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ses travaux et ses conseils, il contribua beaucoup à former Lesueur, Lebrun et Mignard, et fut le principal réparateur de l'art sous Louis XIV: aussi ce monarque lui conserva-t-il le titre et les honoraires de son premier peintre. En avançant dans la carrière, Le Poussin devenait moins exclusivement attaché à ce goût sévère, qu'il avait poussé quelquefois jusqu'à la dureté et à la sécheresse. On ne peut pas dire précisément qu'il changea sa manière; car il écrivait lui-même à M. de Chantelou qu'il se sentait, en vieillissant, plus animé que jamais du désir de régler ses pensées sur celles des anciens peintres grecs mais son exécution devint plus moelleuse, sa composition plus riche. Il commença à traiter des sujets où les beautés de la nature pussent avoir une place, et ne montra pas moins de talent pour le paysage historique que pour l'histoire. Il imprima à tous ses ouvrages, qui ne pouvaient être animés par un intérêt dramatique, un tel caractère de poétique mélancolie, qu'on ne les voit pas sans tomber dans une rêverie pleine de charmes témoin ce paysage où, à travers les danses légères et les jeux folâtres d'une troupe de bergers livrés à la joie qu'inspirent la jeunesse et le printemps, on aperçoit une tombe que couronne un cyprès avec cette inscription: Et in Arcadia ego (et moi je fus aussi pasteur dans l'Arcadie). Cet illus tre peintre, l'éternel honneur de la France, auquel tant de belles qualités étaient échues en partage, et dont les défauts ne viennent · que de l'exagération de ces qualités mêmes, mourut à Rome en 1665; mais la plus grande partie de ses ouvrages est en France. Le Musée du Louvre possède de lui trente-trois tableaux, tous de chevalet, à l'exception de cinq, dont les figures sont de grande proportion. Son tableau du Déluge est un des chefs-d'œuvre de la peinture.

on,

crire contre Luther, et publia un ouvrage intitulé: Propugnaculum summi sacerdotii evangelici, ac septenarii sacramentorum numeri adversus M. Lutherum, fratrem famosum, et Wickleffistam insignem, Londres, 1523, in-8°. Cet ouvrage attira, ditde très-grands éloges à l'auteur; mais il écrivit ensuite en faveur de la reine Catherine et de la suprématie du siége de Rome, et la noble franchise avec laquelle il s'exprimait excita à tel point le ressentiment de Henri VIII, qu'il ordonna la mort du malheureux Powel. Il fut pendu, et ensuite écartelé à Smithfield, le 30 juin 1540, afec plusieurs autres victimes auxquelles on n'avait à reprocher, comme à lui, qu'un extrême attachement à la religion de leurs pères. - POWEL ou POWELL (Richard), lit- / térateur distingué du pays de Galles, mort en 1795, est connu par un poème intitulé les Quatre Saisons, publié en 1793.

* POWELL (DAVID), savant ecclésiastique et historien gallois, né dans le comté de Denbigh vers 1552, mort en 1598, a donné une Histoire du pays de Galles, Londres, 1584, in-4°. Cette chronique, composée en latin par Caradoc, s'étendait de l'an 680 à 1282, et Humphrey Lloyd entreprit de la traduire en anglais; mais, à sa mort, la version n'étant pas terminée, Powell corrigea et augmenta le manuscrit, continua l'histoire jusqu'au règne d'Élisabeth. Elle a été réimprimée en 1697 et en 1774. Il en existe une traduction allemande, Cobourg, 1725, in-8°. POWELL (Gabriel), fils du précédent, né en 1575, mort en 1611, s'est rendu célèbre parmi les puritains en publiant plusieurs ouvrages de controverse contre les catholiques. Wood, qui en donne la liste, prétend que l'auteur était un prodige de science; il avoue en même temps que son zèle pour sa secte était outré.

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* POWNALL (THOMAS), écrivain et an

* POUSSIN (GAspar ou Guaspre). Voyez liquaire anglais, né à Lincoln en 1722, DUGHET.

