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ment de Maine-et-Loire avant d'aller prendre siége à la nouvelle assemblée, RevellièreLépaux avait donné d'autres gages de devouement au parti républicain en coopérant à la création d'un club et à la rédaction d'un journal, dont il dirigea l'esprit dans le sens de ses propres opinions. Ce fut lui qui fit adopter à la convention, par représailles contre le manifeste dit de Brunswick, la rédaction du décret portant que la nation française viendrait au secours de tous les peuples opprimés qui voudraient recouvrer leur liberté; et hien qu'au 18 mai 1791 il n'eût pas balancé à prédire que « le jour où la France cesserait d'avoir un roi elle perdrait sa liberté et son repos pour être livrée au despotisme effrayant des factieux,» il n'en vota pas moins, dans le procès de l'infortuné Louis XVI, pour la mort, et contre le sursis et l'appel au peuple. Antagoniste du terrible Danton, dans la séance du 11 mars 1793, où celui-ci s'efforça d'entrainer l'assemblée à un nouveau choix de ministres qu'elle prendrait dans son sein, Revellière, dont la stature était grêle et contournée, réussit, par une énergique improvisation et par son attitude impassible en présence des sicaires dont on avait encombré la salle des séances, à reculer de quelques jours le dernier triomphe de l'anarchie en relevant encore les girondins abattus. Il ne les défendit pas avec moins de courage au jour où fut prononcée leur proscription (voyez GENSONNÉ, GUADET, etc.), et plus tard il ne dut son propre salut qu'à l'espèce de dédain qu'inspira l'état d'épuisement et de délabrement où l'avaient réduit ses efforts pour se faire entendre au milieu du tumulte des séances. Lorsque le comité de sûreté générale lança contre lui un mandat d'arrêt, il se réfugia d'abord auprès de M. Bosc, puis dans la maison de M. Buire, son ancien collègue à l'assemblée constituante. Revellière Lépaux vint rejoindre à Paris sa femme et sa fille dès que la chute de Robespierre lui permit de reparaître. N'ayant pas été remplacé à l'assemblée conventionnelle, il y fut rappelé sur la motion de Thibault, député du Cantal (mars 1795), et son premier acte fut de s'opposer à la mise hors la loi de l'ancien président du comité de sûreté générale, par qui sa proscription avait été naguère prononcée. Nommé de la commission des douze, il fut chargé de soutenir diverses parties du plan de constitution de l'an 3, et fut l'un des derniers présidents de la con

vention, où en dernier lieu il combattit avec vigueur les anarchistes qu'on désignait sous le nom de Queue de Robespierre. Membre du conseil des anciens et élu à l'unanimité président de ce conseil, il y obtint sur 218 votans 216 suffrages pour la candidature au directoire, et il en fit partie à sa création avec Barras, Rewbell et Sieyes. RevellièreLépaux n'eut qu'une influence secondaire dans ce conseil souverain de la république ; et il paraît y avoir plus particulièrement exercé l'action de résistance, indispensable pour l'équilibre. Sur les sollicitations de plusieurs membres des deux conseils, il donna sa démission lors des événements du 30 prairial, et rentra dans la vie privée. A la création de l'Institut, le premier tiers de ce corps savant l'avait nommé membre de la classe des sciences morales et politiques. Il y lut, quelque temps avant le 18 fructidor, des Réflexions sur le culte, Les cérémonies civiles et les fêtes nationales, et le mode de religion qu'il y préconisait devint le symbole de foi de l'association connue sous le nom de théophilanthropie. Lorsque les pratiques de cette religion républicaine devinrent la proie du ridicule, on ne manqua pas de traîner aussi sous ses verges l'homme à qui était imputée la création de cette secte: à tort ou à raison c'était Revellière-Lépaux qu'on en avait fait le grand-prêtre. Celui-ci, qui avait continué d'assister aux séances de l'Institut, aima mieux renoncer au fauteuil académique que de prêter le serment de fidélité à l'empereur, exigé de toutes les corporations. Retiré alors aux environs d'Orléans, il y vécut obscur, et revint plus tard habiter Paris, où il n'eut un dernier rapport avec l'autorité que pour refuser les offres d'une pension qui lui furent faites la part du gouvernement impérial sous la seule condition qu'il en ferait la demande. Il se trouva compris dans la loi d'amnistie lors de la seconde restauration comme n'ayant occupé aucun emploi dans les cent jours, et il mourut le 27 mars 1824. Outre les mémoires de sa vie qu'il avait dictés à son fils pour être publiés à une époque donnée après sa mort, et les Réflexions sur le culte, etc., dont il a été parlé plus haut, imprimées à Paris, an 5, in-8o, et traduites en allemand, 1797, in-8o, il a laissé quelques autres opuscules dont M. Mahul a recueilli les titres, tom. 5 de son Annuaire nécrologique.

