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C'est ici une indication de ce qui se pratique, plutôt qu'une loi générale à laquelle on soit obligé de se conformer.

Les objets que l'Ordonnance paraît confondre, sont de deux espèces : les uns sont essentiels, et les autres accidentels. Les uns appartiennent à la substance du contrat, et les autres n'en sont que l'accessoire.

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1o. Il est nécessaire que la police contienne le nom de celui qui se fait assuafin que les assureurs sachent avec qui ils contractent. Mais peu importe que l'assuré agisse pour son compte ou pour compte d'autrui. Il peut même se dispenser d'énoncer le nom de son commettant. Il suffit que la personne qui se fait assurer soit dénommée dans la police, pourvu que d'ailleurs les choses soient en règle, et qu'il n'y ait aucune surprise. Infrà, ch. 5, sect. 1.

2° Si l'assuré est une personne connue, on peut se dispenser d'énoncer son domicile; mais si elle est inconnue, et qu'il soit de l'intérêt de l'assureur de savoir où elle est domiciliée, će point pourrait devenir essentiel. Par exemple, si l'assurance est faite pour compte d'un domicilié chez une nation belligérante, cette circonstance, qui tend à aggraver le risque, doit être déclarée. 3. Peu importe aux assureurs que l'assuré soit commissionnaire ou propriétaire. Il suffit que l'aliment du risque soit réel, et que le connaissement soit relatif à la police. Les assureurs sont non recevables à élever la question de propriété, lorsque ce point est étranger aux hasards dont ils sont responsables. Infrà, ch. 5, sect. 3.

Mais si l'assuré était commissionnaire du sujet d'une nation belligérante, et que cette qualité mît la chose assurée en risque d'être prise, il faudrait que la police en fit mention; car rien d'essentiel ne doit être caché aux assureurs. Suprà, ch. 1, sect. 5, § 3. Infrà, ch. 5, sect. 2.

4°. Il est nécessaire que la police désigne les effets sur lesquels l'assurance est faite, afin que la matière du risque soit déterminée. Il faut donc qu'il soit dit qu'on se fait assurer ou sur le corps, ou sur les facultés, ou sur l'un et l'autre, ou sur telle chose en particulier. Infrà, ch. 10.

5o. La police doit contenir le nom du navire, afin que le sort des assureurs ne vague point dans l'immensité des événemens, et ne dépende pas de la volonté indéfinie de l'assuré. Ce point est essentiel. Il ne suffit pas même de désigner le nom du navire; il faut de plus en faire connaître la qualité; car il importe aux assureurs de savoir si le navire sur lequel ils prennent risque est, par exemple, une pinque, ou un vaisseau à trois mâts, etc. Infrà, ch. 6. Lorsqu'il s'agit de marchandises qu'on fait venir des pays étrangers, il est permis de les faire assurer in quovis. Ce mot est une espèce de désignation

Nom de l'assuré.

Domicile de l'as

suré.

Qualité de pro

priétaire ou de commissionnaire.

Effets assurés.

Nom du navire.

Nom du capitaine.

Lieux du risque.

Tems du risque.

Somme assurée.

Prime.

implicite du navire, laquelle suffit, attendu la nécessité des circonstances. Infrà, ch. 6, sect. 5.

6o. La police doit contenir le nom du maître. Mais les assureurs ne peuvent point se plaindre du changement de capitaine, lorsque ce changement a été occasionné par la nécessité. Ils ne peuvent également point s'en plaindre, si la police renferme la clause, ou autre pour lui. Infrà, chap. 7, sect. 1.

7°. La police doit déterminer les deux extrêmes du voyage qui fait l'objet de l'assurance, c'est-à-dire le lieu à quo, et le lieu ad quem. Le premier est celui d'où le risque commence à courir, et le second est celui où le risque sera terminé. Infrà, ch. 13.

Si l'on veut que le navire puisse entrer dans les ports de la route, pour faire la traite, on ne doit pas oublier de stipuler la clause de faire échelle. Infrà, ch. 13, sect. 6.

8°. Le tems auquel les risques commenceront et finiront court ordinairement, à l'égard du corps, depuis le départ jusqu'à l'arrivée du vaisseau; et à l'égard des marchandises, depuis qu'elles ont été chargées dans le bâtiment ou dans les gabarres pour les y porter, jusqu'à ce qu'elles soient délivrées à terre. Mais rien n'empêche de fixer d'autres époques. Infrà, ch. 13.

9°. La police doit contenir la somme qu'on entend assurer; car faut-il bien savoir ce que les assureurs doivent payer en cas de perte.

Pothier, n°. 75, observe que la fixation de la somme n'est pas de l'essence du contrat, et que les assureurs peuvent s'obliger à payer, en cas de perte des choses assurées, le prix qu'elles valaient suivant l'estimation qui en serait faite.