* POUTEAU (CLAUDE), chirugien célèbre, né à Lyon en 1725, vint à Paris, où il mourut en 1775. On a de lui plusieurs écrits publiés par M. Colombier, inspecteur-général des hôpitaux de France, sous le titre d'OEuvres posthumes de M. Pouteau, Paris, 1783, 3 vol. in-8°.

POUVOIR. Voyez SOUVERAINETÉ.

* POWEL (ÉDOUARD ), ecclésiastique catholique, né en Angleterre vers la fin du 15e siècle, fut chargé par Henri VIII d'é

mourut à Bath en 1805. On a de lui un assez grand nombre d'ouvrages, dont les principaux sont : Administration des colonies anglaises, cinquième édition, Londres, 1774, 2 vol. in-8°; Description topographique des États du centre de l'Amérique anglaise, 1776, in-fol., avec une carte, etc.

* POYET (GUILLAUME), chancelier de France, né à Angers vers 1474, exerça d'abord la profession d'avocat, et fut regardé comme l'un des oracles du barreau de Paris. Choisi par Louise de Savoie, mère de Fran

çois Ier, pour soutenir les prétentions qu'elle avait contre le connétable de Bourbon, il plaida cette cause avec tant de succès, qu'il fut nommé avocat-général en 1531, peu après président à mortier, et parvint à la dignité de chancelier en 1538. Mais ayant ensuite été accusé de malversations, d'abus de pouvoir, etc., il fut arrêté en 1542, privé en 1545, par arrêt du parlement, de toutes ses dignités, déclaré inhabile à exercer aucune charge, condamné à 100,000 fr. d'amende et à être emprisonné jusqu'à l'entier paiement de cette somme. Il mourut au mois d'avril 1548.

* POYET (BERNARD), architecte, né en 1742 à Dijon, reçut les leçons de Wailly, fit le voyage de Rome comme pensionnaire, et à son retour devint successivement architecte de monseigneur le duc d'Orléans, de la ville de Paris et de l'archevêché, de l'université, du corps législatif, etc., membre de l'Académie d'architecture, du conseil des bâtiments civils, et il mourut en 1824, membre de l'Académie des sciences. L'édifice consacré à la tenue des séances de de la chambre des députés est un des principaux ouvrages de cet artiste, dont la fécondité et la fougue d'imagination étaient extraordinaires. Malheureusement il tomba dans la bizarrerie en voulant paraître original, et plusieurs de ses conceptions, empreintes d'ailleurs du cachet d'un talent distingué furent avec raison considérées comme excentriques et inexécutables. Nous ne reproduirons point la liste des écrits de Poyet, donnée par M. Mahul, tom. 5 de son Annuaire nécrologique, au nombre de vingt-cinq. Il suffira de mentionner le suivant: Mémoire sur la nécessité de transferer et de reconstruire l'Hôtel-Dieu de Paris, 1755, in-4° le lieu de son choix pour cette reconstruction était l'ile des Cygnes, et il reproduisit ce projet en 1807, en 1822 et en 1824.

* POZZI (JEAN-BAPTISTE), peintre, né à Milan sous le pontificat de Sixte-Quint, mort à l'âge de 28 ans, fut élève de Raffaellino da Reggio, et s'est beaucoup approché du talent de ce maître. Pozzi (Étienne), autre peintre, né à Rome en 1708, mort en 1768, a exécuté dans Rome un grand nombre d'ouvrages qui lui ont mérité la réputation d'un des meilleurs artistes de son temps.

Joseph Pozzi, frère du précédent, se dis. tingua aussi dans l'art de la peinture, mais n'atteignit point la réputation de son aîné.

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POZZO (CASSIEN DEL), commandeur de l'ordre de Saint-Étienne, né à Turin, mort vers la fin de 1657, s'est rendu célèbre par sa riche collection d'antiquités romainet, et par la noble protection qu'il accordait aux artistes distingués, notamment au Poussin qui jouit pleinement de son cabinet. Il correspondait avec presque tous les littérateurs et les savants de l'Europe, fut l'émule et l'ami de Peiresc, et est considéré comme le restaurateur de l'art antique. Le détail de sa collection forme 23 vol. in-fol.

