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moyen âge se jeter dans une carrière de couleurs, des grands feudataires, des maidisputes théologiques qui, d'une extrémité tres de tous étages, des droits féodaux de du monde à l'autre, ont ensanglanté l'autel toute nature, l'inégale répartition des produ Dieu de concorde. Ce qu'il y a de meil- priétés laissées par le père commun ; tantôt leur en nous a été détourné de son but; le celles-ci dévolues au fils aîné, comme herisacrifice de la raison a été insolemment de- tier du fief. tantôt au fils cadet, comme dans mandé au nom de celui qui en fit l'attribut usement de Rohan en Bretagne ; il s'est vu le plus noble de notre nature; et la vie, jeté au milieu de l'ambition de ses propres qui pouvait être conduite utilement à de chefs qui, après s'être déclarés princes spitouchantes abnégations, a été immolée aux rituels, se sont saisis des deux glaives, qui idées stériles d'une perfection imaginaire. ont ceint leurs fronts de couronnes et de tiaL'erreur de nos pères leur a été fàcheuse. res, qui ont eu des palais et des soldats sous Plaignons-les; mais ayons garde de les traiter leurs ordres, des trésors et des juridictions; avec mépris; les temps qui nous favorisent contraint de subir, avec ces influences, celle n'étaient pas pour eux. Épargnons aussi le des préjugés qu'il avait à combattre, il a christianisme innocent de leurs torts; bor- échelonné une hierarchie qui probablement nons-nous à le rétablir dans la dignité de son n'eût pas été avouée de son fondateur. Il n'y origine, sans l'accuser, car tous les cultes a pas eu en lui diversité de croyances fonont subi les mêmes destinées ; tous ont été damentales; car il était difficile que les nasurchargés de pratiques et de superstitions, tions ne tinssent pas à la bonne nouvelle qui sous lesquelles la pensée principale a dis- leur avait été annoncée : mais les croyances secondaires ont varié indéfiniment. La vraie paru. Religieux d'abord, le genre humain a fini par devenir presque partout idolâtre. doctrine, si elle n'a été dénaturée, s'est cachée dans le mysticisme, et a disparu plus d'une fois sous des voiles trompeurs et des allégories détournées de leur sens primitif; enfin, le christianisme, avec une supériorité de pensée et une force d'action inherente à son essence, a dû être d'ailleurs, pendant quinze siècles, ce qu'était l'espèce humaine elle-même, c'est-à-dire en défiance contre toute nouveauté, stationnaire par instinct de conservation, associé, sans l'avouer, par un mélange adultère de pratiques, à deux religions éteintes, et obligé de respecter des usages dont il cherchait à faire oublier l'origine idolâtre. Ainsi on s'étonnera peu que le paganisme et le druidisme aient laissé leurs traces dans la religion qui est venue s'asseoir sur leurs débris.

Voilà sans doute ce qui a autorisé quelques penseurs célèbres à marquer le chiffre de la borne au pied de laquelle doivent expirer la plupart des religions. Ils ont cru ne pouvoir leur assigner plus de deux mille ans de durée. L'événement viendrait à justifier l'oracle, qu'il ne serait pas permis d'en tirer des inductions peu favorables aux croyances essentielles. Quand les cultes se sont organisés, pour avoir de la force, ils ont dû la chercher dans leurs rapports avec les mœurs, les besoins et les habitudes des peuples: ce préalable était nécessaire. Les dogmes principaux ont pu s'attaquer avec succès à nos penchants déréglés ; une lutte corps à corps contre nos passions leur était permise; mais à coup sûr l'institution religieuse, en d'autres points, a dû se monter au diapason de l'intelligence humaine, partout où elle a eu à s'adresser aux esprits, partout où elle a eu à parler aux yeux; certaines formes sociales ont même exigé un respect illimité. Ainsi le christianisme a-t-il fait par rapport au judaïsme sur lequel il avait à prendre racine en Syrie; ainsi a-t-il dû se ressentir, sous beaucoup de rapports, de l'état arriéré de la civilisation européenne au milieu de laquelle, plus tard, il a planté son drapeau. C'était beaucoup pour lui que de poser des principes et de semer de beaux germes, remettant à une époque plus propice d'en obtenir le développement. Il a rencontré sur sa route des serfs, des esclaves de toutes

