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qu'il dit des patrons laïques, cette difficulté avait été résolue d'avance dans l'exposition des principes. « L'Eglise, en admettant une exception en faveur des patrons et fondateurs, n'a point abandonné le principe des droits des évêques, parce que l'exception même est émanée de leur consentement (1).

Ma tâche sera bientôt remplie, Monsieur, et il me reste à examiner ce que dit M. Camus au sujet de l'approbation.

Les trente évêques, parmi les pièces justificatives, avaient cité deux textes du concile de Trente, l'un de la quatorzième, l'autre de la vingttroisième session (2).

Il faut savoir, dit M. Camus, que ces deux textes qu'on a rapprochés, parlent de deux objets absolument différents, et que celui qui commence par ces mots persuasum semper, etc., n'a aucun rapport à l'approbation, il a rapport au défaut de juridiction: or, approbation et juridiction ne sont pas synonymes.

Eh! qu'importe qu'on ait rapproché ces textes, ou qu'on les ait séparés. Le premier ne prouve-t-il pas que, pour pouvoir exercer les fonction pastorales, il est nécessaire d'avoir une juridiction, soit ordinaire, soit déléguée; quant au second texte, il établit que, pour pouvoir confesser, il ne suffit pas d'être ordonné ou admis dans le diocèse; mais qu'il faut encore être approuvé de l'évêque.

Je n'examinerai point ici si les curés, en leur qualité d'ordinaires, ont le pouvoir radical de déléguer leur juridiction; mais au moins est-il certain que, dans l'usage actuel de l'Eglise, ils ne le peuvent pas et s'il a été jugé autrement, il a été mal jugé; puisque ce serait une contravention, et aux lois du royaume, et à la pratique de l'Eglise (3). M. Camus convient lui-même qu'on a pu réserver aux évêques la réconciliation des pécheurs publics; et la juridiction épiscopale n'estelle pas restreinte à son tour par la réserve des cas pontificaux (4)?

Je finis, Monsieur, en vous indiquant une inexactitude et une erreur échappées à M. Camus, l'une à l'occasion du concile de Trente, et l'autre au sujet de l'édit de 1695.

Il dit: 1° que le concile de Trente n'étant pas reçu en France, les évêques n'ont pu s'assujettir, en vertu de son décret, les prêtres à la loi de l'approbation. »

Il est vrai que le concile de Trente, reçu en France, quant au dogme (5), ne l'est point quant à la discipline, ce qui n'empêche pas que le décret dont il s'agit, n'ait été adopté parmi nous, par huit conciles provinciaux, par la pratique de l'Eglise gallicane, et les ordonnances de nos rois. Le décret de ce même concile sur les mariages clandestins, a-t-il été reçu autrement? S'est-on jamais avisé de révoquer en doute la nécessité

(1) Page 27. Les autres exemples rapportés par Gohard ne sont point une suite du droit commun, et rentrent dans l'exception dont parlent les Evêques.

(2) Persuasum semper in ecclesià Dei fuit, etc. (Voy. la première partie de cette lettre).

Quamvis presbyteri in suâ ordinatione, à peccatis absolvendi potestatem accipiant; decernit tamen sancta synodus nullum, etiam regularem, posse concessiones, secularium etiam sacerdotum audire, nec ad idoneum reputari, nisi aut parochiale beneficium aut ab episcopis per examen.... approbationem obtineat. (cap. 2). 3) Declar. de Charles IX, 1562. Ordonn. de Louis XIII, 1619. Edit. de 1695.

(4) Sess. XIV, De pænit., cap. 7.

(5) Voyez la lettre de Bossuet à M. Leibnits, sur le concile de Trente.

de la présence du propre prêtre, pour la validité du mariage, sous prétexte que le concile de Trente n'a pas été reçu, parmi nous, quant à la discipline?