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* POZZO (JÉRÓME DAL), célèbre architecte, né à Vérone en 1718, exerça son art avec une extrême habileté, et chercha par ses conseils et son exemple à remettre en honneur la manière des anciens. On a de lui un traité d'architecture sous le titre de gli Ornamenti dell' architettura civile, secondo gli antichi. Cet ouvrage plein d'érudition et de goût, a été adopté dans un cours public à Vérone. Pozzo était membre associé des académies royales de Parme, et Clémentine de Bologne. Voyez FONTE-MODERATA et MONGIORGI.

* PRADES (JEAN-MARTIN ), prêtre bachelier de Sorbonne, né vers 1720 à CastelSarrazin, doit l'espèce de célébrité qui s'est attachée à son nom à une thèse qu'il soutint en Sorbonne, qui causa un grand scaudale, et força l'auteur à se réfugier en Hollande, où il fit paraître son Apologie ( 1752, in-8o). S'étant ensuite rendu à Berlin, il y fut accueilli par Voltaire, et obtint par sa protection la place de lecteur du roi de Prusse, dont il eut le bonheur de gagner l'amitié. Mais les bienfaits dont ce prince le combla ne tardèrent point à exciter la jalousie des courtisans. Pendant la guerre de sept ans, l'abbé de Prades fut accusé d'être en correspondance avec un secrétaire du duc de Broglie, et de lui rendre compte des mouve

ments de l'armée prussienne. Le roi reconnut ensuite l'innocence de l'abbé, qui n'en fut pas moins envoyé à Glogau, avec l'injonction de ne pas sortir de cette ville sans nécessité. Il s'était depuis quelque temps réconcilié avec l'Église par une rétrataction solennelle des principes contenus dans sa thèse. Il fut nommé archidiacre du chapitre de Glogau, et mourut dans cette ville en 1782.

PRADON, poète dramatique, né à Rouen, mort à Paris en 1698, est bien moins connu par ses ouvrages que par l'honneur qu'il eut d'être opposé à Racine, et par les traits plaisants que son nom a fournis au satirique français. Il vint de bonne heure à Paris, il suivit la carrière du théâtre avec succès, si l'on considère les triomphes trompeurs qui l'aveuglèrent lui-même; avec honte, si on le juge sur la réputation qui lui est restée. Une cabale aussi lâche qu'i nepte, qui poursuivait alors Racine, eut l'idée de lui faire subir une indigue rivalité: sa Phèdre venait de paraître; deux jours après on fit jouer celle de Pradon, et, à la honte des barbares, Pradon fut déclaré vainqueur. (Voyez RACINE.) C'est mal à propos que presque tous les biographes donnent à Pradon le surnom de Nicolas, qui n'est pas le sien; la source de cette méprise a été l'indication négative (N.) mise quelque part après son nom, et qu'on crut être l'initiale de Nicolas. Les ouvrages de ce poète, aujourd'hui totalement inconuus, sont cités par Niceron.

* PRÆPOSITIVUS, théologien, des 12 et 13e siècles, né à Crémone, fut chancelier de l'église de Paris en 1206, et mourut, à ce qu'on croit, en l'an 1209. Il a laissé plusieurs ouvrages inédits, dont les copies manuscrites sont fort nombreuses. Il en existe en Italie, en Angleterre et à la Bibliothèque du Roi. Le plus remarquable de ces écrits est une somme de théologie, dont on a imprimé quelques pages à la suite du Pénitential de Théodore.