Le temps, qui démolit tout, jusqu'aux opinions, quand elles n'ont pas la vérité pour base, a dispersé en lambeaux les dépouilles d'un âge dont nous n'avions pu répudier la succession. L'expérience, cette grande institutrice des peuples, a parlé; un nouveau jour a lui ; et la société, entrainée presque malgré elle, ou plutôt remuée par la main qui avait préparé en silence le moment où chaque créature raisonnable serait appelée à sa part naturelle de droits et de bonheur, est entrée dans une voie de perfectionnement.

Lorsqu'une impulsion pareille se fait sentir, qu'arrivera-t-il des religions? De deux choses l'une, ou que, devant la lumière qui

vient à les frapper elles-mêmes, s'attachant d'une fouie d'esprits graves, et pour lesquels fortement à ce qu'elles renferment d'essen- toutes les sources du merveilleux sont tatiel, elles se prêteront, dans leurs formes ries. Cependant, s'il lui était permis de se extérieures, aux besoins de l'époque; ou flatter de quelque succès sur l'un des deux qu'obstinées à garder le bagage suranné qui hémisphères, nous avons dit et nous le réles embarrasse et qui a perdu le respect pétons encore, il ne faudrait pas qu'il le d'une génération adulte, elles resteront im- cherchât en dehors du christianisme; car il mobiles, quand tout marche autour d elles. n'y a plus de religion possible, surtout en Les conséquences de ces deux partis sont Europe. que celle qui se rattachera plus ou inévitables par l'adoption de l'un, la vie moins directement à l'Évangile. Voyez CHRISdes cultes se continue; en suivant l'autre, TIANISME, CLERGÉ, CULTE, DIɛu, HÉRÉSIES, on s'isole et on inspire une défiance bientôt JUDAISME. MAHOMÉTISME, MORALE, MINISsuivie d'abandon. Or, une religion abandon- TRE DES CULTES, PAGANISME, PHILOSOPHIE, née, fût-elle mise par décrets sous la protec- PRIÈRES et QUAKERISME. KERATRY. tion de l'État, n'en est pas moins une religion morte.

La prophétie qui borne à un certain laps d'années la durée des cultes, peut donc s'accomplir quant à l'alliage dont le christianisme s'est chargé. Il doit lui échapper en substance, parce qu'ayant une doctrine fixe et éternelle à sauver, il se conformera, dans sa partie flexible, aux besoins des sociétés modernes, près desquelles une adhésion à des opinions et à des pratiques d'un autre temps n aurait pas même l'excuse des anciens usages. Ce qui était vérité, par rapport à l'état des esprits il y a quelques siècles, ne serait plus que mensonge aujourd'hui. La foi couvre tout; et dans les choses qui ne touchent pas essentiellement au vice et à la vertu, au moins elle met en paix la conscience: où l'on ne croit pas, au contraire, en quelque matière que ce soit, il y a péril à feindre de croire; et la morale publique sera menacée partout où les citoyens se diront d'une religion sans autorité sur leur jugement.

Lorsque les symboles pâlissent, et quand les emblêmes s'effacent ou se montrent aux yeux sans frapper les esprits, le moment est venu de séparer la partie morte de la partie vivante. La religion du Christ ne saurait › mourir dans l'univers. Certainement elle se réfugiera quelque part; car la terre ne peut être deshéritée de sa plus noble espérance : mais certainement aussi elle périra chez les peuples qui ne l'auront pas laissée se coordonner, dans sa discipline, aux besoins positifs des sociétés,

Nous avons déposé, dans l'une des pages de ce dictionnaire, notre sentiment sur l'inopportunité avec laquelle se présenterait désormais une religion nouvelle. Nous avons même déclaré que le fondateur d'un culte quelconque trouverait peu d'accès auprès

RELIQUES. (Religion.) C'est le nom que l'on a donné d'abord aux dépouilles mortelles des saints, et ensuite, par extension, à tout ce qui avait touché leurs dépouilles, à tout ce qui leur avait appartenu.

