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le travai confié à la commission au sujet des Colonies; l'autre voudrait bien garder un juste milieu entre la Charte et le commune haîne, mais il est entraîné, et, cédant au torrent, il nous traite de coupe-jarrêts! un autre crie à l'aristocratie de la peau!...... Et grand Dieu! dans l'état présent de l'opinion sur notre compte, nous adresser à la Chambre sans défenseurs qui la prémunissent contre l'obsession, ce serait nous mettre à la merci des accusateurs d'Urbain Grandier : nous aurions des lois faites sur le modèle de sa condamnation!.....

C'est alors qu'on aurait à reprocher à ceux qui s'improviseraient nos mandataires, le vice de leur mandat. On n'y manquerait pas, M. de Tracy le premier, lui à qui nous pouvons, à notre tour, demander si son éternelle intervention dans nos affaires est de droit divin?... Qu'il nous dise encore de quel accueil il serait gratifié, par un département dans les affaires intimes et locales duquel il viendrait se jeter avec autant d'acerbe et de préventions qu'il en met dans les nôtres ?

Ecartez donc tous ces moyens inconstitutionnels de représenter les malheureuses Colonies; ils sont peu parlementaires, en ce qu'ils donnent à tous, dans la Chambre, le droit d'attaquer, et à personne mission de défendre. Ce n'est pas là le caractère impartial et désintéressé que l'on doit imprimer aux mesures législatives prises au nom d'une grande et généreuse nation? Les passions de tout genre, les secrètes spéculations de la haîne, et les erreurs même de la bonne foi ignorante, auxquelles on donne ainsi carrière, ressemblent vraiment trop peu au recueillement religieux, à l'impartiale et scrupuleuse investigation des faits, qui doivent présider aux travaux importans de la législature.

Combien ne devons-nous pas trembler de voir éclore nos lois au milieu de la désertion de notre cause! Avec quelle force ne devons-nous pas protester contre une législation annoncée au bruit des malédictions!... contre une législation toute particulière, en effet, car elle s'opère à l'insu des administrés ! ...

Voilà ce que nous avons à attendre d'un parti farouche et inconsidéré qui, l'hypocrisie au front et le mensonge à la bouche, se rue sur la Chambre, séduit, entraîne quelques esprits ardens et avides de célébrité. Ceux-ci proposent et disposent; le reste s'abstient... et nous sommes condamnés!... oui condamnés! Pas de condamnation plus odieuse, plus terrible et plus réelle, en effet, que celle que prononce contre la société, qu'elle enchaîne, une législation faite en haîne des personnes! Mais que disons-nous?... c'est bien pis qu'une condamnation! c'est le poison de tout l'avenir, c'est peut-être aussi le tocsin précurseur d'une immense destruction!

Ah! souffrez plutôt une représentation légale qui, du moins, vous rendra le service de soumettre à votre jugement quelques échantillons d'hommes que vous méconnaissez. Prenez garde encore qu'en vous poussant au mépris de nos droits, l'on ne trahisse la France ellemême : il est une affinité réelle entre ses intérêts et les nôtres.

Ouvrez les yeux, et vous verrez qu'il y a de l'anglais, beaucoup plus d'anglais que vous ne le pensez sans doute, dans ces perfides déclamations qui poursuivent avec tant d'acharnement les colons et leurs actes. Voulez-vous un exemple frappant de la sincérité des démonstrations, du caractère et des intentions de nos zoïles? prenons-le dans la conduite de l'un des principaux membres de la cabale

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anti-coloniale. Il servira à vous donner la mesure de la bonne foi des autres. Par le connu à l'inconnu, la démonstration devient mathématique.

Qu'on se souvienne donc des discours emphatiques, des propositions exagérées de cet ancien questeur de la Chambre, qu'une si grande négrophilomanie emportait naguères dans les hautes régions de l'humanité!.....; il répandait d'abondantes larmes sur le sort de l'Africain que la traite arrachait aux douceurs de la patrie pour le livrer aux abominations des Antilles!..... Delenda erat Carthago!.....