Il dit: 2o que la nécessité de l'approbation n'est devenue une loi que depuis 1695 (1). « Or, continue-t-il, nous le demandons a tout esprit juste et impartial si Louis XIV a pu soumettre par un édit les prêtres à la nécessité de l'approbation, comment l'Assemblée nationale n'a-t-elle pas le pouvoir d'abroger cette loi? »

:

M. Camus n'ignore pas (ce que je viens de dire) que, longtemps avant l'édit de 1695, l'autorité civile et ecclésiastique avait adopté le décret du concile de Trente, quamvis presbyteri; il n'ignore pas qu'un règlement de la chambre ecclésiastique, adopté par les Etats généraux en 1614, porte que nuls prêtres ne s'ingéreront de prêcher ou de confesser, sans l'examen ou l'approbation de l'évêque diocésain et le consentement des curés; il connait aussi la déclaration de Louis XIV du 9 juillet 1646; enfin, il sait très bien que ce prince n'a pas prétendu porter une nouvelle loi; et il ose invoquer l'équité et l'impartialité de ses lecteurs...

Je crois, Monsieur, n'avoir omis ni déguisé rien de ce qui pouvait faire quelque impression dans l'ouvrage de M. Camus. Il a fallu, sans doute, que la cause qu'il avait à soutenir fût bien mauvaise, pour qu'un avocat si exercé et si zélé pour faire triompher les nouveaux principes qu'il a adoptés, eût recours à des moyens aussi faibles, où règne tant de mauvaise foi, et qui sont perpétuellement en contradiction avec ce qui a été de tout temps enseigné, pratiqué dans l'Église et avoué des souverains eux-mêmes. J'ai gémi de voir à la fin de cet ouvrage plusieurs de mes confrères déclarer qu'ils ont reconnu dans les principes qu'il a établis, ainsi que dans les conséquences qu'il en a tirées, des vérités exactes, conformes à la foi catholique, à la discipline reçue dans la primitive Eglise, et qu'ils y adhèrent. Je les conjure, au nom de la vérité, de la religion, du ministère sacré dont nous rendrons compte un jour, eux et moi, de ne pas se laisser séduire par des raisons spécieuses, mais de s'en tenir invariablement aux traditions anciennes et à l'enseignement constant de toute l'Eglise et de tous les temps de ne pas se laisser ébranler par des autorités humaines toujours trompeuses et nulles en matière de religion; mais de se tenir attachés à la colonne inébranlable de la vérité, à la seule autorité qui ne peut égarer celle des premiers pasteurs réunis avec le chef de l'Eglise de s'élever au-dessus de la chair et du sang, pour n'écouter que la vérité et la conscience de se placer en ce moment devant le tribunal du souverain juge, pour juger comme Dieu même, et régler leur conduite sur les règles d'après lesquelles Dieu lui-même les jugera. Pour moi (je le déclare à mes commettants et mes confrères), tels sont mes sentiments et mes principes. Je me croirais indigne d'eux et de leur confiance, indigne du caractère sacré dont je suis honoré, si je m'en départais jamais. Les décrets de l'Assemblée sur la constitution du clergé me paraissent, ainsi qu'à tout ce que je connais de plus éclairé et de plus sage, une usurpation évidente sur la discipline et la juridiction de l'Eglise. En exigeant le nouveau serment, on veut nous for

(1) Nous avons bien voulu réunir dans un seul édit les principales dispositions de tous ceux qui ont été faits jusqu'à présent, touchant la juridiction ecclésiastique. Préambule de l'édit de 1595.

cer à consacrer, par notre adhésion, cette usurpa- | tion inouïe, criminelle, elle-même, et effrayante dans ses conséquences. Je sais ce que je dois à Dieu. Soumis à la puissance temporelle dans tout ce qui est temporel, je dois l'être à la puissance spirituelle dans tout ce qui est spirituel. Pour régler ma conduite, j'attends la décision du sou verain pontife et des évêques; ils sont mes guides et mes oracles dans tout ce qui regarde la religion. En les suivant, je ne puis errer: Ego cathedra Petri consocior: super illam Petram ædificatam esse ecclesiam scio (Saint Jérôme, ép. XIV.)

Je suis, etc.

ASSEMBLÉE NATIONALE.

PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE LAMETH,

Séance du dimanche 28 novembre 1790.

La séance est ouverte à onze heures et demie du matin, par la lecture des procès-verbaux des deux séances d'hier.