En effet, la vente faite au prix qui sera fixé arbitrio boni viri, ou au prix que la chose vaut, est légitime. Casaregis, disc. 34, n°. 18. Pothier, Traité des ventes, n°. 25 et 26.

La même décision s'applique au contrat d'assurance. Si la somme assurée n'est pas certaine lors du contrat même, il suffit qu'elle doive le devenir par la juste estimation qui sera faite de la chose mise en risque.

10°. La police doit contenir la prime ou coût de l'assurance. Ce point est de l'essence du contrat, ainsi qu'on le verra dans le chapitre suivant.

Soumission aux 11o. La police contiendra la soumission aux arbitres. Ce point dépend de la pure liberté des parties. Infrà, ch. 20, sect. 1.

arbitres.

Autres pactes.

12o. L'article ajoute que la police contiendra toutes les autres conditions dont les parties voudront convenir.

Il est donc permis de stipuler d'autres conditions, pourvu qu'elles ne soient contraires, ni à la nature du contrat, ni aux principes d'équité et de justice:

en quoi notre législateur a été plus sage que Philippe II, qui avait prohibé d'ajouter dans la police aucune autre clause que celles par lui autorisées. Réglement d'Anvers, art. 2.

Mais est-il permis de stipuler des pactes contraires à la disposition de l'Ordonnance?

Le réglement de Barcelonne (à la suite du Consulat, ch. 353 et 354), et le Réglement d'Amsterdam, art. 1, déclarent nuls et de nulle valeur tous contrats d'assurance fails et passés au préjudice de l'Ordonnance, quoique les parties aient stipulé et contracté au contraire. Cette décision est trop générale. On ne peut déroger aux dispositions prohibitives de l'Ordonnance: Ea quæ lege fieri prohibentur, si fuerint facta, non solùm inutilia, sed pro infectis habentur. L. 5, C. de legib.

On ne peut déroger aux dispositions de l'Ordonnance dans les points qui sont de l'essence du contrat. Stypmannus, part. 4, tit. 7, n°. 305. Kuricke, diatr. de assecur., pag. 833.

Mais il est permis de déroger aux dispositions de l'Ordonnance dans tous les points qui, n'étant prohibés par aucun texte exprès, n'intéressent ni l'essence du contrat, ni les bonnes mœurs, ni le droit public de la première classe. Rote de Gênes, déc. 102, n°. 5. Stypmannus, part. 4, cap. 7, no. 736. Roccus, not. 61. Casaregis, disc. 1, n°. 8; disc. 10, n°. 8.

Et telle est la disposition du droit commun. Bretonier, tom. 3, pag. 129 et 865. Dunod, des prescriptions, pag. 111. Brodeau, Cout. de Paris, tom. 1, pag. 130. Furgole, des testamens, tom. 2, pag. 6, etc.

$ 2. Pactes contraires à l'Ordonnance.

$ 3. Comment entendre les clauses gé

Les clauses générales doivent être prises dans leur universalité. Elles embrassent tous les cas qui peuvent y être compris. La disposition générale opère autant dans le genre, que la spéciale opère dans l'espèce. Le pacte général doit être in- nérales ? terprété dans sa généralité. Les parties stipulantes doivent s'imputer de n'y avoir apposé aucune restriction. Ces règles nous sont apprises par tous nos docteurs. Dumoulin, cons. 8, n°. 19. Mantica, de tacitis, lib. 3, tit. 2.

Elles s'appliquent naturellement aux contrats d'assurance, qui sont de droit étroit pour les pactes qu'ils renferment. Straccha, de assecur., gl. 15, no. 14. Suprà, chap. 1, sect. 5.

Les clauses des polices doivent être prises à la lettre, lorsqu'elles sont claires par elles-mêmes: In contractu assecurationis inspici debet id tantùm, quòd certum est inter contrahentes. Casaregis, disc. 1, n°. 108.

$4.

Comment interpréter les pactes équivoques de la

Mais lorsqu'elles sont obscures, le meilleur et même le seul moyen d'en police? fixer le sens, est de recourir au droit commun, parce que dans le doute

les parties sont présumées avoir voulu former leurs conventions suivant la règle établie par la loi, laquelle n'est autre chose que la volonté universelle des citoyens Verba conventionum secundùm jus commune debent intelligi. Nam jus commune informat conventiones, easque interpretatur. Et si conventio est ambigua, redigitur ad intellectum juris communis. Nam qui contrahit, præsumitur habere mentem quæ congruit legis dispositioni. Mantica, de tacitis, tom. 1, pag. 114,

n°. 2.

Vattel, du droit des gens, liv. 2, ch. 17, développe admirablement bien tout ce qui concerne l'interprétation des traités.

