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à l'inconsidération ou à l'incapacité, avant de les traiter de crimes. Qui de nous a plus de mesure et d'équité?

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Mais voyez la grande Bretagne! Que d'agitation populaire n'y occasionne pas ce droit que vous réclamez! c'est lui qui à perdu l'Angleterre..... L'Angleterre est perdue! Ah! grand Dieu! quelle sinistre nouvelle! Eh! par quelle fatitude s'estelle donc perdue? ou quel tremblement de terre, quelle convulsion de la nature a englouti cette ile fameuse, cet inépuisable foyer de si grands exemples, cette terre classique des amis de la liberté ?.... Mais Vous me rassurez. L'Angleterre fleurit encore pour l'éternelle instruction du mọnde.-L'Angleterre répare, dans un glorieux silence, les plaies qu'au milieu d'une fievre ardente elle s'est faites! l'Angleterre développe tous les genres d'industrie, exploite tous les sillons de la prospérité humaine, et tout à l'heure encore elle vient de remplir une grande lacune de sa constitution, avec toute la vigueur de la plus énergique jeunesse, et l'importante maturité d'un peuple vieilli dans les affaires pu bliques!... Vous ne pensiez donc qu'à

quelques dissentions parlementaires (là, comme ailleurs, ce n'est souvent que du parlage qui n'a guère d'autre importance que la loquacité); ou plutôt, c'est apparemmment la dernière dissolution du parlement qui vous effraie?

» Je ne vous dirai pas que sur votre exposé, il est évident que vous ignorez les causes et les détails de ce grand évènement, qui n'est point une révolution, comme vous l'appelez; mais je vous dirai que cet exemple offre la preuve la plus.irrésistible que l'influence d'une assemblée nationale sur les ministres ne peut être désastreuse, parce qu'elle est nulle, cette influence, aussi-tôt que le sénat en abuse.

» Qu'est-il arrivé, en effet, dans cette circonstance rare, où le roi d'Angleterre, étayé d'une très - foible mincrité, n'a pas craint de combattre la formidable assemblée nationale, et de la dissoudre? Soudain l'édifice fantastique d'une opposition colossale s'est écroulé sur ses frêles fondemens, sur cette coalition cupide et factieuse, qui sembloit menacer de tout enyahir. Eh! quelle est la cause d'un changement si subit? C'est que le peuple étoit

de l'avis du roi et non de celui du parlement. Le chef de la nation dompta l'aristocratie législative, par un simple appel au peuple, à ce peuple qui n'a jamais qu'un intérêt, parce que le bien public est essentiellement le sien. Ses représentans, revêtus d'une invincible puissance, et presque d'une véritable dictature, quand ils sont les organes de la volonté générale, ne sont que des pygmées impuissans, s'ils osent substituer à leur mission sacrée, des vues intéressées ou des passions particulières.

» Livrons-nous donc sans crainte à l'impulsion de l'opinion publique; loin de redouter, invoquons sans cesse le contrôle universel; c'est la sentinelle incorruptible de la patrie, c'est le premier instrument auxiliaire de toute bonne constitution c'est l'unique surveillant, le seul et puissant compensateur de toute constitution vicieuse; c'est le garant sacré de la paix sociale, avec laquelle nul individu, nul intérêt, nulle considération ne peuvent entrer en balance ».

L'annonce du prompt renvoi des ministres rendit cette adresse moins nécessaire,

Le roi ayant fait communiquer à l'assemblée qu'il se rendroit le lendemain 17 dans la capitale, il fut arrêté de le prier de permettre qu'une députation nombreuse l'accompagnât lors de son entrée à Paris.

PRÉSIDENCE DE M. LE DUC DE LIANCOURT:

Le 20 juillet 1789, les actionnaires de la caisse d'escompte viennent offrir à l'assemblée nationale les éclaircissemens nécessaires sur le crédit.

Mirabeau, qui avoit dévoilé depuis long-tems les manoeuvres de ces vampires, prit jour pour offrir à cet égard un travail très-important et très-urgent. Les évènenemens tragiques, arrivés dans cet intervalle, lui firent suspendre sa motion. «<ll étoit trop dangereux, dit-il, d'échauffer les esprits, et de porter sur les personnes toute la haine qu'on doit aux abus. D'ailil ne falloit pas les faire pendre, il

leurs,

falloit les faire payer ».

La fermentation qui régnoit depuis quelque tems dans la capitale, et dont les ef

fets avoient été si utiles, attirèrent l'attention de l'assemblée nationale; plusieurs moyens furent proposés pour ramener le caline.

Mirabeau, représentant (1) que les petits moyens compromettroient inutilement lä dignité de l'assemblée, commença par exposer les causes du désordre de Paris: « La première et la principale, c'est qu'aueune autorité reconnue n'y existoit; que les électeurs confondant un zèle officieux avec un pouvoir légal, avoient formé un comité permanent, et des assemblées dont T'objet incontestable étoit le bien public, dont la continuation avoit été nécessaire par des circonstances urgentes, mais dont le fruit devenoit nul, parce qu'ils n'étoient que de simples particuliers, sans délégation, sans confiance, et que leur pouvoir avoit cessé au moment où leur mission d'électeurs avoit été consommée. De là résultoit que les districts ne s'accordoient point, he marchoient point ensemble; que, durant cette anarchie, il étoit impossible d'é

(1) Séance du 23.

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