PRAGMATIQUES-SANCTIONS. Toute loi, chez les Grecs, avait le nom général de pragma; et les jurisconsultes qui s'adonnaient spécialement à l'interprétation des lois équivoques ou obscures, s'appelaient pragmaticiens. Au temps des empereurs romains, dont le pouvoir seul faisait la loi, elle s'appelait rescrit pragmatique, ce qui était l'équivalent de commandement impéril. Le premier des empereurs d'Allemagne,

Othon Ier, intitula commandement pragmatique la Charte qu'il donna en 977, parce que la diète germanique n'existant pas encore, il régnait en despote. Comme elle était établie depuis 1061, quand Frédéric Barberousse donna, en 1173, son grand statut, il l'intitula pragmatique-sanction. Saint-Louis, en publiant celle qui porte son nom, y déclara qu'elle émanait d'un conseil des principaux du royaume, représentant la nation : Hoc edicto consultivo; et Charles VII, promulguant ensuite celle de son règne, la présenta comme émanée d'un semblable conseil : De consilio procerum. Il faut conclure de ces observations, et de plusieurs autres consignées dans notre dissertation historique sur le même sujet, que les pragmatiques-sanctions étaient des statuts fondamentaux qui, émanés d'un pouvoir distinct de celui auquel seul appartenait le droit de les publier, attestaient par leur promulgation que celui-ci les avait ratifiés ou sanctionnés.

Énéas Sylvius Piccolomini, qui devint pape sous le nom de Pie II, restreignit trop la portée de nos pragmatiques-sanctions, quand il dit qu'elles n'avaient rapport qu'aux affaires ecclésiastiques. On conçoit que, préoccupé des choses de son état, il pût ne pas voir que l'objet de ces deux fameux statuts était mixte; qu'ils avaient pour but l'avantage temporel, comme le bien spirituel du royaume; mais on ne comprend pas pourquoi l'Académie française, adoptant encore, en 1762, la définition systématique de Piccolomini, a dit, dans son grand Dictionnaire, « que nos pragmatiques - sanctions n'étaient que des réglements en matière ecclésiastique.

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Leur but essentiel fut d'empêcher que le royaume de France continuât d'être appauvri par les exactions des papes, au moyen de l'usurpation qu'ils avaient faite du droit de nommer aux évêchés et autres bénéfices quand ils venaient à vaquer, et souvent mème par anticipation, du vivant du titulaire, avec l'expédient des graces expectatives. Le désordre ne pouvait être arrêté que par une revendication nationale et royale du droit de ceux en qui les règles canoniques avaient reconnu le pouvoir d'élire le successeur du prélat ou autre bénéficier récemment décédé.

Malheureusement les préjugés des temps de Louis IX et de Charles VII ne permettaient pas de comprendre que leurs prag

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matiques-sanctions n'auraient qu'une existence éphémère et incertaine, parce qu'ils -ne les établissaient que sur les règles canoniques du moyen âge, au lieu de les fonder sur celles des beaux siècles du christianisme. Saint Cyprien nous atteste qu'en 253, conformément aux traditions apostoliques et même divines, lorsqu'un siège épiscopal devenait vacant, les évêques de la province se réunissaient dans les villes de ce siège pour nommer et ordonner le sujet qui devait remplacer le défunt; que l'élection ne se faisait qu'en présence et du consentement du peuple. » Ille fallait absolument, dit le même père, attendu qu'on n'èlisait jamais qu'un sujet du même diocèse, et que le peu ple de ce diocèse était seul capable de rendre témoignage de la vie et des mœurs de ceux parmi lesquels on pouvait choisir. » — «L'élection, disait saint Léon, en 445, doit être souscrite par le peuple et ses magistrats comme par le clergé, parce qu'il est juste que celui qui doit présider sur tous, soit élu par tous ; » et, suivant le langage d'Hinc mar, archevêque de Reims, au neuvième siècle, « il faut que celui à qui tous doivent obéir, ait reçu de tous le droit de leur com

mander. »

L'évêque de Rome, le seul qu'aujourd'hui nous appelons pape, s'élisait de la même manière. Ce vieux Liber diurnus romanorum pontificum, dont il a été parlé au mot PAPE, est témoin que l'élection de ce pontife était toujours faite en commun « par le clergé, les citoyens, les patriciens, et même les militaires, depuis le plus élevé en grade jusqu'au dernier des soldats. » Même en 1139, le concile général de Latran, tenu par conséquent à Rome, et sous la présidence d'Innocent II, décida « que toute élection à laquelle les laïques n'auraient pas concouru, au moins par leur consentement, serait frappée de nullité. »

