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HISTOIRE DU TARIF.

LES FERS.

II.

L'augmentation du tarif des fers eut naturellement pour résultat d'attirer les capitaux vers cette industrie à laquelle une prime si énorme était accordée. En 1828, on évaluait de la manière suivante les capitaux engagés dans la production du fer:

379 hauts fourneaux au bois à 100,000 fr. le haut fourneau.

14 hauts fourneaux au coke à 175,000 fr.

1,125 feux d'affinerie à 40,000 fr.

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Fonds de roulement estimé à.

Total.

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37,900,000 fr.

2,450,000

45,000,000

4,000,000

4,500,000

93,850,000 fr.

93,000,000

186,850,000 fr.

On estimait en même temps que les usines établies depuis 1822 se trouvaient comprises dans ce total pour une somme de 94 millions.

La comparaison des quantités produites avant et après l'augmentation des droits confirmait l'exactitude de cette évaluation :

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Ainsi, en quelques années, la production avait été à peu près doublée. Cependant, si rapides que fussent les progrès de la production, la consommation marchait plus rapidement encore. Malgré l'élévation exorbitante des droits, l'importation des fontes et des fers ne cessa de s'accroître. On en jugera par le tableau suivant

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De cette disproportion qui existait entre la production et la consommation, entre l'offre et la demande, il résultait que le prix du fer à l'étranger, augmenté du montant des frais de transport et des droits d'importation, déterminait le prix du marché intérieur. Aussi long-temps que le pays demandait plus de fer qu'il n'en produisait, nos maîtres de forges pouvaient tenir leur prix à cette limite, ou un peu au-dessous. Ils n'y manquèrent point. Le fer produit en France demeura constamment plus cher que le fer anglais d'une quantité égale au montant du transport et du droit, c'est-à-dire plus cher du double au moins. Voici quels furent les prix en France et en Angleterre de 1816 à 1827.

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N. B. Ce tableau a été fourni au ministère du commerce, en 1828, par MM. Riant frères, marchands de fers à Paris.

On voit que la fonte se vendait en France de 50 à 100 p. 0/0, et le fer de 125 à 150 p. 0/0 plus cher qu'en Angleterre. On voit encore que le prix du fer français loin de baisser dans cette période de dix années, s'était au contraire augmenté d'un quart.

Aussi les plaintes s'élevèrent-elles de toutes parts contre cet

odieux monopole qui rançonnait toutes les industries. Les agriculteurs, qui voyaient s'augmenter le prix de leurs outils, les propriétaires de vignobles, dont les exportations diminuaient, les constructeurs de machines, qui ne pouvaient, même en payant le fer deux fois plus cher qu'en Angleterre, se procurer les qualités dont ils avaient besoin, s'unirent pour réclamer l'abaissement du tarif. De leur côté les maîtres de forges défendirent résolument leur monopole; ils affirmèrent que loin de réaliser les énormes bénéfices dont on les gratifiait, ils se trouvaient, pour la plupart, en perte; et que si l'on abaissait, ne fût-ce que de 1 fr. le droit protecteur de la fonte et du fer, ils seraient obligés de cesser leur fabrication, de congédier leurs ouvriers, etc. Tiraillé par ces exigences opposées, et redoutant de s'aliéner les uns en donnant satisfaction aux autres, le gouvernement s'efforça de gagner du temps. Il promit une enquête en 1826.

L'exécution de cette promesse fut retardée jusqu'à la fin de 1828. Alors le gouvernement, ne pouvant reculer davantage, désigna pour composer la commission d'enquête, M. le baron Portal et M. le baron Pasquier, ministres d'état, pairs de France, le duc de Fitz-James, le baron de Barante, le comte d'Argout, le comte de Tournon, et le comte de Kergariou, pairs de France; de Berbis, Humann, Pardessus, Oberkampf, Duvergier de Hauranne, Jacques Lefebvre et Gautier, députés; le baron de Fréville, conseiller d'état, Filleau de Saint-Hilaire, directeur au ministère de la marine, Deffaudis, chef de la division des affaires commerciales au ministère des affaires étrangères, David, administrateur des douanes. M. le baron Pasquier fut nommé rapporteur.

La commission était présidée par le ministre du commerce et des manufactures.

Dans cette enquête on entendit successivement quatorze maitres de forges, deux marchands de fer, deux constructeurs de machines, deux propriétaires de vignobles, deux délégués des chambres de commerce, un inspecteur des mines, etc. La situation de l'industrie du fer y fut mise au grand jour.

La commission constata d'abord, par le témoignage des maîtres

de forges eux-mêmes, un fait très-grave, un fait capital, à savoir le fer PEUT être produit à aussi bas prix en France qu'en Angleterre '.

que

Ce fait bien établi, il y avait à examiner les causes qui empêchaient le prix du fer français de se mettre au niveau du prix du fer anglais. Il était bien avéré, en effet, que le fer revenait à nos maîtres de forges plus cher qu'il ne revenait à leurs concurrents d'Angleterre, il était bien avéré qu'ils ne gagnaient pas tout le montant de la différence des prix dans les deux pays. Quelquesuns même, loin de retenir une part de la prime que leur accordait le tarif, n'obtenaient pas le profit courant nécessaire pour couvrir leurs avances; ils perdaient sur la fabrication. Il fallait expliquer cette étrange anomalie. Il fallait rechercher où allait cette partie de

1 Témoignage de M. Wilson, administrateur des usines du Creusot.

«En France, il n'existe encore que bien peu d'établissements où la houille et le minerai se trouvent réunis; le plus grand nombre de ceux qui travaillent à l'anglaise sont encore obligés de tirer de loin et à grands frais, les uns le minerai, les autres la houille, les autres la fonte elle-même; mais plusieurs grandes entreprises sont projetées dans des localités où l'on ne peut guère douter que la houille et le minerai ne se trouvent en abondance; alors il ne manquera à ces établissements que des communications plus faciles et moins chères pour transporter leurs produits aux lieux de consommation. De telles communications existent depuis long-temps en Angleterre ; cet avantage, celui d'usines formées sur une aussi grande échelle, pourra manquer encore long-temps à la France; à cela près, je crois que la France doit arriver à produire le fer à aussi bon marché que l'Angleterre, car elle n'est pas moins riche en houille, et elle abonde en minerai DE MEILLEURE QUALITÉ. »

Enquête sur les fers, page 82.

Témoignage de M. Baule, propriétaire, exploitant les mines de Roche-laMolière et Firming, dans le bassin de Saint-Etienne.

Je dois dire que la situation générale de la France, comparativement à l'Angleterre, n'est pas aussi défavorable qu'on le croit communément. Ainsi, d'abord, nous avons la houille à aussi bon marché qu'en Angleterre; et, quant au minerai, dans le Staffordshire, où il est extrêmement abondant, on ne peut l'extraire à moins de 15 fr. le tonneau, tandis qu'en France, nous avons des minerais qui ne reviendront sur place qu'à 5 fr. La question repose donc tout entière sur la différence du prix des transports dans l'un et l'autre

pays. Enquête sur les fers, page 209.

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