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cellence de la religion chrétienne, 1767, in-8°.

* PRAXAGORAS, médecin grec, né à l'ile de Cos, fils de Néarque, fut l'un des derniers de la famille des Asclepiades qui acquirent quelque réputation dans l'art de guérir. Bien qu'il se soit écarté à quelques égards des principes d'Hippocrate, il n'en a pas moins rendu son nom immortel par d'importantes découvertes en anatomie et en patologie. Il est aussi le premier qui ait observé les fièvres intermittentes pernicieuses, et qui ait reconnu que le pouls indique les variations de la force vitale dans les maladies. Le temps n'a respecté aucun des ouvrages qu'il avait composés.

* PRAXITÈLE, célèbre statuaire grec, qu'on croit natif d'Athènes, florissait dans les premières années du 4e siècle avant Jésus-Christ, c'est-à-dire dans la 111e olympiade, et par conséquent dut être contemporain d'Apelles et de Lysippe. Il mourut, suivant les mêmes conjectures, postérieure ment à la troisième année de la 123 olympiade, et âgé d'environ 80 ans. Ces faits sont établis avec une grande érudition par M. Émeric-David, dans la notice qu'il a consacrée à Praxitèle, tom. 36 de la Biographie universelle. Au rapport des anciens auteurs, le nombre des ouvrages de Praxitèle ne fut pas moins considérable qu'ils ne furent dignes d'illustrer ce grand artiste. Tel était leur degré de perfection que la célèbre Phryné, avec qui l'on sait que Praxitèle eut un long commerce de galanterie et même d'affection plus douce, ayant obtenu de lui qu'il la laissât faire choix d'une des productions de son ciseau, s'avisa, pour connaître quelle était celle dont il faisait lui-même le plus grand cas, de l'alarmer par la fausse nouvelle que son atelier était en proie aux flammes.—« Quel malheur pour moi! s'écria aussitôt l'artiste, si l'incendie n'a pas respecté mon Satyre et mon Cupidon ! » La courtisane donna la préférence à ce dernier chefd'œuvre, puis elle en fit hommage à la ville de Thespies, où il fut consacré dans un ancien temple de l'Amour. Transporté à Rome par ordre de Caligula, puis rendu aux Thespiens par l'empereur Claude, et de nouveau ravi à ceux-ci par Néron, ce Cupidon, qui était en marbre et avait les ailes dorées, fut détruit par un incendie sous les portiques d'Octavie, où le tyran l'avait fait placer. Le Satyre décora, dans Athènes, un temple situé sur la rue des Trépieds. Il faut

parler maintenant des deux statues de Vénus qu'exécuta Praxitèle, et dont l'une illustra la ville de Cos, l'autre celle de Cnide : celleci était nue, celle-là drapée. La Vénus de Cnide passait, avec le Jupiter de Phidias, pour la production la plus achevée de la sculpture grecque, Comme les chefs-d'œuvre dont nous avons parlé, les deux statues de Phryné, dont l'une, en bronze doré, orna le temple de Delphes, l'autre, en marbre, le temple de l'Amour à Thespies, semblent aussi être l'ouvrage de la jeunesse de Praxitèle; il orna plus tard de ses sculptures les deux frontons du temple d'Hercule à Thèbes. On range également parmi ses principales compositions ces dernières sculptures, qui vraisemblablement étaient en ronde-bosse, et qui durent être exécutées dans la deuxième année de la 116 olympiade. Pline cite une foule d'autres ouvrages de Praxitèle; nous ne pouvons entreprendre de les énumérer ici: mais pour donner la mesure du degré de confiance qu'il faut accorder à l'attribution d'un nombre aussi extraordinaire de chefs-d'œuvre que lui ont faite les anciens auteurs sur la foi des traditions, nous remarquerons que dans ce nombre ils placent une statue de Flore, divinité d'origine romaine, et encore inconnue aux Grecs au temps de Praxitèle. Le caractère de son talent était une vérité frappante dans l'imitation, une grâce, une finesse exquises dans les contours, enfin une admirable entente dans l'expression des émotions douces de l'âme. On ne connait jusqu'ici, avec certitude, que des copies des ouvrages de Praxitèle; quelques-unes d'entre elles ont été gravées dans le Musée français, publié par MM. Robillard-Péronville et Laurent, ainsi que dans le Musée des Antiques de M. Bouillon. Praxitèle eut deux fils, qu'il associa de bonne heure à ses travaux : le plus illustre fut Céphisodore ( voyez ce nom ). Il forma en outre plusieurs élèves d'un très-haut mérite, notamment Pamphile, dont Pline cite une statue de Jupiter hospitalier, qui se voyait à Rome, dans le jardin d'Asinius Pollion. Il y eut dans l'antiquité un autre PRAXITÈLE, modeleur en argent, contemporain de Pompée, et dont les auteurs necitent qu'une composition représentant Roscius enfant, entouré dans son berceau par un serpent qui repose sur son sein.

