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10 La prescription trentenaire, qu'on peut opposer à toutes les actions, tant réelles que personnelles, et dont l'effet est d'anéantir, non seulement l'action elle même, mais encore le titre sur lequel elle est fondée (art. 2262 du Code civil);

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Par une application du même principe, les servitudes, qui sont des droits réels, ne peuvent s'acquérir que par la prescription trentenaire; encore mème ce moyen d'acquérir les servitudes n'est-il admis que pour les servitudes continues et apparentes, parce qu'à l'égard des servitudes non apparentes et discontinues, le fait de la possession peut n'avoir pas été connu de celui contre lequel on veut réclamer la servitude; et qu'il serait dès lors injuste d'attribuer, à son préjudice, un effet quelconque à cette possession.

Considérée comme moyen de se libérer, la prescription exige un temps plus ou moins considérable, suivant la nature de la créance ou de l'action dont on veut s'affranchir au moyen de la prescription.

Sous l'empire de l'ancien droit, on connaissait une foule de prescriptions diverses, par jours, par mois et par années. Le Code a bien simplifié cette division; voici les seules prescriptions qu'il admet :

2o La prescription de dix ans, en faveur des entrepreneurs ou architectes, pour les affranchir de la garantie qui peut peser sur eux, pour les ouvrages qu'ils ont faits ou dirigés (art. 2270);

30 La prescription de cinq ans, pour les les loyers, les prix de ferme, les intérêts arrérages de rentes perpétuelles et viagères, des sommes prêtées, et généralement tout ce qui est payable par année, ou à des termes périodiques plus courts (art. 2277). applicable, d'après l'art. 189 du Code de Cette prescription de cinq ans est également

lettres de change, ou aux billets à ordre commerce, à toutes les actions relatives aux souscrits par des négociants. Enfin, elle peut être invoquée par les juges et les avoués été confiées ( art. 2276); pour être déchargés des pièces qui leur ont

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40 La prescription de deux ans, qui peut être invoquée par les huissiers, pour la décharge des pièces qui leur ont été remises (art. 2276). Cette prescription peut aussi être opposée aux avoués qui réclament le paiement de leurs frais, pour les affaires terminées (art. 2273);

5o La prescription d'un an, admise contre l'action des médecins, chirurgiens et apothicaires; celle des huissiers, pour le salaire de leurs actes; celle des marchands, pour le prix des ventes faites aux particuliers non marchands; celle des maîtres de pension, pour la pension de leurs élèves, et des autres maitres, pour le prix d'apprentissage; enfin celle des domestiques à l'année, pour le paiement de leurs salaires (art. 2272);

6o La prescription de six mois, qu'on peut opposer aux maîtres et instituteurs des sciences et arts, pour le paiement des leçons qu'ils donnent au mois; aux hôteliers et traiteurs, pour le logement et la nourriture par eux fournis; enfin, aux ouvriers et gens de travail, pour le paiement de leurs journées, fournitures et salaires.

Des considérations d'ordre public ont dû faire admettre la prescription en matière

criminelle.

L'intérêt privé des citoyens est réputé sa

tisfait, lorsqu'un espace de temps plus ou il dirige les débats, prononce les jugements, moins considérable s'est écoulé avant que et est spécialement chargé de la police de l'action ait été portée devant les tribunaux ; l'audience. l'intérêt public lui-même doit être désarmé dans de semblables circonstances, et l'effet de la prescription est, non seulement d'empêcher la poursuite, mais d'anéantir même la condamnation qui serait intervenue contre l'accusé.

A cet égard, la loi a dû fixer la durée de la prescription, d'après la nature du fait qui est l'objet de l'action publique ou de la condamnation.

Les peines portées par les arrêts ou jugements rendus en matière criminelle, se prescrivent par vingt ans (art. 635 du Code d'instruction criminelle).

En matière correctionnelle, la condamnation est anéantie par la prescription de cinq ans (art. 630).

Après deux ans, les peines prononcées par les tribunaux de simple police sont prescrites (art. 639).

La prescription de dix ans anéantit l'action publique, ainsi que l'action civile, relativement à un crime, s'il n'a été fait, dans l'intervalle, aucun acte de poursuite ni d'instruction (art. 637).

