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12 juin 1815.

Protestation du cardinal legat Consalvi, au nom de Sa Sainteté et du siège apostolique, contre les dispositions du congrès de Vienne contraire à ses droits1.

Moi, Hercule Consalvi, cardinal-diacre de la sainte Église romaine, au titre de Sainte-Agathe, Alla Suburra, secrétaire d'État de Sa Sainteté et son ministre plénipotentiaire au congrès de Vienne, certifie par les présentes, écrites de ma main, que j'ai réclamé avec tout le zèle possible auprès des souverains et leurs plénipotentiaires au congrès de Vienne, la restitution des provinces, successivement arrachées à Sa Sainteté depuis 1789. A cette fin, j'ai déduit par écrit et solidement, à Paris et à Londres, les prétentions de Sa Sainteté, et ai, par la suite, remis à Vienne, au congrès, une représentation détaillée.

Ce congrès a, à la vérité, arrêté la restitution à Sa Sainteté des marches d'Ancône, de Mauxata et Fermo, les duchés de Commerino, Bénévent et Ponte-Corvo, et des légations de Romagne, Bologne et Ferrare; mes sollicitations sont restées infructueuses à l'égard de la partie de Ferrare, située sur la rive gauche du Pô, et des provinces dont il va être question. Avignon, acquise par des traités de vente et possédée pendant cinq siècles par le siége papal, le comtat Venaissin qu'il a possédé antérieurement déjà, lui furent arrachés en 1791 par l'assemblée nationale, sous la promesse d'une indemnité, et, malgré la promesse de leur restitution faite par Louis XVI, retenue par la France.

Ni le traité de Tolentino de 1797, ni celui de Paris de 1814, ne peuvent être allégués comme motif de ce refus. Car le premier, nul par lui-même, comme je l'ai démontré dans une note, a été renversé et annulé de fait par le gouvernement français, lorsqu'il a usurpé tout le reste des possessions papales, pour la conservation desquelles ces cessions auraient été faites.

1. Schoell, Recueil des pièces officielles, t. XII, vol. V et VI des pièces relatives au congrès de Vienne. art. CCLV, p. 347 à 350.

L'autre ne peut préjudicier aux droits du pape, parce qu'il a été conclu sans la participation du siége apostolique.

Au reste, la partie de Ferrare ci-dessus désignée, et possédée, depuis des siècles, par le siége pontifical, ne lui a pas été restituée, et on ne lui a pas alloué d'indemnité pour cela, quoique, ainsi qu'il vient d'être démontré, ni le traité de Tolentino, ni celui de Paris ne puissent renverser les droits du pape.

Enfin, le congrès a accordé à la maison d'Autriche, au préjudice de la souveraineté et de la neutralité du siége pontifical, le droit de tenir garnison à Ferrare et à Comacchio.

Comme il résulte de ces décrets un grand détriment et préjudice pour le saint-siége et l'Église de Rome, et afin qu'il soit notoire que non-seulement je n'y ai pas accédé et ne les ai pas concédés, mais que je les ai au contraire contredits et combattus, à l'exemple d'autres légats envoyés à des congrès précédents, et particulièrement de Fabio Chigi, évêque de Nardo, envoyé à Münster, qui a réservé, par une protestation solennelle contre les décrets dudit congrès, les droits ecclésiastiques et séculiers de l'Église; je proteste, combats et contredis, au nom de Sa Sainteté et du très-saint père, notre pape Pie VII, régnant par la providence divine, dans la meilleure forme et de toute manière que mon caractère me permet, contre toutes les dispositions faites par le congrès de Vienne au préjudice des domaines, possessions et droits de Sa Sainteté, à l'égard desdits pays, et généralement contre toutes les dispositions préjudiciables à l'Église; et afin que les présentes soient d'autant mieux portées à la connaissance des vivants et de la postérité, j'ai signé de ma main cette protestation, l'ai confirmée par l'apposition de mon sceau, et je demande qu'elle soit insérée au protocole des actes de ce congrès.

Fait à Vienne, au palais de la Nonciature, le 14 juin 1815.

Signé E. cardinal Consalvi.

5 novembre 1815.

Convention entre les cours de Vienne, de Saint-Pétersbourg, de Londres et de Berlin, pour fixer le sort des Sept-Iles Ioniennes, signée à Paris, le 5 novembre 18151.

Nos Franciscus primus, divina favente clementia Austria imperator, etc., etc.