Eh bien! lorsque l'on s'attendrissait aux accens de sa voix, aux douceurs de sa vertu ultra-humaine, et qu'on s'ameutait autour de lui contre les colons absens et calomniés, il n'y avait que du bien-joué de la part de ce négociant philosophe!... Moins humain sans doute que sordide; M. Lainé de Villevêque avait déjà dans la tête son projet de colonisation. Il cherchait adroitement à le débarrasser de la rivalité des Antilles hospitalières; et appelant de tous ses vœux, de tous ses votes, leur anéantissement, il s'assurait l'infernal avantage d'asseoir plus sûrement d'exécrables profits sur l'exemption de toute concurrence avec les marécages de Goazalcoaco. Et quels étaient ceux qui devaient être appelés à fertiliser de leurs sueurs et de leurs cadavres ce sol infect et destructeur ? des antropophages, des nègres ?.... On ne l'eût peutêtre pas souffert!..... C'étaient des blancs, des Français que la misère et l'abandon mettaient aux prises avec l'astuce du spéculateur avide qui, marchandant leur liberté et leur vie à la lueur de quelques avantages, pré-. parait des dupes et des victimes au veau d'or!

Plus d'un journal a déjà servi d'écho aux rives de

Goazalcoaco..... Où sont les philanthropes qui poursuivent cette traite d'une nouvelle espèce.

Nec pluribus impar. L'organe du parti mulâtre n'est pas plus franc dans ses insinuations; quels que soient ses griefs personnels, de quelque désir de vengeance qu'il puisse être transporté, c'est un crime que d'entraîner son parti dans les voies de sa vengeance personnelle; c'est un crime que d'armer la mère patrie contre ses fils, pour un motif aussi bas que celui d'une satisfaction individuelle.

Si l'or de l'Angleterre avait soudoyé les chefs de la cabale; si le poison de sa politique s'était infiltré dans le cœur de nos détracteurs, l'Angleterre ne serait pas mieux servie dans ses projets favoris, ceux d'ensevelir le commerce et la marine de la France sous les ruines de ses Colonies.

La providence, qui nous protége encore en dépit des hommes, réservait, comme à tant d'autres, à l'auteur de la brochure du 12 décembre 1830, de se trahir dans l'énivrement du succès. L'égoïsme et l'hypocrisie y trébuchent enfin à tous les yeux. Ce n'est rien que d'avoir fait imprimer sous l'influence du machiavélisme anglais les maximes les plus subversives de nos Colonies (11). Ce n'est rien, si vous le voulez encore, que de crier aux Cannibales africains que, dans une émeute générale, l'insurrection serait pour eux le plus saint des devoirs!....., et qu'un second Villèle, ministre d'un autre Charles X, viendra sans doute consacrer encore une fois le meurtre, le rapt et l'incendie.

Mais qu'en France l'esprit national s'assoupisse au point de ne pas sentir l'injure faite à sa dignité, c'est ce qui ne se conçoit plus! Les parquets aux yeux de lynx, à

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l'esprit subtil, à la voix de Stentor, dorment donc fatigués de prouesses, pour ne pas reconnaître une injure, un outrage à la France, une attaque enfin à l'ordre établi, dans le fait inoui dont un insolent pamphlétaire se fait gloire publiquement.

Le gouvernement anglais accorde les prérogatives de l'affranchissement à tout esclave qui débarque dans ses possessions ; mesure aussi philantropique que politique (continue-t-on), en ce qu'elle contribue à favoriser la désertion des esclaves des Antilles françaises, qui, n'ayant de la Martinique que sept lieues à passer pour se rendre à SainteLucie, risquent souvent leur vie pour fuir les mauvais traitemens dont ils sont victimes par suite de notre législation actuelle !

Qu'est-ce à dire ? que l'Angleterre aura le droit de s'arroger la disposition de la propriété des sujets français ?..... qu'elle fait bien d'embaucher nos esclaves pour se procurer, à nos dépens, les bras qui manquent à ses cultures?.... qu'elle fomentera impunément chez nous et à la face de la France le trouble, la désertion et la révolte?.... Qu'enfin elle peut compter sur l'assentiment de notre métropole à ce qu'elle la débarrasse une fois pour toutes des colons et des Colonies, en les livrant à des tentations perfides, à des impatiences habilement excitées ?...... Mais, en vérité, c'est tenir la France dans un bien grand mépris de la part de sa rivale !..... Quelle imprudence!.... Nous, plus Français et surtout plus patriotes, nous disons à la France qu'elle n'a aussi qu'un détroit de quelques lieues à franchir pour aller demander compte à l'Anglais, chez lui-même, de tant de perfidies!.... Ce conseil est sans doute plus digne de notre patrie!.... Nous n'avons pas du sang africain dans les veines!. . . . .

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