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Cette définition est tirée du Guidon de la mer, art. 1, ch. 1, et de la doctrine de tous nos auteurs (1).

Assecuratio est conventio de rebus tutò aliundè transferendis pro certo præmio, seu est aversio periculi. Stypmannus, part. 4, cap. 7, no. 262, pag. 453.

Ces mots aversio periculi signifient que l'assureur se charge et prend pour lui-même le péril que les choses courent sur la mer: Aversio periculi ità dicta, quòd aliquis alterius periculum in mari aversum it, aut in se recipit. Loccenius, lib. 2, cap. 5, no. 1.

Le contrat d'assurance est légitime, parce que les risques dont l'assureur se charge, s'estiment à prix d'argent : Quia periculum pecuniâ æstimatur. Roccus, not. 4. Loccenius, d. loco, no. 3. Straccha, in introduct., no. 44. Santerna, part. 1, no. 1. Targa, cap. 52, no. 1. Scaccia, de commercio, § 1, quest. 1, n°. 129. Marquard us, lib. 2, cap. 13, no. 3.

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Il est en usage dans toutes les villes maritimes. Stypmannus, d. loco, no. 7. Pothier, no. 10, observe que l'usage de ce contrat est de la plus grande utilité, et qu'il favorise le commerce de mer, qui, sans ce contrat, ne se > ferait que par un petit nombre de personnes assez riches ou assez téméraires pour oser courir eux seuls les risques maritimes. » Vid. Marquardus, lib. 2, cap. 13, no. 2 et 77.

Examinons maintenant divers points essentiels, qui serviront de base et de principes fondamentaux au présent Traité.

CONFÉRENCE.

I. En effet, l'usage des assurances est sorti du sein même du commerce; le génie des négocians l'a produit et en a fait en même tems une branche fort riche de spéculations. La nécessité en fit naître l'idée comme celle des lettres de change; l'industrie l'a développée, étendue et perfectionnée chez tous les peuples commerçans et navigateurs. « Le systême des » assurances a paru, disait l'orateur du Gouvernement, à la séance du 8 septembre 1807; » il a consulté les saisons; il a porté ses regards sur la mer; il a interrogé ce terrible élé»ment; il en a jugé l'inconstance; il en a pressenti les orages; il a épié la politique; il a » reconnu les ports et les côtes des deux mondes; il a tout soumis à des calculs savans,

Ce contrat est lé

gitime.

Il est très-usité.

(1) Grotius, de jure belli et pacis, lib. 2, cap. 12, § 3, n°. 8. Kuricke, diatrib. de assecur., pag. 829. Loccenius, lib. 2, cap. 5, pag. 979. Roccus, de assecur., not. 1. Straccha, eod. in introd., n°. 46. Lessius, de justitiâ et jure, lib. 2, cap. 28, disp. 4, pag. 354. Corvinus, C. de naufragiis, pag 02. Wolff, inst. du droit naturel, S 679. Marquardus, lib. 2, sap. 15, n°. 8..

» à des théories approximatives, et il a dit au commerçant habile, au navigateur intrépide Certes, il y a des désastres sur lesquels l'humanité ne peut que gémir; mais quant

» à votre fortune, allez, franchissez les mers, déployez votre activité et votre industrie, je me charge de vos risques......................... »

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Le but du contrat d'assurance est de favoriser le commerce, en diminuant les craintes que peuvent inspirer aux commerçans les accidens si fréquens et si terribles auxquels les vaisseaux sont exposés en parcourant les mers.

Deux idées principales dominent cette matière. La première, c'est que la bonne foi la plus scrupuleuse doit régner dans les stipulations des parties contractantes; la seconde, c'est que, dans aucun cas, l'assurance ne peut être pour l'assuré un moyen de bénéficier.

On distingue deux sortes d'assurances.

$ 1.

SECTION I.

Le risque est-il de l'essence du Contrat d'assurance?

LES auteurs italiens distinguent deux sortes d'assurances maritimes: l'assu rance proprement dite, qui a pour objet le risque auquel la chose assurée est exposée, et l'assurance par forme de gageure.

Prima assecurationis species, est illa ubi agitur de assecuratione mercium quæ navigationis periculo exponuntur, et consequenter necessaria est probatio onerationis, ac existentiæ mercium in navi de tempore naufragii, vel periculi....... Altera est species assecurationis, quæ in solo vocabulo talis dici solet : in effectu autem non est talis. De Luca, de credito, disc. 111, n°, 4 et 5. Casaregis, disc. 7,

n°. 5.

Ces deux contrats sont régis par des principes différens.

