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> ne devant pas être pris en considération, l'in› demnité est élevée au-dessus du taux fixé par l'art. 549, pour les polices qui ne portent pas › le même caractère et n'ont pas eu les mêmes > suites.

> Je

> On demandera peut-être, ajoute-t-il, à quoi sert la stipulation de la prime liée, si elle perd >sa force dans une occasion aussi importante? réponds qu'elle conserve toujours les deux > effets principaux qui viennent d'être indiqués, › celui de faire gagner à l'assureur la totalité de cette prime, si la chose assurée périt pendant > l'aller; celui encore de lui faire adjuger une indemnité plus forte, si le retour ne s'effectue pas, > ou ne s'effectue qu'en partie.

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Ces raisons sont sans doute d'une grande sagacité; mais elles sont loin, selon nous, de satisfaire l'esprit, et de répondre d'une manière satisfaisante aux difficultés que fait remarquer M. Locré lui-même.

En effet, toutes les fois que les parties ne se sont pas expliquées, l'aller est compté pour un voyage, et le retour pour un autre.

Si, au contraire, la police comprend l'aller et le retour, elle identifie les deux primes, parce que l'aller et le retour ne forment plus qu'un voyage, dont la prime liée devient le prix indivisible.

Dans ce cas, comment peut-il se faire néanmoins que cette prime indivisible ne soit pas acquise en entier à l'assureur, dès qu'il a commencé

à courir les risques ?........ La diminution de la durée du risque ne fait pas décroître la prime; elle est due en entier dès que le risque est commencé, et dans le cas même où il n'eût duré qu'un instant. Il serait même difficile de trouver sur ce point une proportion géométrique; car le navire peut courir plus de danger dans un moment que pendant la plus longue navigation.

Cette vérité est d'autant plus palpable, que l'art. 294, du fret, veut que lorsque le navire a été frété pour l'aller et le retour, s'il revient sans chargement, ou avec partie de chargement, l'entier fret soit payé.

Nous pourrions pousser plus loin nos observations; mais la loi existe; elle est précise; elle doit être exécutée, Disons done, si l'on veut, que c'est ici une exception à la règle générale; mais disons, avec M. Locré, que cette exception ne doit avoir lieu que dans l'espèce sur laquelle l'art. 356 statue.

Ainsi, malgré le principe général, qui veut que le prix du risque soit dû entièrement lorsqu'il est commencé, malgré l'hommage rendu à ce principe, par rapport au fret, la loi le décide différemment et spécialement, par rapport aux assurances; et cette disposition est conforme à celle de l'Ordonnance, art. 6, titre des assurances.

Cependant le nouveau Code de commerce exprime, ce que l'Ordonnance de 1681 ne faisait pas, qu'il s'agit ici des assurances sur les marchandises, et non des assurances sur le navire. En effet, le

texte même l'art. 356 détermine son étendue avec précision, lorsqu'il dit que sa disposition concerne l'assurance qui a pour objet des marchandises; il fait clairement entendre qu'elle ne s'applique pas à l'assurance qui a pour objet le navire. Cette différence est dans la nature des choses. Quand l'assurance porte sur le navire, et que le navire revient, la chose assurée, c'est-à-dire le navire, existe nécessairement en son entier au retour; au lieu que si l'assurance est sur la marchandise, le navire peut revenir sans que la chose assurée existe au retour, en totalité ou en partie.

La loi nouvelle a encore fait un sage amendement à la loi ancienne, qui voulait que le tiers de la prime fût rendu aux assurés, dans le cas dont il s'agit. Le Code de commerce veut, au contraire, que les deux tiers de la prime ne puissent rester entre les mains de l'assureur, qu'à proportion de ce qui manquera au complément du chargement, et, conséquemment, pour ce qui aura été chargé, que la prime entière soit payée à proportion de ce chargé.

Par exemple, Cyprien a assuré, par prime liée, 60,000 pour aller et retour, à dix pour cent, ce qui fait 6,000'. Le navire est parvenu à sa première destination; mais il ne s'est point fait de chargement en retour. Dans ce cas, Cyprien ne peut exiger que les deux tiers de la prime, c'està-dire 4,000', au lieu de 6,000'. S'il s'est fait un chargement en retour, seulement de 30,000', on

devra supposer que le chargement est complet pour l'aller et le retour, jusqu'à concurrence de cette somme de 30.000', et Cyprien recevra d'abord 3,000' de prime. Quant aux autres 30,000*, il faut agir comme si cette somme avait été assurée pour l'aller et le retour, et qu'il n'y eût pas eu de retour du tout. Dans ce cas, la prime sera réduite à 2,000. Ainsi, Cyprien ne pourra, pour sa prime d'assurance, réclamer que 5,000', au lieu de 6,000'. (Voyez aussi M. Delvincourt, tom. 2, pag. 374).

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Il ne faut pas perdre de vue que la loi est ici spéciale, et qu'elle ne peut s'étendre d'un cas à un autre. Ainsi, cette modification n'a lieu que dans l'hypothèse où le voyage d'aller s'est effectué sans aucun des accidens dont l'assureur doit répondre; car si le navire périssait en allant, le défaut de retour ne pourrait être invoqué par l'assuré pour diminuer la prime, puisque le risque aurait commencé; que, par conséquent, le contrat aurait reçu son exécution, et que le sinistre serait à la charge de l'assureur.- (Voyez Valin sur l'art. 27; Pothier, no. 187, et Émérigon, ch. 3, sect. 2, §4)

Il en est de même pour l'assurance sur le navire il n'y a pas lieu à cette modification, si le navire revient; la police est consommée, et dès lors la prime liée est acquise en totalité à l'assureur. Si le navire ne revient pas, le défaut de retour est jugé par les principes ordinaires. Par exemple, si le capitaine, n'ayant pas trouvé à

charger pour le retour, a jugé utile d entreprendre un autre voyage, alors il a lui-même mis fin aux risques et tenu les obligations de l'assureur pour accomplies, et la prime stipulée est gagnée par ce dernier, sans aucune diminution. Si c'est, au contraire, pour raison d'innavigabilité causée par fortune de mer, c'est un risque maritime dont les assureurs sont tenus, et qui peut même donner lieu au délaissement. (Art. 369). Si l'innavigabilité provient de la vétusté du navire, les assureurs ne sont pas responsables (art. 352); et cependant la prime leur est due, puisqu'ils ont commencé à courir les risques. Il en doit être ainsi si le défaut de retour du navire provient du fait de l'assuré. (Art. 351). D'ailleurs, la disposition de l'art. 356 est une exception à la règle générale, qui veut que la prime soit due du moment que les risques ont commencé à courir : or, l'exception doit être restreinte au cas pour lequel elle est établie.

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Au reste, il faut bien faire attention, comme l'observe M. Locré, que le vœu du législateur n'a pas été, par la disposition de l'art. 356, de faire perdre l'assureur, mais au contraire de lui donner une indemnité; et qu'on ne doit jamais tourner une disposition contre celui en faveur duquel elle est établie. De là il suit qu'on ne doit pas appliquer l'art. 356 dans un sens qui dépouillerait l'assureur, en faisant profiter l'assuré de l'inexécution du contrat, quoique cette inexécution vienne du fait de ce dernier.

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