S'il s'agit d'un délit de nature à être poursuivi correctionnellement, la prescription est acquise après trois années, à compter de l'époque où le délit a été commis.

Enfin, la prescription est accomplie, après une année révolue, relativement aux simples contraventions de police.

Des prescriptions particulières sont établies en matière de douane et d'enregistrement; mais nous avons cru devoir nous borner, dans cet article, à l'exposé des principes généraux sur cette matière importante. COFFINIÈRES.

PRÈS DU VENT. (Marine.) Voyez

VENT.

PRÉSIDENT. (Législation et Politique.) Dans son acception la plus étendue, ce mot désigne le chef d'une compagnie, d'un corps ou d'une réunion quelconque.

Dans certaines circonstances, le président n'exerce qu'une fonction temporaire et purement honorifique. Dans d'autres, au contraire, il est revêtu d'un titre qui lui attribue une sorte de suprématie, des priviléges particuliers ou des fonctions spéciales.

Le président d'un tribunal ou d'une cour est le chef de sa compagnie : il règle l'ordre de service entre les membres du tribunal;

Une juridiction spéciale est attribuée aux présidents des tribunaux de première instance; c'est celle des référés. Alors ils prononcent seuls, et sans aucune instruction préalable, sur les affaires qui leur sont soumises. La loi a pris le soin de déterminer dans quelles circonstances on pouvait recourir à cette juridiction exceptionnelle.

Les présidents des tribunaux, comme chefs de leur compagnie, ont été, dans quelques circonstances, rendus responsables de leurs décisions; le Bulletin des lois (3e série, nos 958 et 994) renferme deux arrêtés des consuls, sous la date des 15 et 27 brumaire an VII, qui, en annulant des jugements du tribunal d'appel du département du Doubs et du tribunal de Rochechouart, comme ayant prononcé sur le contentieux des domaines nationaux, attribué à l'autorité administrative, contiennent la disposition suivante: «Considérant que le tribunal d'ap pel... a porté une décision capable de répandre l'inquiétude et les alarmes parmi les acquéreurs de domaines nationaux, auxquels la constitution de l'État accorde une protection spéciale; mais qu'avant de recourir à des mesures plus sévères, il importe au gouvernement de savoir si la conduite de ce tribunal n'est que l'effet d'une simple erreur d'opinion, ou s'il faut l'attribuer à une affectation coupable..., le président du tribunal, et, en cas d'empêchement légitime, le juge qui le suivra dans l'ordre du tableau, et le commissaire du gouvernement près ledit tribunal, se rendront à la suite du conseil d'État. »

Les devoirs des présidents des tribunaux civils et des cours royales sont faciles à remplir. Pour conserver à la magistrature le respect dont elle a besoin, qu'ils apprennent à faire respecter le magistrat lui-même, dans toutes les circonstances où il exerce ses honorables fonctions; qu'ils ne manquent jamais aux égards dus à ceux qui exercent auprès des tribunaux le ministère sacré de la défense. C'est moins pour eux qu'ils en ont besoin, que pour les intérêts qui leur sont confiés, et dont la défense peut être compromise, quand l'avocat a quelques désagréments à craindre dans l'exercice de son ministère. Qu'ils ne blessent surtout jamais les convenances aux yeux du public, témoin des débats dont ils sont constitués juges,

mais qui exerce aussi une sorte de juridic tion sur les magistrats eux-mêmes.

En matière criminelle, les fonctions du président sont bien plus importantes, et il ne saurait apporter trop de soins à les remplir, puisqu'il s'agit d'un devoir de conscience, dont l'infraction peut avoir les conséquences les plus funestes.

L'office de nos présidents d'assises répond assez à celui du préteur à Rome : il présidait et ne jugeait pas. Constantin l'appelle medium inter reum et actorem. Son devoir est de veiller à ce que, entre l'accusateur et l'accusé, tout se passe dans les formes: semblable aux anciens juges des jeux olympiques, devant lesquels il ne suffisait pas d'avoir abattu son adversaire, si ce n'était de bonne guerre, et qui refusaient la palme au vainqueur, s'il n'avait pas vaincu dans les règles.

Une loi romaine (L. 19, ff. de Officio præsidis) dit que le préteur doit éviter de laisser percer son opinion personnelle, non-seulement en réprimant toute parole vive et indiscrète, mais encore en observant de ne rien découvrir, par ses gestes ou par les airs de son visage, qui puisse donner à juger de ses impressions.

