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sière; et, en continuant de frotter, on le fait disparaître en entier.

On conçoit qu'une pareille manutention doit user l'épiderme; c'est pourquoi il est mieux de se servir d'un morceau de peau. Mais de quelque manière qu'on opère, il faut essuyer souvent la poussière, pour s'assurer qu'on n'effleure pas la peinture. On peut encore enlever le vernis en le dissolvant avec un mélange d'alcohol, d'essence de térébenthine et d'huile.

On tient de chaque main un petit tampon de coton imbibé, l'un du mélange ci-dessus, l'autre d'huile pure. On commence par frotter d'huile la place que l'on veut dévernir; ensuite on emploie le mélange spiritueux, qui dissout le vernis très-rapidement : c'est pourquoi il ne faut frotter que pendant quelques secondes, et de suite on doit arrêter l'action dissolvante avec le coton imbibé d'huile. Sans cette précaution, on s'exposerait à dissoudre une partie de la couleur. De plus, on a soin d'examiner à chaque instant l'état du tampon dissolvant, pour voir s'il n'a attaqué que le vernis.

Comme l'action sur le vernis dépend de la proportion d'alcohol contenue dans le mélange, il vaut mieux en mettre moins, et rendre plus lente l'action dissolvante, que de s'exposer à dissoudre la peinture.

La restauration des tableaux ne présente pas beaucoup de difficultés, tant qu'ils n'ont reçu d'autre altération que le jaunissement du veruis tendre qui les recouvre; mais lorsque, pendant une longue suite d'années, ils ont été exposés sans précautions aux diverses causes qui amènent leur destruction; lorsque la toile est déchirée ou à demipourrie; lorsque les panneaux sont disjoints, ou que la couleur est prête à s'en détacher au moindre choc, il ne semble pas possible de remédier à de pareils accidents. Cependant, quelque imminente que paraisse la complète destruction de ces tableaux, on parvient à les sauver, en enlevant la peinture de dessus son fond, quel qu'il soit, et en la recollant solidement sur une nouvelle toile.

Je vais décrire cette importante partie de la restauration des tableaux, en commençant par l'opération la plus facile, le rentoilage des tableaux peints sur toile.

On est obligé de remettre un tableau sur toile, lorsque la toile est déchirée, lors même qu'elle n'a d'autre mal que d'être usée par les bords, au point qu'il n'y ait plus de

prise pour la clouer sur le châssis. Dans cet état, il est possible que la peinture soit partout solidement adhérente à la toile: alors on se contente de la coller sur une autre; mais si la couleur est prête à s'en détacher par écailles, il est indispensable d'enlever la vieille toile.

Dans tous les cas, on commence par coller du papier sur la surface du tableau, afin de pouvoir le manier sans danger, et quelquefois on en colle plusieurs feuilles l'une sur l'autre.

Si la vieille toile doit être enlevée, il est de la plus grande importance que le papier adhère par toute la surface. Dans ce cas, on colle d'abord de la gaze, et l'air sortant avec facilité, il ne peut y avoir de soufflures,

Si le tableau est extrêmement desséché, il convient d'appliquer dessus plusieurs couches d'huile mêlée d'un peu d'essence de térébenthine. Cette huile pénètre la peinture devenue trop aride, et recolle les parties de couleur prêtes à se détacher. Mais la colle ne prendrait pas sur une surface grasse; c'est pourquoi, après avoir bien essuyé le tableau, on dégraisse sa surface avec une légère dissolution de soude ou de potasse.

La colle dont on se sert est préparée avec parties égales de colle de Flandre et de farine de seigle. On la préfère à celle de froment, parce que la colle préparée avec cette farine se conserve plus long-temps humide, et est moins cassante. Le papier doit être mince, peu collé, très-uni et ébarbé avec soin.