* PRAY (GEORGES ), savant et laborieux historien, né en 1723, dans le comté de Neytra en Hongrie, entra dans l'Institut des

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PRÉC

jésuites, enseigna successivement les belles-même pontife rappela, en termes assez durs, lettres, la philosophie et la théologie dans l'archevêque de Malincs à plus de soumisdifférents colléges. Il devint, à la suppression et surtout à une conduite plus modérée. sion de son ordre, conservateur de la bibliothèque royale de Bude, historiographe de Hongrie, et mourut à Pesth en 1801. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages estimés. * PRÉAMENEU (FÉLIX-JUL.-JEAN BIGOT DE). Voyez BIGOT.

*

PRÉAU (GABRIEL DU). Voyez DUPRÉAU.
PRECESSION. Voyez EQUINOXE.

* PRÉCIPIANO (HUMBERT-Guillaume
DE), archevêque de Malines, né en 1626, à
Besançon, d'une famille d'origine génoise,
mort en 1711 à Bruxelles, s'est surtout
rendu célèbre par le zèle qu'il mit à combat-
tre les opinions religieuses du père Quesnel
(voyez ce nom ). Dès son entrée dans la
carrière ecclésiastique, Précipiano avait été
pourvu de riches bénéfices. La dignité de
haut doyen du chapitre de Besançon lui fut
conférée en 1660 par les chanoines, ses con-
frères, et il la conserva près de vingt ans,
en dépit des censures, d'une excommunica-
tion même fulminée contre lui par la cour
de Rome, qui revendiquait le privilége de
cette nomination. En 1667, il fut député à la
diète de Ratisbonne avec Ambroise-Philippe;
et cinq ans après, le ministère espagnol le
manda à Madrid pour concerter quelques
mesures propres à garantir la Franche-Comté
d'une nouvelle invasion des Français. Enfin
l'entier dévouement de Précipiano à la poli-
tique de D. Juan d'Autriche lui valut d'être
nommé à l'évêché de Bruges. C'est alors
que, pour obtenir ses bulles d'institution
canonique, il se résigna à la soumission
envers le Saint-Siége, et, après une confes-
sion juridique qu'il fit en 1680, l'absolution
de Rome lui fut envoyée, et peu après sa
confirmation dans la dignité épiscopale.
Deux ans plus tard il fut porté au siége ar-
chiepiscopal de Malines; et dès lors telle
fut son ardeur pour affermir les doctrines
ultramontaines dans son diocèse, qu'il en
vint à imaginer un formulaire plus exigeant
que celui d'Alexandre VII. Un décret du
Saint-Office, en date du 26 janvier 1694,
condamna rigoureusement ce nouveau for-
mulaire; mais le prélat refusant de se sou-
mettre, Innocent XII adressa, le 6 février
suivant, à tous les évêques de la Belgique,
un bref pour leur enjoindre d'abandonner
les querelles, déjà trop prolongées, que les
vues de Précipiano tendaient à faire revivre.
Par un autre bref du 24 novembre 1696, le

Mais celui-ci, de concert avec les jésuites, n'en fit pas moins arrêter Quesnel à Bruxelles, où il s'était rendu clandestinement, et jeter le 30 mai 1703, par un ordre du jeune roi d'Espagne, dans une prison, d'où il pour plus détails sur ces faits, le tome i de parvint heureusement à s'évader. (Voyez, l'Histoire ecclésiastique du 16o siècle.)