On trouve d'excellents préceptes sur les devoirs du président en matière criminelle, dans la loi en forme d'instruction, publiée le 21 octobre 1791.

Au sujet du pouvoir discrétionnaire, dont le président de la cour d'assises se trouve investi par l'art. 268 du Code d'instruction criminelle, Me Dupin s'exprime ainsi, dans ses observations sur plusieurs points importants de notre législation criminelle : « Le président peut appeler un témoin non assigné, mander un expert, etc., pour éclaircir un point douteux ; mais il ne peut pas opposer à l'accusé ou à son défenseur le pouvoir discrétionnaire, comme la tête de Méduse, pour restreindre et circonscrire la défense; ce pouvoir ne lui est pas donné pour étouffer la vérité et la gêner, lorsqu'elle veut se produire, mais uniquement pour en favoriser la manifestation. »

Voici comment s'exprime la loi de 1791, que nous avons déjà citée, au sujet du résumé dont elle chargeait le président : « Le président du tribunal fait un résumé de l'affaire, et la réduit à ses points les plus simples; il fait remarquer aux jurés les principales preuves pour ou contre l'accusé. Ce résumé est destiné à éclairer le jury, à fixer

son attention, à guider son jugement; il ne doit point gêner sa liberté. Les jurés doivent au juge respect et déférence; mais ils ne lui doivent pas le sacrifice de leur opinion, dont ils ne sont comptables qu'à leur propre conscience. >>

Sans doute, ces préceptes sont pleins de sagesse; mais est-il utile de charger le président de résumer les débats, ainsi que l'ont successivement prescrit et la loi de 1791 et le nouveau Code d'instruction criminelle?

J'ai soutenu la négative dans mon Traité de la liberté individuelle, vol. 2, pag. 340, et je crois avoir établi que le résumé du président, toujours inutile, peut être quelquéfois dangereux. On ne peut se dissimuler, en effet, qu'un magistrat habile peut exercer une grande influence sur l'esprit des jurés ; et c'est d'une telle influence que la loi a voulu les garantir, en les invitant à ne puiser leur conviction que dans les charges et les moyens de défense.

Cette matière est assez grave pour fixer l'attention de nos jurisconsultes, lorsqu'on s'occupera de la révision des lois criminelles. Il existe un président dans toutes les assemblées, dans tous les corps revêtus d'un caractère législatif ou politique.

La chambre des pairs est présidée par le chancelier de France, et, en son absence, par un pair nommé par le Roi (art. 29 de la Charte). Comme les membres de la chambre des pairs sont à vie et à la nomination du Roi, il était convenable d'appeler à la présidence de la chambre un grand dignitaire inamovible, qui, affranchi de toute responsabilité par la nature de ses attributions, pourrait remplir ses augustes fonctions avec une entière indépendance.

Diriger les débats, maintenir la liberté des discussions, résumer avec précision les propositions soumises à la délibération de la chambre, faire observer son règlement, rappeler à l'ordre les membres qui s'écarterasient de leurs devoirs ; telles sont les principales attributions du président.

Quand la chambre des pairs est érigée en cour de justice, pour connaître des crimes de haute-trahison et des attentats à la sûreté de l'État, le président est chargé de la direction des débats.

Ses nouvelles fonctions lui imposent de nouveaux devoirs. La publicité est toujours de droit en matière criminelle : aussi les citoyens sont-ils alors admis dans l'enceinte de la cour des pairs, dont les délibérations

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législatives sont secrètes; et ils attendent du chef de la magistrature l'exemple d'une noble impartialité,

M. le chancelier D'Ambray a laissé à cet égard les plus honorables souvenirs. Les avocats qui eurent, comme moi, l'honneur de concourir à la défense des accusés dans l'affaire du mois d'août, soumise au jugement de la cour des pairs, n'oublieront jamais le talent, le dignité et la modération dont son président donna tant de preuves dans le cours de ces longs débats.

Le président de la chambre des députés est aussi nommé par le Roi; mais il doit être honoré d'abord des suffrages de la chambre; car le choix est fait sur une liste de cinq candidats par elle présentés.

