Page images
PDF
EPUB

les hostilités ouvertes en Extrême-Orient par le Japon contre notre alliée la Russie; et ainsi de suite... Nous répondrons à ces plaisanteries par des paroles sérieuses et par des faits.

Le Groupe de l'Arbitrage, constitué le 26 mars 1903, représente à la fois l'aboutissement d'une longue campagne préparatoire et le point de départ d'une évolution dans la politique étrangère contemporaine; évolution trop lente, contrariée par trop de résistances sans doute, mais évolution incontestable.

Les faits parlent plus clairement et plus irréfutablement que les critiques. Le Groupe de l'Arbitrage a déjà son histoire, ses documents, ses actes en un mot.

Ce sont ses actes qu'il a décidé de publier régulièrement et que le lecteur trouvera consignés par ordre chronologique dans ce premier volume.

La Conciliation

Internationale

PROGRAMME

du Groupe Parlementaire Français de l'Arbitrage International

Au mois de Mars 1903, sur l'initiative de M. d'Estournelles, un groupe nouveau fut fondé au Parlement: Le Groupe de l'Arbitrage International.

Voici, d'après le procès-verbal de la première réunion, le 26 Mars, le discours qui fut prononcé par le président :

DISCOURS DU PRÉSIDENT (")

Messieurs,

A mesure qu'ils sont plus éclairés, les peuples deviennent plus favorables au principe de l'arbitrage international, tandis que la plupart des Gouvernements y demeurent indifférents ou hostiles.

Cette contradiction s'explique par bien des causes dont la principale, heureusement, n'est qu'un malentendu facile à dissiper.

Les adversaires de l'arbitrage affectent, en effet, de considérer comme un rêve ou comme un danger le plus réel et le plus salutaire des progrès; ils alarment les sentiments et les intérêts les plus respectables, à commencer par le patriotisme, en confondant et en dénaturant des idées qu'on doit envisager chacune en soi distinctement. Ainsi, leur erreur favorite, et devenue systématique, consiste à placer sur un même plan, comme un même but, l'arbitrage et le désarmement. Il est besoin, pourtant, de peu de réflexion pour comprendre que la question du désarmement ne pourra pas

(*) M. d'Estournelles, en prenant la présidence, a prononcé ce discours que les membres du groupe ont décidé de répandre le plus possible, afin de bien définir l'objet et la portée précise de leur action. I importe grandement en effet que l'ignorance ou le parti-pris ne puissent pas affaiblir cette action en la dénaturant, et qu'elle ne donne prise, ni en France ni à l'étranger, à aucun malentendu ; l'éducation de l'opinion, celle de la presse et même des pouvoirs publics, étant presque entièrement à faire sur cette question d'un intérêt pourtant universel.

même être étudiée, aussi longtemps que l'arbitrage ne sera pas entré dans nos

mœurs.

Ou bien encore, on affecte de croire que, nous, partisans de l'arbitrage, nous prétendons soumettre à cette juridiction toutes les questions et la que, sous menace même de l'invasion, au lieu d'appeler aux armes toutes les forces de la nation, nous irions, suppliants, demander des juges que notre agresseur refuserait !...

Il est temps de mettre les choses au point. Même isolées, les aspirations des partisans de l'arbitrage répondent si bien aux vœux de l'humanité qu'elles trouvent déjà de l'écho ; mais elles seront irrésistibles aussitôt qu'elles seront groupées. Ce groupement s'accomplit dans tous les pays qui progressent. En France, il est déjà tardif. C'est pourquoi je vous ai proposé, Messieurs, de nous réunir ici, tous animés d'un même esprit, d'une bonne volonté vraiment patriotique et supérieure, oubliant ce qui nous divise pour ne songer qu'à ce qui nous unit, et de former un groupe composé de tous les députés favorables au développement de l'arbitrage.

Je vous remercie d'avoir répondu si nombreux à mon appel.

Nous sommes ici pour dissiper toute équivoque, volontaire ou involontaire ; pour affirmer et pour démontrer que loin d'être des rêveurs, des philosophes ou des sans Patrie, nous avons pleine conscience de notre devoir et de notre responsabilité en poursuivant pour la France une politique aussi claire, aussi prudente, positive et

pleine de promesses que la politique actuelle de l'Europe est obscure, grosse d'équivoques et de dangers.

Nous sommes ici pour affirmer que nous n'oublions rien du passé, mais que nous pensons également à l'avenir. Nous ne voulons pas faire de la France, prématurément désarmée, affaiblie, une victime et une proie; nous la voulons, au contraire, plus forte, moins exposée et plus prospère qu'à l'heure actuelle."

Pour aboutir à un résultat positif, nous aurons soin de limiter rigoureusement notre tâche. La paix universelle et le désarmement simultané resteront à jamais des rêves si la science, la méthode la plus rigoureuse et la plus patiente ne s'appliquent pas à chercher, à trouver et à définir les moyens d'en hâter la réalisation. Déjà, on peut affirmer que le désarmement ne sera que le dernier terme de l'évolution pacifique. Entre ce dernier terme et nos aspirations présentes combien d'étapes successives restent à franchir, sans qu'on puisse en doubler aucune? Nul ne pourra songer au désprmement avant d'avoir essayé, au préalable, l'effet d'une réduction progressive des armements; et cette réduction elle-même sera nécessairement précédée par la limitation, la non augmentation des armements. Mais cette limitation suppose déjà de grands de changements dans les relations des Puissances et ces changements devront être consacrés par des traités. Ces traités, impliquant des échanges de concessions réciproques, motivées par le respect de la justice et par la conscience d'une solidarité nouvelle entre

« PreviousContinue »