Ces procès-verbaux sont adoptés.

M. Pezous, député du département du Tarn, demande et obtient un congé de six semaines pour vaquer à des affaires de famille.

M. Vieillard, député de Coutances, membre du comité des rapports, rend compte d'une pétition des administrateurs du département du Lot, tendant à obtenir que les six commissaires nommés pour exercer provisoirement les fonctions municipales dans la ville de Montauban, soient chargés des dites fonctions, et la ville autorisée à renouveler la moitié des officiers municipaux, conformément aux décrets de l'Assemblée nationale.

Il propose, en conséquence, un projet de décret, qui est adopté dans les termes suivants:

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports sur la pétition des administrateurs du département du Lot;

« Considérant que lorsque, par son décret du 26 juillet dernier, elle a autorisé le directoire du département à nommer six commissaires pour remplir provisoirement les fonctions municipales dans la ville de Montauban, elle n'a pas entendu priver cette ville des avantages accordés par la Constitution aux municipalités, de procéder à l'époque indiquée par la loi, au renouvellement de la moitié des membres qui doivent les composer, ni proroger les fonctions desdits commissaires au delà du temps auquel la commune de Montauban pourrait être représentée par des membres qu'elle aurait élus, décrète ce qui suit:

Art. 1er.

« Aussitôt après la notification du présent décret, les commissaires exerçant à Montauban les fonctions municipales, feront, en leur présence, tirer au sort, et indiqueront ensuite ceux des anciens officiers municipaux et notables que le sort aura désigné devoir être remplacés.

Art. 2.

. Celui desdits commissaires, chargé des fonctions de procureur de la commune, fera aussitôt convoquer la communauté des habitants pour

procéder, le dimanche d'après la convocation, au renouvellement de la moitié des officiers municipaux et notables, et à la nomination d'un substitut du procureur de la commune.

Art. 3.

"Lors de l'élection, aucun des membres suspendus de leurs fonctions par le décret du 26 juillet dernier, ne pourra être élu,

Art. 4.

« La nomination faite, le pouvoir attribué aux commissaires par le directoire du département du Lot, cessera.

Art, 5.

« Les officiers municipaux nouvellement élus, remplaceront lesdits commissaires; le premier nommé fera provisoirement les fonctions de maire.

Art. 6.

« Les notables qui auront été élus formeront provisoirement le conseil de la commune, sans le concours d'un plus grand nombre.

Art. 7.

« Le substitut du procureur de la commune exercera aussi provisoirement les fonctions de procureur de la commune. »>

M. le Président. L'ordre du jour est un rapport du comité de judicature sur les précautions à prendre pour ce qui regarde la liquidation des offices.

M. Gossin, rapporteur. Le comité de judicature, constainment animé du désir de répondre à la confiance dont vous l'avez honoré, s'occupe sans relâche des mesures nécessaires pour remplir la tâche que vous lui avez imposée. Vous avez adopté pour la liquidation des offices des bases qui assurent sa marche; mais il est essentiel aussi que vous daigniez prendre des précautions pour épargner aux officiers et à leurs créanciers tous les frais qui ne seront pas indispensablement nécessaires pour que la liquidation soit légalement et irrévocablement consommée. Tel est l'objet des observations sommaires et du projet de décret que nous allons avoir l'honneur de vous soumettre.

Vous avez confié au garde des rôles, par votre décret du 30 octobre, le soin de recevoir les oppositions qui seraient formées au remboursement des offices, et quoique, relativement à une situation nouvelle et imprévue, vous fussiez strictement les maîtres de choisir, vous avez été déterminés par la considération que les gardes des rôles étaient déjà dépositaires d'un grand nombre d'oppositions; que l'article 18 de l'édit de 1771 les appelait en première ligne pour les recevoir, et que par conséquent il était naturel de leur en accorder la suite. Mais l'intérêt de ces officiers n'a pas été le seul motif de votre détermination, et votre objet essentiel, en indiquant les gardes des rôles et en leur attribuant le droit spécial de recevoir les oppositions, avait été de faire que les créanciers sur offices n'eussent qu'une seule opposition à former, et les titulaires liquides qu'un seul certificat à présenter au Trésor public pour toucher leurs remboursements.