*

:

comte Dɛ), né en 1742 à Semur en BrionPRÉCY (LOUIS-FRANÇOIS PERRIN, nais, fut, dès le commencement de la révolution, l'un des plus zélés défenseurs de la les guerres d'Allemagne de 1755 à 1762, et cause monarchique. Après avoir servi dans dans la campagne de Corse, il devint en 1783 commandant du bataillon de chasseurs des Vosges, refusa en 1791 le grade de colonel du régiment d'Aquitaine, pour se rapprocher du roi, et entra dans la garde constitenant-colonel. Cette garde n'ayant point tutionnelle de Louis XVI en qualité de lieutardé à être licenciée, le comte de Précy, à la sûreté du monarque et de son auguste sans qualité apparente, continua de veiller famille, et au 10 août 1792 il combattit dans les rangs des Suisses. C'est là que le roi en quittant son palais pour n'y plus rentrer, s'écria, en apercevant ce serviteur dévoué nues historiques, sont consacrées comme » Ah! fidèle Précy! » Ces paroles, devedevise dans les armes de la famille du comte, en vertu d'une autorisation de Louis XVIII. Après l'attentat du 21 janvier le comte de Précy s'était retiré à Semur, et y attendait l'occasion d'être utile à la cause monarchique, lorsque les Lyonnais lui offrirent le cepta et se rendit à Lyon; mais la défection commandement de l'armée fédérale ; il acperspective d'un siège pour lequel rien n'ade cette armée le réduisit bientôt à l'affreuse vait été prévu. En vain il se hâta de cherattaquée le 8 août 1793 par une armée de cher des secours au dehors; la place fut 40,000 hommes, avant qu'aucune de ses dispositions eût pu recevoir son effet. Cependant le 17 un message, envoyé aux autorités, promettait clémence et protection aux habitants pourvu que dans une heure la ville ouvrit ses portes et livrât ses chefs. Ce message est remis au comte de Précy, qui s'em— presse d'en donner connaissance au conseil du gouvernement de la cité. On sait que La réponse fut unanimement négative. Après

deux mois de la plus vive résistance, le général lyonnais, à la tète de 700 hommes divisés en trois corps, se décida à effectuer une sortie sous le feu des assiégeants; mais sa troupe fit taillée en pièces, et fut obligé de chercher son salut dans la fuite. Caché pendant huit mois dans un souterrain, ce ne fut qu'après la chute de Robespierre, qu'il put sortir de France. Pendant son séjour à l'étranger le comte de Précy fut chargé de plusieurs missions diplomatiques, et s'en acquitta avec tout le zèle dont il était capable ; mais il eut aussi à souffrir de nou velles persécutions: arrêté en Prusse, sur la demande du gouvernement consulaire, il ne recouvra sa liberté qu'après 18 mois de détention. Enfin il obtint de rentrer dans sa patrie en 1810, et vécut dans la retraite jusqu'à la restauration. Nommé alors lieutenant-général et décoré du Cordon-Rouge, il prit le commandement de la garde nationale de Lyon, où il fut accueilli avec enthousiasme, devint ensuite inspecteur honoraire des gardes nationales du département du Rhône, et se retira à Marcigni, où il mourut en 1820, à l'âge de 78 ans.- Pierre de Précy, neveu du précédent, mort en 1822 à Semur en Brionnais, est auteur d'un poème en quatre chants intitulé les Martyres, dont l'Ami de la Religion et du Roi a rendu un compte détaillé, tom. 31, pag. 95. Il avait composé plusieurs autres ouvrages, entre autres un poème historique du monde, un autre sur les Stuarts, un livre de l'Influence du christianisme sur la civilisation des peuples, etc.