Notum testatumque omnibus et singulis, quorum interest, tenore præsentium facimus:

Ut deliberationes ad figendam sortem septem Insularum Ioniensium, in congressu Vinnensi inchoatæ, et ob temporum vicissitudines prorogatæ, tandem ad effectum perducantur, adstipulantibus omnium Russiarum imperatoris et regis Borussiæ Majestatibus et re, Nobis visum est cum regis unitorum Magnæ Britanniæ et Hiberniæ regnorum Majestate amicabiliter desuper convenire, quem in finem a Nostris et prælaudatæ Majestatis ministris plenipotentiariis specialis actus signatus fuit, tenoris, qui sequitur :

Au nom de la très-sainte et indivisible Trinité

S. M. l'empereur d'Autriche, roi de Hongrie et de Bohême, S. M. le roi du royaume uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, S. M. l'empereur de toutes les Russies et S. M. le roi de Prusse, animés du désir de donner suite aux négociations ajournées lors du Congrès de Vienne, afin de fixer le sort des Sept-Iles Ioniennes, et d'assurer l'indépendance, la liberté et le bonheur des habitants de ces îles, en les plaçant, eux et leur constitution, sous la protection immédiate d'une des grandes puissances de l'Europe, sont convenus de régler définitivement tout ce qui a rapport à cet objet par un acte spécial, lequel étant fondé sur les droits résultants du traité de Paris du trente mai mil huit cent quatorze, ainsi que sur les déclarations britanniques à l'époque où les armes de l'Angleterre ont délivré Cerigo, Zante, Cephalonie, St.-Maure, Ithaque et Paxo, sera envisagé comme

1. Martens, Nouveau Recueil, t. II, p. 663; Neumann, t. III, p. 55.

faisant partie du traité général signé à Vienne le neuf juin mil huit cent quinze à la suite du congrès; et pour arrêter et signer ledit acte, les hautes parties contractantes ont nommé plénipotentiaires savoir:

S. M. l'empereur d'Autriche, roi de Hongrie et de Bohême, le sieur Clément-Wenceslas-Lothaire prince de MetternichWinnebourg-Ochsenhausen, etc., — et le sieur Jean-Philippe baron de Wessenberg, etc.

Et S. M. le roi du royaume-uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, le très-honorable Robert Stewart, vicomte Castlereagh, etc., et le très-illustre et très-noble seigneur Arthur Duc, marquis et comte de Wellington, etc.

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Lesquels, après avoir échangé leurs pleins-pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

I

Les îles de Corfou, Céphalonie, Zante, Sainte-Maure, Ithaque, Cerigo et Paxo, avec leurs dépendances, telles qu'elles sont désignées dans le traité entre S. M. l'empereur de toutes les Russies et la Porte-Ottomane du 21 mars 1800, formeront un seul État libre et indépendant, sous la dénomination des États-Unis des Iles Ioniennes.

II

Cet État sera placé sous la protection immédiate et exclusive de S. M. le roi du royaume-uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, et de ses héritiers et successeurs. En conséquence, les autres puissances contractantes renoncent à tout droit ou prétention particulière qu'elles auraient pu former à cet égard, et garantissent formellement toutes les dispositions du présent traité.

III

Les États-Unis des Iles Ioniennes régleront, avec l'approbation de la puissance protectrice, leur organisation intérieure : et pour donner à toutes les parties de cette organisation la consistance et l'action nécessaire, S. M. Britannique vouera une

sollicitude particulière à la législation et à l'administration générale de ces États. En conséquence, Sa Majesté nommera pour y résider un lord commissaire supérieur qui sera investi de toute l'autorité nécessaire à cet effet.

IV

Afin de mettre en exécution, sans délai, les stipulations consignées dans les articles précédents, et fonder la réorganisation politique des États-Unis Ioniens sur cette organisation qui est actuellement en vigueur, le lord commissaire supérieur de la puissance protectrice réglera les formes de convocation d'une assemblée législative, dont il dirigera les opérations, à l'effet de rédiger, pour cet État, une nouvelle charte constitutionnelle que S. M. Britannique sera priée de ratifier. Jusqu'au moment où une pareille charte constitutionnelle sera rédigée et dûment ratifiée, les constitutions existantes resteront en vigueur dans les différentes îles, et aucun changement ne pourra y être fait que par S. M, Britannique, dans son conseil.

V

Pour assurer, sans restriction, aux habitants des États-Unis des Iles Ioniennes les avantages résultant de la haute protection sous laquelle ils sont placés, ainsi que pour l'exercice des droits inhérents à cette protection, S. M. Britannique aura celui d'occuper les forteresses et places de ces États, et d'y tenir garnison. La force militaire desdits États-Unis sera de même sous les ordres du commandant des troupes de S. M. Britannique.

VI

S. M. Britannique consent à ce qu'une convention particulière avec le gouvernement desdits États-Unis règle, d'après les revenus de l'État, tous les objets relatifs au maintien des forteresses actuellement existantes, ainsi qu'à l'entretien et au paiement des garnisons britanniques, et au nombre d'hommes qui les composeront en temps de paix. La même convention

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