Mais, à l'exemple des empereurs qui, succédant immédiatement à Constantin Ier, s'étaient prévalus de ses largesses envers l'église de Rome pour s'immiscer dans l'élection de ses évêques, en se réservant le droit de les confirmer, les autres souverains étaient intervenus, par des commissaires, dans les élections des évêques de leurs états respectifs. Elles en étaient le plus souvent faussées en faveur des ecclésiastipues de cour, des parents et quelquefois même des bâtards de ces princes. Un concile de Valence, en 855, essaya, sans succès, de remédier aux

inconvénients de cette influence dominatrice, en suppliant les monarques de laisser au clergé et au peuple la libre faculté d'élire leurs évêques, et en prescrivant à ces électeurs de ne choisir qu'un sujet du diocèse, ou tout au plus du voisinage, mais dont la bonne conduite et la science fussent bien connues dans le diocèse qu'il devait gouverner. »>

Déjà les évêques de chaque province de France où un siége devenait vacant, négligeaient de se rendre dans la ville où il fallait élire le nouveau pasteur ; et les chapitres de cathédrales, étant une réunion permanente d'électeurs, s'emparaient insensiblement du droit d'élection. Pour éluder l'autorité du métropolitain, ils se mettaient en relation directe avec les rois, qui trouvaient un grand avantage à favoriser cette usurpation. Les choix tombaient plus directement sous leur influence, d'autant mieux que les chapitres excluaient formellement des élections qu'ils s'arrogeaient, non-seulement les laïques mais même les curés et les religieux. Le concile général de Latran, en 1139, le leur défendit; mais ce fut bien inutilement. Ils n'en tinrent pas plus de compte que les rois n'avaient eu égard aux supplications et décrets du concile de Valence.

Alexandre III, élu en 1159, par les cardinaux, ayant ensuite triomphé du concur. rent qu'on lui donna, puis des trois autres qui se succédèrent après celui-ci, et qu'on a qualifiés comme lui du titre flétrissant d'antipapes, fit décider par un concile de Latran, en 1179, que désormais l'évêque de Rome ne serait plus nommé que par les cardinaux. Innocent III, fait pape de cette manière en 1198, trouva convenable à ses vues politiques de rendre cette disposition générale pour tous les sièges de la chrétienté, et il statua, dans un autre concile de Latran, en 1215, que tous les évêques seraient élus par les chapitres des cathédrales respectives, sans aucune intervention des laïques, même des autres prêtres et des religieux. Cet ordre de choses devint bientôt le droit commun, en ruinant celui qui, pendant douze siècles, avait subsisté dans l'Église.

Mais les chapitres de cathédrales, étant aussi quelquefois contrariés par les princes dans les élections, s'en plaignaient aux papes, que par là ils acheminaient au privilége de nommer aux évêchés et aux autres bénéfices, non sans retirer de grands émoluments pécuniaires de ces nominations. Clément IV

publia, en 1266, une bulle, par laquelle il attribuait aux seuls pontifes de Rome une grande quantité de nominations de ce genre, et lésait même les prétentions des chapitres en quelques points analogues. Les exactions de la cour romaine appauvrissaient de plus en plus le royaume. Ce fut alors que les récriminations générales donnèrent lieu à la rédaction de cette pragmatique - sanction que saint Louis promulgua en mars 1268. Dans son préambule, il mit en principe a que son royaume n'avait jamais eu, audessus du roi, d'autre dominateur ni d'autre protecteur que Dieu, et qu'il ne voulait pas lui en reconnaître d'autre. » Ensuite il statua que les églises et cathédrales auraient la liberté des élections, que ces élections sortiraient leur plein et entier effet; que les exactions pécuniaires et autres charges onéreuses, imposées par la cour de Rome, lesquelles, « disait-il, ont misérablement appauvri notre royaume, ne pourraient être levées ou recueillies. » Ce sont là les plus essentiels des six articles dont se composait la pragmatique-sanction de saint Louis.

