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Dijon, vous ont été régulièrement annoncés par le vicomte Cathcart et sir Charles Stewart.

Les nombreuses occupations que je trouvai à mon arrivée, doivent m'excuser auprès de V. S. si je n'ai rien ou peu de chose à ajouter à la masse de nouvelles importantes et intéressantes que vous trouverez dans les differens journaux sur le progrès de l'heureuse révolution qui a eu lieu.

Je me borne en conséquence, pour le moment, à vous expliquer ce qui s'est passé par rapport à la destinée future et à l'établissement de Napoléon et de sa famille.

V. S. connoit déjà par lord Cathcart l'acte d'abdication signé par Buonaparte le 4 de ce mois, et l'assurance qui lui a été donnée par l'empereur de Russie et par le gouvernement provisoire, d'une pension de 6 millions de fr., avec un asile dans l'ile d'Elbe. Buonaparte avoit déposé cet acte dans les mains de M. de Caulaincourt et des maréchaux Ney et Macdonald, pour l'échanger contre un engagement formel de la part des alliés, relatif à l'arrangement proposé. Les mêmes personnes étoient aussi autorisées à consentir un armistice, et à déterminer une ligne de demarcation qui puisse en même temps être satis

faisante pour les alliés, et prévenir l'effusion inutile du sang humain.

A mon arrivée, je trouvai cet arrangement sur le point d'être adopté. On avoit discuté une convention qui auroit dû être signée le jour même, si l'on n'avoit annoncée l'approche des ministres alliés. Les motifs qui portoient à hâter la conclusion de cet acte, étoient l'inconvénient, sinon le danger qu'il y avoit à ce que Napoléon demeurât à Fontainebleau, entouré de troupes qui lui restoient toujours fidèles; la crainte d'intrigues dans l'armée et la capitale, et l'importance qu'avoit, aux yeux dé beaucoup d'officiers, un arrangement favorable à leur chef, qui leur permît de l'abandonner sans se déshonorer.

Dans la nuit après mon arrivée, les quatreministres eurent une conférence sur la convention préparée, avec le prince de Bénévent: j'y' fis connoître mes objections, en exprimant en même temps le désir qu'on ne crût pas que j'y insistois au risque de compromettre la tranquillité de la France, pour empêcher l'exécution. de la promesse donnée, à cause de l'urgence des circonstances, par la Russie.

Le prince de Bénévent reconnut la solidité de plusieurs de mes objections; mais il déclara en

passer

l'ar

même temps qu'il croyoit que le gouvernement provisoire ne pouvoit avoir d'objet plus important que d'éviter tout ce qui pourroit, même pour un instant, prendre le caractère de la guerre civile, et qu'il pensoit aussi qu'une mesure de faire pour ce genre étoit essentielle mée du côté du gouvernement dans une dispo sition qui permit de l'employer. D'après cette déclaration et celle du comte de Nesselrode, portant qu'en l'absence des alliés, l'Empereur son maître avoit senti la nécessité d'agir pour le mieux en leur nom, aussi-bien qu'en son propre nom; je m'abstins de toute opposition ultérieure au principe de la mesure, me bornant à suggérer quelques modifications dans les détails. Je refusai cependant, au nom de mon gouvernement, d'être plus que partie accédante au traité, et déclarai que l'acte d'accession de la Grande-Bretagne ne s'étendroit pas au delà des arrangemens territoriaux proposés dans le traité. On regarda comme parfaitement fondée mon observation qu'il n'étoit pas, nécessaire que nous prissions part à la forme du traité, nommément pour ce qui regardoit la reconnoissance du titre de Napoléon dans les circonstances actuelles. Je joins maintenant le protocole et la note qui déterminent le point

d'extension auquel j'ai pris sur moi de faire des promesses au nom de ma cour.

Conformément à mes propositions la reconnoissance des titres impériaux dans la famille fut limitée à la durée de la vie des individus, d'après ce qui s'est observé, lorsque le roi de Pologne devint électeur de Saxe (1),

Quant à ce qui fut fait en faveur de l'Impératrice, non-seulement je n'y fis aucune objection, mais je le regardai comme dû à l'éclatant sacrifice des sentimens de famille que l'empereur d'Autriche fait à la cause de l'Europe, J'aurois désiré substituer une autre position à celle de l'ile d'Elbe pour servir de retraite à Napoléon; mais il n'y en a pas de disponible qui présente la sécurité sur laquelle il insiste, et contre la quelle on ne pourroit faire les mêmes objections, et je ne crois pas pouvoir encourager l'alternative dont, d'après l'assurance de M. de

(1), Lord Castlereagh veut sans doute parler d'Auguste 1 qui, par la paix d'Altränstadt, renonça au royaume de Pologue en conservant le titre de roi sa vie durant, sans pouvoir ajouter la qualification de Pologne. La phrase qui termine la fin du texte, veut dire : Lorsque le roi de Pologne redevint simple électeur de Saxe.

Caulaincourt, Buonaparte avoit plusieurs fois parlé, d'avoir un asile en Angleterre.

La même nuit les ministres alliés eurent une conférence avec M. de Caulaincourt et les maréchaux; j'y assistai. Le traité fut examiné et accepté avec des changemens; depuis il a été signé et ratifié, et Buonaparte commencera demain ou après demain son voyage au midi.

Signe CASTLEREAGH.

ANNEXE I,

Protocole de la séance des ministres alliés, du 10 avril 1814.

Les plénipotentiaires de S. M. l'empereur Napoléon et ceux des puissances alliées s'étant réunis aujourd'hui, sont convenus des articles. du traité qui fixe les arrangemens relatifs à l'empereur Napoléon et à sa famille.

Lord Castlereagh, ministre de S. M. Britannique, a déclaré que l'Angleterre ne pouvoit intervenir comme partie au susdit traité, mais a promis rapporter l'acte d'accession de sa cour, dans le plus bref délai, en tant que cela concerne la libre possession et paisible.

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