La vénération des reliques remonte à l'antiquité la plus reculée; mais elle se bornait au simple respect. Il était tout naturel que les corps des martyrs qui avaient sacrifié leur vie pour le nom de Jésus-Christ, fussent en grande vénération parmi les fidèles, et devinssent, suivant l'expression d'un Père de l'Église, des exhortations au martyre. Lorsque Antoine voulut émouvoir les Romains en faveur de César, il leur montra la robe ensanglantée de ce dictateur. Ainsi, quand les successeurs des apotres voulaient confirmer les chrétiens dans la foi, ils choisissaient la présence des tombeaux qui renfermaient les restes précieux des martyrs, pour opérer cet effet. Il était presque produit par le lieu mème, par la vue du sang adorable de l'auguste victime de la nouvelle alliance que les prêtres faisaient couler sur l'autel dans des catacombes, où gissaient de toutes parts les ossements encore sanglants des athlètes qui avaient versé le leur pour la même cause, par le souvenir du courage qu'ils avaient montré dans le combat, et par une foule de circonstances qui agissaient sur l'imagination des spectateurs, et ne laissaient que peu de chose à faire à l'orateur sacré.

Du respect pour les reliques des saints et du simple culte qu'on leur rendait, quelques fidèles passèrent promptement jusqu'à une espèce d'adoration. Quand ils eurent, en quelque sorte, identifié les saints avec la Divinité, ils ne tardèrent pas à confondre avec l'honneur qui est dû à leurs dépouilles mortelles, celui qu'ils méritent eux-mêmes dans le sein de Dieu. Les corps des saints ont été les temples du Saint-Esprit. Hs se

releveront à la résurrection générale, pour servir encore de demeure aux ames bienheureuses qui les ont habités, et pour jouir avec elles d'une félicité éternelle. Le seul attouchement des os d'Élysée rendit la vie à un homme qui fut jeté par hasard dans son tombeau; et l'Ecclésiastique nous dit làdessus que le corps mort d'Elysée prophétisa, c'est-à-dire, suivant saint Cyrille de Jérusalem, celui qui était sans vie la rendit à celui qui l'avait perdue (1). Dans le Nouveau-Testament, il est rapporté que l'ombre du corps de saint Pierre rendait la santé aux malades, et que les mouchoirs et les tabliers qui avaient touché au corps de saint Paul, opéraient les mêmes guéri

sons.

le Dieu suprême avait fait des miracles par les cendres des martyrs, il ne les avait donc pas en horreur ; c'étaient done ses mains qui les avaient pétries.

Cette doctrine, qui relevait la dignité des reliques, produisit aussi des excès. Quand on admet, avec les Pères de l'Église et les Actes des martyrs, que les os sacrés des bienheureux ont la vertu d'attirer les grâces et les bénédictions du ciel sur ceux qui les révèrent; qu'ils sont plus précieux que l'or et les perles; qu'ils font la défense des villes qui les possèdent; qu'on est heureux de pouvoir se prosterner devant eux, et de leur donner toutes les marques d'un respect religieux et sincère, etc., on n'est pas éloigné d'ouvrir la porte à l'abus et à la superstition. Ce furent ces graves inconvénients qui soulevèrent la bile de Vigilance, prêtre de Barcelone, et le portèrent à l'extrémité opposée. Il est bien rare qu'une dévotion mal entendue n'engendre l'impiété: on ne le vit que trop dans cette circonstance.