Ses attributions sont les mêmes que celles du chancelier à la chambre des pairs. Seulement, comme les séances de la chambre des députés sont publiques, son président a peut-être besoin de plus de fermeté pour l'accomplissement de ses devoirs. Les passions politiques se manifestent, en effet, avec plus d'énergie sur les bancs opposés, quand les citoyens assistent aux débats parlementaires; et, dans les circonstances importantes, pour maintenir le calme dans les délibérations, celui qui y préside doit savoir résister à l'entraînement de l'opinion publique.

La Charte attribue aussi au roi la nomination des présidents des colléges électoraux; et quoique leurs fonctions soient de bien courte durée, elles n'en sont pas moins d'une extrême importance.

Leur devoir se réduit à assurer le secret, et par conséquent l'indépendance des votes, et à proclamer le véritable résultat du

scrutin.

Il ne faut que de la probité pour remplir un tel devoir cependant, plus d'une fois, des plaintes graves se sont élevées contre des présidents de colléges électoraux. Des hommes qui, dans les circonstances ordinaires de la vie, seraient incapables d'une action contraire à la délicatesse, ne sont plus les mêmes, quand ils deviennent les instruments du pouvoir; tant il est vrai que les passions politiques peuvent fausser le jugement et pervertir le cœur!

Dans plus d'une occasion, la nomination des présidents de colléges électoraux a été, pour le ministère, un moyen de présentation de ses candidats; et c'est ainsi que, dans les grands colléges surtout, où l'in

nomme,

fluence de l'autorité est plus active, des députés étrangers au département qui les lui sont, pour ainsi dire, imposés. Sans doute, le ministère ne peut toujours demeurer simple spectateur dans la lutte qui s'engage au moment des élections; mais il existe pour lui divers moyens d'influence, sans recourir à celui que nous venons d'indiquer. Il faut éviter de placer un homme appelé à jouer un rôle politique, entre sa conscience et son intérêt personnel. Le président d'un collége électoral doit être le juge du combat, sans y prendre part. S'il a besoin de solliciter pour lui les suffrages des électeurs, comment pourra-t-il émettre une opinion désintéressée dans les discussions qui s'éleveront sur les droits de quelques membres du collége? La candidature ministérielle le place dans la position difficile d'un juge obligé de proclamer la sentence qui lui fait gagner ou perdre sa cause; et lors méme qu'il sort vainqueur de la lice, son triomphe doit toujours être accompagné de quelque amertume.

Nous ne parlerons pas des présidents du conseil d'État, qui ne sont pas investis de fonctions politiques, ni des présidents des conseils municipaux et des conseils de département, puisque ce titre est dévolu aux maires et aux préfets.

Nous terminerons par une réflexion générale: c'est que le président d'un corps ou d'une compagnie quelconque, lors même qu'il n'a que des attributions purement honorifiques, doit respecter et faire respecter par tous les membres les règles auxquelles ils sont soumis, et leur donner l'exemple de l'accomplissement consciencieux des devoirs qui leur sont imposés. (Voyez ASSEMBLÉES, ÉLECTION, MAGISTRAT, PAIRIE et TRIBUNAUX.) COFFINIÈRES.

PRESLES (RAOUL DE), cultiva les lettres avec succès, et mérita les bontés de Charles V, qui le nomma maître des requêtes, et ajouta à cette faveur des lettres de légitimation. Ce fut par l'ordre de ce prince que Raoul traduisit en français la Cité de Dieu de saint Augustin, imprimée à Abbeville en 1486, 2 vol. in-fol., et réimprimée à Paris en 1531. C'est la première version française de ce savant traité. On a encore de Presles, un Traité de la puissance ecclésiastique et séculière. Il mourut en 1383, âgé de 67 ans.

* PRESSAVIN, chirurgien de Lyon, embrassa avec ardeur les principes de la ré

volution, fut élu député à la convention na tionale en 1792, vota la mort de Louis XVI, se prononça contre l'appel et le sursis, et fut nommé ensuite (1798) du conseil des Cinq-Cents. On ignore où et comment il termina sa carrière. On a de lui: Traité des maladics des nerfs, dans lequel on développe les vrais principes des vapeurs, 1769, in-12; réimprimé sous le titre de Nouveau Traité des Vapeurs, etc., 1771, in-12, traduit en allemand; Traité des maladies vénériennes, etc., 1773, in-8°; l'Art de prolonger la vie et de conserver la santé, 1786, in-8°; traduit en espagnol, Madrid, 1799, in-8°.