Ayant ainsi fixé très-solidement le tableau à l'espèce de cartonnage appliqué à sa surface, on procède à l'enlèvement de la vieille toile; ce qui ne présente aucune difficulté, si elle a été encollée avant de recevoir les couches d'impression. Il suffit, dans ce cas, de la mouiller légèrement avec une éponge. La colle ne tarde pas à se détremper, et la toile se détache, en cédant au moindre effort. S'il n'y a pas d'encollage couche d'impression, il faut user la toile avec de la pierre-ponce ou une râpe.

sous la

Pour procéder au rentoilage, on tend sur un chassis une toile neuve, forte et unie. Ou en fait disparaitre les noeuds avec pierre-ponce; puis on en colle bien également la surface. On met de même une couche de colle sur l'envers du tableau, que l'on a bien nettoyé de toutes les inégalites qui peuvent s'y trouver. Alors on l'applique | sur la toile avec les précautions convenables

pour éviter les soufflures, On ne la fait donc adhérer que successivement; on fait sortir l'air et l'excès de colle, en les poussant toujours du centre vers les bords.

Lorsque la colle est presque sèche, on promène sur la surface du tableau un fer à repasser, qui n'est pas assez chaud pour endommager la peinture, mais qui fond la gélatine contenue dans la colle de pâte, la fait pénétrer dans toutes les fissures, et recolle les écailles prêtes à se détacher. Le but de cette opération est aussi de rendre unie la surface du tableau. C'est pourquoi on passe le fer à plusieurs reprises, en commençant toujours par les bords, où l'humidité est maintenue plus long-temps par les bois du châssis, qui empêchent l'accès de l'air extérieur. On laisse encore le tableau pendant plusieurs jours dans un lieu très-sec. Il ne reste plus alors qu'à décoller le cartonnage appliqué sur la peinture; ce que l'on fait à l'aide d'une éponge mouillée.

Cette opération pourrait rendre assez d'hu midité pour décoller les bords du tableau: c'est pourquoi on les maintient en collant sur les bords du châssis de petites bandes de papier qui s'étendent un peu sur le tableau.

Lorsqu'on a enlevé le papier, il arrive quel. quefois que l'on trouve sur le tableau l'empreinte des marges superposées des feuilles. Cet effet a lieu, lorsqu'on a employé du papier trop épais. Pour faire disparaître ces empreintes, il faut de nouveau coller du papier mince très-uni, en disposant les feuilles de manière que les endroits où se trouvent les traces produites par la superposition des marges, soient couvertes par le centre des nouvelles feuilles; et lorsqu'on emploie le fer, on ne le passe que sur les endroits que l'on vent aplanir.

Si la toile n'est endommagée que par une légère déchirure, on peut réparer le mal sans être obligé de rentoiler le tableau. On le met à plat sur une table, et l'on applique sur l'endroit entamé plusieurs morceaux de gaze que l'on colle l'un sur l'autre avec un mastic très-dense, composé de blanc de céruse et d'huile extrêmement visqueuse. On pose sur cette espèce d'emplâtre un morceau de marbre ou une tablette de bois, que l'on charge d'un poids, et on maintient un jour ou deux cette pression.

Lorsqu'il s'agit d'enlever un tableau de dessus un panneau, on commence toujours de la même manière, c'est-à-dire, qu'on se

rend maître de la peinture, en collant dessus de la gaze et plusieurs doubles de papier. Ce cartonnage étant parfaitement sec, on pose le tableau à plat sur une table bien unie, et avec une scie montée de manière qu'elle ne puisse pénétrer dans toute l'épaisseur du bois, on scie le panneau par petits carrés, qu'on enlève ensuite très-facilement avec un ciseau. On approche ainsi très-près de la peinture sans courir le risque de l'endommager. Alors avec un petit rabot et des râpes on réduit le bois à une si mince épaisseur, qu'en le mouillant légèrement avec une éponge, on le détache sans peine. On a mis ainsi à découvert l'impression en détrempe appliquée sur le panneau avant de commencer le tableau. On enlève avec un grattoir cette impression, qui presque toujours est fendillée comme la faïence qui a été sur le feu. On procède ensuite au rentoilage, comme il a été dit plus haut.