Cette décision, en contrariant l'ancien état des choses, a donné lieu à des difficultés que nous avons cherché à concilier; nous nous flattons

d'y être parvenus. Nous allons vous rendre compte de nos vues et de nos démarches. Avant la suppression de la vénalité des offices, l'opposition se formait au sceau des provisions; les gardes des rôles la recevaient. Son effet était d'amener aux parties casuelles le dépôt du prix de l'office vendu, pour être partagé entre les opposants; c'est là ce qui nous avait paru appeler les gardes des rôles, par préférence, à la réception des oppositions; mais cette forme, qui suffisait tant que le prix d'un office était rapporté par un acquéreur particulier, cessait d'être suffisante quand l'office était acheté ou supprimé par l'Etat et remboursé par le Trésor public. D'autres officiers, connus sous le nom de conservateurs des finances sur le Trésor public, recevaient des oppositions qui, formées dans leurs mains, frappaient indistinctement sur tous les capitaux où arrérages payables au Trésor royal; en sorte que, toutes les fois qu'il était chargé du remboursement d'un office, ce remboursement ne s'y faisait qu'en rapportant, outre le certificat du garde des rôles, celui des conservateurs des finances.

Cette double formalité, onéreuse pour le public, était cependant fondée en raison; il fallait constater, par le certificat du garde des rôles, que, lors de la suppression de l'office, il n'y avait pas d'opposition formée au sceau.

On constatait par le certificat du conservateur que, depuis que l'office avait cessé d'être pour devenir une somme exigible au Trésor royal, il n'était pas survenu d'opposition à son remboursement.

Il résultait dans le droit, de cet état de choses, que l'attribution faite aux gardes des rôles par Votre décret du 30 octobre n'anéantissait pas les droits des conservateurs, sur lesquels vous n'aviez pas prononcé.

Il en résultait, dans le fait, que le public, accou-tumé à connaître les conservateurs pour tout ce qui se payait au Trésor public, avait porté le plus grand nombre des oppositions dans les mains de ces officiers; en telle sorte que l'intention que vous aviez eue de ne commettre qu'un seul dépôt des oppositions devenait illusoire, mais qu'il suffisait d'une seule opposition formée dans chacun des établissements, avant votre décret, et même de la possibilité qu'on en eût formé quelqu'une, pour que le Trésor public fût autorisé à ne payer que sur le vu des deux certificats à la fois.

Il est donc devenu nécessaire de parer à cette double formalité et à l'augmentation de dépense quí en devenait la suite.

Un autre objet avait en même temps attiré notre attention, parce qu'il était la suite de votre décret. Le tarif des gardes des rôles avait été fixé pour les oppositions d'une manière avantageuse, à raison du nombre borné de ces actes qu'ils recevaient, année commune, dans l'état ancien, et ces oppositions étaient sujettes à un renouvellement annuel.

Dans un moment où elles vont tout à coup se multiplier considérablement, et où la liquidation va successivement anéantir tous les offices, il n'est pas juste que ces oppositions restent au même taux et que leur durée soit aussi restreinte. Nous étions au moment de vous proposer à cet égard un règlement, quand nous avons découvert la nécessité d'en solliciter un de votre sagesse, non seulement sur le tarif des oppositions, mais encore sur l'unité du dépôt où elles devaient être portées.

Nous n'avons vu à cet égard qu'un seul moyen

praticable, et ce moyen est simple et remédie à tout sans inconvénient et sans contradiction: il consiste à ordonner la réunion des deux établissements en un seul, pour opérer en commun et délivrer un seul certificat sur les oppositions déjà respectivement reçues, et sur celles qui le seront conjointement, à compter de leur réunion. Cet arrangement, si utile pour les créanciers et pour les officiers débiteurs, présente encore la plus grande facilité pour la réduction du tarif. Les oppositions reçues par les conservateurs duraient trois ans et ne coûtaient que 30 sous. Mais les certificats donnés par les gardes des rôles n'étaient payés que 4 livres, et ceux des conservateurs, gradués d'après les sommes remboursables, variaient depuis 1 livre jusqu'à 30 livres. Nous avons vu dans la réunion des deux établissements l'occasion la plus naturelle et la plus juste de ramener les frais à une diminution avantageuse pour le public, soit parce qu'un seul acte tiendrait la place de deux, soit parce qu'on pouvait prendre, dans chacun des tarifs particuliers, la fixation la moins forte en les réduisant en un seul.