PRÉDICATION. (Religion.) Autrement, dispensation de la parole de Dieu dans l'Église chrétienne. Elle est aussi ancienne que la religion, et n'a pas d'autre berceau que le sien. Comme le Dieu vivant avait envoyé son Verbe, le Verbe envoya ses apôtres Allez, enseignez toutes les nations, apprenez-leur à garder tout ce que je vous ai recommandé. Les apôtres, dociles à la voix de leur divin Maître, prêchèrent partout, le Seigneur coopérant avec eux, et confirmant leurs discours par des signes surnaturels. Leur prédication se fit entendre dans l'univers entier, et leur parole retentit jus qu'aux extrémités du monde. Saint Paul, écrivant aux Corinthiens, a soin de leur dire : « Je n'ai point employé en vous prêchant, les discours persuasifs de la sa» gesse humaine, mais les effets sensibles de l'esprit et de la vertu de Dieu, afin

» que votre foi ne soit pas établie sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance

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de Dieu.... Nous prêchons la sagesse de

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Dieu, renfermée dans son mystère, pré» parée avant tous les siècles pour notre » gloire. J'ai rapporté ce passage de l'apô tre, parce qu'il est le fondement de la prédication, qu'elle n'a dégénéré qu'en s'en écartant, et qu'on n'a pu lui rendre sa purelé privimitive qu'en l'y ramenant.

Les disciples immédiats des apôtres propagèrent leur doctrine, et furent, à leur exemple, des hérauts, des prédicateurs de l'Évangile. Dès l'origine du christianisme, la prédication accompagna tous les actes religieux, et jamais les fidèles ne se réunirent pour prier ou pour offrir, que l'évêque, ou celui qui le représentait, ne distribuât le pain de la parole c'est saint Justin, martyr, qui nous l'apprend.

En entrant dans l'Église chrétienne, les philosophes et les orateurs y apportèrent leur manière de discuter et de parler en public. Alors même qu'ils n'introduisirent aucune nouveauté dans le fond des mystères, ils changèrent le mode d'enseignement. L'amalgame de tant de peuples divers, qui communiquaient entre eux par la profession de la même foi, porta de nouveaux changements dans la prédication. Ce fut bien autre chose quand les ténèbres envahirent l'Europe dans le moyen âge, quand la scolastique régna en souveraine dans les cloitres et dans les cathédrales, quand les langues. modernes se formèrent, se développèrent, se perfectionnèrent. La prédication subit toutes les chances de la fortune qu'éprouvè rent les nations chrétiennes pendant dixhuit siècles, et se ressentit de toutes les révolutions des arts et des sciences.

Dans le quatorzième et le quinzième siècle la prédication fut profanée par des quo. libets, des apostrophes hardies, souillée par des obscénités révoltantes. On y rencontre néanmoins des apologues charmants et des sentences admirables. Parmi les prédicateurs de cette époque, on distingue saint Antoine de Lisbonne, saint Vincent Ferrier, le chancelier Gerson, Nidder, et plus tard Robert de Licio, Brûlefer, Barlette, Menot, Maillard, Pepin, Clérée et Raulin. La plupart des savants se sont imaginé qu'on prêchait en latin : c'est une erreur. Les sermons étaient prononcés en langue vulgaire, comme je l'ai démontré ailleurs. Mais des auditeurs instruits en fai

saient des analyses qu'ils traduisaient en mauvais latin. Les endroits où le prédicateur devait s'arrêter étaient notés du triple hem, et ceux qui étaient destinés à produire de l'effet, par ces mots : percute pede, percute pedibus.

A la renaissance des lettres, la prédication perdit de sa naïveté, et demeura ensevelie sous des amas de citations indigestes. Les prédicateurs avaient recours à ce qu'ils appelaient les dix fontaines d'invention. Ils puisaient dans les polyanthea, dans les theatra, dans les thesauri, et dans ces magasins publics d'érudition banale, qui ne servaient qu'à alimenter la paresse et à étouffer le génie.