Si le dommage n'a lieu que dans une partie du panneau, si le bois est d'ailleurs sain, et que l'humidité n'ait attaqué la peinture qu'en quelques endroits, où elle se trouve prête à se détacher du fond, on remédie à ce mal local sans enlever le tableau. Dans ce cas, on verse sur la partie endommagée de la colle-forte chaude qui pénètre par les fentes sous les écailles. Lorsque la colle est figée, on enlève toute celle qui reste à la surface de la peinture, et l'on colle du papier sur cette place avec une colle de pâte très-légère. Lorsque le papier est sec, on passe dessus le fer chaud qui fond la colle, la répand uniformément sous les écailles, et les rattache d'une manière très-solide. On mêle à la colle-forte environ un huitième d'huile siccative blanche, laquelle s'y combine et la rend moins accessible à l'humidité (1).

Lorsqu'un panneau est fendu, ou qu'il s'est déjeté, on y remédie en collant derrière ce qu'on appelle un parquet : c'est un grillage en bois de sapin, dont on colle seulement les barres qui sont dans la direction des fibres du bois du panneau. Les barres transversales sont maintenues par les premières dans des entailles faites dans leur épaisseur, dans lesquelles elles sont engagées. Elles ne sont point collées au pan

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car le mouvement dans le bois s'opérant toujours sur la largeur elles ne pourraient y adhérer solidement ; elles servent seulement par leur pression à maintenr le panneau de manière qu'il ne puisse plus se déjeter.

L'enlèvement d'un tableau peint sur mur ne présente pas plus de difficultés, bien qu'on ne puisse attaquer le mur par derriere, comme un panneau. Lorsqu'on a appliqué sur la peinture un fort cartonnage, on fait dans le mur, autour du tableau, une entaille assez large pour pouvoir, avec un ciseau, détacher du mur le ciment sur lequel ordinairement le tableau est peint. Cet enduit, qui n'a pas plus de six à huit centimètres d'épaisseur, se détache facilement, et reste adhèrent à la peinture.

A mesure que l'enduit se sépare du mur, on roule le tableau sur un gros cylindre, pour le transporter. Il reste à enlever le ciment adhérent à la peinture; on y parvient avec un ciseau. C'est une besogne qui exige plus de patience encore que d'adresse. Si le tableau était peint immédiatement sur la pierre, sans aucun enduit de mortier (1), on parviendrait encore à l'en détacher en s'y prenant comme un écorcheur, et se servant d'un ciseau ayant des dents comme une scie, mais aiguisé de manière qu'il tende toujours à mordre du côté du mur.

Si le tableau que l'on rentoile devait être placé dans un endroit humide, il faudrait, au lieu de colle de pâte mêlée de gélatine, employer un mordant huileux, tel à peu près que celui dont se servent les doreurs. Ce rentoilage a été exécuté avec succès sur quelques tableaux du Musée. On peut composer le mordant avec de l'huile de lin épaissie par une longue ébullition; on broierait du blanc de céruse et un peu de minium très-fin avec cette huile visqueuse, et on en appliquerait une couche bien égale sur la toile neuve et sur le tableau, soit à l'aide d'une brosse ferme, soit à l'aide du couteau dont on se sert pour l'impression des toiles cirées,

On attendrait quelque temps que cet enduit fût à demi sec; alors on collerait le tableau en le faisant adhérer successivement depuis un bout jusqu'à l'autre.

L'enlevage et le rentoilage une fois ter

(1) Le plafond de Sainte-Geneviève est sur la pierre enduite seulement d'une couche d'huile mélée de résine et de cire.

minés, il reste pour compléter la restauration à nettoyer le tableau, et à repeindre les endroits détruits.

Pour la première opération, qui est trèsdélicate, on se sert de divers moyens qui réussissent entre les mains d'un artiste habile et expérimenté ; mais qui, employés par tout autre, sont plus dangereux qu'un rasoir manié pour la première fois par un apprenti barbier; car ici le patient n'avertit pas à l'instant de la blessure qu'il reçoit.

