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L'histoire, d'accord avec la raison, proclame donc hautement qu'il n'y a de garantie pour les individus, et de durée pour les États, que dans l'organisation d'une défense commune. Cette organisation est d'autant meilleure qu'elle familiarise avec les armes un plus grand nombre d'individus. Ce n'est pas seulement parce que le nombre est formidable à la guerre qu'il convient d'aguerrir toute une population: c'est aussi parce que la nature est avare des hautes capacités militaires, et que ces capacités décident le destin des combats. Il faut présenter aux grands talents, trop disposés à s'ignorer eux-mêmes, le plus de chances possibles pour se sentir et se montrer. Qu'on réfléchisse combien peu de généraux capables de diriger de grandes armées se sont manifestés dans la guerre de vingt-trois ans. Le choix s'exerça cependant sans restriction ni limite sur plusieurs millions de soldats qu'armait notre indépendance.

Les institutions organisatrices ont pris, selon les temps et les lieux, des caractères et des noms variés. On peut consulter le troisième volume de l'Encyclopédie méthodique, pag. 160 à 188, on y trouvera un précis intéressant des combinaisons imaginées par plusieurs peuples célèbres; mais, pour ne parler ici que de notre France, si la forme a souvent changé, le fond est toujours demeuré le même toujours, dans les dangers publics, le gouvernement s'y est appuyé sur les masses, et les mots de ban, d'arrière-ban, de levée, de milice, de réquisition et de conscription, tour à tour choisis et abandonnés, ne représentent, en dernière analyse, que l'obligation où se trouve un peuple, animé du sentiment de sa dignité, de se lever en masse toutes les fois que son existence ou son honneur sont en péril.

Quelques publicistes regrettent qu'on n'ait pas naturalisé chez nous les institutions romaines, rappelées par notre assemblée constituante (décret du 12 décembre 1790), lors de la création des premières gardes nationales. Ils pensent que, dans une société convenablement ordonnée, on doit ne confier d'armes qu'aux seuls citoyens, c'est-à

dire, à tout homme qui payant, comme propriétaire, un cens quelconque, se trouve intéressé à la conservation de l'État, laquelle apparemment est indifférente aux non-propriétaires.

Il y aurait beaucoup à dire sur les vertus civiques inhérentes à la propriété et sur cette qualification de prolétaire adressée dédaigneusement à quiconque vit du travail de ses mains. Je me contenterai de faire remarquer qu'il n'est pas exact d'avancer que chez nous le non-propriétaire ne participe point aux charges publiques. N'est-ce donc pas un véritable cens que ce surcroît de prix dont les prélèvements du fisc affectent les objets de première nécessité? L'impôt indidirect n'existait pas à Rome, où, bien loin de taxer le blé, le sel, etc., le gouvernement les fournissait gratuitement à la plébécule. Il s'ensuit que les publicistes qui assimilent entre elles les classes inférieures des deux pays cherchent futilement des rapports là où il n'existe que des diffé

rences.

Au reste ce n'est pas le lieu d'examiner si l'individu à qui le travail de chaque jour permet de dépenser 50 sous, n'est pas aussi bien propriétaire de neuf cents francs de revenu que celui qui en possède le capital en fonds ou en marchandises. Je rapellerai seulement qu'à l'époque récente de nos désastres militaires, ces distinctions subtiles de prolétaires et de citoyens, n'ont pas été avouées de la nature comme source d'amour pour le pays, et gage de dévouement à sa cause. Ce fut alors la classe qui n'a rien à perdre, celle qui, selon notre ingénieux fabuliste, ne peut être condamnée à porter deux bâts, qui se montra le moins ébranlée de nos revers de fortune et le plus disposée à faire à l'honneur ce sacrifice de la vie devant lequel ceux de la fortune sont peu de chose. J'ajouterai qu'encore aujourd'hui c'est elle qui conserve le nerf militaire, et elle seule qui nourrit le patriotique espoir de notre réveil et de notre revanche.

