mêlant de tout, même des crimes, comme si son attention pouvait suffire et au gouvernement général du monde, et aux soius minutieux de chaque particulier. O hommes, s'écrie Octavius, quelle est votre erreur! Comment Dieu >> serait-il loin de nous, puisqu'il remplit par » son immensité le ciel, la terre et toutes les ⚫ parties de ce vaste univers? Non-seulement il est près de nous, mais encore il est dans nous. Le soleil, quoique attaché au ciel, » est répandu par toute la terre; tout se ⚫ ressent de sa présence, et sa clarté n'est jamais altérée. A plus forte raison, Dieu,

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les plus ingénieuses, pour ruiner les fondements du système de Bayle, et employèrent les raisonnements les plus forts pour détruire ses sophismes. Mais, en définitive, ils viennent tous aboutir à celui de Bossuet, qui en est le meilleur resumé. Si les mé» chants prospèrent visiblement, et que » leur bonne fortune semble faire rougir » sur la terre l'espérance d'un homme de » bien, il regarde le revers de la main de Dieu, et il entend avec foi, comme une » voix céleste qui dit aux méchants fortunés qui meprisent les justes opprimés: Oherbe » terrestre! herbe rampante! oses-tu bien » te comparer à l'arbre fruitier pendant la rigueur de l'hiver, sous prétexte qu'il a perdu sa verdure. et que tu conserves » la tienne durant cette froide saison? Viendra le temps de l'été, viendra l'ardeur du grand jugement qui te desséchera jusqu'à » la racine, et fera germer les fruits immor

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(1) Sermon sur la Providence, à la fin.

» tels des arbres que la patience aura cul» livés (1).

» commune, et qu'il n'y a d'exception pour » personne. Il est à croire que les événe»ments particuliers ne sont rien aux yeux » du Maître de l'univers; que sa Providence » est seulement universelle ; qu'il se contente » de conserver les genres et les espèces, et » de présider au tout, sans s'inquiéter de la >> manière dont chaque individu passe cette » courte vie (1). »

Voltaire qui, dans divers ouvrages, avait parlé de la Providence avec tant de dignité et de conviction, venait d'envoyer à J.-J. Rousseau ses deux poèmes sur la Loi naturelle, et sur le Désastre de Lisbonne, dont le dernier portait atteinte à la doctrine qu'il avait professée ailleurs. Le citoyen de Genève lui écrivit, le 18 août 1756, une Lettre dans laquelle il justifie la Providence des maux dont on l'accuse. On y lit :

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» Les premiers qui ont gâté la cause de » Dieu sont les prêtres et les dévots qui ne » souffrent pas que rien se fasse selon l'or» dre établi, mais font toujours intervenir » la justice divine à des événements pure>ment naturels, et, pour être sûrs de leur fait, punissent et châtient les méchants, éprouvent ou récompensent les bons in» différemment avec des biens ou des maux, » selon l'événement. Je ne sais, pour moi, >> si c'est une bonne théologie; mais je trouve » que c'est une mauvaise manière de rai» sonner, de fonder indifféremment sur le » pour et le contre les preuves de la Providence, et de lui attribuer sans choix tout » ce qui se ferait également sans elle. » Le judicieux abbé Fleury manifeste à peu près les mêmes sentiments dans son troisième Discours sur l'Histoire ecclésiastique, no 3. Les philosophes, à leur tour, continue Rousseau, ne me paraissent guère plus >> raisonnables, quand je les vois s'en pren» dre au ciel de ce qu'ils ne sont pas impassibles, crier que tout est perdu quand ils » ont mal aux dents, ou qu'ils sont pauvres, » ou qu'on les vole, et charger Dieu, comme dit Sénèque, de la garde de leur » valise. Si quelque accident tragique eût fait périr Cartouche ou César dans leur >> enfance, on aurait dit : quel crime avaient » ils commis? Ces deux brigands ont vécu, » et nous disons pourquoi les avoir laissés » vivre? Au contraire, un devot dira, dans » le premier cas, Dieu voulait punir le père » en lui ôtant son enfant ; et dans le second, » Dieu conservait l'enfant pour le châtiment » du peuple. Ainsi, quelque parti qu'ait pris la nature, la Providence a toujours » raison chez les dévots, et toujours tort » chez les philosophes. Peut être, dans l'or» dre des choses humaines, n'a-t-elle ni tort » ni raison, parce que tout tient à la loi

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(1) Octavius, traduction de M. Péricaud, p. 171.

Comment concilier ces assertions de Rousseau avec la parole expresse de Jésus-Christ dans l'Évangile? « Ne vous inquiétez point » où vous trouverez de quoi manger, ni » d'où vous aurez des vêtements; la vie » n'est-elle pas plus que la nourriture, et le » corps plus que le vêtement? Considerez » les oiseaux : ils ne sèment point, ils ne » moissonnent point, et ils n'amassent rien » dans des greniers; mais votre Père céleste » les nourrit. N'êtes-vous pas beaucoup plus

qu'eux ?.... Considérez comment croissent » les lis des champs; ils ne travaillent point, » ils ne filent point, et cependant Salomon, » dans toute sa gloire, n'a jamais été vêtu » comme l'un d'eux.....; il ne tombe pas un » seul passereau sur la terre sans la volonté » de votre Père. Mais pour vous, les cheveux mêmes de votre tête sont comptés; ainsi ne craignez point (2). » (Voyez DIEU.) FLOTTES. * PROVINS (le père PACIFIQUE DE ). Voyez Pacifique.

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* PROYART (LIEVAIN - BONaventure ), historiographe, né en Artois vers 1743, embrassa l'état ecclésiastique, et se distingua de bonne heure dans l'enseignement. Il était principal du collège du Puy, lorsque la révolution éclata: forcé de s'expatrier, il se rendit d'abord à Bruxelles, ensuite en Francònie, où il devint conseiller ecclésiastique du prince Hohenlohe - Bartenstein, et fut chargé spécialement de la distribution des secours aux prisonniers français, mission dont il s'acquitta avec le plus grand zèle. De retour en France, après le concordat de 1801, la publication d'un ouvrage intitulé: Louis XVI et ses vertus, qui parut en 1808, le fit renfermer à Bicêtre. Bientôt le chagrin et le dénuement des choses les plus nécessaires, pendant un hiver rigoureux, lui occasionèrent une hydropisie de poitrine dont il mourut la même année, à Arras, où

(1) OEuvres de J.-J. Rousseau, édition de P. Didot, 1801, tom. 18, pag. 163. (2) Matt., chap. 6 et 10.

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