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dans l'hérédité, soit en biens présens et actuels, soit en actions, parce que c'est la jouissance totale ou partielle de la masse des droits héréditaires qui a été léguée que le testateur ait augmenté ou qu'il ait diminué son patrimoine depuis la confection de son testament, il n'en résulte rien autre chose, sinon que le légataire universel ou à titre universel de l'usufruit en sera plus ou moins avantagé, parce qu'il aura une jouissance plus ou moins étendue.

L'usufruitier universel a donc le droit de jouir de tous les biens présens et disponibles au moment du décès du testateur, et même de tout ce qui pourrait en augmenter la masse par la suite, si la cause de l'obvention était déjà dans l'hérédité. Ainsi, par exemple, à supposer que celui qui qui a légué l'usufruit de tous ses biens à CAIUS, ait laissé entre autres fonds un domaine dont il n'avait que la nue propriété, par la raison que la jouissance en appartenait à un tiers, lorsque cet usufruit particulier viendra à cesser, c'est CAIUS qui devra en profiter, parce que le testateur lui ayant légué l'usufruit de tous ses biens, lui a par là même légué le droit d'entrer en jouissance de ce domaine, lorsque l'usufruit de l'autre serait arrivé à son terme (1); comme il lni a légué le droit d'exiger le paiement des créances quand le terme sera venu.

(1) Voy. dans VOET sur le digeste, tit, de usufructu et quemadmod., lib. 7, tit. 1, n. 15.

479. Il n'en serait pas de même de la somme adjugée par forme de réparation civile ou de dommages-intérêts contre le meurtrier du défunt; le légataire universel de l'usufruit de ses biens ne pourrait en demander la jouissance, parce que, comme le dit Lebrun, ces sortes de réparations imitant la douleur et la perte de celui qui les obtient, doivent lui être propres comme l'affliction à raison de laquelle elles sont ordonnées (1). La cause de ces dommages-intérêts ne se rattache point à la succession comme faisant partie du patrimoine du défunt, mais plutôt au droit de la parenté pour l'indemnité de ceux qui souffrent du meurtre de leur parent; en sorte que ce n'est point jure hæreditario, mais bien jure sanguinis vel necessitudinis, que la demande doit en être formée; non enim hæredibus jure hæreditario competit, quippè quod in corpore libero damni datur, jure hæreditario transire ad successores non debet, quasi non sit damnum pecuniarium: nam ex bono et æquo oritur (2). Telle est aussi la décision que les auteurs ont portée sur cette question (3).

480. SI UN propriétaire voisin acquérait la mitoyenneté du mur de la maison grevée d'usufruit, sans doute l'usufruitier universel aurait droit de jouir du prix qui serait payé pour cet objet,

(1) Traité des successions, liv. 2, chap.6, sect. 2, distinct. I, n. 12.

(2) L. 5, §. 5, ff. de his qui effuderint, lib. 9, tit. 3. (3) Voy. dans SOTOMAYOR, de usuf., cap. 40.

puisque sa jouissance s'étend à tout ce qui se trouve dans l'hérédité, ou qui peut en provenir et s'y rattacher; mais en serait-il de même de l'usufruitier à titre singulier, auquel on n'aurait légué que la jouissance de la maison dont le mur ferait partie? Nous croyons que non car il ne pourrait exiger l'usufruit de la somme dont il s'agit, ni comme étant compris dans son titre, puisqu'on ne lui a légué que l'usufruit d'une maison; ni comme indemnité à raison de la chose vendue, parce qu'il ne souffrirait aucune éviction dans sa jouis

sance.

481. LE PROPRIÉTAIRE d'une rente foncière, faisant son testament, a légué la jouissance de son mobilier à son épouse, et laissé ses immeubles en plein domaine à son héritier. La veuve, comme légataire à titre universel de l'usufruit de tout ce qui est réputé meuble, doit avoir la jouissance de la rente foncière et en percevoir les arrérages annuels; mais le débiteur, ayant cessé de payer ces arrérages pendant plusieurs années, a donné lieu à ouvrir contre lui une action en commise ou résolution du contrat : est-ce dans l'intérêt et au profit de l'usufruitière que cette résolution doit être prononcée, par la raison qu'elle avait la jouissance de la rente? ou, au contraire, n'est-ce pas seulement au profit de l'héritier qu'elle doit être adjugée, par la raison qu'elle fait rentrer le fonds dans la succession, et que lui seul a droit à la jouissance comme à la pro priété des immeubles?

Il faut faire cette distinction: ou le débiteur de la rente avait déjà, lors de la mort du testateur, cessé ses paiemens durant le temps nécessaire pour donner lieu à l'action en résolution du contrat, ou c'est seulement dès le jour de ce décès que le droit d'intenter cette action a été requis contre lui.

482. Dans le premier cas, c'est au profit de l'héritier la commise doit être prononcée, parce

que

que le testateur avait déjà lui-même, en son vivant, un droit acquis pour rentrer dans la propriété et jouissance de son fonds; que l'action qui lui appartenait à ce sujet était un immeuble dans son patrimoine, puisqu'elle tendait à la revendication d'un immeuble (526), et qu'en conséquence elle fait partie des immeubles dévolus en plein domaine à son héritier. Peu importe que la demande en commise n'ait été formée que depuis le décès du testateur, parce que le jugement qui la prononce se rattache à sa cause, et qu'en déclarant que la commise a été méritée ou encourue par une telle faute et depuis l'époque où elle a eu lieu, il déclare par là même dès-lors le droit a été acquis pour que faire prononcer, et doit, par une conséquence nécessaire, reporter ses effets à cette même époque, quant à l'adjudication du droit de propriété, quoiqu'il n'ait pas les mêmes effets quant à la restitution des fruits perçus avant la demande en justice, attendu qu'ils sont un accessoire de la possession paisible jusqu'au moment du trouble (1) causé par l'assignation.

la

(1) Voy. dans DUMOULIN sur la coutume de Paris,

483. Dans le second cas, au contraire, c'est-à-dire si c'est pour cessation de paiement postérieurement à la mort du testateur, que la résolution du contrat de rente soit demandée, il est hors de doute que c'est dans l'intérêt de la veuve qu'elle doit être prononcée quant à la jouissance, parce qu'ayant le droit de jouir de la rente, elle doit avoir aussi celui de jouir du fonds qui lui est subrogé par le jugement qui prononce la commise.

48. Lorsque l'usufruit de la même ou des mêmes choses a été légué à plusieurs personnes, tous les différens colégataires ont droit de concourir au partage de la jouissance qui leur est conjointement donnée.

Mais, pour que ce concours à partage doive avoir lieu, il faut que tous soient appelés au même titre, c'est-à-dire que tous soient légataires universels, ou tous à titre universel, ou tous à titre singulier: si, en effet, le testateur avait légué la jouissance de tous ses biens ou d'une quote part de tous ses biens à une personne, et qu'il eût en même temps légué à un autre l'usufruit d'un ou de plusieurs objets déterminés, on ne devrait pas envisager le légataire universel ou à titre universel comme appelé à concourir, avec ce dernier, au partage de la jouissance des choses comprises dans son legs; car, comme les légataires universels (1009) ou à titre universel (871 et 1012) de la propriété

tit. 1, §. 33, gloss. 1, n.o 148; — §. 43, gloss. 2, n.os S. 45, gloss. 1, n.o 9.

et 48;

TOM. II.

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