PRESSE. Voyez TYPOGRAPHIE.

PRESSE (LIBERté de la ). (Politique.) Publicité que l'art typographique donne à la pensée.

La presse est un mode d'écriture, l'écriture est la parole, la parole est la pensée, la pensée est l'homme même.

Doué par la nature d'organes destinés à donner à la voix les formes de la pensée, l'homme a commencé par défendre ou revendiquer ses droits avec la parole; c'est aussi la parole que le pouvoir a d'abord punie de Socrate à Jésus, des apôtres du Christ aux ministres de la religion réformée, tout orateur qui s'oppose aux idées dominantes est puni comme séditieux. La langue est tantôt impie, tantôt rebelle: Jean Huss brûlé par des catholiques; Michel Servet, par des protestants; Ramus assassiné, l'université détruite, les cours de philosophie, de droit public, d'histoire, interdits, prouvent une éternelle hostilité entre la puissance et la parole.

Lorsque l'homme eut trouvé l'art de fixer la parole et de la peindre aux regards, l'écri. ture devint criminelle à son tour. Un manuscrit, matière brute et morte, fut coupable de la vie que l'intelligence humaine lui avait imprimée. Les Athéniens bannissent Protagoras et brûlent son ouvrage; les Spartiates chassent Archiloque et brûlent ses vers; Auguste fit brûler les libelles, et tout livre qui ne déifiait pas Octave était un libelle; Tibère commença cette longue proscription du génie qui s'étend de Crémutius Cordus à Algernon Sidney. Le concile de Constance défendit la lecture des livres des gentils ; le pape Martin V excommunia les lec teurs des manuscrits hérétiques; le concile de Prague, renouvelant les bûchers républicains de la Grèce et de Rome, fit brûler

les œuvres de Wicklef, et légua cet usage à l'inquisition sacerdotale et civile.

L'imprimerie, qui permet à la parole de se fixer à perpétuité et de pénétrer en tous lieux, fut, à son apparition, traitée comme une invention du diable. On lui doit tous les progrès de l'intelligence humaine, mais depuis Galilée, elle n'a publié aucune découverte utile qu'elle n'ait payée par de longues et cruelles persécutions.

Les modes divers de l'art typographique, la peinture, la gravure, la lithographie coupables aussi de fixer la pensée; la pantomime convaincue de parler par le geste et de sentir par le regard : tout fut accusé, jugé, condamné. L'intelligence muette et ne se manifestant par aucun signe extérieur, suscitait encore les ombrages du pouvoir; l'inquisition, Venise, la démocratie de 1793, la réaction de 1815, portèrent la lâcheté de la haine jusqu'à punir des pensées et des sentiments qu'on prétendait deviner faute de pouvoir les connaître ; et les prisons, l'échafaud, le bûcher attendaient les homme inoffensifs, suspects de mal penser des prêtres, des rois, des olygarques ou des démocrates : ce grotesque de la politique disparaît devant les tourments odieux auxquels la pusillanime lâcheté de l'autorité dominante condamnait des innocents, criminels pour n'avoir pas commis de crime.

Malgré cette constante oppression de toutes les formes que la pensée peut revêtir pour arriver à la publicité, le principe de la liberté de la presse a toujours été proclamé par tous les gouvernements: Rome, Madrid et Lisbonne le reconnaissent comme Washington, Londres et Paris.

Mais il est un autre principe que tous les peuples doivent également reconnaître, c'est l'abus que peut entraîner l'usage de la presse.

Dès lors la loi qui proclame cette liberté ne peut se concevoir séparée de la loi qui punit cette licence.

La licence commence où finit la liberté ; mais où faut-il poser la limite qui sépare celle-là de celle-ci? Les gouvernements euxmêmes n'en savent rien : la liberté des ÉtatsUnis est licence en Hollande, la liberté de la Hollande est licence en Angleterre, la liberté d'Angleterre est licence à Paris, la liberté de Paris est licence à Vienne, la liberté de Vienne est licence à Rome, et la liberté de Rome est licence à Madrid.

Pour régulariser la liberté de la presse,

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