Rendons toutefois cet hommage aux esprits éclairés qui discutent et votent notre législation, qu'ils ne consacrèrent jamais ces vaines théories. Les lois du 10 mars 1818 et du 9 juin 1824, qui régissent maintenant cette matière, appellent, au contraire, indistinctement tous les enfants du pays à l'honneur de le servir, et leur reconnaissent des droits égaux pour l'avancement et les récompenses.

Ces lois, répudiant le mot de conscription, comme rappelant des souvenirs douloureux, ont introduit à sa place le nom de recrute ment pour désigner l'emprunt annuel des hommes que le prince fait au pays. Cet emprunt ne peut excéder soixante mille soldats, dont chacun, après huit années passées dans les rangs, est rendu à sa volonté propre; ce qu'on appelle libéré.

L'article 1er de la loi consacre une fiction que je voudrais en voir bannie, parce qu'il me semble que ce qui sent l'artifice òte quelque chose à la majesté d'un acte destiné à rappeler à tous la première obligation de l'état social. Cet article suppose que l'armée se recrute par des engagements volontaires, et qu'il n'est recouru au service obligé que dans le cas de leur insuffisance. Or, il n'est pas vrai que les armées modernes puissent se recruter avec des volontaires (1). On aura beau arguer de l'héroïque détermination qui, au début de la révolution, nous improvisa trois cents bataillons d'infanterie ; on excipera vainement de ce qui a été imité, ou, suivant une heureuse expression du maréchal Saint-Cyr, parodié par d'autres États: : ce sont des exceptions à l'ordre naturel des choses, qui condamne les peuples civilisés à répugner au métier des armes. Je ne sais d'ailleurs si la défense d'un pays gagne beaucoup à ces résolutions enthousiastes, le ressort moral des populations se relachant bientôt proportionnellement à l'effort qui l'a tendu. J'aurais trouvé plus digne que l'article 1er de la loi ne contint que ces mots Tout Francais nait soldat, et doit prendre place dans le rang, lorsque son áge et l'utilité du pays exigent ce sacrifice. Bien différente de la conscription, dont on a dit avec raison qu'elle était d'une équité inexorable, la loi de recrutement admet des exemptions. reconnait des dispenses, et favorise le remplacement. Toutes ces concessions amènent, dans leur application aux individus, un examen et un debat pour lesquels est institué, dans chaque départe

(1) A l'époque de la formation de l'armée nouvelle, il existait une foule de militaires survivant aux désastres et au licenciement de l'ancienne, qui semblaient n'avoir de ressource que celle de servir. C'était assurément, pour l'engagement volontaire, la circonstance la plus favorable possible: eh bien! du 10 mars 1818 auler octobre 1819,il ne s'en présenta que 15,371. C'est sur le pied de 10,248 par an. Depuis lors les engagements volontaires out toujours été décroissant,

ment, un tribunal composé de fonctionnaires de l'ordre civil, qu'on nomme conseil de révision, lequel prononce en dernier ressort.

On ne peut qu'applaudir au principe de la libération définitive. Dans un pays où il nait annuellement (1) 498,824 enfants du sexe masculin, il n'y a pas nécessité d'obliger indéfiniment toute la population au service personnel; mais le terme de cette libération tombant à l'âge où l'homme est plus apte aux travaux militaires, ne me pa. rait pas une innovation bien heureuse.

Quant aux exemptions et aux dispenses, les chiffres officiels parlent plus- éloquemment que des réflexions. Voici le travail produit au Conseil à l'époque d'adoption de la loi du 10 mars. Il s'agissait de mettre sur pied les classes de 1817 et 1818, que les tableaux de recensement évaluaient à 290,000individus.

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2. Elle éloigue du rang, par la facilité donnée au remplacement, toutes les intelligences que l'éducation a développées.

30 Elle dispense trois cinquièmes de la population d'apprendre à manier des armes, ce qui doit les rendre impropres à défendre le pays.

Ces causes réunies non-seulement tendent à amortir le feu militaire, mais ont pour résultat inévitable d'assigner à nos troupes une valeur intrinsèque moindre que que les troupes des États nos rivaux, qui font passer toute leur population dans l'armée, satisfaisant au principe fondamental de toutes les institutions de ce genre qui ont existé, savoir, de faire concourir toutes les forces physiques et intellectuelles du pays au grand but de sa conversation.