* REVEL (JEAN), dessinateur, né à Paris

en 1684, mort à Lyon en 1751, porta par son art les fabriques de cette ville au plus haut degré de splendeur. Il est l'inventeur des points rentrés qui, mélangeant les couleurs claires avec les obscures, les rendent plus douces, et c'est encore lui qui a trouvé le secret de placer les ombres du même côté, et de produire de vrais tableaux sur les étoffes. Cet artiste était fils de Gabriel Revel, peintre qu'employait Lebrun.

* RÉVÉREND (DOMINIQUE), ecclésiastique, né à Rouen en 1643, mort à Paris en 1734, est auteur des ouvrages suivants : la Physique des anciens, ou la Physique traitée dans un nouvel ordre selon le senti ment des philosophes anciens et modernes, Paris, 1701, in-12; Mémoires historiques de Nickols sur les derniers troubles de Transylvanie, Rouen, 1734, 2 vol. in-12: cet ouvrage qui se trouve à la suite de l'Histoire des révolutions du royaume de Hongrie, a été fini et publié par Lecoq de Villeray.

* REVERS (LOUIS-FRANÇOIS), chanoine de Saint-Honoré à Paris, mort en 1798, à l'âge de 70 ans, fut chargé, par M. de Juigné, archevêque de Paris, de revoir et de refondre le rituel du diocèse. Il fut aidé dans ce travail par l'abbé Plunkett et l'abbé Charlier, et l'ouvrage parut en 1786, 3 vol. in-4o, sous le titre de Pastorale parisiense; mais il fut attaqué par un grand nombre de critiques et dénoncé au parlement qui fut sur le point d'en arrêter la distribution. Cette dénonciation n'eut pas de suites cependant, et l'ouvrage fut adopté. On a encore du chanoine Revers une traduction en vers latins du Poème de la religion, de Racine le fils, publiée avec beaucoup de changements par T'abbé Charlier, Paris, 1804, in-12.

de 72 ans. On a de lui: Belgicarum ecclesiarum doctrina et ordo, grec et latin, Leyde, 1623, in-12; Epitres françaises des personnages illustres et doctes à Scaliger, Harderwyck, 1624, in-12; et quelques autres écrits de peu d'importance.

REVOLTE. Voyez RÉVOLUTION.

RÉVOLUTION. (Analyse.) On donne le nom de surface de révolution à celle qui est engendrée par la révolution d'une courbe qui, sans changer de forme ni de dimensions, tourne autour d'un axe fixe, chacun de ses points conservant la même distance à cet axe. Toutes les surfaces faites autour sont de cette espèce; et il suit de la définition', que chaque point décrivant une cir. conférence autour de l'axe, les sections de la surface de révolution par tous les plans per pendiculaires à l'axe, sont des cercles: le cylindre, la sphère, le cône, sont dans ce cas.

Nous ne nous occuperons pas de mesurer les aires et les volumes de ces corps : ce sujet est ou sera traité aux articles QUADRATURE, VOLUME; mais nous chercherons l'équation générale des surfaces de révolution. On peut la concevoir engendrée de deux manières : ou par le mouvement d'une courbe donnée quelconque BC autour de l'axe fixe Az (fig. 76 des planches de Géométrie), ou par celui d'un cercle BOCI dont le plan reste perpendiculaire à l'axe Az, mais dont le rayon varie, le centre glissant le long de l'axe, et la circonférence coupant toujours la courbe fixe BECD`: c'est ce dernier procédé que nous suivrons ici, en prenant Az pour axe des z.