L'assurance par forme de gageure n'est pas une assurance véritable. Elle Assurance par n'en a que le nom, ainsi que l'observe très-bien le cardinal de Luca.

forme de gageure.

C'est gageure de dire: Si mes marchandises périssent, vous me compterez mille écus: Si merces meæ peribunt, dabis mille. Mais ce n'est pas gageure de dire: Je me fais assurer pour mille écus, mes marchandises qui valent mille écus. il Il faut alors que cette valeur soit réelle, parce que, dans ce dernier cas, s'agit d'une assurance proprement dite. Santerna, part. 3, no. 44. Scaccia, S1, quest. 1, no. 169. Straccha, de assecur., gl. 6, n°. 4. Lessius, lib. 2, cap. 28, n°. 28. Roccus, not. 32, et resp. 31, n°. 2.

Straccha a fait un traité sur les gageures, qu'on trouve dans le recueil de

Mercatura, pag. 430. Il soutient, part. 4, § 8, que l'assurance par gageure est légitime.

Cette espèce d'assurance n'était pas inconnue aux Romains. Si un tel navire arrive d'Asie, je vous donnerai telle somme: Si navis ex Asiâ venerit. L. 63, ff de verb. oblig. S'il n'arrive pas, vous me donnerez telle somme : Dare spondes, si navis non venit. L. 129, ff eod.

Pareilles gageures sont permises à Florence, à Naples et autres endroits. Rocus, resp. 22, no. 9.

Elles étaient autrefois en usage à Marseille. Henri Bouchet, négociant, avait promis à Pierre Viguier et à François Bedarride, 2,611 liv. pour gageures sur le retour de divers vaisseaux. Il impétra des lettres de rescision, sous prétexte qu'il était mineur, Il en fut débouté par sentence du 7 février 1619, et cette sentence fut confirmée le 20 mars 1620, par arrêt du Parlement de Grenoble, où le procès avait été évoqué.

D'Aix, à la suite du Statut de Marseille, dec. 83, pag. 719, rapporte cet arrêt, et il observe que le mineur qui est marchand n'est pas restitué envers les actes qui concernent son état. Par où l'on voit que les assurances par gageure étaient anciennement usitées parmi nous.

Les gageures sont licites en elles-mêmes, pourvu que leur objet n'ait rien de déshonnête, et qu'il n'y ait ni dol ni surprise. L. 2 et 3, ff de aleat. L. 17, $ 5, ff de præsc. verb. L. 57, 63, 108, 129, ff de verb. oblig., SS 4 et 6, inst. eod. Rivellus, dec. 57. Stypmannus, part. 4, cap. 6, no. 60, pag. 429. Roccus, de assecur., not. 73. Expilly, pl. 4. Despeisses, tom. 1, pag. 238. Danty, ch. 10, no. 12, pag. 229. Catelan, tom. 2, pag. 350. Boniface, tom. 1, pag. 509. Pitaval, Causes célèbres, tom. 7, pag. 220.

Les gageures étant licites en elles-mêmes, pourquoi le sort des navires ne peut-il plus en devenir l'objet?

C'est parce qu'on a considéré que la navigation intéressant la République (ad summam rempublicam, navium exercitio pertinet. L. 1, § 20, ff de exercit. act.), il serait odieux qu'on se mît dans le cas de désirer la perte d'un vaisseau. L'avidité du gain est capable de produire des perfidies qu'il importe de prévenir. Voilà pourquoi dans la plupart des places de commerce les assurances par gageure ont été prohibées.

Elles le furent par le Réglement d'Amsterdam, art. 4.

Elles l'ont été à Gênes. Casaregis, disc. 7 et 15.

Blackstone, tom. 3, ch. 30, pag. 379, parle d'un statut de Georges II,

les défendit en Angleterre.

qui

$2.

Assurance proprement dite.

Enfin, elles ont été prohibées par l'Ordonnance de la marine.

On ne connaît donc en France que l'assurance proprement dite, laquelle ne saurait subsister, si l'assuré n'expose rien aux hasards de la mer. Le risque est de l'essence de l'assurance, et forme le principal fondement de ce contrat: Principale fundamentum assecurationis est risicum, seu interesse assecuratorum, sine quo non potest subsistere assecuratio. Casaregis, disc. 4, n°. 1; disc. 13, n°. 5; disc. 173, n°. 1. Pothier, no 45.

Ce principe est consigné dans une foule d'articles de l'Ordonnance, titre des assurances. On peut voir les art. 22, 37, 38 et 56.

Il ne reçoit parmi nous aucune exception. L'assurance est un contrat par lequel on prend sur soi le péril que les effets d'autrui courent sur mer : Quo aliquis alterius periculum in mari aversum it, aut in se recipit.