Sa fermeté contre l'exagération du pouvoir des pages, en d'autres circonstances, comme en celle-ci, notammant lorsqu'il s'était soulevé, en 1245, contre la déposition de l'empereur Frédéric II par Innocent IV, fit juger à la cour de Rome qu'il lui serait inutile de s'opposer à l'exécution de cette pragmatique-sanction. Elle ne l'osa pas non plus sous les règnes de Louis-le-Hutin et même du roi Jean II; mais Rome eut, en 1302, un pontife très-audacieux, en qui revivait dans toute sa vigueur l'esprit de Grégoire VII et d'Innocent III. Ce pontife était Boniface VIII, avec qui presque tout le clergé de France, asservi par les fausses décrétales, était dans une aveugle et servile connivence. Quelles atteintes ne durent pas souffrir les élections capitulaires, dans un temps où, malgré la défense que Philippe-le-Bel faisait aux évêques d'obéir à Boniface qui leur avait enjoint de venir à Rome s'humilier à ses pieds, il y en eut trente-quatre qui s'y rendirent à cet effet!

Sous Philippe de Valois, la puissance des papes se trouvant encore plus affermie en France par les empiétements du clergé, la pragmatique-sanction de saint Louis était presque entièrement oblitérée. On ne s'en souvenait plus, lorsqu'en 1309, les papes vinrent habiter Avignon, y tenir une cour plus magnifique que celle du monarque, et

y faire venir tant d'autres potentats se prosterner devant leur immense puissance. Ce Benoît XIII, qu'au temps des antipapes d'alors, les cardinaux de sa faction élurent dans cette ville, en 1394, et que le clergé français s'empressa de reconnaître pour pape légitime, ne se bornait pas à exiger comme des redevances inévitables, les subventions que la charité avait prodiguées à ses prédécesseurs dans les premiers temps de leur séjour en France. A la vacance des évêchés et des autres bénéfices, il s'en rendait l'arbitre, prétendait à la dépouille des titulaires défunts, et même aux arrérages qui leur étaient dus à leur décès. Charles VI, indigné de tant d'usurpations, y opposa, le 18 février 1406, un édit par lequel il tâcha de faire revivre la pragmatique - sanction de saint Louis; et le parlement, par un arrêt du 11 septembre suivant, défendit à Benoit XIII, de se permettre aucune exaction en France, sous peine de poursuite contre les exacteurs.

Le concile général, indispensable pour mettre fin au schisme occasioné par trois papes qui en même temps voulaient gouverner l'Église, à savoir, Benoît XIII, résidant à Avignon, Jean XXIII, à Pise, et Grégoire XII à Rome; ce concile s'ouvrit à Constance, le 5 novembre 1414, et commença par déposer Benoit XIII. Jean XXIII ayant ensuite abdiqué, et Grégoire XII étant mort, il élut pour vrai pape Martin V, le 11 novembre 1417. Dans l'intervalle, un grand nombre de membres du concile, et surtout les évêques de France qui étaient de cette assemblée, avaient instamment demandé qu'elle décrétât formellement le rétablissement des élections par les chapitres de cathédrales, conformément au dernier droit commun, déjà lui-même presque aboli par les réservations des papes; mais le concile, trop occupé de l'extinction du schisme, avait renvoyé ce point de discussion au prochain concile, ou au pape qu'il allait élire, voulant qu'il traitât de cet objet avec des membres de chaque nation. Martin V, à peine élu, s'était subitement imprégné des idées de la cour de Rome; il éluda la commission, et l'affaire qu'il devait discuter avec des pères du concile, se trouva renvoyée au concile suivant, qui fut celui de Bâle, en 1431.

Charles VI, ayant prévu que Martin V prendrait l'esprit de ses prédécesseurs, avait, dès la nouvelle de son élection, convoqué à Paris une assemblée composée de prélats,

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