Mais, avant de vous proposer cet arrangement, Messieurs, nous avons dû prévoir les difficultés et les réclamations qu'il pouvait exciter de la part des officiers qu'il s'agissait de réunir et de réduire. Il fallait, en vous soumettant nos projets, pouvoir vous répondre qu'ils ne seraient pas contrariés.

Nous avons pris, en conséquence, la précaution d'entendre les parties intéressées, et de leur faire connaître les vues d'utilité publique qui détermineraient nos plans. Nous leur devons la justice de déclarer que, quelque rigoureuses qu'aient pu leur paraître les réductions, considérables en elles-mêmes et accrues encore par la nécessité de partager entre deux établissements le quart au plus de ce qu'un seul obtenait dans l'état ancien, ils n'ont pas hésité à s'imposer ces sacrifices et å en faire l'hommage à la patrie.

Nous n'avons eu qu'à donner des éloges aux vues de conciliation et de désintéressement qu'ils ont manifestées et qui les rendent dignes de toute votre bienveillance. C'est d'après la possibilité reconnue de cette réunion et l'examen attentif des effets qu'elle doit produire, que nous avons rédigé les premiers articles du décret qui va vous être présenté; mais il est encore plusieurs objets dignes de votre prévoyance, et qui seront utilement réunis à celui dont nous venons de Vous entretenir.

Le premier a rapport aux quittances notariées qu'il sera nécessaire d'exiger pour la sûreté des payements, la validité des décharges et le bon ordre de la liquidation. Après y avoir mûrement réfléchi, nous nous sommes d'abord convaincus qu'il était impossible d'épargner aux officiers liquidés la formalité d'une quittance devant notaires. L'avantage de l'authenticité, celui d'une minute soigneusement conservée, presque toujours la necesité d'annexer à la quittance un pouvoir spécial dont le dépôt doit être préalablement fait à Paris, si l'on veut éviter les surprises, tout enfin semble se réunir pour exiger impérieusement cette quittance solennelle et attestée par un officier public. Il s'agit seulement de faire qu'elle n'expose aucun des titulaires à des frais trop considérables, ni même à une dépense telle qu'elle forme un objet digne d'attention. Nous avons ensuite pensé que le véritable moment pour recevoir cette quittance était celui où l'officier liquidé, recevant sa reconnaissance de liqui

dation, consommerait lui-même sa destitution pour commencer à n'être qu'un créancier du Trésor public en vertu du titre qu'il reconnaîtrait avoir reçu.

Attacher la quittance au moment de la conversion de ce titre en assignats, ce serait d'une part augmenter la dépense, puisque, les titulaires ayant la faculté de faire diviser leur reconnaissance de liquidation, il faudrait alors multiplier les quittances notariées par le nombre des coupons qu'on aurait mis en circulation.

Il faudrait d'ailleurs que cette négociation, si utile pour l'officier qui voudra se libérer, si utile pour la nation, lorsque l'emploi direct des reconnaissances en acquisition de domaines nationaux doit diminuer l'émission des assignats, il faudrait, disons-nous, que cette négociation se surchargeât d'entraves et de formalités dispendieuses, au lieu qu'un simple transport, avec la formalité de la saisie, suffira dans tous les cas. Enfin, ce serait s'écarter des règles de l'uniformité, si essentielle dans une grande comptabilité; car une partie des reconnaissances directement employées à payer des domaines nationaux ne pourraient être quittancées que dans les provinces, et la caisse de l'extraordinaire, dispensée de la conversion en assignats, perdrail avec cette obligation le moyen de suivre ellemême, et d'une manière uniforme, la formalité des quittances. Or, elle se trouvera constamment remplie en exigeant ces quittances au moment même de la remise de la reconnaissance de liquidation. Cette reconnaissance deviendra dès lors un effet négociable, que le titulaire lui-même, ou son concessionnaire en vertu d'un transport, recevra au Trésor royal, sur son acquit, en représentant le certificat de non-opposition ou de mainlevée. Ceux dont le payement sera arrêté par des oppositions seront les seuls qui aient une double formalité à remplir: la première, au moment du transport, s'ils en font un; la seconde, au moment du remboursement effectif. Mais ils ne pourront s'en plaindre: il n'est pas juste que leurs créanciers puissent être déçus en recevant, comme libre, un titre qui ne le serait pas. Tout le monde connaît d'ailleurs la simplicité des formes pour les cessions ou transports de créances sur le Trésor royal; et quiconque usera de cette facilité n'a pas le droit de réclainer contre la charge imperceptible dont elle sera accompagnée.