On se tromperait fort si l'on croyait qu'on puisse employer sans danger les alcalis et les savons pourvu qu'ils soient suffisamment étendus d'eau. L'eau seule fait du tort aux tableaux, lorsqu'ils sont très-desséchés ; elle peut dissoudre certaines couleurs; elle pénètre par les fentes, augmente l'aridité de la couleur, et contribue à la détacher de son fond. Il est donc mieux de jusqu'à ce qu'il n'en absorbe plus. Les Flacommencer par imprégner d'huile le tableau mands se servent pour cela d'huile de pavot. On peut employer également l'huile de noix, et même l'huile de lin, puisque cette huile, quoique beaucoup plus jaune que les deux autres, blanchit, comme elles, au contact de la lumière. Au surplus, quelle que soit l'huile dont on imbibe la vieille peinture, elle pénètre dans la couleur desséchée, et en se résinifiant, elle recolle la partie prête à tomber (2).

précautions convenables, nettoyer le tableau Après cette opération, on pent, avec les avec des dissolutions alcalines. J'ai vu même employer avec succès le savon noir qui, l'avait mêlé avec une telle quantité d'huile, comme l'on sait, est très-corrosif; mais on qu'il ne pouvait plus avoir d'action sur la peinture. On le laissait même pendant plusieurs jours sur le tableau, sans qu'il produisit d'autre effet que de ramollir la crasse et le vieux vernis. Lavant ensuite le tableau partie nettoyé. Toutefois, un pareil procédé avec une éponge, il se trouvait en grande est dangereux, en ce qu'on opère en aveugle.

Si le tableau est recouvert d'un vieux vernis, le savon ou la dissolution alcaline l'enleveront en partie, parce que les résines, surtout lorsqu'elles sont devenues

rances

sont très-facilement saponifiées. Lorsque la crasse qui se trouve dans les cavités formées par le tissu de la toile, ou

(2) On emploierait avec succès l'huile épaissie à l'air, délayée dans de l'essence de térébenthine.

les inégalités de la peinture, n'est pas enlevée, il ne faut pas s'obstiner à frotter avec la brosse ou l'éponge, on s'exposerait à effleurer les parties saillantes de la couleur, avant d'atteindre cette crasse; il faut alors recourir à l'emploi du grattoir, et il est inutile d'avertir que les plus grandes précautions sont indispensables en usant d'un pareil moyen. Dans beaucoup de cas, un curedent peut tenir lieu de grattoir; dans d'autres, il faut un tranchant bien acéré.

On a vu, au commencement de cet article, qu'on peut enlever le vernis avec un mélange d'alcohol, d'essence de térébenthine et d'huile; on peut employer le même moyen pour nettoyer. Au surplus, l'état dans lequel se trouve le tableau doit déterminer le choix des procédés. Par exemple, s'il a été vernis avec du blanc d'œuf, il est évident qu'on ne pourra enlever ce vernis qu'avec de l'eau ; si, au contraire, on a employé un vernis huileux, tel que nos vernis au copal, il faudra le ramollir en le frottant pendant plusieurs jours avec de l'essence de térébenthine et de l'huile, puis avec de l'alcohol tenant un peu de potasse en dissolution; et quand ce vernis sera suffisamment ramolli, on l'enlevera avec un grattoir. Lorsque le nettoyage est terminé, il reste à fermer toutes les plaies qui se sont décou vertes. S'il y a des trous, on les bouche avec un mastic composé de colle et de blanc de craie, semblable à l'apprêt des doreurs, et l'on égalise bien ce mastic, de manière qu'il soit au niveau de la surface du tableau. Si le grain de la toile est apparent, on produit un effet semblable en appliquant sur le mastic encore mou un morceau de toile du même grain, et pressant dessus pour former l'empreinte du tissu.

Les trous étant bouchés, il faut nécessairement repeindre sur le mastic.