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Il nous apprend que la première maxime générale sur l'interprétation, est qu'il n'est pas permis d'interpréter ce qui n'a pas besoin d'interprétation. Quand » un acte est conçu en termes clairs et précis, quand le sens en est manifeste, et ne conduit à rien d'absurde, on n'a aucune raison de se refuser au » sens que cet acte présente naturellement. Aller chercher ailleurs des conjectures pour le restreindre, ou pour l'étendre, c'est vouloir l'éluder. Admettez une fois cette dangereuse méthode, il n'est aucun acte qu'elle ne rende inu» tile. ( N°. 263 ).

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> Si celui qui pouvait et devait s'expliquer clairement et nettement, ne l'a » pas fait, tant pis pour lui : il ne peut être reçu à apporter subséquemment des restrictions qu'il n'a pas exprimées. ( N°. 264. )

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› Puisque l'interprétation légitime d'un acte ne doit tendre qu'à découvrir la pensée de l'auteur, ou des auteurs de cet acte, dès qu'on y rencontre quel

⚫ que obscurité, il faut chercher quelle a été vraisemblablement la pensée de ⚫ ceux qui l'ont dressé, et l'interpréter en conséquence. (N°. 270).

» Dans l'interprétation des pactes et des promesses, on ne doit point s'écarter › du commun usage de la langue, à moins que l'on n'en ait de très-fortes raisons. Au défaut de la certitude, il faut suivre la probabilité dans les affaires humaines. Il est ordinairement très-probable que l'on a parlé sui⚫ vant l'usage; cela fait toujours une présomption très-forte, laquelle ne peut ‣ être surmontée que par une présomption contraire, plus forte encore. (No. 271).

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Les paroles ne sont destinées qu'à exprimer les pensées; ainsi, la vraie signification d'une expression, dans l'usage ordinaire, c'est l'idée que l'on › a coutume d'attacher à cette expression. (N°. 273).

› Les termes techniques, ou les termes propres aux arts ou aux sciences › doivent ordinairement s'interpréter suivant la définition qu'en donnent les > maîtres de l'art. (N°. 276). Infrà, ch. 8, sect. 13.

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Quand les choses qui entrent dans la raison d'une convention, sont considérées, non comme actuellement existantes, mais seulement comme possibles, la seule possibilité de l'événement suffit pour empêcher toute exception. (No. 298). Ce principe lumineux a présidé à notre jurisprudence, au sujet du taux des primes. Infrà, ch. 5, sect. 3, 4 et 5.

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CONFÉRENCE.

XVI. L'art. 332 du Code de commerce, après avoir établi la forme externe ou extrinsèque du contrat d'assurance, s'occupe de sa forme interne ou intrinsèque, et il porte : << Il exprime (le contrat d'assurance);

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» Le nom et le domicile de celui qui fait assurer, sa qualité de propriétaire ou de commissionnaire;

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Le lieu où les marchandises ont été ou doivent être chargées, le port d'où ce navire » a dû ou doit partir;

Les ports ou rades dans lesquels il doit charger ou décharger, ceux dans lesquels il

» doit entrer;

» La nature et la valeur, ou l'estimation des marchandises, ou objets que l'on fait as

» surer;

» Les tems auxquels les risques doivent commencer et finir;

» La somme assurée;

La prime ou le coût de l'assurance;

» La soumission des parties à des arbitres, en cas de contestation, si elle a été convenue; » Et généralement toutes les autres conditions dont les parties sont convenues. » Ces dispositions de la loi nouvelle ont été puisées dans l'art. 3, titre des assurances, de l'Ordonnance de 1681, qui avait elle-même consacré l'ancienne jurisprudence nautique, comme l'observe Emérigon. (Voyez l'art. 1 du chap. 2 du Guidon de la mer, et l'art. 3

des Assurances d'Amsterdam ).

-

La Cour de cassation avait présenté une longue série de dispositions pour déterminer l'effet des contraventions et des omissions sur ce sujet; mais la commission crut devoir les écarter, parce qu'il lui parut que toutes ces conséquences dérivaient naturellement du texte même de la loi. ·(Voyez Observations de la Cour de cassation, tom. 1, pag. 26,

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etc., et Analyse raisonnée des observations des tribunaux, pag. 92 et 93).

Il faut d'ailleurs dire ici, sur l'art. 332 du Code de commerce, ce que Valin disait sur l'art. 3 de l'Ordonnance: Tout ce qui est prescrit par cet article est extrêmement juste, » pour prévenir les surprises qui pourraient être faites aux assureurs et les contestations qui pourraient s'élever au sujet des véritables clauses et conditions de l'assurance. » En effet, le législateur a senti combien il était important pour l'assureur de connaître toute l'étendue des risques dont il se charge.

Ajoutons avec ce savant commentateur que « l'intention de la loi, en exigeant que la 8

T. I.

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