Tout cercle BIC parallèlé aux xy a pour équations (voyez COURBE ) celle de son plan et celle de sa projection horizontale, savoir:

*REVILLON (CLAUDE), médecin, memz= = ß, et x2 + y2 = 22, (1) bre de l'Académie des sciences de Dijon, en faisant AI = 3, et le rayon CI=λ. On correspondant de la Société de médecine, donne d'ailleurs les équations M=0, N=:0, mort à Thionville en 1795, est auteur d'un de la courbe directrice CEDB. Éliminant ouvrage ́intitulé : Recherches sur la cause x, y et z entré ces quatre équations, pour des affections hypocondriaques, appelées exprimer que les deux courbes se coupent, communément vapeurs, ou Lettres d'un mé-il en résultera une équation connue entre decin sur ces affections, Paris, 1779, 1 vol. in-8°; réimprimées en 1786, et augmentées de plusieurs autres recherches sur le même sujet.

*REVIUS (JACQUES), principal du collége théologique de Leyde en 1642, assista au synode de Dordrecht, fut nommé réviseur de la Bible, qui porte le nom de cette ville, et mourut à Leyde en 1658, à l'âge Tome 19.

les constantes à et ; soit FX, cette équation de condition. On a vu à l'article COURBE que si l'on élimine 3 et λ, à l'aide des équations (1), § = FA sera celle de la surface. Ainsi z = F(x2+ya) est l'équation générale de toutes les surfaces de révolution engendrées autour de l'axe des z; et suivant qu'on prendra pour la directrice telle ou telle courbe, on aura différentes

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expressions pour M et N, qui feront prendre à la fonction F des formes diverses; en sorte que pour chaque surface de révolution, cette fonction se trouve déterminée.

C'est une propriété de toutes ces surfaces, quelque forme qu'on donne à la courbe révolutive, que la normale, en un point quelconque, va toujours couper l'axe de révolution en un point. Or, les équations de la normale à une surface courbe sont

X (−x + p (Z − z ) = 0,
Y−y+q!Z — z) = o ;

x, y, z sont les coordonnées variables de la surface, p et q leurs coefficients aux différences partielles ; X, Y, Z sont les coordonnées courantes de la normale. D'un autre côté, X = o, Yo, sont les équations de l'axe des z. Éliminons ces trois coordonnées entre ces quatre équations, et nous aurons py=qx pour l'équation de condition qui exprime que les deux droites se coupent. C'est donc l'équation aux différences partielles de toute surface de révolution ; et il serait facile de montrer, soit en differenciant z = F (x2+y2), soit en intégrant py=qx, que ces deux équations représentent la même surface. (Voyez mon Cours de Mathématiques pures, nos 749 et 879.) FRANCOEUR.

RÉVOLUTION. (Politique.) Changement de l'ordre social. Il s'opère avec plus ou moins de violence, selon que plus ou moins de personnes ont intérêt à défendre la forme politique qu'on attaque. La révolution anglaise de 1688 s'accomplit sans obstacle; elle n'avait pour adversaires que le roi, la cour et les jésuites. Une guerre délivra les états de l'Union américaine; ils n'avaient à s'affranchir que de l'oppression de la métropole. Ainsi firent les Suisses. Les Pays-Bas furent moins heureux : ils lut taient contre le despotisme de Philippe II, une partie de leur noblesse et tout le catholicisme de l'intérieur; de là ces persécutions cruelles et ces représailles sanglantes. La révolution est vaincue à Madrid, à Lisbonne, à Naples, à Turin: elle y eût triomphé du roi, de l'aristocratie, du sacerdoce; mais au-dessous du peuple éclairé qui la voulait, se trouvait une populace nourrie par les seigneurs et fanatisée par les prètres, qui ne voulut perdre ni ses aumônes ni sa superstitieuse stupidité.