La plupart des restaurateurs sont dans l'usage d'appliquer une légère couche de vernis sur le tableau avant de commencer les repeints. Ils le font, afin de mieux voir la teinte de l'original, avec laquelle ils se proposent de s'accorder il arrive de là qu'en dévernissant le tableau, on doit enlever les repeints. Je crois qu'il est mieux de frotter d'huile la partie que l'on doit repeindre par ce moyen, ou fait reparaître les couleurs du tableau dans tout leur brillant; on essuie complétement l'huile avec un linge propre on du coton. La couleur perd alors de son éclat; mais elle en con

serve assez pour guider le peintre. Elle paraît un peu plus pâle qu'étant vernie; ce n'est pas un désavantage, par la raison que les couleurs à l'huile prennent, en séchant, un ton plus foncé : c'est pourquoi il faut tenir ses teintes un peu plus claires, afin qu'après leur entière dessiccation, elles se trouvent au ton de l'ancienne couleur. D'ail leurs, comme on ne parvient presque jamais à imiter la teinte d'une peinture ancienne autrement que par des glacis, il est indispensable que les repeints soient toujours d'un ton plus clair.

De tous les accidents qu'on rencontre dans la restauration des tableaux, celui des gerçures présente le plus de difficultés; il est même sans remède si elles ont lieu sur un ancien tableau; on ne peut plus alors rapprocher les parties écartées. Il n'y a d'autre moyen que de boucher les fentes en les remplissant avec de la couleur; mais si le tableau gercé n'est peint que depuis un petit nombre d'années, et que la dessiccation ne soit pas parfaite, on peut faire rapprocher les parties séparées ; il suffit pour cela d'enlever complétement le vernis, et de poser le tableau à plat. Avec le temps, les parties de la peinture qui se sont retirées s'étendent, et en s'étendant elles se rapprochent, au point que les fentes disparaissent entièrement.

De tout ce qui précède, on doit conclure que ce serait trop risquer que d'entreprendre de nettoyer ou de restaurer un tableau, si l'on n'avait aucune expérience dans cette partie. Il serait mieux, sans doute, qu'un peintre habile ne s'en rapportât qu'à lui seul du soin de nettoyer un tableau, dont mieux que personne il peut apprécier le mérite; mais, auparavant de l'entreprendre, il faut qu'il fasse des essais sur un tableau qu'il peut gåter sans regret; et, quelque succès qu'il ait obtenu dans, ses expériences, il ne doit pas croire qu'il réussira constamment. Celui qui s'est occupé toute sa vie de la restauration des tableaux, ne peut pas encore se flatter d'avoir rencontré toutes les difficultés; il doit toujours, par précaution, essayer sur quelques parties les moins importantes du tableau le procédé de nettoyage qui convient le mieux. (Voyez PEINTure.) MÉRIMÉE.

* RESTAUT (PIERRE), grammairien fran. çais et avocat, né à Beauvais en 1696, vint de bonne heure à Paris, et fut chargé de quelques éducations particulières au collége de Louis-le-Grand. Il se livra ensuite à

l'étude de la jurisprudence, se fit recevoir avocat au parlement, puis aux conseils du roi en 1740, et mourut en 1764. Comme jurisconsulte, Restaut a composé plusieurs mémoires écrits avec clarté et précision. Mais l'ouvrage qui lui a fait le plus de réputation est sa Grammaire française, publiée en 1730, et à laquelle il ajouta, en 1732, un traité de versification. Cet ouvrage, d'abord adopté par l'université, et dont il donna un abrégé en 1732, eut neuf éditions, du vivant de l'auteur, et fut long-temps le seul livre élémentaire sur la langue française ; mais ceux qui ont paru depuis l'ont éclipsé, et il est bien moins suivi de nos jours. Restaut a revu la 4e édition du Traité de l'orthographe française en forme de dictionnaire, imprimé à Poitiers en 1764, in-8°, et on a encore de lui une traduction de la Monarchie des Solipses, 1721, in-12. Cet ouvrage, qui renferme une satire allégorique du gouvernement des jésuises, a été plusieurs fois réimprimé; la meilleure édition a été publiée en 1824 par M. le baron d'Hénin de Cuvillers. On trouve dans quelques exemplaires une gravure qui a été supprimée.