Saint Jérôme, qui remplissait l'univers du bruit de son nom, se chargea de réfuter Vigilance, qu'il appelle Dormitance, mauvais calembourg, indigne d'un si illustre docteur. La réfutation de l'hérésie du prêtre espagnol renferme de grosses injures, des allusions malignes, de misérables sophismes au milieu des raisonnements les plus vigoureux en faveur du culte des reliques. Hélas ! qu'avait-il besoin de tant de rhétorique lorsque le sentiment seul résout la difficulté ? M. de Montlosier l'a bien senti dans un de ses derniers ouvrages. « Par elles-mêmes, dit-il, les reliques ne méritent pas plus de » défaveur que la dévotion. Même humai»nement parlant, l'honneur accordė aux reliques ne présente à personne rien de

Tels sont les fondements d'un culte qui jeta de profondes racines dans le cœur des premiers chrétiens. Appuyés sur l'autorité de l'Ancien et du Nouveau Testament, et confirmés par les miracles que nous venons de citer, ils frayèrent le chemin à des superstitions, que la fin du troisième siècle vit se développer. La vénération des reliques prenait sa source dans les sentiments de la nature. La religion, d'accord avec la raison la plus sévère, ne pouvait la condamner; mais qui ne sait que l'homme passionné abuse de ce qu'il y a de meilleur et de plus sacré? Oserai-je dire ma pensée tout entière? Il me semble que le culte des reliques doit, en grande partic, son extension au · manichéisme. Cette secte regardait le corps comme l'ouvrage du mauvais principe, et la prison dans laquelle gémissait l'ame, sublime émanation du bon principe. De là l'horreur que les manichéens témoignaient pour la chair. Les catholiques ne crurent pas pouvoir mieux combattre cette hérésie qu'en rendant un culte aux dépouilies mortelles des bienheureux du début à l'excès la distance est aisément franchie; elle le fut. Les docteurs qui combattirent les erreurs de Manès, s'attachèrent à prouver que l'homme tout entier, composé d'un corps et d'une ame, était l'ouvrage du Dieu créateur, et que la substance matérielle, quoique inférieure à la substance spirituelle, était pourvue de qualités précieuses. Ils invoquèrent la vénération des reliques, comme une Au surplus, l'immortel Bossuet a ramené preuve de la doctrine qu'ils enseignaient. Si cette controverse à ses termes les plus simples, en s'exprimant ainsi dans son Exposi

(1) Catéch. xvIII. Voyez le Traité des saintes reliques, par l'abbé de Cordemoy, Paris, 1719,

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déplacé. Quel est celui de nous dont le >> cœur ne s'attache pas aux restes qu'il » aura pu recueillir d'un père, d'un ami, » d'une femme chéric? Quel est celui qui » ne serait pas satisfait d'avoir quelque » chose d'Henri IV, de Sully ou de Montes» quieu? Ce qui est vrai et beau dans l'ordre » des sentiments humains, comment ne le » serait-il pas dans l'ordre des sentiments religieux (1) ? »

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(1) Les Jésuites, les Congrégations. Mémoire à M. de Villèle, pag. 118.

D

tion de la doctrine de l'Église catholique: « Ce serait être trop aveugle que de ne pas » apercevoir l'extrême différence qu'il y a » entre ceux qui se confiaient aux idoles par l'opinion qu'ils avaient que quelque divi» nité ou quelque vertu y était, pour ainsi » dire, attachée; et ceux qui déclarent, » comme nous, qu'ils ne se veulent servir » des images que pour élever leur esprit au » ciel, afiu d'y honorer Jésus-Christ ou les »saints, et dans les saints Dieu mème, qui » est l'auteur de toute sanctification, de » toute grâce. On doit entendre de la même » sorte l'honneur que nous rendons aux reliques, à l'exemple des premiers siècles de l'Église; et si nos adversaires considé»raient que nous regardons les corps des » saints comme ayant été les victimes de » Dieu par le martyre ou par la pénitence, » ils ne croiraient pas que l'honneur que nous leur rendons par ce motif pût nous » détacher de celui que nous rendons à » Dieu même..... Il est vrai néanmoins que, >> comme les marques sensibles de révérence » ne sont pas toutes absolument nécessaires, » l'Église, sans rien altérer dans la doc» trine, a pu étendre plus ou moins ces » pratiques extérieures suivant la diversité » des temps, des lieux et des occurrences, ne » désirant pas que ses enfants soient servile. »ment assujétis aux choses visibles, mais » seulement qu'ils soient excités et comme » avertis par leur moyen de se tourner à » Dieu, pour lui offrir en esprit et en vérité » le service raisonnable qu'il attend de ses » créatures...... Il n'y a rien de plus injuste » que d'objecter à l'Église qu'elle fait consis» ter toute la piété dans cette dévotion aux »saints, puisque le concile de Trente se ⚫ contente d'enseigner aux fidèles que cette » pratique leur est bonne et utile, sans rien davantage. Ainsi l'esprit de l'Église est de » condamner ceux qui rejettent cette prati» que par mépris ou par erreur (1). »