L'état de la prédication à cette époque dans les différents royaumes de la chrétienté, et les obstacles qui en ont empêché l'amélioration pendant long-temps, ont été constatés par un grand nombre d'écrivains dont il serait superflu de produire la liste.. Il suffira de nommer les plus remarquables. Le père Isla, jésuite castillan, a signalé les abus qui déshonoraient le ministère de la parole de Dieu en Espagne et en Portugal, dans son ingénieuse histoire du fameux prédicateur Fray Gerundio de Campazas. Hugues Blair, qui avait offert des modèles de goût et d'éloquence à l'Angleterre et à l'Écosse, en publiant ses sermons, affaiblit notablement les vices rongeurs de la prédication par son Cours de littérature, et substitua des leçons de saine morale, bien qu'un peu sèches, à des discussions métaphysiques à quoi se réduisaient les sermons dans sa patrie. En Italie, le cardinal Frédéric Borromée, neveur de.saint Charles Borromée, comme lui archevêque de Milan, dans son ouvrage de Episcopo concionante; Bernardin Ferrari, docteur du collège Ambrosien, dans ses trois livres de Ritu sacrarum ecclesiæ catholicæ concionum; et plus encore le jésuite Segneri et le cardinal Casini, contribuèrent puissamment à diminuer la fureur des ecclésiastiques pour ces misérables concetti qui déparaient le plus noble des arts. En France, nous pouvons étaler avec orgueil d'immenses richesses dans ce genre. Fénelon se présente avec ses Dialogues sur l'éloquence de la chaire, et sa Lettre à l'Académie française; Jean Gaichiés, de l'Oratoire, avec ses Maximes sur le ministère de la chaire; Pierre de Villiers avec l'Art de précher, poème souvent réimprimé; le docte abbé Fleury avec ses admi

rables ouvrages, bien qu'ils n'aient pas pour objet unique le ministère de la prédication; le cardinal Maury avec son Essai sur l'éloquence de la chaire; M. l'abbé Guillon, avec sa Bibliothèque choisie des saints Pères; M. Raulin avec son excellent article sur les Sermonaires des quinzième et seizième siècles, inséré dans la Revue française, no 12. Ils ne laissent rien à désirer sur ces matières, les uns, en s'élevant avec énergie contre tant de défauts qui se glissaient imperceptiblement jusque dans les plus beaux talents; les autres, en traçant aux jeunes prédicateurs les règles qu'il faut suivre pour parvenir à la perfection.

»

Quel est le fond de la prédication évangélique? La réponse est facile : elle est renfermée dans la question même. La prédication ne peut être que l'expression de la pure parole de Dieu, interprétée par les décision des conciles ou le consentement unanime des Pères; tout ce qui est hors de là ne peut être qu'accessoire et destiné à servir d'ornement. « La parole de Dieu, dit » saint Paul aux Hébreux, est vivante et efficace; elle perce plus avant qu'une épée » à deux tranchants, elle pénètre jusque » dans les replis de l'âme et les divisions de l'esprit, jusque dans les jointures et les » moelles; elle démêle les pensées et les » mouvements du cœur. Nulle créature ne » lui est cachée. » Le même apôtre établit encore plus fortement, ce semble, le même principe dans sa seconde épître à Timothéc. «Toute écriture inspirée de Dieu, dit-il, » est utile pour instruire, pour reprendre, » pour corriger, et pour conduire à la piété » et à la justice, afin que l'homme de Dieu » soit parfait, étant propre et préparé à tout » bien. »

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Quelque incontestable que soit ce principe, le cardinal Maury a cru devoir insister pour l'inculquer davantage dans l'esprit de quelques nóvateurs qui s'étaient imaginé que les livres des philosophes et des orateurs pouvaient fournir d'aussi bonnes leçons de morale, et de meilleurs exemples d'éloquence que les livres sacrés. « C'est en lisant » et en relisant l'Écriture-Sainte, dit-il, D qu'on apprend à parler cette belle langue » de la piété, du zèle et de l'onction, qui répand tour à tour sur le style des images » touchantes, majestueuses ou terribles » sans lesquelles on ne s'emparera jamais ni » de l'imagination ni du cœur de l'homme. >> On trouve dans les livres saints des pen

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» sées si sublimes, des expressions si hardies » et si énergiques, des tableaux si pittores» ques, des allégories si heureuses, des sen» tences si profondes, des élans si pathéti»ques, des images si éclatantes et si variées, » qu'il faudrait se les approprier par intérêt » et par goût, si l'on était assez malheureux » pour ne les point rechercher par principe » et par devoir (!). »

En avançant que la parole de Dieu ne peut être interprétée que par le consentement unanime des Pères, j'ai suffisamment laissé voir quel usage devait en faire un prédicateur. Orateurs chrétiens! Vous êtes les ministres de la parole de Dieu; vous devez d'abord, vous crie l'illustre cardinal, tirer des livres saints la substance de vos discours et parler habituellement la langue du prédicateur invisible que vous représentez; mais comme la doctrine du christianisme ne se trouve parfaitement développée que dans la tradition des Pères de l'Église, vous devez aussi acquérir à leur école cette sûreté de principes, cette netteté d'enseignement, et cette fermeté d'expression dont ils ont été les organes, les régulateurs et les modèles.