Pour la postérité, les révolutions sont la grande époque des peuples, l'origine de leur gloire et de leur indépendance, la source de

leurs richesses et de leur prospérité. L'histoire de ces catastrophes s'empreint de vie, de mouvement, de grandeur. Tout prend une allure animée et gigantesque : le courage va jusqu'à l'audace; la vertu jusqu'au sublime. Le crime même s'y revêt d'un grandiose qui le sauve du mépris par la terreur. Ce n'est pas la magie théâtrale d'un palais, la guerre aventureuse et chevaleresque de la noblesse, le péril des esclaves qui se font tuer pour des intérêts qu'ils ignorent et des princes qu'ils ne connaissent pas, la vanité des rois, les intrigues de leurs catins, l'astuce de leurs prêtres. Dans cette lutte de la liberté contre l'oppression, c'est l'homme qui veut remonter à la dignité de l'homme, une nation qui veut ressaisir sa majesté première ; c'est le triomphe des plus hautes pensées, des plus nobles sentiments; ce sont les lois de la nature, les immunités du genre humain, l'œuvre et la volonté de Dieu aux prises avec des fers forgés par des despotes et rivés par des pontifes. C'est le plus noble et le plus terrible spectacle que la terre puisse offrir au ciel. Les annales d'un peuple privées d'attrait, de mouvement, de pensée, lorsqu'il gémit en paix dans sa servitude coutumière, semblent sortir de la mort, à ce réveil inattendu des nations qui se lèvent comme un seul homme pour embrasser la liberté.

Pour la génération contemporaine, la révolution est un épouvantable fléau. Ce concours de périls, d'espionnage, de délations; ces cachots qui s'encombrent, ces échafauds qui se teignent de sang, cette hostilité de l'exagération, ces persécutions de l'inimitié, ce danger de la modération, cet opprobre de la félonie, ces terreurs qui planent jusque sur le foyer domestique; cet esprit de parti trahissant l'amitié, outrageant la nature, sacrifiant tous les devoirs au besoin du triomphe; ces fureurs des troubles civils, cet appel à la guerre étrangère; ce flux et reflux d'apostats, de transfuges, de traitres; la piété du sacerdoce sanctifiant l'assassinat, l'honneur de la noblesse se glorifiaut de pillages sans profit et du sang répandu sans gloire; le peuple opposant l'oppression aux oppresseurs, le fanatisme aux fanatiques, le glaive au glaive, et la mort à la mort; ces fureurs qui se choquent, ces crimes qui se heurtent, cette absence complète d'ordre, de paix, de sécurité, font de ces époques fatales la terreur et l'horreur de ceux qui les dirigent, de ceux qui y

participent, de ceux même qui demeurent les hommes que les choses; et quand ils ont insulté ceux-là, ils pensent avoir jugé celles-ci.

spectateurs passifs et épouvantés.

Il faut qu'un peuple ait long-temps souffert pour oser s'armer du courage des révolutions. Plus l'oppression fut longue et cruelle, plus la révolution est terrible et la vengeance sanglante. Le despotisme est stable; il divise ses cruautés pour jouir de sa tyrannie de chaque jour. L'anarchie est un torrent qui hâte ses ravages et amoncèle les ruines, comme s'il ne lui était pas donné de bouleverser encore les ravins qu'il a sillonnés.

Il est un point où le pouvoir, dégénérant en tyrannie, touche à la liberté; où la liberté, se tournant en licence, touché à la monarchie c'est l'heure fixe des révolutions. Osez-vous la devancer? La catastrophe est infructueuse, parce qu'elle est prématurée. La laissez vous prescrire? Les ressentiments s'amoncèlent, les vengeances s'amassent, les haines s'allument; et la révolution, d'autant plus cruelle qu'elle est plus tardive, accumule les crimes stériles et les persécutions sans objet. Il est pour ces rénovations une époque précise de maturité que les esprits élevés peuvent prévoir, que les grands citoyens savent saisir. Sydney parut trop tôt, Padilla trop tard.