En partant de ces principes, notre but principal n'est donc que de fixer, pour les quittances que vous croyez devoir exiger, un tarif inodéré, faible même, mais dont la faiblesse se trouve justifiée par la multiplicité des actes sur lesquels il doit porter. Nous vous soumettons ce tarif gradué pour toutes les sommes, et il s'expliquera suffisamment par lui-même sans que nous devions entrer ici dans de plus grands détails. Nous profiterons encore de cette occasion pour vous parler des moyens de réduire la dépense à laquelle les officiers sont exposés quand ils veulent fournir les expéditions en forme des titres nécessaires pour leur liquidation. Dans plusieurs endroits les contrôleurs ont été jusqu'à exiger, sur le simple vidimus d'un acte, le meme droit que sur la convention que cet acte renfermait. Partout le droit de contrôle est à cet égard trop considérable; il est de votre justice de le diminuer pour cette espèce de produit extraordinaire qui doit former au profit de l'administration un bénéfice inattendu. Votre comité vous propose, en conséquence, le décret suivant :

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu

le rapport du comité de judicature, décrète ce qui suit:

Art. 1er.

« Pour éviter aux créanciers sur offices et aux propriétaires des titres, les frais de deux oppositions, et aux officiers débiteurs ceux de deux certificats, les gardes des rôles auxquels le décret du 30 octobre dernier attribue la réception des oppositions sur offices, se réuniront aux conservateurs des hypothèques et oppositions sur les finances, pour ne former, relativement à la partié des offices, qu'un seul et même établissement jusqu'à la fin de la liquidation des offices supprimés.

Art. 2.

«En conséquence, les registres et liasses des oppositions formées depuis un an ès-mains des gardes-rôles, seront rapportées et jointes à celles formées depuis trois ans, à compter de la publication du présent décret, ès-mains des conservateurs des finances; celles qui seront formées à compter de la même époque, seront reçues en commun; et pour les unes comme pour les autres, il ne sera délivré qu'un seul et même certificat, signé par les gardes des rôles et les conservateurs des finances en exercice.

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malités prescrites par l'article 9 des lettres patentes du 7 mars 1789.

Art. 9.

« Il n'y aura lieu à opposition pour raison du capital des créances sur les corps et compagnies supprimés, dont la nation a mis les dettes à sa charge, conformément à ses décrets des 2, 6 et 7 septembre dernier; les créanciers ne seront tenus que d'exécuter à cet égard les dispositions dudit décret qui les concerne, tous leurs droits demeurant au surplus réservés pour le payement des arrérages à eux dus, et qui se trouveront échus le 31 décembre prochain.

Art. 10.

Les officiers liquidés donneront, lors de la remise qui leur serà faite de leur reconnaissance de liquidation, une quittance devant notaires, dont expéditions seront jointes et annexées aux procès-verbaux de leur liquidation.

Art. 11.