Ces réflexions ne sont pas nôtres. Elles résultent d'ouvrages justement estimés (1), de discussions publiques. Elles ont appelé les méditations du conseil de guerre.

Notre intention, au reste, n'est pas de les faire peser à titre de reproche sur la mé

moire de l'auteur illustre de la loi du 10 mars. D'abord son système, comme reculant la libération à douze années, dont six dans l'armée active et six dans les vétérans, était plus essentiellement militaire que ce qui a été substitué. Par la création de légions départementales, hommage rendu à la mémoire de nos trois cents fameux bataillons, il avait fondé des moyens d'émulation, ramené la fraternité d'armes et ranimé l'esprit de provinces et de corps. Il projetait aussi une solide organisation de la garde nationale, institution dont on ne sait comment expliquer l'oubli en présence des landwher de l'Allemagne et des colonies' militaires de la Russie.

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parle pas d'inquiétudes plus fondées que le pouvoir était autorisé à nourrir, et qu'il a fallu de la magnanimité pour surmonter. Il était difficile de transiger avec des intérêts et des préjugés si divers. C'est cependant ce qu'a fait la loi du 10 mars, dont on peut dire, comme de celle de Solon, qu'elle est la meilleure que l'on pût alors institucr. (Voyez ARMÉE.) LA NEUVILLE.

RECRUTEMENT. (Marine.) Napoléon captif, discourant sur les actes de sa vie po. litique et militaire, disait un jour : « Avec un habit, un mousquet et quelques jours d'exercice, on transforme un artisan ou un laboureur en soldat; tandis qu'il faut des années pour former un matelot médiocre. On improvise une armée; mais point une

marine. »

Tout État que sa position géographique met dans le cas d'avoir à soutenir des guerres maritimes ne saurait donc apporter trop d'attention à s'assurer, par avance, les officiers et marins qui doivent former les équipages de sa flotte.

Examinous quels moyens on a pris jusqu'ici en France pour arriver à ce résultat, et d'abord occupons-nous des officiers.

Nous avons déjà fait remarquer que ce n'est guère qu'aux approches du règne de Louis XIV qu'il faut remonter pour trouver les premières traces d'une marine militaire régulièrement organisée. C'est ce prince qui fut, à proprement parler. le créateur du corps royal de la marine. Mais, comme il en fit un corps privilégié, accessible à la noblesse seule, et qu'une naissance distinguée ne s'allie pas toujours avec l'instruction pratique essentielle à l'homme de mer, il n'eut, dans le principe, que des officiers de marine, braves comme tous les militaires français, mais qui n'avaient guère de marins que le nom. Les véritables marins de la flotte étaient alors les pilotes et les maitres d'équipage. Pour y rémédier, et en même temps se former une pépinière de jeunes officiers, il créa trois compagnies de deux cents gentilshommes gardes de la marine, à l'instar des compagnies de cadets de l'armée de terre, et il établit en même temps à Brest et à Toulon des écoles pour leur instruction. Ces mesures, ainsi que les guerres maritimes dans lesquelles la France se trouva engagée, ne tardèrent pas à former un certain nombre de bons officiers, et à procurer à nos armées navales et escadres des succès qui portèrent tout d'un coup la gloire de notre marine à

un point qu'on ne l'a pas vue atteindre de les grades d'aspirant et d'enseigne, ramenėpuis cette mémorable époque. rent chaque année sur les vaisseaux quantité d'officiers à qui une bonne instruction théorique donnait le moyen de perfectionner promptement les connaissances pratiques; enfin l'École polytechnique y sema quelques sujets distingués. L'instruction se répandit progressivement dans tous les grades, et vint à bout, non sans peine, d'y supplanter la routine opiniâtre et orgueilleuse.

L'organisation définitive que Louis XIV donna au corps royal de la marine par son ordonnance de 1689, quoique souvent modifiée dans quelques détails par les faiseurs dont l'espèce est si commune en France, demeura intacte, pour le fond, jusqu'au grand bouleversement politique qui eut lieu tout juste un siècle après.