*RESTIF DE LA BRETONNE (NICOL.EDME), écrivain fécond et spirituel, mais cynique et bizarre par système, né en 1734 au village de Sacy, en Bourgogne, vint jeune à Paris, où l'indigence et des goûts licencieux lui firent contracter des liaisons et des habitudes avilissantes qu'il conserva toute sa vie, et qui pourtant ne l'empêchèrent pas de vouloir s'ériger en réformateur des mœurs de son siècle. Quelques succès, et surtout un amour-propre excessif, lui ayant persuadé qu'il était au moins l'égal de Voltaire, et bien supérieur à Buffon, qu'il appelle une taupe, il crut pouvoir lutter victorieusement avec J.-J. Rousseau, dont il affectait toutes les singularités, et fit paraître en 1772, en opposition avec l'Emile, les Lettres d'une fille à son père, qu'il regardait comme un chef-d'œuvre de sensibilité, un tissu de lumières et de vertu, et le plus beau présent enfin qu'il pût offrir à la postérité. Ce modeste auteur, appelé quelque part le Rousseau du ruisseau, mourut à Paris en 1806, aussi oublié que la plupart de ses ouvrages. * RESTOUT (JEAN), peintre ordinaire du roi et directeur de l'Académie de peinture, né à Rouen, où il mourut en 1768, à l'âge de 76 ans, était fils d'un peintre distingué, nommé Jean comme lui, et neveu de Jouvenet, dont il suivit les leçons. On a de Res

tout plusieurs vastes compositions, où il a aussi quelquefois outré les défauts de son maître, mais où il a aussi déployé une imagination féconde et un talent remarquable.RESTOUT (Jean-Bernard), fils du précédent, cultiva aussi la peinture, et fut reçu de l'Académie; mais ayant embrassé les principes de la révolution, il quitta sa palette pour siéger parmi les membres de la municipalité qui s'installa le 10 août 1792, fut chargé le soir même de l'arrestation de M. de la Porte, intendant de la liste civile, et ensuite de celle de Thierry, valet de chambre de Louis XVI. Accusé ensuite d'avoir pris part aux dilapidations qui eurent lieu au gardemeuble de la couronne, il fut renfermé à Saint Lazare, où il subit une captivité de quinze mois, et mourut en 1796. On a de cet artiste quelques tableaux bien inférieurs à ceux de son père.

RÉSURRECTION. ( Religion. ) Le terme résurrection, d'après son étymologie, signifie l'action de se relever. Dans un sens plus restreint, il désigne le retour de la mort à la vie. Ce terme s'applique à l'ame et au corps. L'ame, déchue de son innocence, est-elle régénérée? On dit qu'elle est ressuscitée. (Voyez EXPIATION et SACRIFICE.) C'est surtout depuis Jésus-Christ que la régénérátion morale est appelée résurrection. L'immortalité de l'ame et la résurrection des corps ont été plusieurs fois désignées par le mot de résurrection; mais ce mot, dans le sens le plus ordinaire, désigne le miracle spécial par lequel un homme mort est rappelé à la vie qu'il doit perdre une seconde fois, ou bien le miracle général par lequel, à la fin des temps, les ames de tous les hommes seront réunies à leurs corps pour n'en être jamais plus séparées.

Des notions confuses sur l'état des hommes après la mort répandues chez les païens, ont fait soupçonner que le dogme de la résurrection avait été révélé à Adam.

« Des savants de la première classe, ob» serve Leland, ont cru voir une corruption » de la doctrine de la résurrection des corps » dans l'opinion de la transmigration des » ames, qui fut si généralement reçue des » nations. Peut-être doit-on aussi attribuer » à la corruption de ce dogme les fausses » idées de la vie future que l'on trouve chez quelques peuples, et qui ont donné lieu » à des coutumes bizarres, et même bar» bares.» (Nouvelle démonstration évangé lique, tom. 4, pag. 277.) L'auteur de l'Es

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