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liens de la fraternité parmi les fidèles, que l'Église catholique honore les bienheureux et vénère leurs reliques.

Mais s'il n'est pas défendu de vénérer les dépouilles mortelles des saints; s'il est même bon et utile de le faire, il est bien difficile qu'à la longue ce culte ne dégénère en superstition et en abus de tout genre. L'Histoire ecclésiastique est là pour l'attester. « Je confesse, dit Calvin, qu'on ne vient pas » du premier coup à l'idolâtrie manifeste; » mais petit à petit on vient d'un abus à l'autre, jusqu'à ce qu'on trébuche en l'ex » trémité. Tant y a que le peuple qui se dit » chrétien en est venu jusque là, qu'il a » pleinement idolâtré en cet endroit, autant » que firent jamais les païens.... Et il ne faut » excuser que ç'a été un zèle désordonné de quelques rudes ou idiots, ou de simples › femmes ; car ç'a été un désordre général, approuvé de ceux qui avaient le gouverne. » ment et conduite de l'Église (1). »

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On commença par supposer des reliques, même dans les premiers temps du christianisme; on le voit dans saint Optat de Milève, dans la vie de saint Martin, par Sulpice Sévère, dans saint Augustin; et ces suppositions donnèrent lieu à de vives discussions et à des schismes déplorables. On en vint jusqu'à placer sur l'autel les corps qui étaient, dans l'origine, ensevelis sous l'autel; on les porta solennellement en procession; on les divisa, tandis que d'abord ils étaient laissés tout entiers bien avant dans la terre; et ce fut là, dit le judicieux abbé Fleury (2), l'occasion des impostures; on les multiplia d'une manière ridicule; on leur attribua de nombreux miracles, dans la vue d'attirer des offrandes et des pélerinages qui enrichissaient les villes. Les croisades mirent le comble à ce débordement de reliques. Il semble que les musulmans et les chrétiens orientaux aient fait assaut de fourberie pour mieux tromper les Latins, et leur vendre au poids de l'or les premiers ossements qui leur tombaient sous la main, ou les vieux meubles dont ils étaient embarrassés. On peut dire, sans hésiter, que l'effet le plus incontestable des croisades a été l'envahissement de l'Occident par les superstitions et les fraudes pieuses de l'Orient.

Autant de fois les reliques ont été en proie

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à la destruction, autant de fois elles ont été subitement remplacées. Les fureurs des iconoclastes, les différentes invasions des Barbares du Nord et des Maures d'Afrique, les guerres des Albigeois et des Vaudois, les ravages des protestants, la révolution française, en les anéantissant, les ont multipliées; pour une de perdue il en a été trouvé dix.

Les reliques n'ont pas laissé de faire fleurir les beaux-arts. Pour fabriquer des reliquaires et des châsses, il a fallu cultiver le dessin, la gravure, la sculpture. Cette fabrication a sufli pour la renommée de saint Éloi et de beaucoup d'autres. Et maintenant il ne nous reste guère de tant de chefsd'œuvre de l'art, dont la France était enrichie, que la châsse de saint Carméry (1), de Mozat, diocèse de Clermont; celle de saint Taurin (2), d'Évreux, et la cassette qui contient la chasuble de saint Régnobert, de Caen (3). LABOUDERIE.