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On ne peut bien prêcher la parole de Dieu qu'autant que l'on est habile théologien; et » quiconque veut devenir habile théologien, > suivant Bossuet, qu'il lise et qu'il relise » les Peres. S'il trouve dans les modernes quelquefois plus de minuties, il trouvera → très-souvent dans un seul livre des Pères plus de principes, plus de cette première » sève du christianisme, que dans beaucoup » de volumes des interprètes nouveaux ; et » la substance qu'il y sucera des anciennes » traditions, le récompensera très-abondam» ment de tout le temps qu'il aura donné à » cette lecture. Que s'il s'ennuie de trouver » des choses qui, pour être moins accommo» dées à nos coutumes et aux erreurs que » nous connaissons, peuvent paraître inuti»les, qu'il se souvienne que, dans le temps » des Pères, elles ont eu leur effet, et qu'el» les produisent encore un fruit infini dans » ceux qui les étudient, parce qu'après tout, » ces grands hommes sont nourris du fro➤ment des élus, de cette pure substance de la religion, et que, pleins de cet esprit primitif qu'ils ont reçu de plus près, et avec plus d'abondance de la source même, souvent ce qui leur échappe, et qui sort na

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(1) Essai, etc., tom. 2, pag. 194. Tome 19.

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On a agité la question de savoir si les catholiques ne feraient pas mieux de lire leurs sermons, à l'exemple des protestants, que de les apprendre par cœur et de les réciter. Je n'hésiterai pas un instant à dire franchemént qu'il me semble que les sermons doivent être débités de mémoire. Sans doute il en coûte, surtout dans un âge avancé, d'apprendre sa leçon comme un écolier, et d'être exposé à rester court devant un auditoire attentif, et parfois peu indulgent. Bourdaloue et Massillon, qui avaient une mémoire ingrate, en ont souvent fait la triste épreuve. Mais aussi quel avantage n'obtient pas le prédicateur qui récite sur celui qui lit son sermon? Il a un air d'inspiration qui donne de l'ascendant à ses paroles, et qui rompt l'uniformité que doit entraîner nécessairement un monologue d'une heure au moins. Combien de personnes, en entendant la lecture d'un discours ordinaire, ne s'imagineraient elles pas qu'elles ont perdu leur temps, et qu'elles pouvaient tout aussi bien remplir leur devoir en lisant un sermon de quelque orateur célèbre; tandis qu'il est bien rare qu'un prédicateur qui récite son sermon leur laisse ce regret! D'ailleurs, si les orateurs français ont élevé l'art de la chaire à un si haut degré de supériorité et de gloire, c'est qu'ils apprennent et qu'ils débitent leurs sermons. En gravant dans leur mémoire un sujet qu'ils n'avaient peutêtre qu'ébauché, ils l'ont envisagé sous tous ses rapports; ils l'ont approfondi; ils ont coordonné leurs idées, limé leur style, et conduit leur composition à ce point de perfection qui en fait un chef-d'œuvre.

Je ne m'arrêterai point à examiner s'il est avantageux pour un prédicateur d'improviser ses sermons; il est impossible, sans avoir écrit, d'entretenir long-temps des auditeurs sur des matières aussi ardues que le dogme et la morale, sans les ennuyer, sans se répéter. La tradition nous apprend que Bossuet et Fénelon prêchaient souvent d'abondance, et qu'il leur arrivait de parler quelquefois dans le désert.

La méthode de diviser les sermons, généralement adoptée, n'est pas du tout ridicule, comme le prétendent quelques rhéteurs. Suivant M. Andrieux, les sermous

(1) Défense de la tradition et des saints Pères.

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