A la révolution, tout changea de face. On vit émigrer le corps presque entier de la marine royale, et, lorsque la guerre éclata sur mer, au commencement de 1793, il fallut remplacer à la hâte tous les officiers qui avaient regardé comme un devoir de suivre les princes à l'étranger, malgré les ordres réitérés d'un roi que depuis 1789 ils ne considéraient plus comme libre. Mais comment procéda-t-on à ce recrutement pour ainsi dire général des états-majors de la flotte? on amalgama ensemble une foule d'éléments divers et la plupart hétérogènes. Autour du petit nombre d'ofliciers de la marine royale demeurés à leur poste, on groupa d'anciens officiers bleus (1), des capitaines marchands, des premiers et seconds pilotes des vaisseaux du roi, des maîtres d'équipage, et enfin des gens qui n'avaient guère d'autre titre que la recommandation toute puissante des sociétés populaires dont ils étaient membres. C'est-àdire que, parmi d'habiles marins dont les lois et les préjugés de l'ancien régime arrêtaient l'essor, on introduisit des hommes que la plus commune pratique de la manœuvre d'un vaisseau pouvait seule recommander, mais qui ne possédaient même pas tous cette pratique grossière, et qui d'ailleurs ne se distinguaient par aucune des autres qualités indispensables à un officier.

En vain, par des épurations successives, on écarta la plupart des individus dont les clubs révolutionnaires avaient infesté tous les grades, même les plus élevés. Jusqu'à la fin de la guerre, la marine se ressentit de cette bizarre et funeste composition de la première branche de son personnel.

Cependant les écoles d'hydrographie et de navigation qui furent établies dans plus de quarante ports, et le concours public pour

(1) Nom que l'orgueil aristocratique avait donné aux officiers auxiliaires, par allusion à la couleur de leur habit tout uni et dénué des galons et broderies qui ornaient celui des hommes titrés ou gentillatres composant ce qu'on appelait le grand corps.

A la chute de l'empire, les états-majors de nos bâtiments de guerre abondaient en jeunes officiers qui donnaient les plus hautes espérances, et qui les auraient réalisées, si la guerre se fût assez prolongée pour qu'ils pussent faire quelques longues campagnes. Ceux qu'épargnèrent les diverses réformes qui suivirent les cent-jours-sont aujourd'hui (après quelques anciens chefs d'un mérite éminent) l'élite du corps royal de la marine; circonstance qui doit faire vivement déplorer les violentes et impolitiques mesures dont leurs compagnons furent victimes.

En 1815, non-seulement le corps de la marine établi sur le pied de paix fut considérablement réduit ; mais encore on vit remplacer un certain nombre de jeunes réformés par des officiers de l'ancienne marine revenus de l'émigration. De là résultait une double nécessité de se composer une bonne pépinière. Dans ce but, il fut créé un collége royal de marine; mais les faiseurs de l'époque, par une ridicule adulation envers un auguste personnage, placèrent ce collége loin de la mer, dans la ville qui portait le nom du prince grand-amiral.

Ce que tout homme doué de ses sens pouvait prévoir arriva. Après deux années d'études mal faites, les élèves sortaient du collége d'Angoulême la mémoire chargée de notions mal conçues, qu'ils oubliaiant avec une grande facilité au milieu des exercices de la mer, et le but de l'institution se trouva tout à fait manqué. De nombreuses réclamations s'élevèrent, et l'autorité se vit obligée de mettre en question s'il ne convenait pas de substituer d'autres écoles au collège d'Angoulême. La suppression de ce monstrueux établissement aurait procuré, sur le personnel seul, une économie de soixante mille francs. Cette suppression avait même été décidée; mais des influences secrètes, sur la nature desquelles il ne convient pas de s'expliquer, l'empêchèrent d'être effectuée. On se borna à quelques modifications qui ne rémédiaient point aux vices qu'il fal

lait détruire, et force fut d'en revenir à ces vaisseaux-écoles qu'on avait établis sous l'Empire, ainsi qu'au concours direct pour les places d'élèves et de volontaires, à quelque source que les candidats eussent puisé les connaissances dont ils devaient faire preuve. En attendant le résultat de ce retour à de saines idées, on manque d'élèves pour compléter les cadres d'officiers auxiliaires.