L'histoire prouve que les révolutions sont · le résultat inévitable, nécessaire, fatal, de la manière dont les peuples ont été gouvernés depuis long-temps. Une révolution ne peut suivre, si l'oppression ne la précède. Mais la longanimité des nations est inégale: la tyrannie blesse plus promptement la jeunesse que la caducité, la fierté vertueuse que la corruption énervée, la civilisation que la barbarie; et quoique le joug soit également pesant pour tous, les forts détellent le matin; les faibles, l'après-dinée. Des esprits de peu de portée se figurent que quelques intrigants, quelques livres bouleversent les peuples. S'il en était ainsi, le pouvoir serait bien stupide, qui ne réprimerait pas ces mesquines hostilités. Une vue courte et basse ne voit les choses que dans les hommes pour apprécier une époque historique, on la personnifie; chaque révolution se fait homme; la réforme, c'est Luther; la première révolution anglaise est Cromwell; la seconde, Guillaume; la ter

reur,

c'est Robespierre; l'empire, c'est Napoléon; l'esprit constitutionnel, c'est quelques députés, quelques écrivains de l'opposition. Ils trouvent plus facile d'apprécier

Les esprits qui ont quelques notions des faits et des temps, remontent de l'effet à la cause. La nécessité du protestantisme date de la temporalité des papes, et le but réel des hérésies intermédiaires atteste cette vérité. La révolution française date du peu do part qu'obtint le peuple dans les dépouilles de la féodalité et de l'usurpation monarchique des libertés communales; toutes les révoltes intercalaires signalent cette tendance nationale. Les hommes qui ne savent pas lire dans les faits, ne pourront du moins récuser les paroles; ils y verront une hostilité séculaire contre les priviléges qui blessent la liberté.

Philippe veut résister à la tyrannie papale; il convoque les états-généraux. L'orateur du peuple accable de malédictions Boniface VIII et le sacerdoce de France; il proclame que la couronne ne relève pas de la tiare. Dix ans après, il refuse tout impôt qui ne frapperait. que la classe plébéienne. En 1356, il demande et obtient le renvoi des ministres; il vote des subsides, mais il nomme des commissions pour en surveiller le recouvrement et l'emploi. En 1369, le tiers-état demande la guerre contre l'Angleterre; en 1380, il généralisc et sanctionne toutes les immunités municipales; en 1382, il refuse l'impôt, parce que le roi refuse de chasser ses ministres. Sous Charles VII, il veut opposer des bornes à l'oppression nobiliaire, à l'avidité sacerdotale; sous Louis XI, il décido que les biens de la couronne sont la propriété de l'État; sous son successeur, il règle la régence, nomme le conseil, et rejette le budget comme rempli de mensonges et de folles dépenses; il établit la liste civile; il raie toutes les pensions qui n'avaient pas une cause honorable; il demande la réduction des évêchés, des abbayes, des jours de fête, et s'oppose à toute pension accordée à des nobles ou à des prêtres; il veut assu、: jettir les gens d'armes aux tribunaux ordi.. naires, le sacerdoce au parlement; il veut que la justice soit rendue sans frais. En 1560, l'orateur des communes demande « que les » curés, les abbés, les évêques, soient, comme dans l'ancienne église gallicane, élus par le peuple; que les vœux monastiques ne soient reçus qu'à trente ans ; qu'on ne puisse se marier qu'à sa paroisse, pour éviter les unions clandestines; que toutes les fêtes soient