Les notaires de Paris, auxquels les officiers liquidés s'adresseront pour lesdites quittances, ne pourront percevoir pour tous droits d'icelles, que les sommes qui suivent, savoir :

« 2 livres pour tous offices dont le remboursement n'excédera pas 2,000 livres ;

"

« 3 livres depuis 2,000 livres jusqu'à 5,000 livres; i

4 livres 10 sous depuis 5,000 livres jusqu'à 20,000 livres;

«6 livres depuis 20,000 livres jusqu'à 50,000 livres ;

9 livres depuis 50,000 livres, jusqu'à 100,000 livres ;

«et 12 livres depuis 100,000 livres, jusqu'à quelque somme que ce soit. Si la quittance était collectivement donnée par plusieurs officiers de la même compagnie, il ne sera perçu qu'un seul droit réglé par la somme totale du remboursement commun. Mais il sera payé, au delà de cette somme, dix sous par chaque partie comparante dans l'acte, à raison de l'établissement des qualités, non compris le papier.

Art. 12.

"Lesdites quittances seront données sur papier à un seul timbre, et ne pourront être assujetties au contrôle.

Art. 13.

« Le contrôle des expéditions délivrées par les notaires de provinces, ou rédimées par eux, des titres, quittances de finance, provisions, ou autres actes nécessaires aux titulaires d'offices, pour parvenir à leur liquidation, sera invariablement fixé, pour tous droits à 15 sols.

Art. 14.

Lesdites expéditions seront payées aux notaires qui les auront faites, à raison de 10 sols par rôle d'expédition ordinaire, sans qu'ils poissent, sous aucun prétexte, exiger de plus grands droits. »

M. le Président met successivement aux voix les 14 articles du projet de décret.

Ces articles sont adoptés sans discussion.

Un membre demande la parole et propose d'ajouter aux articles présentés par le rappor1 SÉRIE. T. XXI.

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M. le Président. L'ordre du jour est la reprise de la discussion sur les droits d'enregistrement, sur les actes civils et judiciaires et sur les titres de propriété.

M. Antoine Morin, député de Carcassonne. Messieurs, j'entends répéter depuis un an que les ennemis du bien public, déconcertés par votre sagesse et intimidés par votre courage, vous attendent, avec un coupable espoir, aux difficultés de tout genre que présente l'établissement de l'impôt. J'ai dù tourner mon attention sur cette importante matière et vous soumettre le fruit de mes recherches. En vous présentant mes idées sur le tarif du comité, je les généraliserai assez pour qu'elles puissent, à certains égards, servir de principe et de régulateur dans toute discussion relative aux impôts indirects que vous devez établir.

Vous avez aboli des impôts désastreux, et vous avez été généralement applaudis; vous créerez dis impôts qui, par leur assiette, ne puissent pas peser sur le pauvre; vous les rendrez productifs pour éviter l'inconvénient de les trop multiplier, et vous mériterez la reconnaissance de la nation. Vous ne chercherez plus, comme on l'a déjà fait, dans les impôts ou dans leur détail, ce qu'ils ont de bon; on l'a déjà dit, il n'y en a pas de ce genre; ils ne peuvent être que moins onéreux les uns respectivement aux autres; dans l'alternative fâcheuse, dans le choix forcé d'un mal, il laut adopter le moindre.

Je mets dans cette dernière classe les droits d'enregistrement. Votre comité vous a dit que leur produit réuni se portait à 34 millions, sans qu'il ait fixé le produit particulier de chacun de ces droits; je suppléerai votre comité à cet égard; je mettrai sous vos yeux ce que doit produire chacun des articles les plus importants du tarif. Par là vous connaîtrez la portion du revenu public qui lui est attachée, et vous vous porterez avec d'autant plus de zèle à le maintenir qu'il sera plus productif.

Je prouverai encore que les bases du tarif sur les successions et les actes des notaires doivent être augmentées de 15 millions qui surchargeraient moins le peuple que l'impôt désastreux proposé sur les boissons, et qui répareraient, jusqu'à un certain point, la diminution dont vous êtes menacés sur le produit du tabac.

Ou pourrait m'opposer que je dois attendre que chacun des objets dont je sollicite l'augmentation soit à la discussion; il m'a paru utile de les présenter d'avance à votre examen, de placer leur produit dans le même cadre, pour que d'un coup d'oeil vous en embrassiez l'étendue et vous puissiez juger de leur importance.

En rendant justice, comme je le dois, à l'unité des principes, à la simplicité qui caractérisent le plan de votre comité, et qui étaient si difficiles à garder en classant toutes les dispositions des hom

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