* RELY (JEAN DE ), l'un des orateurs les plus distingués du 15o siècle, était, selon la Gallia christiana, le grand-oncle du célèbre jurisconsulte Baudouin. Né à Arras en 1430,, il embrassa l'état ecclésiastique, fut pourvu d'un canonicat, devint successivement chancelier et archidiacre de l'église de NotreDame, professeur de théologie, recteur de l'université, docteur en Sorbonne, et ce fut lui qui, en 1461, rédigea les remontrances présentées par le parlement à Louis XI, pour le maintien de la Pragmatique-Sanction. Ces Remontrances, écrites, dit-on, avec une énergie remarquable, ont été réim primées plusieurs fois en français et en latin. Député par le clergé de Paris aux états-généraux de Tours, en 1483, et chargé de présenter ensuite à Charles VIII le résultat des délibérations de l'assemblée, Jean de Rely plut au jeune prince par son éloquence, devint son aumônier, bénit son mariage avec Anue de Bretagne, l'accompagna dans son expédition à Naples, et fut chargé en suite de plusieurs missions auprès du pape Alexandre VI. 11 mourut évêque d'Angers en 1499. Ce prélat avait retouché, par or dre de Charles VIII, le style de la traduc tion des livres historiaulx de la Bible, par

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Guyart de Moulins, et la fit imprimer à Pa ris vers 1495.

* REMACLE (SAINT), né dans l'Aquitaine, remplaça saint Amand sur le siége épiscopal de Tongres en 650, et le quitta vers 660 ou 661 pour aller se renfermer dans le monastère de Stavelo qu'il avait fait fonder dans les Ardennes, par Sigebert, roi d'Austrasie, et où il se plut à former un grand nombre de disciples, parmi lesquels on compte saint Théodard, saint Lambert et saint Hubert, qui occupèrent successivement son siège. Il mourut en 675, dans un âge très-avancé.

* REMBRANDT (PAUL), dit Van Ryn, l'un des peintres les plus célèbres de l'école hollandaise, né près de Leyde en 1606, ne s'attacha ni à la correction du dessin ni au goût de l'antique, mais il réussit à rendre la nature avec la plus étonnante vérité, et a été comparé aux maitres de l'école vénitienne pour la fraicheur et la vie de ses carnations. Ses tableaux, vus de près, sont raboteux. et il serait permis de croire, comme on l'a dit, qu'il travaillait quelquefois avec le couteau de sa palette au lieu de pinceau; mais de loin ils font un effet merveilleux par la magie des couleurs, la naïveté et la force de l'expression. Un auteur moderne, Sobry, qui a fait une Poétique des arts, dit que Rembrandt est le Shakspeare de la peinture, et Shakspeare le Rembrandt de la poésie. « Point de goût (dit-il en suivant le paral» lèle), mais tant de vérité! point de noblesse, mais tant de vigueur! point de >> grâce, mais tant de coloris. » Ce n'est pas seulement comme peintre que Rembrandt s'est rendu célèbre ; il est compté au nombre des plus habiles graveurs, et ses estampes, où l'on remarque la même singularité de travail que dans ses tableaux, sont fort recherchées des connaisseurs. Il mourut à Amsterdam en 1674, laissant une belle fortune dont son avarice l'empêcha toujours d'user. On prétend qu'il était si avide d'argent qu'il s'avisa un jour de quitter Amsterdam, et de se faire passer pour mort, afin d'augmenter le prix de ses ouvrages. Ce trait de sa vie a fourni le sujet d'une pièce intitulée : Rembrandt, ou la Vente après décès, jouéc en 1800 au théâtre des Troubadours. On a de Rembrandt un assez grand nombre de portraits, et plusieurs tableaux d'histoire, parmi lesquels il faut distinguer Tobie et sa famille, l'un des chefs-d'œuvre du Musée royal.

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