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de précédents bien précis et de statuer sur des faits qui pour la plupart se passent à de grandes distances. Enfin, comme ce traité ne réunirait probablement par les signatures de tous les États, il ne remplirait complètement son but, les puissances signataires invitaient celles qui n'y auraient pas adhéré, à se soumettre, elles aussi, au même mode d'arbitrage.

que si

CHAPITRE IV.

De l'intérêt qu'ont les différents États à prendre part au traité maritime.

Les limites de cet écrit ne nous permettant pas d'examiner successivement l'intérêt particulier que chaque nation peut avoir à l'adoption d'un traité maritime, nous nous bornerons ici aux grandes puissances qui seraient appelées à poser d'un commun accord les bases de ce traité.

La France.

- Cette puissance nous semble bien placée pour prendre l'initiative, car elle est la seule parmi les grandes nations qui n'ait aucun intérêt spécial assez fort pour la faire hésiter sur la marche qu'elle doit suivre; ses intérêts sont les mêmes que ceux des autres pays: elle aura donc l'autorité de celui qui parle réellement au nom de tous. La situation de la France, entourée de trois

mers, lui assurerait un grand rôle dans les négociations; monarchie de trente-quatre millions d'hommes, dont toutes les parties tiennent également à la nationalité française, elle tire de cette unité sa principale force; sa marine militaire est une des plus nombreuses et des plus aguerries, et son état financier lui permettrait, en cas de guerre, de faire les plus grands sacrifices pour l'équiper et l'entretenir sur le pied le plus respec table.

Par sa position centrale, elle profiterait des fa cilités qu'offrirait au commerce l'ouverture des trois principaux passages; ses ports de la Médi terranée ne sont pas éloignés du Bosphore et de Suez, et ceux de l'Océan se trouvent sur une des côtes de l'Europe les plus rapprochées de l'isthme de Panama.

Lorsqu'un traité, signé par quelques unes des grandes puissances, aura donné au commerce de la France plus de sécurité ; lorsqu'elle aura fondé pour le soutenir, non des colonies, mais un nombre suffisant de comptoirs, les Français reconnaîtront que le commerce maritime est la source des plus grands bénéfices, que les produits de leur sol et de leur industrie pourront alors

être offerts à des prix qui leur permettront de soutenir la concurrence dans tous les marchés. On verrait peu à peu les habitants de la vaste ceinture maritime de la France s'élancer dans une carrière que leurs pères avaient parcourue avec habileté et qu'ils ont plus tard abandonnée aux étrangers, dont les vaisseaux, les marins et les capitaux font le service de leurs ports. Des lignes de navigation par bateaux à vapeur deviendront nécessaires; elles mettront à la disposition du gouvernement de grands bâtiments qui, lorsque la paix sera troublée, pourront être armés en guerre et soutenir utilement la marine militaire.

C'est pour l'entretien de ses armées que la France a fait jusqu'à ce jour les plus grands sacrifices, parce que c'était sur les frontières de terre qu'elle avait la chance d'être attaquée. Peut-être n'en est-il plus de même aujourd'hui ; qu'a-t-elle à craindre des souverains et des peuples de l'Allemagne, dont les besoins et les intérêts sont devenus les mêmes que les siens? La France voudrait-elle, en cherchant à étendre son beau territoire, se livrer à cet entraînement qui porte les peuples puissants à s'agrandir? Mais aussi longtemps que ses producteurs ne renonceront pas au système

prohibitif, toute conquête leur paraîtra nuisible. La France, telle qu'elle est maintenant, leur présente un écoulement suffisant pour la plus grande partie de leurs produits. Mais lorsque quelques départements nouveaux, chez lesquels la fabrication dépasserait de beaucoup la consommation, viendraient jeter sur le marché national une masse énorme d'objets manufacturés, cette concurrence serait une cause de profonde perturbation pour l'industrie existante.

Ce qui importe à la France aujourd'hui, c'est de protéger sur toutes les mers et dans tous les pays son commerce et ses comptoirs; ses rivaux sont l'Angleterre, la Russie et les États-Unis: en cas de lutte, c'est par mer seulement qu'elle peut les atteindre.

Une marine puissante est nécessaire à la France: elle devra donc y consacrer une plus grande part de ses revenus et l'élite de la population militaire de son vaste littoral; c'est la marche qu'ont suivie les Vénitiens et les Hollandais dans les siècles de leur puissance, et celle que les Anglais suivent encore aujourd'hui.

Les points maritimes dont les États rivaux de son commerce ne sauraient se passer, ne sont pas

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