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une députation vers le clergé, députation très-solennelle et très-nombreuse, qui, résumant tout ce que nos adversaires ont -si subtilement allégué, tout ce que nos commissaires conciliateurs ont si bien dit, adjurera les ministres d'un Dieu de paix de se ranger du côté de la raison, de la justice, de la vérité, et de se réunir à nous pour tenter un nouvel effort auprès de la noblesse. Si les espérances que nous avons conçues d'une grande partie du clergé ́sont fondées, elles se réaliseront à l'instant même. Et quelle différence pour nous d'inviter la noblesse, de la sommer au besoin, de réclamer contre elle, s'il est malheureusement nécessaire, réunis avec le clergé ou isolés de lui! Mais, quel que soit le succès d'une telle démarche, elle vous donnera l'honneur de tous les procédés; elle conquerra Fopinion universelle à votre modération et à votre fermeté.

» Que si, par impossible, si, ce qu'à Dieu ne plaise, les privilégiés s'obstinent dans leur conduite impérieuse et ambiguë, nous recourrons au commissaire du roi, et nous lui demanderons de faire respec

ter son ajournement. M. le garde des sceaux, par ordre du roi, a ajourné cette assemblée. Toute assemblée ajournée doit incontestablement se retrouver la même qu'elle étoit au moment où on l'a ajournée. M. le garde des sceaux doit donc faire respecter et exécuter l'ordre du législateur provisoire dont il a été l'organe; et ce n'est qu'alors que la conduite des ordres privilégiés aura montré tout-à-la-fois leur indiscipline et l'impuissance du ministère, que, forcés d'établir et d'exercer vous-mêmes les droits nationaux, vous aviseriez dans votre sagesse aux moyens les plus paisibles, mais les plus sûrs, d'en développer l'étendue ».

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Mirabeau finit par proposer de faire à la motion cet amendement qu'il seroit décrété une députation vers le clergé, députation très-solennelle et très - nombreuse, qui, résumant tout ce que MM. de la noblesse avoient allégué, tout ce que les commissaires conciliateurs avoient si bien dit, adjureroit les ministres du Dieu de paix de se ranger du côté de la raison, de la justice et de la vérité, et de se réunir dans la salle commune »>.

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M. Target réduisit la motion à des termes plus simples. Voici l'arrêté qui fut pris à ce sujet (1):

» L'assemblée des communes a arrêté de députer à MM. du clergé, pour les inviter au nom du Dieu de paix, et de l'intérêt national, à se réunir avec eux dans la salle de l'assemblée générale, pour aviser aux moyens d'opérer la concorde, si nécessaire en ce moment au salut de la chose publique.

28 et 29 mai 1789.

Les communes attendoient avec impa tience la réponse de MM. du clergé; mais elles apprirent par une députation (2), qu'ils avoient suspendu leurs délibérations pour déférer à une lettre du roi qui témoignoit le désir de voir renouveler les conférences. Le roi manifesta le même désir aux communes. Les circonstances

alarmantes qui avoient précédé et accompagné cette lettre, parurent mériter de sérieuses réflexions. Les débats furent vifs ; les motions furent multipliées : voici celle que proposa Mirabeau.

(1) Le 27 mai. (2) Le 28 mai.

» Qu'il soit fait à sa majesté une trèshumble adresse, pour lui exprimer l'attachement inviolable de ses fidèles communes à sa royale personne, à son auguste maison, et aux vrais principes de la monarchie; pour témoigner à sa majesté leur respectueuse reconnoissance de ce que, dans sa sagesse et sa bonté pour ses peuples, sa majesté a convoqué, non trois assemblées distinctes de trois ordres séparés d'intérêt et de vues, mais l'assemblée nationale; pour s'occuper, de concert avec sa majesté, de la régénération du royaume, de ce que, dans sa sollicitude bienfaisante, sa majesté a daigné rechercher les moyens de mettre fin à la malheureuse inaction à laquelle cette assemblée nationale est réduite par l'incident le plus imprévu, le plus contraire au bien général; pour lui exposer que, par déférence au désir de sa majesté, les communes de son royaume ont autorisé leurs commissaires à assister à la conférence à laquelle sa majesté a daigné les inviter, et l'informer en même tems, qu'intimement convaincus que les députés des différens ordres sont députés à une seule et même

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assemblée, l'assemblée nationale; que la vérification de leurs pouvoirs ne peut être définitivement faite et arrêtée que dans l'assemblée nationale; et déterminés comme ils y sont obligés par les ordres de leurs constituans, à ne reconnoître pour députés à l'assemblée natio nale, que ceux dont les pouvoirs auront été vérifiés et approuvés dans la dernière assemblée, ils chargent expressément leurs, commissaires de s'occuper de tous les expédiens qui, sans porter atteinte à ce principe fondamental, pourront être jugés propres à ramener la concorde entre les divers ordres, et les faire concourir à rechercher en commun les moyens de réaliser les espérances que sa majesté a conçues pour le bonheur et la prospérité de l'eat; enfin, de leur en faire le rapport, à l'effet que lesdites fidèles communes prennent une détermination qui, s'accordant avec les instructions qu'ils ont reçues de leurs commettans les mette à portée de donner à sa majesté des preuves non équivoques de leur immortel dévouement à sa personne royale et à tout ce qui la touche, et de leur zèle illimité pour

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