Avec le temps, nous verrons sans doute disparaître les difficultés qu'éprouve encore le recrutement des officiers de notre marine militaire. Au reste, l'instruction des membres actuels du corps est en général satisfaisante. Ce que nous avons dit aux articles NAVIGATEURS et PILOTAGE montre à quel de gré sont portées les connaissances théoriques de nos officiers. Quant à celles relatives à la pratique de la navigation, et à l'art militaire de mer, les rapports des campagnes de nos divisions navales, leurs exercices et manœuvres faits dans toutes les stations simultanément avec des bâuments de guerre anglais, et enfin la conduite de notre escadre à la bataille de Navarin, prouvent que cette branche essentielle de la science navale a marché de pair avec la théorie. Tout enfin nous fait augurer pour une guerre future des résultats bien différents de ceux de la dernière guerre.

Levant, on adopta le système de recrulement en usage pour celle du Ponant.

ce

Ce système consistait dans des levées arbitraires faites sur les navires marchands, et dans toutes les paroisses du littoral, qui interrompait le commerce et gênait la pêche. Des capitaines et officiers de marine, munis d'une commission de l'amiral, étaient envoyés dans les provinces limitrophes de la mer, pour y eurôler les matelots de bonne volonté ou de force. Ils exerçaient ainsi une sorte de presse. On a peine à concevoir, et c'est assurément une chose bien remarquable, que les Anglais, qui souvent ont perfec tionné avant nous diverses branches du service de la marine, n'en soient encore aujourd'hui qu'à ce mode de recrutement odieux et vexatoire.

Les mesures de rigueur qu'il nécessitait ne faisaient que redoubler l'éloignement des marins français pour le service de l'État. En vain la solde allouée par le roi aux matelots était supérieure à celle que donnaient les négociants et armaieurs, leur répugnance était si forte pour l'embarquement sur les vaisseaux de guerre, qu'ils préféraient souvent s'expatrier. Ces émigrations devinrent même si nombreuses, qu'un édit royal porta la peine des galères perpétuelles contre tout matelot ou ouvrier des ports qui passait à l'étranger. Par un édit postérieur, il fut déPassons maintenant à ce qui regarde les claré que tout marin qui aurait manqué à équipages.

On manque de notions sur la manière dont s'opérait le recrutement des marins destinés à monter les bâtiments de guerre français à des époques un peu reculées. La plupart des ouvrages qui contiennent les récits des combats et expéditions de la marine française, antérieurement au règne de Louis XIV, ne font aucune mention des mesures employées pour recruter et composer les équipages. Il paraîtrait que, de même que les capitaines furent long-temps chargés de l'achat et de la distribution des vivres à leurs matelots, ils eurent aussi la charge de lever ceux qui étaient nécessaires pour composer leur équipage. Du moins cet usage se maintint jusqu'à une époque assez rapprochée de nous pour la marine de la Méditerranée qui comptait beaucoup moins de vaisseaux que de galères, et par conséquent exigeait plus de chiourmes de forçats ou d'esclaves turcs et maures, que d'équipages de matelots. A mesure que le nombre des vaisseaux s'accrut dans notre marine du Tome 19.

deux revues de suite serait puni comune déserteur, c'est-à-dire de la peine de mort. Toutefois, on en revint ensuite à la peine des galères, moins par humanité que par intérêt, et parce que l'application de cette peine avait pour résultat d'augmenter les chiourmes qui armaient les galères.

Cependant Louis XIV, ami de l'ordre, et surtout jaloux de connaître en tout temps les ressources dont il pouvait disposer pour armer ses escadres, établit, par les conseils de Colbert, un nouveau système de recrutement celui des classes.

D'après ce système, les gens de mer furent partagés en quatre parties ou classes dans les provinces maritimes du Ponant, à l'exception du Poitou et de la Saintonge, et seulement en trois dans ces deux dernières et dans celles du Levant, c'est-à-dire de la Méditerranée. Chacune de ces classes était alternativement réservée pour le service du roi pendant une année; les deux autres classes devaient avoir une entière liberté de naviguer au commerce et de se livrer à leur

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