Luzac, sur les Institutes de Wolff, S 679, dit que la définition de l'as>surance suppose qu'une chose est ou sera exposée à quelque danger. » Valin, art. 6, des assurances, observe que par la nature de ce contrat, > tout dépend des risques, activè et passivè, et qu'on ne peut gagner ou perdre qu'à raison des risques et jusqu'à concurrence. C'est un principe, ajoute› t-il, qu'il ne faut jamais perdre de vue. »

>

« Il est de l'essence du contrat d'assurance, dit Pothier, n°. 11, qu'il y ait une ou plusieurs choses qui en soient la matière.

Pour rendre le contrat d'assurance parfait, il faut non seulement qu'il y ait une matière qui en soit l'objet, mais encore que cette matière soit exposée aux risques de la mer, et qu'elle s'y trouve exposée lors du sinistre même: Suscipiens enim periculum, pro iis solùm tenetur, quæ tempore periculi vel naufragii, in navi fuerunt. Marquardus, lib. 2, cap. 15, n°. 25. Loccenius, lib. 2, cap. 5, no. 7. De Luca, de credito, disc. 111, n°. 4; ou du moins il faut que le sort en soit ignoré lors de la signature de la police; car le péril est présumé tel qu'on le croit. Periculum censetur tale, quale bonâ fide æstimatur. Lessius, lib. 2, cap. 28, no. 24. S'il n'y a ni risque effectif, ni risque putatif, il n'y a point d'assurance. Dumoulin, contr. usur., no. 97. Perezius C. de naufrag., no. 22. Marquardus, lib. 2, cap. 13, no. 23.

En un mot, la perte ou le dommage considérés dans l'incertitude des événemens, sont la matière de ce contrat : Propria ejus materia est damnum subratione incerti. Corvinus, de naufragio, pag. 93. V. infrà, ch. 15 et 16..

CONFÉRENCE.

II. Emérigon dit l'assurance maritime, parce qu'il n'est ici question que de celle-là,et nul

lement de celles qui se font pour les voyages par terre, ou pour garantir les propriétaires de maisons du danger du feu et des autres accidens, etc. Il peut y avoir une infinité de contrats d'assurance de cette dernière espèce. L'assurance, dans un sens étendu, peut s'appliquer à toutes sortes de choses et de risques.

L'assurance maritime, par forme de gageure, a été prohibée en France, non seulement par l'Ordonnance de la marine, mais encore par le nouveau Code de commerce, qui ne connaît que l'assurance proprement dite, laquelle ne saurait subsister si l'assuré n'expose rien aux hasards de la mer, et si la chose assurée ne se trouve pas exposée aux risques de la mer lors du sinistre même. Ces principes sont de nouveau consacrés dans les art. 336, 357, 349, 365, 383, etc., du Code de commerce..

Le Code civil interdit toute espèce de gageure. Le Code de commerce ne pouvait être plus indulgent. « Ce n'est point en France, disait l'orateur du Gouvernement, et dans une » nation de tant d'importance, que la législation naturalisera l'immoralité des paris. (Voyez art. 1965, 1966, 1967 du Code civil).

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SECTION II.

L'Assurance est-elle un contrat synallagmatique, nommé, et qui ait une nature propre ?

POTH IER, no. 6, dit que le contrat d'assurance est synallagmatique, car it produit des obligations réciproques. L'assureur s'oblige envers l'assuré de

» le garantir et indemniser des fortunes de mer, et l'assuré s'oblige récipro» quement envers l'assureur de lui payer la prime convenue. »

En effet, dès que la police est signée, l'assuré ne peut, sans le consentement des assureurs, la mettre à l'écart pour faire assurer les mêmes risques par d'autres personnes; il lui est simplement permis de faire assurer la solvabilité des assureurs.

Dès que la police est signée, les assureurs ne peuvent se délier sans le consentement de l'assuré. S'il advient que les assureurs ou aucuns d'eux,

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» après avoir signé en quelque police, se repentent, ou aient peur, ou ne » voudraient assurer sur tel navire, il sera en leur liberté de le faire réassurer › par d'autres, soit en plus grand ou moindre prix; mais pour cela ne >se pourront désobliger que le chargeur ne s'adresse directement à eux, parce qu'ayant par leur seing donné leur promesse, quelques protestations, assignations qu'ils fassent, au contraire, ils ne pourront se désobliger sans ⚫ le consentement de l'assuré. » Guidon de la mer, ch. 2, art. 19.

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Les docteurs italiens, voulant trouver dans le droit romain ce qui n'y est

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