remises au dimanche ; que ces réunions de débauchés et d'ivrognes appelées confréries soient abolies; qu'il soit établi des chaires de morale et de droit politique; que les cxactions nobiliaires soient réprimées; que la vénalité des charges soit supprimée ; que le roi donne des audiences publiques; que la confiscation soit abolie; que le dénonciateur soit nommé à l'accusé, et puisse être poursuivi; que les municipalités soient élues par les citoyens; qu'on ferme les maisons de prostitution et de jeu; que l'impôt soit général et également réparti; il demande enfin la protection pour l'agriculture, le commerce, l'industrie; l'uniformité des poids et mesures; des lois contre le luxe, la banqueroute, l'adultère; et finit par attribuer tous les maux de la France à la nonpériodicité des assemblées nationales et à la non-existence des états provinciaux, et ensuite au défaut d'instruction de la noblesse et du sacerdoce, d'où provient leur malice et leur mauvaise façon de vivre. » En 1576, il renouvelle les mêmes plaintes. En 1588, il tonne contre les ecclésiastiques qui dilapident les biens du pauvre; contre les nobles qui oppriment le peuple; contre ces magistrats qui portent des jugements comme s'ils avaient été dignement choisis et libre ment élus. En 1614, il demande qu'on proclame de nouveau l'édit de Louis X, et qu'il soit publiquement reconnu « qu'aucun denier ne peut être levé dans le royaume que du consentement des trois états, qui cn feront eux-mêmes le recouvrement et l'emploi. »>

Les aveugles de 1789 ne voyaient que la révolution du 14 juillet; ils étaient assez sourds pour n'avoir pas entendu cet orage de quatre siècles qui grondait sur la France. Depuis Saint-Louis, la révolution voulait s'opérer en paix et avec ordre par le système parlementaire. Malheureusement la tyrannie de Richelieu, le despotisme de Louis XIV proscrivirent les états-généraux. La révolution politique se concentra dès lors dans la réforme religieuse : du siége de La Rochelle aux dragonnades, on persécute moins l'hérésie que la liberté. On se ligue avec les protestants étrangers, on proscrit les protestants de l'intérieur, parce que J'esprit d'indépendance effrayait à l'intérieur et servait dans l'étranger.

Chassée de la réforme, la révolution se réfugia dans la philosophie du dix-huitième siècle. Elle continue l'œuvre des états-gé.

néraux, détruit cette intolérance qui avait suscité la ligue, les dragonnades et les soixante mille lettres de cachet du jésuite Le Tellier; elle éteint les bûchers des inquisitions d'Espagne, de Portugal et d'Italie; elle diminue le nombre de ces victimes que les cloîtres engloutissaient vivantes; elle fait supprimer la question, adoucit la cruauté des supplices, fait rougir les magistrats de l'atrocité des peines et de la témérité des jugements; elle obtient des encouragements pour l'agriculture, des égards pour l'industrie, protection pour le commerce; elle prouve l'iniquité de l'esclavage des nègres, et porte à désirer l'abolition lente et graduelle de la traite. La superstition pâlit devant Voltaire, l'oppression devant Montesquieu, le vice devant Rousseau. On avait proscrit les états-généraux, on avait proscrit les protestants, on persécuta les philosophes; et quelque forme qu'elle pût revêtir, la révolution se retrouvait toujours en face de ses ennemis.

Restaient encore la servitude personnelle, les priviléges oppressifs de la noblesse, les richesses usurpées du clergé, la déprédation des finances, le régime dévorant des fermes, l'iniquité des tribunaux dans les affaire politiques, la partialité des juges dans les affaires sacerdotales et nobiliaires, les biens de main-morte, la vénalité des offices, l'obscurité des lois, le vote et l'assiette de l'impôt; et pour les hommes sans pouvoir et sans fortune, le défaut absolu de protection, de liberté, de sûreté.

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Si de Henri IV à Louis XIV on n'eût pas proscrit les états - généraux, l'opposition parlementaire eût suffi; la voix du peuple, éclatant dans les États, eût modifié sa destinée; les abus eussent en partie disparu; et la nation, satisfaite de ceux qu'on eût déjà supprimés, s'en serait remise à la représentation nationale, pour la suppression de ceux qui eussent existé encore. Tout se fût fait avec mode et lenteur; l'ordre, la paix n'eussent pas été troublés, et la loi eût progressivement accompli ces institutions qu'il fallait conquérir par la force. On ne saurait trop le redire : l'absence des états-généraux a produit la révolution française, et a contraint d'opérer par la violence tout ce qu'on pouvait consommer par la législation. L'absence de la représentation enlevant à la noblesse et au sacerdoce toute leur puissance politique, les jeta dans la domesticité royale. Les grands seigneurs étaient à la merci da

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